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Vous pouvez effectuer des recherches en ligne dans le texte intégral de cet ouvrage à l'adresse[http://books.google. con] My p Revie REVUE NUMISMATIQUE COLLABORATEURS Dont les articles ont para dans la Hevue numismatique (nouvelle série , 1856, 1857, 1858 , 1859, 1866). ee MM. , ACY (Ernest d’), à Villers aux Era- bles : Somme). . | BARTHELEMY | Anat. de), à Neuf- châtel ( Seine-Inférieure), BEULÉ (Ernest), à Paris. BIGOT (A. ), à Rennes, BOILLEAU (L.), à Tours. BOUDARD , à Beziers. BRETAGNE, à Nancy. BRUGIERE DE LAMOTTE, à Mont- luçon. CARPENTIN (A.), à Marseille. CAVEDONI (l'abbé C.), à Modène. CHARVET (J. ), à Paris. COCHET (L’abbé), à Dieppe. COHEN (Henry), & Paris. COLSON (Le docteur A. |}, à Noyon. CRAZANNES (Le baron Chaudruc de }, à Castel-Sarrazin. DAUBAN ( Alfred }, à Paris. DELOCHE ( Maximin), à Paris, DENIS LAGARDE, à Brest. DESCHAMPS DE PAS (Louis), & Saint-Omer. DEVILLE (Achille), à Paris. DUPRE (Prosper), à Montjay (Seine- et-Marne ). FEUARDENT, à Montmartre. GAYRAUD DE SAINT-BENOIT, à Saint-Benoît ( Aude). GERY (R.),à Voiron (Isère). HUCHER | Eugène), au Mans. HURON (E.), à Montoire-sur-Loir. JUDAS (Le docteur A. ), à Pasay. LAGOY (Le marquis de), & Aix Bouches-du-Rhône ). LAMBERT ( Edouard), & Bayeux. LA SAUSSAYE (Louis de), & Lyon. LAURENT (Jules), à Epinal. LELEWEL (Joachim ) , à Bruxelles. MM. LENORMANT ( Charles ), à Paris. LENORMANT ( François), à Paris. LONGPERIER ( Adrien de), à Paris. LONGPERIER-GRIMOARD (Alfred de), & Longpérier ( Oise ). LUYNES (Le duc de), & Dampierre. MANTELLIER, à Orléans. MAXE (Léon), à Reims. MILLER | Emmanuel}, à Paris. MORBIO (Carlo), à Milan. MULLER (Louis), à Copenhague. NAMUR, à Luxembourg. PETIGNY (Jules de’, à Clénor (Loir- et-Cher }. POEY D'AVANT (F.), à Maillezais (Vendée). PONTHIEUX (N.), à Benuvais. PORRO (Comte Jules), à Milan. PROMIS (Chev. Dom. ), à Turin. PROKESCH-OSTEN (Baronde), à Conatantinople RAUCH ( Adolphe de), à Berlin. RETHAAN MACARE (J.C. A.), & Utrecht. ROBERT (C.), à Paris. RONDIER, à Melle ( Deux-Sèvres). ROUYER (J.), & Paris. SABATIER (Jean), à Montmartre. SALIS (Comte J. F. G. de), & Lon- dres. SAULCY (F. de), à Paris. SAUVADET, à Montpellier. SAUVAGEOT ( F.), à Paris. SORET (F.), à Genève. VALLIER (Gustave), & Grenoble. VOGUE ( Le comte Melchior de ), au Pezeau (Cher). WADDINGTON (W. H.), à Bourne- ville ( Aisne ). WITTE (J. de), à Paris. Paris, — Imprimé par E. Taunor et G°, 26, rue Racine, près de l'Oléon. REVUE NUMISMATIQUE PUBLIEE PAR J. DE WITTE Membre de l'Académie royale das Sciences, des Lettres et des Beaux-Arts de Belgique , Correspondant de l'Institut et de la Société impériale des Antiquaires de France, er ADRIEN DE LONGPÉRIER Membre de l'Institat ot de la Société impériale des Antiquatres de France , Associé étranger de l'Académie royale des Sciences de Belgique. Ostendite mihi numisma cemus est imago hæe, el superseri MATTH., XxIt, 19—20. Gujus 2 = NOUVELLE SERIE. TOME CINQUIÈME. PARIS AU BUREAU DE LA REVUE CHEZ MM. CAMILLE ROLLEN ET FEUARDENT 42, ROE VIVIENNE, 1860 MEMOIRES ET DISSERTATIONS. MEDAILLES DE MARIUM EN CYPRE. (PI I.) L'île de Cypre est une des portions du monde ancien les moins explorées et les moins connues ; c’est celle dont on possède le moins de monuments, et jusqu’à ces dernières années, un petit nombre d inscriptions grecques et phéni- ciennes, et le beau médaillon de Nicoclés , roi de Paphos, composaient à peu près toute la richesse archéologique de cette Île jadis si puissante et si célèbre. Il existait cependant dans différentes collections un assez bon nombre de mé- dailles, mal attribuées ou reléguées dans ce purgatoire numismatique, qu'on appelait « les incertaines de Cilicie,» et qui ont été enfin rendues à leur véritable patrie. C'est à feu Borrell, de Smyrne , et à M. le duc de Luynes que l'on doit cet important accroissement de la science numis- matique. Borrell ne s’est occupé que de la numismatique grecque de Cypre, et dans son ouvrage , publié en 1836, il faisait connaître et il expliquait des monnaies d’or et d'argent d’Evagoras 1, roi de Salamine , de ses fils Nicoclès et Pythagoras , et de son petit-fils Évagoras Il; de Pnyta- 1860.— 1. 1 2 MÉMOIRES goras, et enfin de Ménélas, frère de Ptolémée Soter. De plus, il restituait à l’île de Cypre un certain nombre de monnaies royales, semblables aux précédentes, mais d’une attribution moins certaine, et il publiait une monnaie auto- nome grecque de Paphos , ayant beaucoup d’analogie avec le médaillon de Nicoclès !. | En 1846, M. le duc de Luynes publiait son Essai sur la nu- mismatique des Satrapies et de la Phénicie, et au milieu d’un grand nombre d’attributions nouvelles et justes, se trouvait celle de plusieurs médailles à légende phénicienne aux rois de la ville phénicienne de Citium en Cypre. Toutes ces pièces étaient anonymes; mais peu de temps après, le même savant faisait connaître une nouvelle et importante médaille portant en toutes lettres le nom d'Abdémon, roi de Citium*, et frappée probablement dans la trentième année du règne d'Artaxerce I, 443 avant Jésus-Christ. Enfin, en 1852, M. de Luynes faisait faire un pas décisif à l’ar- chéologie de l'île de Cypre, en publiant son beau mémoire sur la Numismatique et les Inscriptions cypriotes. Grace à une heureuse découverte faite dans l'île, l'alphabet cypriote était connu, et servait de lien à un nombre considérable de médailles, dont personne n'avait soupçonné l'importance, et qui étaient réunies pour la première fois dans l'ouvrage du savant académicien. Malheureusement les diffcultés du sujet étaient telles que l'auteur crut devoir se borner à quelques observations peu étendues et à un petit nombre de conjectures fort sobres. Toutefois, cette publication jetait 1 Ce médaillon de Nicoclés n’est plus unique. Il en existe un second exem- plaire, de coin différent , aoquis il y a peu d'années par le Cabinet du roi à Turin. Cette belle pièce, que nous avons vue , met hors de doute l'authenticité de celle du Cabinet de Florence. -% Ree, num., 1850, p. 309. ET DISSERTATIONS. 3 un jour considérable sur les antiquités cypriotes, et notam- ment elle confirmait d'une facon remarquable le témoignage d'Hérodote sar le mélange de races dans l'île. « Parmi les Cypriotes, dit cet historien, les uns se disent originaires de Salamine et d'Athènes, les autres de l’Arcadie et de l’île de Cythnus, d’autres enfin de la Phénicie et de l’Éthiopie. » En effet, à côté des éléments helléniques établis sur le littoral de l'île , il existait une importante population phé- nicienne dont le centre était à Citium, et une race qui se regardait comme autochthone, mais qui avait de grands rapports avec les habitants de l'Égypte; cela résulte de l'analyse de l'alphabet cypriote, composé en partie de ca- ractères empruntés aux systèmes hiéroglyphique et hiéra- tique de l'Égypte. Depuis l'ouvrage de M. de Luynes, la numismatique cypriote s’est enrichie de quelques pièces nouvelles, pu- bliées par M. Fr. Lenormant dans son Catalogue de la col- lection de Behr, et notamment d'une médaille au type de Citium , avec la légende du roi Démonicus, fils d’Evagoras. Nous allons à notre tour essayer d'établir les droits d’une autre ville de l'île sur une belle et importante série de mé- dailles, restées jusqu'ici sans patrie assurée. . M. le duc de Luynes * proposait de classer à Marium les médailles bien connues à la légende MAP et au type du cygne, puis il ajoutait : « Tout en proposant cette attribu- tion , nous devons ajouter que des pièces toutes semblables de la collection Hunter portent la légende MAPA et MAPAO, ce qui a conduit les antiquaires à les attribuer à Marathus de Phénicie ; mais la numismatique de Marathus est restée. phénicienne jusqu’au tenips de la domination romaine, et -§ Num. ef inser. cypr., p.37. À MÉMOIRES rien ne peut faire soupconner que jamais le grec ait été écrit ou parlé dans cette ville. » Nous sommes heureux de pouvoir publier aujourd'hui une médaille qui lévera tous les doutes à l'égard de l'attribution proposée par M. de Luynes. Voici cette pièce, que nons avons tronvée dans la collection de la banque d’ Angleterre, et dont il existe un exemplaire incomplet à la Bibliothèque impériale. 1.—) [4 y #— 5%. Femme ailée s agenouillant à droite, et portant de ses deux mains un disque à la hauteur de sa ceinture. Dans le champ, une téte de poisson. R, MAAP. Cygne battant des ailes ; dans le champ, une sauterelle. — Æ. 6. Poids : 10#,51. (PI. 1, n°7.) On voit que les Phéniciens et les Grecs ne prononçaient pas le nom de la ville de la même manière; les premiers disaient Marlo, les seconds, Matro; et quoique l'élément hellénique ait fini par absorber l'élément phénicien , c’est cepéndant la prononciation ancienne qui prévalut, et les monnaies purement grecques portent les légendes MAPA et MAPAO; cette forme fut ensuite adoucie et devint Marium. Diodore est le seul historien qui ait mentionné cette ville, et on trouve dans son texte les mémes variantes que sur les médailles , variantes qui remontent sans doute aux diffé- rentes sources qu'il a consultées, et que les éditeurs mo- dernes se sont trop empressés d'effacer. Selon cet historien, le général athénien Cimon s’empara, vers l’an 450, de Malum et de Citium, et accorda aux habitants des condi- tions avantageuses. Thucydide, qui raconte sommairement les mêmes événements, ne fait pas mention de Malum, et rapporte que Ja mort de Cimon et le manque de vivres contraignirent les Athéniens de lever le siége de Citium. Quoique les manuscrits n'offrent que la lecon Malum, Wesseling avait déjà soupçonné que Malum était la même ET DISSERTATIONS. 5 . ville que Marium, et la médaille avec la légende MAAP montre qu'il avait deviaé juste *. Marium était, de même que Citium, une colonie phéni- cienne , ainsi que le prouve le proverbe ou dicton cité par Étienne’, 6 Kavpov Mapredg; car tout ce qui se rattache à Cinyras et aux Cinyrades accuse une origine phénicienne. Par suite de la domination athénienne dans la Méditerranée et de l'extension générale de la race hellénique, l'élément grec dominait à Marium au commencement du Iv° siècle, ainsi qu'il résulte des médailles à légende purement grecque que nous décrirons plus loin, et qui paraïssent antérieures à la médaille bilingue. Cette dernière, frappée un peu plus tard , indique une réaction phénicienne, qui aura eu lieu à la suite d'une des nombreuses révolutions dont Cypre fut le théâtre. Vers le milieu du 1v° siècle la transformation était accomplie, et la population phénicieane avait disparu ou s'était bellénisée; en effet, dans le périple de Scylax, rédigé sous sa forme actuelle, vers l'an 360, on trouve la forme Marium et la ville est appelée une ville hellénique *. Marium figure plusieurs fois dans le cours des guerres entre Antigone et Ptolémée; elle était alors gouvernée par un roi nommé Stasiæcus , qui, en 312, fut fait prisonnier par Ptolémée ; à la suite de cet événement la ville fut rasée; et les habitants transportés à Paphos‘. Plus tard elle fut relevée sous le nom d’Arsinoé, et continua à. exister jusque dans les temps byzantins *. Dans les trois passages de Diodere que nous venons de 1 Diod., XII, 3, ct la note de Wessclng. — Thucyd., I, 112. ® Steph. Byz., in c. Mipuv, 3 Scylax, cap. 103. * Diod.. XIX, 59, 62, 79. 3 Stepb. Byz., 0. Macuv, Apawon. — Plin., V, XXXI, 35. — Hierocl., Sy- mecdemus. 6 MEMOIRES citer, on trouve les variantes Mpros, Mavéwv, Maltéux ; les éditeurs modernes ont adopté partout la forme Maouvs, indiquée par le premier passage; mais dans les deux autres, Ja leçon des manuscrits autoriserait plutôt la forme Mateus. De même dans Ie passage de Pline, on trouve parmi les variantes la leçon Maleum. Il nous reste à décrire les autres médailles de Marium , et à dire quelques mots sur leurs types. 2. — Femme agenouillée , etc., comme au n° 4. #. MAP. Cygne debout; devant lui un autel ; sous l’autel, la croix ansée. — Poids : 95,94. (Bibliothèque impériale. Luynes, Num. Cypr., pl. VII, n° 8.) 3. — Même type; le disque est orné d'une étoile. #. MAP. Cygne marchant à gauche; devant, un poisson ; derrière , la croix ansée, — Poids : 405,42. (Luynes, Num. Cypr., pl. VII, n° 4.) h. — Mème type; dans le champ, un sceptre. kr. MAP. Cygne debout; devant, un autel, la croix ansée et un épi; dans le champ, la lettre T. — Poids : 406,37. (Musée Britannique. Voy. pl. I, n° 8.) Le type de ces médailles a été expliqué par M. le duc de Luynes ; la femme agenouillée est « Astarté portant l'étoile tombée du ciel, qu'elle avait ramassée en Phénicie et con- sacrée à Tyr. Le cygne est l’otseau consacré à Vénus, celui qui, sur un bas-relief du Musée de Florence, et sur les médailles de Camarina , transporte la déesse de l’Océan à l'Olympe. Il était aussi consacré au personnage symbolique Adonis, dont l’île de Cypre fut la patrie ‘.» 5. — Éphèbe nu et ailé, agenouillé à droite et tenant un disque. + Luynes, Num. cypr., p. 37. ET DISSERTATIONS. 7 BR. MAPA. Cygne debout ; au-dessus, une mouche volant. — Poids : 145,17. (Musée Hunter, pl. LXVI, n° 20.) : . 6. — Figure barbue, à demi nue, ayant quatre ailes, agenouillée à gauche, et tenant le disque. x. MAPAO. Cygne debout , et portant sur son dos un petit oiseau qui le picote. — Poids : 415,04. (Musée Hunter, pl. LXVI, n° 49.) 7. — Partie supérieure d’une figure à deux têtes barbues, et à quatre ailes, tenant un disque, sur lequel il paraît y avoir une tête d'animal. Dans le champ, au-dessous , une protomé de bœuf à face humaine. y. MAGA. Cygne battant des ailes, — Poids : 145,43. (Musée Hunter, pl. LXVI, n° 21.) Ces trois curieuses médailles ont une grande analogie: avec les précédentes; mais ce n'est plus Astarté qui porte l'étoile , c'est tantôt un éphèbe ailé , tantôt une figure bar- bue symbolique à une ou deux têtes et à qnatre ailes, comme on en voit sur les monuments assyriens. Dans l'igno- rance où nous sommes à l'égard de la mythelogie cypriote, il serait difficile d’assigner un nom à ces divinités. Quant au taureau à face humaine, on le trouve sur les monnaies lyciennes ainsi que sur beaucoup de monuments asiatiques. 8. — Tête laurée barbue à gauche, avec une boucle: d'oreille. yi. MAPI. Téte imberbe laurée, les cheveux en nœud derrière la tête, et ornée d’une boucle d’oreille et d’un cel- lier; derrière, dans le ehamp, une branche de laurier ou plutôt de myrte. — M. 3. Poids : 25,53. (Ma collection. Voy. pl. F, n° 9.) Cette médaille, déjà connue depuis longtemps, quoique fort rare, a été attribuée aux Mariandyniens de Bithynie, et ensuite dans le Supplément de Mionnet à Marium; cette se eee 8 MEMOIRES dernière attribution est la seule vraie. La pièce se rattache à la nombreuse série de pièces frappées par les rois des villes cypriotes , et présentant pour type une tête de chaque côté. Nous croyons reconnaître ici les têtes de Cinyras et de Myrrha; le dicton 6 Kwvpov Mapuvs montre qu'il existait un lien quelconque entre Marium et Cinyras, soit qu'il en ait été le fondateur, soit qu'il y fat l’objet d'un culte particulier. La pièce est postérieure à celles que nous avons décrites précédemment, ainsi que le montre la légende MAPI; mais elle est encore antérieure à Alexandre, et la tête un peu hermaphrodite de Myrrha est d'un beau style. Nous passons maintenant à une série de médaïlles ané- pigraphes, qui nous semblent appartenir également à Marium , quoiqu'il soit impossible de le démontrer d’une manière péremptoire. 9. — Figure ailée, agenouillée et les bras étendus. x. Objet conique, grossièrement indiqué dans un carré creux irrégulier. — MR. 4. (Médaille fruste du Musée Bri- tannique. Poids : 415,75. Voy. pl. 1, n° 4.) 40. — Femme ailée, agenouillée à gauche , et tenant de la droite un sceptre, et de la gauche une couronne. 3. Objet conique, muni à son extrémité supérieure de deux petites anses; de chaque côté un objet pointillé, res- semblant à un oiseau sans pattes ; le tout dans un carré creux. — A. 5. Poids : 115,33. (Musée Britannique. Voy. pl. I, n° 2.) 41..— Méme femme ailée. 5). Méme objet conique, sans les anses; sur la partie inférieure , il y a la lettre Y ou un symbole ayant cette forme; de chaque côté une grappe de raisin; en haut, dans le champ, un A renversé; le tout dans un carré creux. — - A. Poids : 445,29. (Musée Britannique. Voy. pl. I, n° 3.) ET DISSERTATIONS. 9 42. — Même type des deux côtés, sauf la lettre sur la partie inférieure du cône.— Æ. 6. Poids : 14",23. (Musée Britannique. Voy. pl. I, n° 4.) 43. — Même type. 3. Objet conique, muni de deux anses; de chaque côté un objet pointillé, ressemblant à une cnémide; en haut la lettre A renversée; le tout dans un carré creux. — AM. 5. Poids : 445,55. (Bibliothèque impériale. Voy. pl. 1, n° 5.) 44. — Même type. #. Objet conique; dans le champ la lettre A renversée, et les lettres I et F; le tout dans un carré creux. — A. 5. Poids : 115,70. (Musée Britannique. Voy. pl. I, n° 6.) De ces six pièces, les cinq dernières appartiennent au v° siècle; la première, qui est d'un style fort archaïque, est plus ancienne; elles ont précédé par conséquent l’émis- sion des pièces au type du cygne, et quoiqu’en apparence fort différentes, elles se rattachent au même culte et au même ordre d'idées. En effet, si le cygne est, comme la colombe, un oiseau consacré à Vénus, la pierre conique est l’image mème de cette déesse, la forme sous laquelle elle était adorée à Paphos et ailleurs. Il en était de même de la Diane de Perga, autre divinité dont le culte était fort répandu dans le midi de l'Asie Mineure, et dont l'idole était une pierre de forme conique. Il est plus difficile de déter- miner le caractère de la déesse qui forme l’autre type de ces médailles. D’une main elle tient une couronne, de l'autre, un objet qui ressemble à un caducée, mais qui n’en est pas un; c'est un bâton ou sceptre surmonté d'une pomme ou d’un autre symbole; comme il est toujours sur le bord de la médaille, il n’est pas nettement indiqué , mais c'est le mème symbole qui se trouve dans le champ de la 40 MEMOIRES médaille n° 4 (voy. pl. 1, 0°8). On pourrait assimiler Ia déesse à l’Iris des Grecs, ou peut-être à la Victoire. J'ajouterai, en terminant, une observation; de même qu'il ¥ avait deux villes de Soli, l’une en Cypre , l’autre en Cilicie , il paraît y avoir eu deux villes appelées originaire- ment Marlum ou Malum. L’une, située en Cilicie , non loin de Tarse, est devenue Mallus; l’autre a vu sou nom revêtir la forme plus douce de Marium; on ne peut guére douter toutefois que ces deux villes n’aient eu une méme origine phénicienne, et n’aient porté dans le. principe un nom identique. | W. H. Wappineton. ET DISSERTATIONS. 41 OBSERVATIONS QUELQUES POINTS DE NUMISMATIQUE PHÉNICIENNE. MONKNAIES DE TARSE A LA LÉGENDE 770. Parmi les problèmes que présente l'étude des monnaies à légendes phéniciennes, il n'en est peut-être pas de plus obscur et de plus difficile que celui de l’explication du mot 44 |A inscrit sur un grand nombre de médailles de Tarse, le plus souvent isolé ', mais aussi, sur une pièce, commen- çant une légende beaucoup plus développée : ybLH7+4314goltoi11414". M. Amédée Peyron est le premier qui ait tenté d’inter- préter ces légendes”; ses efforts portérent sur la plus longue qu'il lut : son a ray Sy xt NDT ( Victoria hzc super Abedeserum principem Ciliciz. ) Mais cette explication, peu conforme aux habitudes des 1 Duc de Luynes, Num. des Satrap., pl. IV, Gaos, n* 10-6; pl. V, n°° 7 et 8; pl. VIII, n° 3-6, 9 et 10; pl. IX, n°* 11-14, 20 ot 21; pl. X, n* 22-24. 3 Ibid., pl. III, Abdsohar, n° 1 ; pl. IV, n°° 2-4. 3 Diss. de num. Tarsensibus, dans les Momoires ds l’Académie royale de Turin, t. XXIV. 12 MÉMOIRES légendes numismatiques, ne pouvait pas être admise, sauf pour les mots wrray et 75n habilement discernés par l'é- minent philologue. M. Peyron faisait en effet un > du troi- sième caractère, qui est certaimement un 5 ou un 7, et un N des quatrième et sixième, qui ne sauraient être que deux 7. En outre, les formes xt NDT seraient araméennes ‘, ce qui ne s'accorde avec rien de ce que nous pouvons entrevoir par les monuments du dialecte purement phénicien de la Cili- cie, et le mot 35 avec le sens de prince n'existe dans au- cune langue sémitique. Le savant orientaliste de Turin, pour justifier ce mot, était obligé d’avoir recours au nom de Bagoas, lequel n'est pas sémitique, mais correspond au perse Bagha ( pehlvi, 132, persan moderne, 2); cette der- nière étymologie nous semble préférable à celle que pro- posent M. Peyron et Gesenius, tirant Bagoas du mot arabe as, spectabilis, præstans, dérivé de 45, , facies. Lindberg * et Hamaker * furent encore moins heureux que M. Peyron, et méconnurent les points que ce philolo- gue avait déjà établis avec certitude. Le premier voyait dans la légende d’Abdsohar on sya pray Sy pr qu Diadema purum super Abdlanum in angustits vite ; le second : Jon nis pray Oy 77 JD Piaculum sincerum a servis solvendum est felicilas et beatitudo perennis. C'est bien ici le cas de dire avec M. Munk : « Que peut-on Nous disons araméennes, car c'était dans cette langue que M. Peyron di- sait conçue la légende de la pièce qui nous occupe; mais un démonstratif NY n’est réellement d'aucune langue sémitique. 8 Deinsc. Melit., p. 46. 3 Miscell., p. 144. ET DISSERTATIONS. 43 » opposer à de pareilles interprétations? Il est impossible » de les réfuter sérieusement; elles échappent à la critique » par ce qu'elles ont de vraiment excentrique ‘. » Gesenius’ rentra dans une voie plus scientifique et iden- tifia remarquablement bien tous les caractères de la légende, sauf un seul : 0 2/2 007729 Oy 77 JMD seulement, dans l'explication, il ne montra pas la même habileté que dans la lecture matérielle. I] proposa de tra- duire : Stella tua lucida super Abdsohar, pontificem magnum * Ciliciz, phrase peu naturelle sur une monnaie et démentie d’aillears par les pièces à la simple légende 152 , connues cependant de l’éminent philologue allemand. En effet, si, à la rigueur, on eût pu admettre que 77110 , dans la grande légende, signifiait stella tua, quel sens lui aurait-on re- connu sur les monnaies où il est isolé? A quoi l’applique- rait-on, et que voudrait dire cette formule mystique et in- terpellative placée ainsi comme légende monétaire ? Après Gesenius, M. le duc de Luynes ‘ tenta à son tour l'explication de ce mot mystérieux sur lequel s épuisaient en vain les efforts des philologues et des antiquaires. Il expliqua fort heureusement la fin de la légende aon asartay Sy TT … sseeee (moneta) pura ad Abdsohar campi Ciliciæ, explication où quelques points peuvent encore être consi- dérés comme douteux, par exemple le rôle de la préposi- tion Sy et la valeur de la quinzième lettre, mais où les 4 L'inscription phénicienne de Marseille , Journal asiatique, quatrième série, t. X, p. 480. 2 Mon. phan., p. 279. 3 Les lettres ‘3 'D étaient pour Gesenius les initiales des mots La Wo. à Num. des Satrap., p. 27 et suiv, 1h MEMOIRES mots 47, pur, de la racine 723, wnriay et 75n à pour bn 1a, désignant la basse Cilicie par opposition à Ja partie montueuse, ou Cilicie Trachée, doivent étre considérés comme acquis désormais à la science d’une manière certaine. Pour ce qui est de la valeur de la quinzième lettre , pla- cée entre le + de n111y et le 4 de 13, nous ne saurions y voir un + avec M. le duc de Luynes. Le * a bien trois pointes dans l’hébreu primitif des médailles asmonéennes, 7 ou sf; mais cette forme, qui ne se retrouve même pas dans quelques-uns des plus anciens monuments de cette écriture ‘, est tout à fait étrangère à la paléographie des monnaies de la Gilicie, dans laquelle le * est constamment “ ou 7. X& est au contraire un x, identiquement sembla- ble à celui du papyrus araméen du musée de Turin *, Y. Qn sait quel rapport la paléographie phénicienne de la Cilicie offre avec l'alphabet araméen. Les arguments philologiques confirment ce que nous di- sons d'après la figure même du caractère. On trouve bien un comme finale des noms 52599 et vrann sur des mon- naies phéniciennes dont les premières au moins sortent de l'atelier de Tarse; mais ce sont des noms étrangers, et le y représente la finale perse en a. Quant aux noms nationaux appartenant aux langues sémitiques, sur aucun monument phénicien on ne les trouve terminés par un non radical. Cette finale se présente seulement sur les monnaies naba- téennes dans les noms 255, vrbn. 10237; mais là, comme dans les inscriptions du Sinaï, c’est une forme purement 1 Par exemple, sur un cône de chalcédoine blanche, d'origine juive, por- tant l'inscription : 41172Y ja wana > Nathaniz filii Obdiæ , et publié par M. Reediger ( Zeitschr. der Deutsch. morgenl. Gesellsch., t. 111, p. 243). Cette pierre fait aujourd’hui partie des collections de M. le duc de Luynes, 2 Gesenius, Monumenta phanicia, pl. XXX, 3 Voy. Revue num., 1858, p. 292 et suiv. ET DISSERTATIONS. 45 arabe ; c'est le dhamma final des noms propres en arabe littéral écrit par une quiescente au lieu de l'être par un signe additionnel’. Sur une monnaie de Tarse vn172y pour ‘7tay serait un arabisme que nous ne pouvons admettre. Maintenant quel peut être le sens de cet x isolé entre deux mots dont il ne fait certainement pas partie? On ne saurait guère le considérer que comme linitiale d'un mot abrégé. Dans ce cas, ‘x serait peut-être J11N, «sei- gneur,» titre qui s'applique quelquefois aux princes ; ainsi dans Isaie : D'3TN WPI, dominali sunt nobis prin- cipes *. On lirait dès lors: on a 'x anmtay Sy 7. pour ora prix inrtay by 7, (moneta) pura ad Abdsohar dominum campi Ciliciz. Quant au mot 77710, le noble académicien circonscrit avec une grande habileté les limites du probléme. « Sur une » médaille de Tarse*, dit-il, la légende 175 se décompose » de telle sarte que le est placé à l'angle et parallèlement » au côté supérieur du carré, de cette manière 19 , d'où » il résulte que le mot 5 est formé de la particule 1 » avec un autre mot 777, et non de 7139 avec le pronom » affixe 7- Puis, ‘après quelques autres observations : « On » voit par leur travail et leurs symboles que les monnaies » épaisses à la légende 179 ont été frappées depuis le » temps d’Abdsohar ou d'Artaxerxès-Mnémon jusqu'à celui » des Séleucides inclusivement, c’est-à-dire pendant près » d'un siècle. Que faut-il en conclure? C'est 1° que la pa- t Tuch , Zeitschr. der Deutsch. morgenl. Gesellsch., t. IJ], p. 136 ct suiv. — Cf. ce que nous en avons dit également dans le Journal asiatique, 1859, t. XIN. p. 12. 3 1s., AXVI, 13. 3 Num. des Satrap., pi. VIII, n° 3. 16 MEMOIRES » role 719 n’est pas un nom propre, puisque le magis- » trat éponyme n'aurait pu vivre aussi longtemps; 2° que » ce n’est pas un nom de lieu, même en le décomposant en » 7 D, attendu que nous ne connaissons aucune ville de » Cilicie qui réponde à la légende 717m ou 777; 3° que » cette légende s'appliquait exclusivement aux monnaies » épaisses au type du lion, frappées à Tarse, dont elles » portent toujours l'emblème principal, Baal Tars, avec » Son nom. » S'appuyant sur ces conclusions et ne trouvant pas dans la langue hébraique d’explication satisfaisante pour le mot 377, M. le duc de Luynes avait recours à un autre idiome sémitique. « On trouve dans l’arabe le mot Je , qui » signifie à la fois lion et épais, ce qui répond bien au type » et à l'épaisseur de nos médailles, épaisseur qui va tou- » jours en augmentant jusqu'au moment où leur série s’in- » terrompt. » Il est toujours dangereux de chercher dans l'arabe des analogies ou des explications pour les textes phéniciens conçus en général dans un hébreu presque pur, et ici nous croyons que la tentative de M. le duc de Luynes n’a pas été très-heureuse. Quand même on admettrait le rap- prochement du mot 17 avec l'arabe, la traduction crassum leoninum ne saurait être acceptée. Un mot ne peut avoir deux significations simultanément; de ce que Ji: 2 en arabe signifie lion, et d'autres fois épais, on n'est pas autorisé à lui donner ces deux sens réunis. Il faut donc absolument | choisir entre crassum et lroninum, et par conséquent la dé- signation de l'espèce de monnaie est bien incomplète. De plus, /eoninum n'est guère admissible, car il n'est pas dans les habitudes monétaires d'écrire à côté d’un type aussi simple que la figure d'un lion l'explication de ce type; quant à crassum, cette épithète s'appliquerait bien aux ET DISSERTATIONS. 47 pièces à la légende +172 frappées sous les Séleucides et pe- sant de 46 à 47 grammes, lesquelles sont en effet fort épaisses; mais elle ne conviendrait guère aux pièces plus anciennes, lesquelles pèsent environ 105,50 et sont au contraire assez peu épaisses relativement à leur mo- dule *. M. Blau* a donc eu raison, croyons-nous, de chercher une autre explication pour le mot 159. Comme M. le duc de Luynes, il distingue le préfixe » et le mot 717; seule- ment il veut y voir l'analogue du mot dapedc, transcrit dans les livres saints JYIN* et 2211°. Pour cela il suppose que le mot de darique ne dérive pas, comme le disent tous les auteurs anciens, du nom du roi Darius, 1 Signalons aussi, mais seulement pour mémoire, l'explication proposée par M. le docteur Judas, après Je travail de M. le duc de Luynes (Etude de la iangue phénicienne, p. 123). Renouvelant une opinion proposée d’abord par Fabricy, ce savant voit dans le mot "979 le nom de Masaca, capitale de la Cappadoce, qu’il suppose s'être d’abord appelée Mazarca. Quant à la grande légende d’Abd-Sohar, il la lit : Jon ‘a'Nnonmtay Sy pp. Mazarca, pure devant Abdsohar, seigneur puissant ds la terre. On doit regretter que les judicieuses observations de M. le duc de Luynes n'aient pas pu prémunir M. le docteur Judas contre une semblable attribution, et que, moins antiquaire que philologue il ait cherché l'émission des monnaies qui nous occupent ailleurs qne dans l'atelier de Tarse, auquel elles appar- tiennent indubitablement. 3 Zeitschrift der Deutschen Morgenländischen Gesellschaft, t. VI, p. 481-483. 3 1 Paral., XXIX , 7. — Esdr., VIII, 27. à Esdr., 11, 69. — Nehem., VII, 70 72. — La plupart des lexicographes ex- pliquent ce mot comme désignant la dariqu:. Gesenius en cherche l'origine dans le persan, et y voit une allusion au type de l’archer qui décore ces mon- naies, JS, signifiant l'arc du roi. Ne serait-il pas plus naturel d’y voir l'analogue du grec ôpayux ? TEST 2n7 serait donc, dans les livres d’Es- dras et de Néhémie, une drachme d’or, ainsi que l’a entendu saint Jérôme, c'est-à-dire la moitié du VIDTIN. La darique d'or, on le sait, pesait en effet exactement une double drachme d'or ou un statère du système attique. 1860.— 1. 2 18 MÉMOIRES mais du persan y),«or,» en zend zaraet sairi', lequel pro- duit le composé )) wre, Spin ser, «or blanc » c’est-à-dire argent. Cette étymologie est pour le moins douteuse, et une seule considération suffit pour faire rejeter l'explication proposée par M. Blau pour la légende +159, cruz interpre- tum, comme il l'appelle. Les monnaies qui portent cette légende n'ont pu être désignées comme des dariques, puisque les plus anciennes pesant 105,50, sont des pièces de 2 dariques d'argent, et que les plus récentes ont le poids des tétradrachmes attiques *. Dans un travail plus récent”, M. Blau a proposé une se- conde attribution toute différente de la légende 571. Croyant retrouver sur les monnaies à légendes orientales, et même grecques, frappées sous la domination des Aché- ménides, une langue particulière, source du pehlvi, et composée de même par un mélange d'araméen et d'iranien, il a tenté d'expliquer d’après ce système toutes les inscrip- tions que portent ces médailles. En général, M. Blau n'a pas été heureux dans ce tra- vail. 11 a expliqué comme contenant des substantifs d'un sens fort compliqués des légendes qui renferment évi- demment des noms de villes. Ainsi ESTFEAILYS , forme nationale du nom d'Aspendus, avec anousvdra pour 1 Burnouf, Commentaire sur le Ydcna, p. 444. 2 M. Blau, poursuivi de l'idée de retrouver dans les légendes phéniciennes des monnaies frappées sous les Achéménides des titres et des épithètes em- pruntées à la langue perse, renouvelle l'opinion de M. Peyron sur les derniers mots de la grande légendn d’'Abdsohar, et y lit on 319772 ; il traduit de même 3 par « prince,» et y retrouve le perse Bagha. Mais ce mot aurait été certainement rendu en phénicien par 12 et non par 3, et d’ailleurs, comme nous venons de le dire, ce n’est pas JV, mais 3N que porte la pièco. De plus, Bugha ne signifie pas prince, c’est un surnom des souverains, « le dieu, le divin », et non le titre même de leur pouvoir, 9 De numis Achxmenidarum aramao-persicis, Leipzig, 1855, in-4°, ET DISSERTATIONS. 49 EXTFENAILY2’, est à ses yeux le mot «tribut,» en persan moderne, 4-1. Les lettres op, initiales de quelque nom de ville alliée, que l’on voit dans le champ de certaines pièces de Tarse *, sont expliquées par lui comme signifiant « argent ,» persan, «—, syriaque , Las. Le principal défaut des lectures de cet érudit tient au peu de fixité des valeurs de l'alphabet qu’il adopte et aux changements qu'il apporte inutilement aux valeurs recon- nues avec certitude par les savants qui l'ont précédé. Ainsi, pour en revenir à la légende qui nous occupe, 44 | 4, ces lettres que l’on ne peut lire que Pro ou T1710, dont la dernière est indubitablement un 4, sont expliquées par lui 19 , et rapprochées de la légende A4 ? 4, qui se lit au droit dune grande darique d argent aux types du roi dans son char et de la galère*. Quant à ce mot 17, M. Blau le prononce Mizdya, et le traduit par mercenarius, slipendiarius, le comparant au zend mizda et au persan oy, lesquels ont le sens de merus, premium, et supposant que les pièces qui portent cette inscription ont été frappées pour le but spécial de payer la garde du roi. La seule chose qu'il soit nécessaire d’opposer à cette opinion, c'est que À n’a jamais été ni pu être un ». Quant à A YY4;, puisque la discussion de la lecture de 1 Voy. Longpérier, Annuaire de la Société imp. des antiquaires de France, 1853, p. 159. ? Duc de Luynes, Num. des Satrap., pl. IV et V, Gaos. — M. le duc de Luynes voyait dans la légende du revers WJ ; sur la lecture OD, voy. notre Catalogue Behr, p. 113. " 3 Mionnet, Recueil de planches, pl. LXI, n° 1.—Kopp, Bilder und Schriften, t. JI, p. 241. — Hoffmann, Grammatica syriaca , pl. 1. — Gesenius, Monumenta phanica, pl. XXXVI, 8G. — Tresor de numismatique, numtismatique des rois grecs, pl. LAVI, n° 1, et notre Essai sur le classement des monnaies d'argent des Lagides, dans la Revue numism., 1855, pl. III, n° 2; tirage à part, pl. VIII, n° 2, 20 MÉMOIRES M. Blau nous amène à parler de cette épigraphe moné- taire dont l'explication n'a pas été encore donnée jus- qu'ici, disons-en quelques mots. La lecture en est certaine , c'est v179, lequel n'a aucun rapport avec 777. Pour ce qui est de la traduction, on ne peut, croyons-nous, en donner qu'une seule, c'est comparer ce mot au perse Mazdaya, «le Mazdéen, l’adorateur d’Ormuzd. » 1] consti- tue une épithète du roi dont il accompagne la figure, épi- thète analogue au 701159 qui commence le protocole des titres de tous les rois Sassanides '. Ici, nous devons le re- marquer, c est un des cas trés-rares où l'on peut admettre la présence d'un mot d’origine iranienne sur une monnaie phénicienne. Les idées de la religion de Zoroastre n'avaient pas de mots pour les désigner dans le phénicien ou dans les idiomes voisins: c était donc là un de ces cas où, comme dit Cicéron, novis rebus nova ponenda sunt nomina. Essayons à notre tour de pénétrer le sens de cette diffi- cile légende. Si nos efforts ne sont pas couronnés de succès et si nous avons trop présumé de nous en tentant d’é- claircir ce point obscur, l'exemple de ceux qui nous ont précédé pourra servir d'excuse à notre erreur et à notre illusion. Nous prenons pour point de départ la distinction très- ingénieusement établie par M. le duc de Luynes entre la préposition préfixe » et le mot 777. Quant à ce groupe de trois lettres, un exemplaire conservé dans la collec- tion du Cabinet de France, sépare nettement le + final 1 Cette opinion se trouve aussi exposée dans un Mémoire sur les représenta- tions d'Ormazd écrit depuis longtemps , et dont jusqu'ici j’ai différé la publica- tion par suite de l’impossibilité où je me suis trouvé de me procurer le dessin de quelques monuments fort importants dans la question. ( A. DE LONGPÉRIER. ) ET DISSERTATIONS. 91 des lettres 17, et permet de décomposer aiasi la courte légende nn en trois parties 4~1-2. Ceci une fois posé, cherchons avant toute autre chose quel peut être le sens du mot 7? Deux passages de la grande inscription phénicienne de Marseille me semblent fournir la clef de l'énigme. Le premier est à la ligne 7 : ve Sow pos oams> 955 odw on noix on 952 sya on Sa IAN 1 Ce que M. Munk traduit : Pour le bélier ou la chèvre holo- causte, sucrifice obligatoire ou holocauste volontaire, les prétres auront d'argent 1 sicle 2 sar par téte (d animal). Le second passage se rencontre quatre lignes plus bas (a la ligne 11) : 329 902 OND nin on yyw ON 552 now ye ON san 10. ANA os nwdy Le sens en est assez difficile. M. Munk a traduit : Pour le] fruit des jardins, soit des fleurs offrande volontaire, soit le scheccef ou le hazith*, les prétres auront trois quaris (de sicle) d'argent * et 2 zâr, pour chaque *. ‘ Le NY do l'inscription de Marseille doit, comme l'a très-bien vu M. Munk, être le NY® mentionné dans lx Mischnâ ( première partie, traité filam, ch. 1, § 4), fruit analogue à celui du lotus ou 094. 2 MTT se retrouve également dans la Mischna {première partie, traité Theronmoth, ch. 1X , § 7; ch. X, $ 10 ) sous la forme JET et avec le sens de plante bulbeuse , telle que ail ou Poignon. | 3 L'expression simple de "O35, analogue au grec &pyv- eos , ayant le sens d'un sicle d'argent, est assez habituelle dans les livres hébraïques; ainsi on dit "C2 ON , en sous-entendant pypw , mille argentei ( Genes., XX, 16). On écrit de même 2:17 MWY, decem aurei | ibid., XXIV, 22). 4 Les principales conjectures sur lesquelles s'appuie cette traduction ont recu l’assentiment de M. Blau, Die Inschrift ron Eryr, dans le Zeitschrift der Deutschen morgenlündischen Gescilschaft, t. 111, p. 446. 22 MÉMOIRES La signification du mot. a beaucoup embarrassé les interprètes. M. de Saulcy, qui le premier a porté les inves- tigations de la science sur le texte de l'inscription de Mar- seille’, y a vu l'hébreu 11, peregrinus, et réunissant en une seule expression 1 5pw, a cherché dans ces sicles étrangers une mention des monnaies d'argent de Marseille. Mais la ligne 7, distinguant nettement le sicle du zdr et fai- sant suivre chacun de ces mots d’un chiffre particulier, ne permettait pas qu'on admit cette conjecture. M. le docteur Judas *, tout en reconnaissant la distinction des deux mon- paies, attacha, comme M. de Saulcy, le sens d'étranger au mot 7, et proposa de reconnaître dans la phrase de la ligne 7 l'expression d’un rapport entre les sicles phéniciens et la monnaie de Marseille, «un sicle, c’est-à-dire deux pièces étrangères. » Mais la comparaison des deux espèces de monnaies repousse cette opinion; le sicle, chez les Carthaginois comme chez les Juifs, est un tétradrachme du système asiatique , c’est-à-dire plus de deux monnaies d’ar- gent de Marseille, lesquelles sont des trioboles du système babylonien apporté d'Asie Mineure par les colons phocéens. D'ailleurs la phrase de la ligne 41, faisant suivre la mention de 3/h de sicle du mème chiffre de 2 zar, dément toute interprétation de ce genre. Il n'y a donc pas moyen de faire autrement que ne l’a fait M. Munk, c'est-à-dire de ne pas voir dans le 17, une division du sicle, inconnue jusqu’alors et inférieure au | quart de cette monnaie. N'est-ce pas une indication de la valeur de la pièce en 1 Mémoire sur une inscription phenirenne deterree à Marseille, dans le t. XVII des Mémoires de U Academie des inscriptions et belles -icttres, ? Étude démonstratire, p. 166, ET DISSERTATIONS. 93 zdr que l’on doit reconnaître dans la légende +159? Nous le croyons et nous espérons pouvoir le démontrer. Dans notre opinion, les trois parties dans lesquelles nous divisons cette légende , 4 17 ©, signifieraient « (pièce) de 20 zar.» La préposition » indiquerait ici la composition comme le latin ex ou le grec amd; c'est ainsi qu'on trouve dans le Cantique des Cantiques ' 3257 oD... PHO, fercu- lium... ex lignis Libani”. Quant à la lettre 4, nous la considérons comme jouant un rôle numéral. L'emploi des lettres de l'alphabet comme signe des nombres n’est pas sans exemple dans |’ épigraphic phénicienne. Sur les monnaies nous les trouvons quel- quefois mélées aux chiffres ordinaires; ainsi les grandes dariques au type du roi dans son char et au revers de la galère *, et leurs divisions au type du roi frappant le lion *, présentent dans le champ du droit les chiffres suivants : O, 20; 90, 22; OO, 40; SO O, A2, qui doivent indiquer les années d'une ère inconnue. Sur une darique d'argent aux types du roi monté sur l'hippo- campe et de la chouette, conservée au Cabinet des mé- dailles *, on voit à côté de la chouette la date, ‘| ‘4 que nous ne pouvons pas expliquer autrement que par 42 °, la mon- 11,9. 2 Cf, Genes., 11, 19. — Ezod., XXXIX, 2. — Ps., XVI, 4.— Hos., XIII, 2. 3 Trésor de numismatique, numismatique des rois grecs, pl. LXV, n°? 20:22: pl. LXVI, nes 4 et 5. & Ibid., pl. LXIV, n°* 13 et 14. 5 Jbid., pl. LXV, n° 7. * Sur les dariques portant la tête d'Hercule et an revers la galère, on trouve 24 MÉMOIRES naie dont nous parlons, par le style, le travail, et tous les autres caractères, étant manifestement du même temps que celles qui portent les dates oN MO RO, 82 TPs 385 “yy 35: Les médailles au nom d’Abd-Sohar et les monnaies les plus anciennes et les plus nombreuses qui portent la simple légende 7110, pèsent de 10,90 à 105,60, selon leur état de conservation et selon les diverses émissions. La vingtième partie de ce poids est 0,54 ou 05,53, c’est-a- dire exactement l’obole d'une drachme asiatique pesant 85,24 ou 35,18, taux auquel cette unité monétaire avait été généralement réduite sous la domination des rois aché- ménides ‘. Nous trouvons ainsi pour le zàr une valeur très. régulière et toute naturelle, et nous sommes amené à con- clure que cette monnaie, mentionnée si clairement dans l'inscription de Marseille, n'était autre que l’obole de la drachme asiatique, c’est-à-dire la vingt-quatrième partie du sicle. 3/4 de sicle et 2 zâr, comme nous voyons à la 41° ligne de cette inscription, correspondent exactement aux 20 zâr inscrits sur les monnaies de Tarse. le mot ND, Ac Y/, 100, suivi de chiffres qui varient depuis 1 jusqu'à 86. Les dizaines au-dessus de 20 y sont indiquées par les lettres numérales : | Xe HY , 7 N2; 120. 4X, 7 N10, 130. WY, ORD, M40, OX /, ÿ Nv, 170. HET eA, in Dd RO, 185. Ces dates appartiennent à l'ère de Cyrus. — Cf. duc de Luynes, Mémoire sur Le s arcoph age d Eschmunazar, p. 58. 1 V. notre Essai sur le classement des monnaies d'argent des Lagides, duns |: Recue num., 1855, p. 104, et p. 158 de la publication séparés. XT DISSERTATIONS. 25 Dans l'inscription de Marseille comme sur nos monnaies, cette somme de 20 zdr indique un rapport exact entre les deux systémes monétaires appelés par les auteurs anciens asiatique et babylonien. 3/4 de sicle et 2 zar, c'est-à- dire 3 drachmes et 2 oboles asiatiques, sont la valeur de quatre pièces d'argent massaliotes, c’est-à-dire de 4 tri- oboles babyloniens au poids de 25,70 environ , de même que 1 sicle et 2 zâr correspondent à cing de ces pièces plus 4 obole, circonstance qui doit nous faire présumer que dans le comptoir punique de Marseille la monnaie locale, et non la monnaie carthaginoise, était employée pour les usages ordinaires et pour le payement des honoraires des prêtres à chaque sacrifice. À Tarse, les 20 zâr inscrits sur la monnaie marquent la valeur de la pièce de 2 dariques ou de 2 drachmes baby- loniennes en oboles asiatiques, auxquelles les indigènes, Phéuiciens d’origine , étaient probablement plus ancienne- ment habitués. Cette recherche de combinaisons harmo- niques entre les différents systèmes monétaires avait eu, du reste, une grande influence dans la fixation du taux de la darique, combiné , ainsi que nous l'avons établi dans notre Essai sur le classement des monnaies d'argent des Lagides', pour que les espèces frappées pour le grand roi pussent circuler dans toutes les contrées en y représentant . toujours une valeur exacte dans la monnaie du pays. Les plus anciennes monnaies frappées à Tarse sous la domination perse, antérieures même à l'introduction du type de Baal Tars, et portant la légende INP, mn’, présentent déjà la même combinaison. Nous possédons 1 Revue num., 1855, p. 104 et suiv., et p. 158 et suiv. du tirage à part. 3 Duc de Luynes, Num. des Satran,, pl. VIII, n° 1 et 2. 26 MEMOIRES deux variétés de ces monnaies : unc grande pièce et sa division. La grande piéce pése, comme les monnaies un peu postérieures à la légende qr, 105,65; c'est une double darique ou pièce de 20 zar. La division pèse 35°,20; c'est une drachme asiatique ou pièce de 6 zar, exactement au même taux que celui que représentent les médailles qui sont l'objet de notre étude. Nous ne trouvons plus la drachme asiatique comme divi- sion à partir du moment où apparaît le type de Baal Tars et où la légende “771m s’introduit dans le champ du revers. Nous rencontrons seulement, et cette circonstance confirme encore notre explication, de toutes petites monnaies dont le poids monte jusqu'à 0*,65', qui, en tenant compte de l'élévation du poids, constamment plus fort dans les petites divisions que dans leurs multiples, représentent le zar ou l'obole asiatique, et qui par conséquent valaient le vingtième des monnaies de grand module. Mais la légende 79 se retrouve sur des monnaies d’é- poque postérieure et d’un poids différent de celui des plus anciennes pièces auxquelles nous avons reconnu la valeur de 20 oboles asiatiques *. Comment concilier ce fait avec l'explication que nous proposons pour la légende? Ici deux opinions différentes peuvent être soutenues avec une égale vraisemblance. Les monnaies qui offrent la légende 4159 avec un autre poids que celui de la double darique sont peu nombreuses et semblent avoir été frappées pendant très-peu de temps, au début de la domination grecque sur la Cilicie. Les ar- tistes qui les ont gravées paraissent, comme M. le duc de 1 Jbid., pl. IX, n°° 15 et 16. > Ihid., pl. IX, n°° 20 et 21; pl X, n° 22 24, ET DISSERTATIONS. 27 Luynes Ta déja fait remarquer ‘, avoir été étrangers à la connaissance de la langue phénicienne. Ils font dans les légendes les fautes les plus extraordinaires. Ainsi, sur un exemplaire *, dans le nom de Baal Tars, [4p Loy , mn %y2. le a disparaît et est remplacé par un point, en même temps que le * est retourné en sens inverse de sa direction véritable, | Ph&Uur. Sur unautre * c'est la lé- gende du revers qui est entièrement dénaturée; au lieu de ro nous trouvons 330, par suite d'une confusion entre le 9 etle 3, 441). Sur un troisième exemplaire * la forme du * est altérée de manière à devenir méconnais- sable, A4144, Lorsqu'on voit de semblables erreurs se produire sous la main de l'artiste, n’est-on pas assez naturellement amené à supposer qu'il a dû, en imitant des monnaies anté- rieures, en copier servilement les légendes comme les types sans s'être rendu compte du sens qu'elles pouvaient offrir ? D'un autre côté nous devons remarquer que les pièces les plus pesantes à la légende +150 sont des tétradrachmes attiques au poids de 175,30, modelé sur celui des tétra- drachmes d'Alexandre. Or, si nous divisons par vingt le poids de ces monnaies, nous rencontrons une valeur exacte dans un autre système ; ce ne sont plus des oboles asiati- ques comme d'abord. mais des oboles babyloniennes, c’est- à-dire du système dans lequel les pièces de 105,80 étaient des didrachmes. La coïncidence est assez frappante pour ne pas être purement fortuite. Comme il est naturel de 1 Jbid., p. 60. ? Ibid., pl. X, n° 22. 3 Jbed., pl. IX, no 21. 4 Joil., pl. X, n° 23, 28 MÉMOIRES penser que le mot phénicien 71, de même que le grec 0600:, a pu désigner la coupe analogue du vingt-quatrième d’un tétradrachme ou du sixième d’une drachme dans les différents systèmes monétaires, on serait en droit de sup- poser que, de même que les Perses en introduisant leur monnaie dans la Cilicie avaient eu soin d'inscrire sur les espèces qu'ils mettaient en circulation le rapport de cette monnaie avec celle à laquelle la population indigène était plus anciennement habituée, les Grecs inscrivirent dans les premiers temps de leur domination la marque de la relation du système monétaire qu'ils introduisaient avec celui que les Perses avaient fait entrer dans les mœurs des habitants de Tarse. Ce qui semblerait confirmer cette dernière conjecture, c'est l’existence , dans les cartons du Cabinet de France, d'une division encore inédite des monnaies de Tarse au type du lion, dont le style correspond exactement à celui des grandes pièces pesant 475,30. Le poids de cette mon- naie est 45,80, c'est-à-dire deux des oboles ou zdr qui ressortiraient de la division par vingt du poids des tétra- drachmes attiques frappés en méme temps. On le voit, que l’on adopte l’une ou l’autre de ces opi- nions, le changement de poids ne détruit pas notre expli- cation de la légende 152. Cette légende si embarrassante contient une indication de la valeur de la pièce tout à fait analogue aux inscriptions AIAPAXMON, HMIOBO- AION, etc., que l'on rencontre sur certaines monnaies grecques !. | 1 La légende Ves n'est pas, du reste, le premier exemple d'indication de valeur de la monnaie que l'on rencontre dans la numismatique orientale. M. le duc de Luynes | Revue num., 1858, p. 364-366) a expliqué de la façon la plus ET DISSERTATIONS. 99 En outre qu elle offre un sens clair et naturel , notre opi- nion fournit l’explication définitive du mot 17. Lorsque ce mot se présentera désormais dans les textes phéniciens on devra le traduire par obole. Reste seulement à en recher- cher l'étymologie. Ici nous n’osons rien dire de bien précis. Il est cependant assez probable que comme 5¢w, ce mot, avant de désigner une monnaie, a dû indiquer un poids. Dès lors nous serions assez porté à le rapprocher de la ra- cine y17 ou 77, qui a le sens de disperser, puis de semer, et dont la première signification a fourni le dérivé 1°, pe- ingéniense, par nne indication de ce genre, les mots 02 ny, id ane A et 503 En, war AS oes qui se lisent au revers de deux monnaies naba- téennes; les premiers signifient obole d'argent, les seconas , demie ( obole) d'ar- gent. Que l'on ne s'étonne pas de voir deux mots différents aésigner In même monnaie sur des pièces de la Nabatèue et sur des pièces de la Cilicie. Chez les Nabatéens, les légendes monétaires sont conçues dans un dialecte arabe assez fortement empreint d’aramaisme; dans la série cilicienne, elles sont en phéni- eicn pur. La différence des deux langues, quoiqu’elles appartiennent l’une et l'autre à la même famille, est assez forte pour expliquer un changement dans le vocabulaire. Voici donc comment nous établirions la synony mie de l'obole dans les idiomes sémitiques : Phénicien. . . . . …. 2 . . . 7 7 | na ébreu, | ANN NY? Chalduïque. . . . | ny Nabatéen.. . . . . . . . . . #1 és Arabe... y Le sens originaire de ces différents mots ne diffère pas beaucoup. 97, nous le disons, est un grain; 5174 signifie la même chose; quant À ny", c'est une petite pierre. un grain de sable, 30 MEMOIRES regrinus. Exprimer la plus petite division d’une série de poids par le nom de graine ou de semence, est une idée naturelle dont on retrouve la trace chez tous les peuples. De même que les Phéniciens avaient le 97 , les Grecs avaient le xepxttov et la pol, les Latins la siliqua, et chez nous même, avant l'établissement du système métrique, le poids le plus faible était le grain. FRANCOIS LENORMANT. ET DISSERTATIONS. 31 DISSERTATION SUR LES MÉDAILLES DE CONSECRATION FRAPPEES PAR MAXENCE A LA MEMOIRE DE SON FILS ROMULUS. Maximien Hercule, père de Maxence, fut associé à l'em- pire avec le titre d’Auguste par Dioclétien , l'an de Jésus- Christ 286; il eut pour son département l'Occident, c’est- à-dire l'Italie, les Gaules, l'Afrique, etc. Maxence était âgé de quatre ans lorsque son père fut associé à l'empire, et Rome dut être le séjour habituel de ce jeune prince. En 305 Maximien Hercule, forcé par Galérius , abdiqua à Milan en même temps que Dioclétien à Nicomédie. Maximin était déjà César, et Sévère fut proclamé Auguste et empe- reur par Galérius en 306, ayant Rome dans son départe- ment. Constantin et Maxence furent complétement oubliés dans ces promotions qui suivirent l’abdication de Maximien et de Dioclétien. Maxence dut éprouver un sentiment de dépit et de jalousie profonde en voyant Maximin et Sévère avoir le pas sur lui, fils et gendre d’empereur. D'un autre côté, aiguil- lonné par la fortune de Constantin, qui se relevait d’une injustice pareille en acceptant des troupes le titre d'Au- 32 MEMOIRES guste, il se mit à la tête de ce qui restait de prétoriens à Rome, et, proclamé Auguste par eux, il se fit facilement reconnaître dans cette ville où il avait vécu dix-neuf ans avec toutes les prérogatives attachées à la qualité de fils d’empereur. Maxence était aussi fortement encouragé par son père , qui regrettait comme lui les grandeurs auxquelles il avait été forcé de renoncer. A la nouvelle de cette usurpation, Sévère, complétement étranger à Rome, marche vers cette capitale; mais les troupes étaient bien mal disposées à le servir ; elles avaient toujours obéi à Maximien Hercule, et par conséquent elles devaient conserver de l'attachement pour le fils de ce prince. Alors Maximien reparaît sur la scène, sous le pré- texte de soutenir Maxence, qui avait besoin de son influence, et en réalité pour reprendre la souveraineté dans Rome. Son fils lui céda la pourpre avec une apparence de con- descendance, mais sachant bien que l'autorité lui res- terait. : On vit alors dans l'empire six princes à la fois, Augustes ou Césars : Galérius , Sévére , Maximin, Constantin, Maxi- mien Hercule et Maxence, ces derniers seuls maîtres de Rome en réalité. Sévère , dans ses tentatives contre Rome, fut abandonné de ses troupes ; assiégé dans Ravenne, il fut contraint de se rendre et de se donner la mort. En 307, Galérius entra en Italie pour venger Sévère et détruire Maxence ; mais il fut obligé de fuir, abandonné aussi de ses soldats. Ceux-ci affectaient un respect religieux pour les droits de la patrie, et, Romains, ils se faisaient un scru- pule d'attaquer Rome. Galérius ne pouvait avoir aucune influence dans cette ville, qu’il connaissait si peu, que lorsqu'il en approcha, disent les historiens, il fut effrayé ET DISSERTATIONS. 33 de son immense étendue, et qu'il douta dès lors de son succès. | Maximien, qui était resté en Gaule pour s'appuyer de l'alliance de Constantia, à qui il donna sa fille Fausta , re- vint à Rome pour arracher l'autorité à son fils; il n'y réussit pas, et Maxence, que reconnaissait aussi l'Afrique, s'attacha plus que jamais à Rome. Maxence ne fut jamais reconnu par Galérius, et Galérius n’était pas reconnu dans Rome la ville de Maxence. Maxence, maitre de Rome et par droit de conquête et par droit de naissance, se regardait avec une certaine légitimité comme le seul maître de l'empire ; aussi il nomma à Rome des consuls en opposition avec ceux de Galérius. En 306, l’année même où il s’était fait reconnaître dans Rome et où il avait mis en jeu tous les moyens de s'y affer- mir contre toutes les tentatives de ses compétiteurs, il lui était né un fils, auquel fut donné le nom de Romulus. Dans le choix de ce nom, Maxence dut avoir l'intention de mettre son fils sous le patronage de la ville éternelle. Serait-il impossible qu'il obtint naturellement, ou même qu'il exigeât, que celui-ci fût adopté par Rome? On objec- tera qu'une circonstance semblable n'a pas. de précédent dans les annales de Rome; mais la situation de Maxence est aussi bien exceptionnelle; repoussé par tous les Augustes, il a pour lui Rome, le cœur de empire ; quoi de plus na- turel qu'il veuille attacher cette ville à sa famille par Jes liens les plus sacrés ! Ce nom de Romulus, qu'aucun em- pereur n’avait encore fait renaître, ne reparaît-il pas là comme une circonstance sans précédent? Maxence ne se considérait-il pas, aussi lui, comme le libérateur et comme le conservateur de Rome , sa ville? Les monnaies de Maxence, de tous les modules et de tous les métaux, nous l’appren- 1860. — 1. 3 3A MEMOIRES nent : CONSERVATOR VRBIS SVAE, telle est la légende du revers qui s’y reproduit le plus souvent autour de la figure allégorique de Rome assise dans un temple , tenant un globe surmonté de la Victoire , ou présentant un globe à l'empereur. | Ainsi que nous l'avons déjà dit, Maxence continue les fastes consulaires à Rome sans se préoccuper de ceux de Galérius, et quels consuls fait-il nommer? En 308, nous voyons Maxentius Augustus et Romulus Cæsar (celui-ci était âgé de deux ans). En 809, Maxentius Augustus II, et Romulus Cesar II. Romulus meurt cette année-la, aprés avoir été deux fois consul et nommé deux fois Auguste , probablement. A la mort de ce fils, de ce nouveau Romulus qui devait éterniser l'empire dans sa famille, Maxence fit frapper en or et en bronze des médaillons et des monnaies de consécra- tion, représentant au revers un temple de forme ronde, et, au-dessus, un aigle éployé avec la légende AETERNAE MEMORIAE ; et, au droit, le buste de Romulus vêtu de la toge, avec des légendes dont jusqu'à présent on ignore le sens, et que je m'explique d’après les circonstances histo- riques que je viens de rappeler. Voici ces légendes : DIVO. ROMVLO. N.V.C. (vel COS vel CONS) nostræ urbis consuli. DIVO. ROMVLO. N.V.BIS.C. (vel COS vel CONS) nostræ urbis bis consuli. DIVO. ROMVLO. N. V. B. AVG. nostræ urbis bis au- gusto. IMP. MAXENTIVS. DIVO. ROMVLO. N.V.F. (vel FILIO) nostræ urbis filio. ET DISSERTATIONS. 35 DIVO. ROMVLO. N.V. CONS. FILIO. nostræ urbis consuli filio. Dans les deux derniéres légendes, le mot BIS ne parait pas, ce qui confirme l'interprétation que je propose : bis filio n’aurait pas de sens. Ainsi donc, Maxence, qui se fait appeler sur la plupart de ses monnaies le conservateur de sa ville, peut trés-bien, en voulant conserver la mémoire de son fils à la postérité, rappeler les titres dont sa ville avait honoré le nouveau Romulus et dire sur les médailles de consécration qu'il fait frapper dans ce but : Maxence, empereur, au divin Romulus, deux fois consul de notre ville ou fils de notre ville. R. Géry. 36 MEMOIRES NOTE SUR LES MONNAIES DE ROMULUS, FILS DE MAXENCE. Les discussions relatives à la légende des monnaies du fils de Maxence sont aussi anciennes que la numismatique. Tristan, Jobert, Hardouin, Bimard de la Bastie, Noris!, Cl. de Boze*, ont tour à tour fait connaître leur opinion sur le sens des caractéres NVBISCONS. En 1827, Mionnet, dans la seconde édition de son livre de la Rareté des médailles romaines, se contente de dire « qu'on ignore absolument le sens de ces mots. » Il est vrai qu'Eckhel avait refusé de se prononcer, que Beger, Spanheim et Banduri montrent une grande réserve en analysant les systèmes de Tristan et d'Hardouin. Ce dernier * avait proposé l'explication Nostrz Vrbis BIS CONSuli, Nostræ Vrbis Bis AVGusto qui séduisait Jobert *. Bimard s'écrie : « Or qu'est-ce que l’Auguste d’une ville? » et l’illustre antiquaire de Vienne dit encore « ve- rum si quis dici potuit Vrbis filius, an et Vrbis consul, vel Augustus? »°. En 1836, l’auteur d'un article du Numismatic journal 1 Dissert, I. De num. Diocl. et Mazimian., c. 5. 3 Académie des inscript., t. XV, p. 477. 3 Oper. Select., p. 463. ® La Science des médailles, nouv. édit., 1739, t. IJ, p. 196. & Docitr, num.,t. VIII, p. 60. ET DISSERTATIONS. 37 qui signe E-C-B., trouvant « absurde » la présence simul- tanée des titres divus et consul, en revient à l'opinion de Tristan qui lisait Nostræ urbis conservator’. Le numisma- tiste anglais croit que l’abréviation de consul est « toujours COS » et il ne s'aperçoit pas de la difficulté que présente- rait l'interprétation de la phrase nostrz urbis bis conservator, d’ailleurs si choquante pour des oreilles romaines. Une note en ancienne écriture, tracée sur mon exemplaire des Mé- langes de Pellerin (T. I, p. 162), nous fournit ce sens : « deux fois consul à l’âge de cing ans,» Natu quinquenni BIS CONSuli. Je ne la rapporte que pour ne rien omettre. En 1843, M. W. Chassot de Florencourt a imprimé à Trèves, sous le titre de Erkidrung der räthselhaften Um- schrifien des Consecrations-Münzen des Romulus, un mémoire fort intéressant dans lequel il propose d'admettre la for- mule Nominis Venerandi qu'il s'efforce de justifier par des citations de textes ingénieusement rapprochés et par la mention des monnaies de consécration de Constantin le grand, portant les trois variantes VN. MR — IVST. VEN. MEM. et IVST. VENER. MEMOR., c'est-à-dire suivant Bi- mard et Eckhel, VeNerandz MemoRiz et IVSTa [soluta] VENERandz MEMORiz. La première ligne de l'inscription citée d’après Orelli (1069) : DIVO. ROMVLO. N. M. V COS. OR..... I. FILIO D. N. MAXENT..... I. INVICT VI... AVG. NEPOTI T. DIVI. MAXIMIANI. SEN ORIS. AC.. .….............., doit se lire, suivant M. de Florencourt : Divo Romulo no- 1 Comm, hist., t. TII, p. 469. 38 MEMOIRES minis maxime venerandi. .Voici comment Nibby transcrivait ce fragment épigraphique trouvé à Rome dans le cirque de Maxence : « Divo Romulo Nobilis Memoriz viro Consuli ORdinario 17, Filio Domini Nostri Maxentit invicti Viri, Augusti, Nepoti ter Divi Maximiani senioris ac bis Augusti. - M. Lenormant, dans le Trésor de Numismatique', re- pousse l’explication du collaborateur anonyme du Numis- matic journal, et, faisant remarquer que le christianisme avait enlevé au titre Divus une partie de sa valeur primi- tive, alors que les fils de Constantin pouvaient l’appliquer à leur père sur ses monnaies de consécration, il croit que Maxence à voulu faire une sorte de compensation paienne ‘ en corroborant dicus par numen, et qu'il faut lire DIVO ROMVLO NVmini : Au divin Romulus vraiment Dieu. Un post-scriptum ajouté à cet article, au moment où notre savant et regretté confrère venait de lire la brochure de M. de Florencourt que je lui avais communiquée, tout en rendant justice au travail du docte antiquaire de Trèves, propose une modification à son système. On pourrait, dit M. Lenormant, lire sur les monnaies NVMINI VENERANDO et dans l'inscription du cirque NVMINI MAXIME VENE- RANDO. Chose assez singulière ! ni Mionnet, ni l’'anonyme du Nu- mismatic Journal, ni M. Lenormant, ni M. de Florencourt, n’ont eu connaissance d’un travail publié, en 1825, dans l’Antologia de Florence (t. XVIII, p. 86), par le comte Borghesi. Ce travail intitulé Memoria sopra Valeria Mas- similla moglie dell imperadore Massenzio, nous révèle le nom de la mére de Romulus que I histoire a passé sous silence. Quoique les deux inscriptions qui suivent : 1 Jconogr. des empereurs rom., 1843, p. 117 et 118. ET DISSERTATIONS. 39 DOMINO.PATRI DOMINAE MATRI M. VAL. MAXENTIO VAL. MAXIMILLAE VIRO CLARIS NOB FEM VAL. ROMVLVS. C.P VAL. ROMVLVS.C.P. PRO AMORE PRO AMORE CARITATIS EIVS ADFECTIONIS EIVS PATRI. BENIGNISSIMO MATRI.CARISSIMAE. fussent publiées depuis longtemps, puisque l’une a été . donnée par Vignoli (1705), par Muratori (1740), par Fico- roni (1745), et l’autre par Maffei (1749), et qu'elles fussent toutes deux conservées, à Rome, dans la collection Ros- pigliosi*, on n'avait pas songé à rapprocher leur texte et par conséquent on n'avait pu reconnaître qu'elles pro- viennent d'un même monument dédié par le jeune Romulus à son père et à sa mère, alors que le premier ne s'était pas encore fait proclamer empereur. L'illustre épigraphiste de San Marino fait remarquer que l'inscription dans laquelle Maxence ne reçoit que le titre de vir clarissimus a dû être tracée après l'abdication de Maxi- mien Hercule, en 305 ; Galère régnant, sa fille Maximiila avait droit au titre de nobilissima femina. De l'inscription * : D.M T.ATTICI STRABONIS ROMVLI CLARISSIMI PVERI il résulte aussi que Romulus portait le titre de clarissimus 1 Voy. Ficoroni, le Memorie ritrovate nel territorio di Labico, p. 45, et Maffei, Mus. Ver., p. 312, n° 6. ? Pighius, Auctar, inscript., p. 64. h0 MÉMOIRES puer alors que son père vivait dans la condition privée. Mais lorsque Maxence fut devenu empereur, son fils dut naturellement porter le titre nobilissimus ; puis, nommé consul deux fois, il avait revêtu la toge virile et par consé- quent il n'était plus nobilissimus puer, mais bier nobilissi- mus vir. Il est donc tout naturel que les médailles de Ro- mulus aient pour légende : | DIVO ROMULO Nobilissimo Viro Consult DIVO ROMULO Nobilissimo Viro BIS CONSuli . IMP. MAXENTIVS. DIVO.ROMVLO. Nobilissimo Viro FILIO M. le comte Borghesi s'étonne de ce que cette explication si simple n'ait pas encore été proposée par les numisma- tistes qui l'ont précédé. Il considère comme une pièce fausse la monnaie du musée de Vienne qui porte M. AVR. ROMV- LVS. NOBILIS. CAES et ne mentionne pas le petit bronze cité par Banduri comme offrant l'inscription DIVO ROMVLO NV8 AVG peut-être parce qu'il ne le croit pas authentique. Cependant cette légende pourrait être facilement inter- prétée par DIVO ROMVLO Nobilissimo Viro Beatissimo AVGusto, puisque le titre beatissimus se lit sur un assez grand nombre de monnaies frappées en l’honneur de Dio- clétien , et sur une monnaie de Maximien Hercule. Je viens de rappeler les diverses opinions qu’a fait naitre la légende NVBISCONS. On voit qu'elles s’éloignent pour la plupart de celle qui a été adoptée par le P. Hardouin, le P. Jobert et M. Géry. Si nous préférons Ja maniére de voir de M. le comte Borghesi, ce n’est pas que le titre urbis filius nous paraisse impossible à admettre. Cl. de Boze a publié une monnaie de Galére Antonin sur laquelle on lit : M. ANNIOS. TAA. ANT. YIP (vid: Pouf: ou Po.cm@y) ; et à ce sujet le savant académicien cite des inscriptions et des ET DISSERTATIONS. hi médailles qui donnent à des magistrats le titre de vioc mo)ew;, fs de la ville’. On pourra encore trouver dans le Corpus inscriptionum græcarum : vids nodews (n° 3570), vioc quAñc (n* 4048, 4019 ), Guyærrp modes ( n° 1253, 1442, 4080). Suétone appelle Caius César filius castrorum. Mais je ne saurais accepter Nostræ urbis bis consul, car bien que Maxence fit un affreux tyran, l’effroi de la ville de Rome, il avait certainement pour sa langue un respect qu'il ne ressentait pas pour les citoyens, et il n’eut pas voulu faire écrire Nostræ urbis bis consul, quand il pouvait employer une tournure plus euphonique. Ensuite il n’est pas certain que Romulus ait été adopté par Rome. Ce jeune prince était né avant l’avénement de son père; c’est ce que les inscrip- tions rapportées plus haut nous prouvent. Nous apprenons aussi par l'Epitome de Sextus Aurelius Victor que sa bisaïeule maternelle, la mère de Galère, se nommait Romula (Galerius..... ortus Dacia Ripensi, ibique sepultus est; quem locum Romulianum ex vocabulo Romulæ matris appellarat), et il paraît naturel que Maximilla ait donné à son fils un surnom de famille indépendamment du rapport que ce surnom pouvait avoir avec les origines de la ville éternelle. Ii faut reconnaître cependant que, devenu empereur, Maxence a bien évidemment profité de l’occasion qui s of- frait à lui de faire un rapprochement entre le nom de son fils et celui du premier Romulus. Si nous voyons paraître sur un denier d’argent à la légende TEMPORVM FELICITAS AVG, la louve allaitant les deux enfants, qui se trouve en- core sur les moyens bronzes portant SAECVLI FELICITAS AVG. N; si ce type décore le fronton du temple de Rome qu'entoure l'inscription CONSERV. VRB. SVAE ; si enfin il 1 Mém. de l'Acud. des inacriptions,t. XV, p. 468 et suiv. h2 MÉMOIRES est gravé entre les déux Dioscures qu'accompagne la lé- gende AETERNITAS. AVG. N., c'est que l’empereur a voulu faire allusion au nouveau Romulus qui lui semblait un gage de durée pour sa dynastie. Eckhel n’a pas donné une bien grande attention à ces faits, car il dit : post tot Aeternitatis typos hic novus, nulla tamen ejus certa ratione. J'ajouterai que pour bien étudier la légende des monnaies de Romulus, il ne faut pas l’isoler de la série à laquelle elle appartient : Imp. Maxentius Divo Maximiano patri, Imp. Maxentius Divo Constantio adfini, Imp. Maxentius Divo Constantio cognato, Imp. Maxentius Divo Maximiano socero, Imp. Maxentius Divo Romulo N. V. Consuli filio. Toutes ces indications de parenté se rapportent a Maxence , et non pas à la ville de Rome. C'est encore la qualité de fils de Maxence qui figure après la mention du consulat dans l'inscription suivaate , trouvée à Rome dans le cirque de Caracalla, et publiée par M. le comte Borghesi : DIVO ROMYLO COS. ORDIN FIL. D.N. MAXENT L’inscription du cirque de Maxence rapportée plus haut commence par la même formule, et l'on voit que la réunion des titres divus et consul était bien décidément autorisée par l'usage de ces temps. Ap. DE LONGPERIER. ET DISSERTATIONS. A3 QUELQUES MONNAIES RARES OÙ INÉDITES DE LA BIBLIOTHÈQUE DE MARSEILLE. ( Pl. IT et II.) La ville de Marseille a fait, en 4822, l'acquisition du Gabinet de médailles formé par l’ancien président de Saint- Vincens , numismatiste distingué et auteur d'une instruc- tive dissertation sur les monnaies provengales. Ce travail, malheureusement peu connu, par ce seul fait peut-être qu'il n'a pas été imprimé à part, se trouve englobé dans les tomes H et III de l’ Histoire de Provence du Père Papon. M. de Saint-Vincens y a joint un assez grand nombre de planches, devenues aujourd’hui assez rares, malgré divers tirages qui ont toujours été faits sans accompagnement du texte. Ces planches contiennent, non-seulement les pièces grecques reproduites avec beaucoup plus d'exactitude dans la Numismatique de ta Gaule Narbonnaise de M. de La Saus- saye, et des monuaies des comtes de Provence proprement dites, mais encore celles qui ont eu cours légal dans la contrée, ainsi qu'un certain nombre de pièces frappées par les rois de France au titre de cette province après sa réunion à la couronne. Outre les monnaies de Provence , la suite de M. de Saint- Vincens contenait un grand nombre de médailles grecques et romaines, plus ou moins bien conservées, comme on les collectart alors. Mais la ville de Marseille a compris que les hh MEMOIRES monnaies locales devaient être aujourd'hui sa spécialité, et elle dirige dans ce sens tous ses efforts, afin d'être bientôt à même d'offrir aux numismatistes une collection digne d’être visitée et étudiée. En attendant que nous ayons pu terminer le travail d’une monographie provençale, nous allons faire connaître ou restituer quelques pièces de ce Cabinet. N° 1. — THEODOBERTI REX. Croix égale dans le champ. x. Monogramme de Théodebert. — Cuivre. Poids : 4 gramme (pl. II, n°4). Si je place cette pièce en tête des monnaies proverçales qui vont suivre, c'est que, dans son désir de la rattacher à la Provence, M. de Saint-Vincens, après l'avoir fait inexactement dessiner sous le n° 45 de sa pl. IX dans l'ouvrage de Papon, la décrivait ainsi, en l'attribuant au comte Robert : « Cette monnaie est peut-être la seule que « les comtes de Provence aient fait frapper en cuivre pur. all y a une croix autour de laquelle on lit : ROBERTI « REX IhER.» (Papon, tome III, page 585). Duby a calqué ce dessin erroné sous le n° 8, pl. VIII du Supplément. Mais l'excellente conservation de cette pièce ne permet pas d'y lire autre chose que le nom de Théodebert , écrit en lettres purement latines , au lieu des € gothiques et de l’h cursif qu'on a cru pouvoir substituer aux caractères réels. Et d'ailleurs, que serait venu faire au x1v° siècle et sur une monnaie de Robert le monogramme qui se voit au revers? Nous avons donc réellement sous les yeux un rarissime, si ce n’est unique spécimen de la monnaie de cuivre de Théodebert. On peut en juger par le dessin que nous en donnons, qui est d’une exactitude rigoureuse. N° 2. — VICTOR(I?]. Profil droit. #, ITACIO ACCLISI[E] (Racio ecclesiæ), autour d'un ET DISSERTATIONS. ._ &5 grénetis , dans le centre duquel se trouve une croix formée de cinq perles. — Argent. Poids : 18,10 ( pl. II, n° 2). Ce curieux denier d'argent abbatial de l'époque méro- vingienne appartient à M. Henri Morin, de Lyon, qui a bien voulu me le communiquer. Il a besoin d’être étudié pour savoir s’il y a lieu de l’attribuer à la célèbre abbaye de Saint-Victor de Marseille, fondée en 440, par saint Cassien. Cette abbaye paraît être la seule de ce nom qui ait pu frapper monnaie sous la première race, puisque celle de Paris, sous la même invocation, ne remonte qu'aux premières années du xu° siècle, c'est-à-dire au règne de Louis VI, et alors le type mérovingien avait disparu depuis longtemps. Si l'on objectait contre cette attribution que l’abbaye de Saint-Victor, consacrée par un pape en personne et cé- lèbre dès son origine par ses richesses , a été détruite par les barbares peu d'années après sa fondation, il est facile de répondre que dès avant le vu: et le vin° siècle elle avait acquis un nouveau degré de puissance, à ce point que son abbé n'allait pas tarder 4 marcher de pair avec l’évêque de Marseille, et à créer de nombreux conflits avec l’administra- tion temporelle de la ville. Cette communauté était en pleine possession de droits considérables qui témoignent qu'elle s'était relevée de sa chute longtemps avant la fin de la dynastie mérovingienne, à l’époque où apparaissent pour * Marseille les saigas d'argent contemporains de Dagobert II. Saint-Victor, dans cette hypothèse, auraït joui des mêmes prérogatives que Saint-Martin de Tours, soit qu'une con- cession ait été accordée aux abbés, soit, ce qui est plus probable , que dans leur lutte avec l'autorité temporelle, ils aient usurpé momentanément le droit de frapper monnaie. Cette piéce et cette attribution sont a étudier. Notre des- sin en donne les moyens. A6 MEMOIRES Ne 3. —- BOSO GRACIA DEI. Dans le champ REX. #. VIENNA CIVIS. Croix égale. — Argent. Poids : 1°,10. Obole de Bozon frappée à Vienne (pl. IT, n° 3). ‘Cette magnifique obole, presque à fleur de coin, est d’une trop grande rareté pour que nous n’en donnions pas un dessin exact. L’exemplaire de la même pièce, qui appartient à M. Henri Morin, est fruste. N°4. — + K. CO. P. FL RE F (Karolus COmes Provineiæ Filius REgis Francie). Croix dans un grénetis. #. + PVINCIALIS. Chatel tournois moins le pignon, qui est remplacé par un lis. — Argent pur. Denier. Poids : 1 gramme. C'est le type du denier provençal de Charles I de Pro- vence, à l’imitation du denier tournois de saint Louis. La conservation hors ligne de cette pièce permet d’assigner son poids exact, qui est un gramme. Cette monnaie fort rare avait été mal lue, et par suite mal dessinée sur les planches de Saint-Vincens, qui, préec- cupé du titre de roi de Jérusalem , avait vu dans la légende du droit : K. CO. P. IH. R. CE (Karolus comes Provinciæ, Hierosolymæ rex), laissant les deux dernières lettres inex- pliquées et sans se rendre compte, ainsi qu'il arrivait sou- vent alors, que la lettre E ne pouvait, par sa forme, appar- tenir à l'époque de Charles I. Duby, qui n'avait pas vu la pièce en nature, l'a copiée servilement (pl. XCIV, n°4) sur les dessins de Saint-Vincens, et est tombé dans la même erreur, bien que pl. XCIII, n° 44, il ait donné un autre exemplaire du même denier, qu'il a correctement expliqué. La monnaie tournois, toute locale avant saint Louis, n’é- tait pas connue en Provence, où Charles I essaya de l'intro- duire lorsqu'elle fut généralisée par son frère. En outre du ET DISSERTATIONS. A7 denier que nous décrivons , ce prince a fait frapper un gros d'argent dont Saint-Vincens nous donne le dessin sous le n° 3 des monnaies de ce règne. Mais quoique nous retrou- vions la même tentative sous Louis et Jeanne , comme nous le dirons tout à l'heure, cet essai n’a pas prévalu, et le type du carlin l’a emporté à partir de Charles II, pour faire place ensuite & celui du couronnat. N° 5. — + KAROL. SED. REX. Tête de face couronnée de Charles Il. y. -+ IERL : ET: SICIL : Croix à branches égales fleurde- lisées, et recroisettée au cœur. — Billon. Poids : 08,70 (pl. IT, n° A). Cette pièce, frappée à Naples, est reproduite sur notre planche avec une scrupuleuse exactitude, qui relève les erreurs des dessins de Saint-Vincens et de Duby. Ne 6. — CAROL : SCD’: DEI. GRA. IERL’. SICIL’. REX. Écu ordinaire du salut d’or provençal. 3. Type ordinaire du salut.—Or. Poids : 45,40 (pl. II, n° 5). Cette pièce est remarquable en ce que, comme la pré- cédente , elle appartient incontestablement à Charles II, : ainsi que l'indique le mot secundus placé après le nom du prince, et qui, sur les monnaies, est écrit indistinctement SED, ou SCD. On lit sur les esterlings de Henri III d'Angleterre (1216- 4272) : HENRICVS REX III et HENRICVS REX TERCI; -plus tard, Henri IV de Castille (1454-41474) faisait inscrire sur ses monnaies et sur ses sceaux HENRICVS CARTVS. Les papes, à partir de Benoît XI (1303-1504), ont marqué leur rang sur les monnaies. La numismatique sicilienne nous offre : pour Guillaume I] (1166-89), W. REX. II et REX. W. SCD’S; pour Conrad LI (1250-54), CVR SECVNDVS; pour Frédéric III (1296-1337), FREDERIC:T; pour Pierre IR 48 MEMOIRES (1337-42), PETRVS SECVNDVS. Il est à remarquer que le signe distinctif du rang , reproduit sur la plupart des mon- paies de Charles II, se retrouve sur l'éeu d’or frappé en Aragon par Réné (RENATus PRIMus) et sur un billon de Charles HI (KAROLus TERCIVS), dont nous parlerons à leur place : mais le point le plus important de cette pièce est de pouvoir faire attribuer à bon droit à Charles I le salut qui porte le nom royal sans autre indication. Cette circonstance est d'autant plus intéressante qu'il y avait jusqu’à ce jour hésitation dans l'attribution. Au reste, la légende est même inscrite d’une manière différente sur le salut primitif de Charles I, qui porte : KAROL. DEI. GRA. IERLM. SICILIE. REX. Il n’y a donc plus aucun doute sur l'attribution du salut d'or de Charles } et de celui de Charles IF, du moment que la monnaie de celui-ci indique le règne postérieur. N°7. — Imitation italienne ? des lis d'argent de Provence. — Argent. Poids : 85,56 (pl. II, n° 6). Cette pièce ne saurait mieux se comparer, pour son diamètre et son épaisseur, qu'à ces monnaies minces et épatées frappées en Italie pour les Carlovingiens du x° siècle. Les caractères des légendes, qui sont indéchiffrables, offrent même quelque ressemblance avec ceux qui sent gravés sur ces dernières pièces. I] est remarquable que celle que nous décrivons , malgré la grandeur de son format , est beaucoup _ plus légère que le lis d argent ordinaire. Ce curieux spéci- men appartient à M. Henri Morin, de Lyon. Une pièce analogue figure, sous le n° 1201, dans la Description des monnaies seigneuriales françaises, par M. Poey d'Avant. N° 8. + : IOhA : Ih’R : ET : SIC : REG: (Johanna, leru- salem et Siciliæ regina). Buste de face couronné de la reine. Un manteau fleurdelisé couvre ses épaules. ET DISSERTATIONS. h9 y. + COMITSA : PVICE : ET: FORCALQE: Armes de Pro- vence et de Jérusalem. — Florin d or. Poids : 3,50 (pl. II, n° 7). Cette rare pièce, dessinée par Saint-Vincens et copiée par Duby, qui ne l’a pas vue en nature, est admirable de type et de gravure. Nous rectifions ici les irrégularités du dessin de ces deux auteurs. On peut y remarquer le mélange de la forme des A et des E. L'exemplaire que nous avons sous les yeux appartient à M. Henri Morin. La Bibliothéque impériale de Paris en pos- séde un qui a été gravé dans le Trésor de numismatique (Art monétaire , pl. XXIV, n° 9). Il diffère par les dimen- sions du buste. N° 9. — + LVDOVICVS" REX. Croix dans un grènetis. ET : IOhA : REGNA : IhR : ET: SICL’ PVIC : COMTS , en légende extérieure. R. TVRONVS PVICE. Chatel tournois : bordure de douze lis. Type du gros tournois de saint Louis. — Argent pur. Poids : 4 grammes (pl. II, n°8). Cette pièce de Louis et Jeanne, est entièrement inédite. L’exemplaire qui a servi de type à notre dessin est à fleur de coin et appartient à M. Henri Morin. Celui que possède la bibliothèque de Marseille est malheureusement très-rogné. N° 40. — + LVDOVICVS: DEI: GRA: IRLM: Z: SICIL: REX. Écu de France , avec le lambel d'Anjou, timbré d'une couronne. n. + XPS. REX. VEIT. IN. PACE. DEVS. hO. FAC. EST. ( Christus rex venit in pace, Deus homo factus est). Type exact des écus du roi Charles VI. — Or. Poids : 3,80 (pl. Il, n° 9). Cette pièce , imitation exacte des écus d'or de Charles VI 1860.— 1. 4 50 MEMOIRES (4380-1422), ne peut appartenir qu'à Louis II de Provence, son contemporain (1387-1417). Louis I, qui n'avait pris originairement que le titre de duc de Calabre, n'adopta celui de roi de Sicile et de Jérusalem que pendant sa mal- heureuse expédition de Naples, et à partir du 30 août 1383, Or ce prince, étant mort l’année suivante, n'aurait pas eu le temps de copier la monnaie du roi de France; car la circulation restreinte d'alors ne répandait pas les diffé- rents types avec la même rapidité qu'aujourd'hui. On sait que la fabrication des premiers écus d'or de Charles VI date du mois de mars 1384. A l'appui de l'attribution à Louis IT, il faut dire aussi qu'il existe plusieurs variétés de coins de cette pièce, ce qui indique une longue fabrica- tion qui n’a pu avoir lieu sous Lovis I. En 1855, on a dé- couvert à Saint-Sauveur en Puisaye (Yonne) un vase d’étain contenant 48 écus d'or de Charles VI à fleur de coin, et 2 écus de Louis de Provence, semblables à celui que nous venons de décrire. N° 11. — + RENAT9O PRIM9 DEI GRA REX. ARAGO. Buste de face couronné du roi qui tient un sceptre de la main droite, dans un entourage à dix arcs de cercle. 8. + DEVS: IN: ADIVTOR MEVM INTENDE. Écu d’Ara- gon, couronné, dans un entourage à douze arcs de cercle. — Or. Poids : 3 grammes (pl. III, n° 10). N° 42. — RENAT9 P9 DEI GRA RX ARAG. Revers. + DE9.1. ADIVTOR. MEV. ITENDE. — Or. Type de la pièce précédente, dont elle est le quart. Poids : 0,76. (Voy. Revue num., 1840, p. 347, et 1844, p. 286, et sur- tout Gaillard, Catalogue de la collection de Garcia dela Torre, pl. XVIII, n° 4, ce dernier exemplaire trés-complet. ) Sur ces deux pièces, par suite d'un usage commun à l'Espagne et à la Sicile du moyen âge, et que j'ai déjà ET DISSERTATIONS. ‘61 signalé pour les monnaies de Charles II, Réné prend ici l'épithète chronologique de primus : nous retrouverons tout à l'heure la même particularité sur une monnaie de son successeur, inscrite Carolus tercius. Réné, frère et successeur de Louis III, était, comme lui, fils d’Yolande d’ Aragon. Ses droits à ce royaume, sur lequel Louis III n’avait jamais élevé de prétentions, lui seraient donc venus du chef de sa mère. Les Catalans s'étant ré- voltés contre Jean II, roi d'Aragon, offrirent à Réné de passer sous sa domination. Celui-ci leur envoya, en 1467, une armée composée de Lorrains et de Provencaux, com- mandés par son fils Jean, duc de Calabre, qui mourut à Barcelone en 1470, après avoir obtenu de brillants succès. C'est sans doute pendant cette expédition et à son sujet que le comte de Provence , duc de Lorraine et de Bar, nomina- tivement roi de Sicile et de Jérusalem, fit battre de la mou- naie d'or comme roi d'Aragon. Les deux pièces dont je donne ici le dessin sont d’une très-bonne conservation, qui permet de fixer leur poids avec certitude. Mais, par une circonstance qui tient sans doute au peu d'épaisseur du métal, la figure du prince n’est pas sortie sous le coin. Ne 43. — RENATVS : SICILIE : REX: CO: P. Ecu aux armes de Hongrie, Anjou, Jérusalem, etc. Revers.+ SIT: NOMEN. DNI. BENEDITVM. Croix pattée, cantonnée de deux fleurs de lis et de deux couronnes. — Billon. Poids : 3 grammes (pl. III, n° 11). Je n'ai donné ce grand blanc que.comme spécimen, parce que j'ai trouvé en lui, pour la première fois, l'écusson écartelé dans l'entourage à trois cintres des grands blancs a 1f couronne de Charles VIT. En outre, le revers est identi- que avec celui des rois de France et porte sit nomen domini 02 MÉMOIRES benedictum, tandis que tous les exemplaires de blancs aux trois cintres que j'ai sous les yeux sont inscrits au titre de comte de Provence et de Forcalquier. N° 44. — + KAROLVS ANDECAVIE IHRLM SICILIE REX. Buste de sainte Madeleine tenant un vase à la main. x. Tarasque — IN HOC SIGNO VINCES. Double croix de Lorraine, accostée au pied d'un côté d'un K couronné, de l’autre d’un lis avec le Jambel. — Magdalin d'or. Poids : 4sr,80 (pl. III, n° 12). Cette rare monnaie, poétisée autant par le culte de la maison d'Anjou pour sainte Madeleine, qu'une tradition fait mourir en Provence, et qui donna son nom à cette pièce (Magdalena), que par la brièveté d’un règne in extremis, est un des plus curieux monuments de la nu- mismatique provençale. Les quatre fils de Réné étaient morts avant lui, et en vertu de son testament, son neveu, Charles Ill, fut appelé à recueillir sa succession au détri- ment de Yolande d'Anjou, mariée en 1444 à Ferry de Lor- raine, comte de Vaudémont. Mais, attaqué par les Lorrains qui étaient venus à bout de soulever d'importantes villes de Ja Provence, Charles se jeta dans les bras de Louis XI, à qui il légua par testament sa belle couronne comtale. Succédant à Réné en 4480, ce prince mourut en 1481, et avec lui disparut la monnaie provençale , frappée par la province indépendante, dont le nom ne figure plus que comme accessoire sur les pièces fabriquées pour les rois de France. Ainsi que l'indique la farasque placée dans la légende du revers, le magdalin a été frappé à Tarascon, atelier mo- pétaire qui continua à fonctionner jusque sous Louis XII. N° 45. — KAROL TERCIVS DEI GRA. Trois fleurs de lis surmontées du lambel , dans un cercle à huit brisures. ET DISSERTATIONS. | 53 3. —+ IERVSALEM SICIL RX. Croix de Jérusalem canton- née de quatre croisettes. — Argent bas. Poids : 05,7 faible (pl. III, n° 43). | Voilà un curieux et inédit spécimen de la monnaie de Charles III. C'est, ainsi que nous l'avons fait remarquer en parlant du salut d'or de Charles IT, la troisième fois qu’a- vant l'anuée 1481 nous trouvons le numéro d’une série d'un comte de Provence accolé à son nom. Dans les mon- naies royales de France, ce chiffre ordinal ne fut adopté par Louis XII que sur l’un de ses grands blanes et sur ses pièces frappées en Italie, c'est-à-dire environ vingt ans plus tard : mais cet usage, que la maison d’ Anjou avait contracté en Sicile, ne devint général qu'à partir du règne de Henri I]. N° 46. — + HENRICVS HII DG FRANC ET NAV REX. Écu de France timbré d’une couronne fermée, et accosté de deux H majuscules. 8. CAROLVS X DG FRANC REX 1597. Revers ordimaire de Charles X ; croix échancrée, cantonnée de deux lis et de deux couronnes. — Cuivre ou bas billon. Poids; : 4°,35 (pl. III, n° 44). Dans ses Considérations historiques et artistiques sur les monnaies de France, M. B. Fillon dit que « huguenots et « politiques, également ennemis de la ligue, étaient faits « pour s'entendre. La mort de Henri III, ajoute-t-il, hata « la fusion ;» et il appuie son raisonnement sur l'émission — de quelques monnaies exceptionnelles. Il cite, entre autres, un écu d’or frappé à Rouen sans nom de roi, en 1562, époque où cette ville eut à soutenir un siége terrible contre les catholiques’; puis il descend à une pièce analogue 1 Recue numismatique, 1845, p. 556. — Conf. Lecointre-Dupont, Letires sue d'hist, monet, de la Normandie, 1846, p. 87. bA MEMOIRES frappée & Bordeaux en 1643. Je ne suivrai pas le savant auteur dans sa dissertation; mais je suis heureux de pro- duire , entre ces deux dates et à l’appui de son système, la curieuse monnaie toujours mal décrite et mal dessinée , et par suite souvent mise en doute, que possède la biblio- thèque de Marseille, Ce douzain de cuivre rouge, allié au plus bas titre, trouvé dans le midi par M. de Saint-Vincens, ne peut, quoique usé par une longue circulation, laisser aucun doute ni sur sa lecture ni sur son authenticité. Mais une étrange remarque à faire , c'est que cette pièce porte, précisément du côté où se trouve inscrit le nom de Charles X, la date de 1597, tandis que ce prince était mort en 1590. M. Conbrouse (Monnaies tournois, page 75), tout en faisant une erreur de date au sujet de cette mort, nous apprend que plusieurs villes ont monpayé au nom de Charles X jus- qu'en 1594, 1597 et 1598, avant que le duc de Mercœur eût fait sa soumission à Henri IV. N° 17.— MONAST. LERINENSE. P. SEPVL. Buste de saint Benoît à droite. 3. SVB VMBRA SEDI 1667. Les mots sont séparés par des rosaces. Dans le champ, écu couronné aux armes de Lérins. — Argent. Poids : 65,40 (pl. III, n° 15). Pour ne pas m'exposer à copier les notices de Duby, tome II, page 251, et de Saint-Vincens, dans le tome II, page 598, de I’ Histoire de Provence par Papon, je dois ren- voyer à ces deux ouvrages pour tout commentaire sur cette pièce de la plus grande rareté, que ni l’un ni l’autre de ces deux auteurs n'a vue en nature. On y trouvera que le mo- nastère de Saint-Honorat de Lérins , près d’ Antibes, recut, le 28 mars 954, de Guido, comte de Vintimiglia, le lieu dit Sabourg ou Sépulcre, qui se trouve sur le territoire compris aujourd’hui dans les États du roi de Piémont. C'est ET DISSERTATIONS. 55 pour faire allusion à cette possession que notre monnaie porte, après le nom de Lérins, les mots P. SEPVL (princeps sepulcri). Des pièces d’ argent ont été fabriquées au nom de ce monastère par deux abbés différents, en 1667 eten 1671. La nôtre, d’après les auteurs que j'ai cités, aurait été ’ frappée sous le cardinal Louis de Vendôme, abbé com- mandataire, et dom Gésaire Barcillon, abbé régulier, en 1667. N°48. — + ARCHIEPISCOPVS. Dans le champ GAL-DS. en deux lignes, sous une mitre ornée de perles , entourée d'un cercle en grènetis. "og + DEI:GR:ARELATENSIS. Croix feuillue dans un grènetis. — Billon. Poids : 45,20 (pl. Ill, n° 46). Je reproduis cette rare pièce avec une exactitude qui lui rend tout son caractère , défiguré sur les planches de Duby et de Saint-Vincens. Elle appartient à Galhard Saumate, archevêque d’ Arles en 1317. N°49. — : + : SCATERINA : DE: AVRAICA. La princesse assise sur un siége à têtes de lion, et tenant une fleur de la main droite. Type des carlins de Provence. y- +R. D. BAVTIO. PRINCEPS. AVRA. Croix feuillue des carlins ordinaires, ayant aux angles quatre petites croisettes terminées chacune par une hermine. — Argent. Poids : 85,10 (pl. IT, n° 17). Cette pièce, toujours mal lue et mal dessinée, a donné lieu à plusieurs dissertations. M. Duchalais (Revue nu- mismatique de 1844, page 60) rappelle que Duby, sous le n° 2 de la pl. VII du Supplément, écrit la légende de la manière suivante, d'après les dessins de Saint-Vincens : SUATERINA DE AVRAICA. C'est, en effet, la lecture de : Saint-Vincens, et je ne doute pas que cette étrange erreur n'eût été immédiatement relevée par tout numismatiste qui 56 MÉMOIRES aurait vu la pièce en nature. Non-seulement on a défiguré la forme des E et des C , mais encore on doit se demander comment il a été possible de prendre la seconde lettre de la légende pour un U, alors que cette forme n'était pas en usage , et comment ensuite on a pu vouloir donner à cette mème lettre la valeur du V, afin d’arriver à constituer le mot VATERINA. La première lettre est un S parfaitement formé et qui n'aurait pas dû être indiqué par des points comme sil était douteux ou mal venu, ainsi que l'ont fait nos deux auteurs, l'un copiant l’autre. La seconde est, à n'en pas douter, un C fermé, plus visible encore et mieux arrêté sur la pièce que j'ai sous les yeux que par le dessin que j'en donne. Seulement une portion de la partie supé- rieure a été enlevée par l'usure provenant d'une courbure faite au métal. C’est donc bien SCATERINA qu'il faut lire; et dès lors on devra admettre, jusqu'à’ présent, l’explica- tion si ingénieuse de M. Duchalais, et donner cette pièce à Catherine de Courthezon, dame de Baux, en laissant toute- fois la lettre S inexpliquée. En ce qui concerne le revers, je dois dire que, malgré toute l'attention que j'y ai apportée , et par suite d’un léger ressaut fait par le coin, 1] m'est impossible d'affirmer que la première lettre soit un B plutôt qu'un R. La comparaison avec le B voisin du mot BAVTIO n'a pas même pu fixer mon opinion. Gette circonstance, si nécessaire cependant pour l'attribution, va être sans doute discutée par M. Henri Morin. Après sa Numismatique du Dauphiné, ce savant col- lecteur va s'occuper de la monographie des monnaies d'Orange : il possède un dessin scrupuleusement exact de cette pièce, et il faut espérer qu'il arrivera à compléter l'explication de ses deux légendes. AD. CARPENTIN. ET DISSERTATIONS. 57 REMARQUES SUR QUELQUES MONNAIES DECRITES DANS L'ARTICLE PRÉCÉDENT. La pièce de cuivre de Théodebert, qui avait été si singu- lièrement travestie par les numismatistes du siècle dernier, et que M. Carpentin nous restitue, a une grande impor- tance ; elle prouve que l'attribution au même prince d’une autre monnaie de cuivre, portant le monogramme royal au revers du monogramme du Christ, est excellente, et que M. le marquis de Lagoy', qui l'avait proposée, avait deviné juste ; elle atteste que nous ne nous sommes pas trompé en classant au règne de Childebert I la pièce de même style, de même fabrique, sur laquelle on lit HELDEBERT REX *; elle achève enfin de montrer l'authenticité du monnayage de cuivre des fils de Clovis. Ce sujet si curieux a besoin d'être repris dans un article spécial, et la Revue s'en oc- cupera bientôt. 1 M. de Lagoy, Explication de quelques médailles à munogramme, 1843, pl I, n°20,21. — Mélanges de numismatique, 1845, pl.I, n° 10, 19, 20; pl. IT, n° 9.— Recherches sur l'explication des monogrammes de quelques médailles inédites, 1856, pl. n° 9, 10, 11. 3 Notice de la collect. Rousseau, p. 25. 58 MEMOIRES La pièce attribuée à l’abbaye de Saint-Victor est-elle de fabrique méridionale ? C'est là une question difficile à ré- soudre. M. le marquis Édouard de Lagrange possède quelques deniers au même type sur lesquels on lit LANDOLENO VI - CARONNO VIC - VIRCILOI CAS. Mais les monnaies découvertes à Plassac ne sont pas encore pu- bliées, et nous devons nous borner à cette indication. Nous ne sommes pas porté à croire que la monnaie gravée sous le n° 6 de la planche II soit une imitation ita- lienne du lis d'argent de Robert. Les seigneurs du moyen âge avaient à leur disposition tant de ressources lors- qu'il s'agissait de composer une légende analogue à celle d'une monnaie qu'ils voulaient contrefaire, qu’on pourrait à bon droit trouver extraordinaire qu'ils se fussent contentés d'une série inintelligible de caractères. Si, au contraire, nous admettions que cette contrefacon a pour auteurs des Grecs, des Arabes ou des Turcs, habitant les îles de la Mé- diterranée , les côtes de l'Asie Mineure ou de la Syrie, la mauvaise forme donnée aux caractères, leur défaut com- plet de sens s'expliqueraient facilement. On sait que le lis d'argent du roi de Sicile et de Jérusalem avait cours dans tout l'Nrient. On en trouve partout des exemplaires mêlés aux monnaies arabes et arméniennes. Il y a plus, nous sommes certain que les Musulmans ont contrefait le lis d'argent sans s'inquiéter des croix et des fleurs de lis que porte le modèle. M. J. Friedlander a publié la curieuse monnaie que Saroukhan, prince Seldjoukide de Lydie (1299-1345), a fait fabriquer à Magnésie du Sipyle '. 4 Fränkische im Orient geprägle Munzen, dans l'ouvrage intitulé: Beiträge zur dlteren Manzkunde. Berlin , 1851, p. 52. ET DISSERTATIONS. 59 Nous en donnons un nouveau dessin plus complet, d'a- près l’exemplaire qui existe au Cabinet des médailles de la Bibliothèque impériale. On lit sur cette pièce : + MONETA.QVE.FIT.IN MANGLASIA.DE — VOLVNTATE.SARCANI.DNI.DICT.LOCI. Une autre pièce, conservée aussi dans la même collec- tion, a pour légendes avec les mêmes types au droit et au revers : + MONETA: QVE : FIT: MNGLASIE: 0: + : DE VOLVNTE.DNI EIVSDEM : OI: Les incorrections qui se font remarquer dans les Jé- gendes de cette dernière monnaie s'expliquent très-faci- lement. . Si un prince aussi considérable que le fut Saroukhan, qui a laissé son nom à la ville de Magnésie‘, a pris la peine de faire composer par quelque Européen une légende latine , il n’en devait pas être de même chez des contrefac- teurs de bas étage, forcés de se contenter d’une apparence d'inscription. En examinant le lis d'argent qui appartient _ 1 Cette ville porte encore aujourd'hui le nom de Saroukhan. Voy. l'ân- nuaire impérial de l'empire offoman pour 1847, publié par M. Bianchi dans le Journal asiatiqus, 1V* série, t. XI, p. 17, et la note. 60 MEMOIRES à M. Henri Morin, on reconnaîtra que le revers conserve encore assez bien la trace de la légende originale; on petit s'en assurer en plaçant la série de caractères em- preinte sur ce revers en regard de la légende adoptée par Robert : hONOR. REGIS. IVDICIV. DILIGIT 1010 BCOBS IIDICBI DICRII C'est bien ainsi qu'on peut se représenter le résultat ob- tenu par un copiste grec, arabe ou turc. La précieuse monnaie frappée par l'abbé de Saint-Ho- norat de Lérins est très-certainement aussi une imitation, et elle a été frappée au Sabourg, c’est-à-dire en territoire italien. Les actes cités par Duby le prouvent assez claire- ment. | Alberico II Cybo-Malaspina, duc de Massa, contre- faisait le luigino de Guillaume Henri, prince d'Orange, qui était une imitation de celui de mademoiselle de Mont- pensier. Le duc de Massa avait placé dans son écu l'aigle de l'empire au dessus de ses armoiries, accompagnées de deux branches d’épine (mala spina) et un ruban sur lequel est écrit LIBERTAS (4662 à 1667 ) ‘. Jean André III Doria-Landi contrefit, en 1665, le luigino de Massa, en plaçant, de même qu'avait fait Alberico, l'aigle de l'empire au dessus de ses armes, avec un rubar portant la devise DIO LAVDATO. Mais comme les branches d’épine n'avaient pas de sens pour lui, il les remplaça par deux palmes *. 1 Viani, Memorie della famiglia Cybo, 1808, pl. XII »n* 2a6, 2 Ag. Olivicri, Monete dei principi Doria, 1859, tav. III et IV. ET DISSERTATIONS. 6A L'abbé de Lérins, à son tour, a contrefait, en 1667, le luigino de Jean André, son voisin. La crosse et les deux palmes imitent très-bien l’aigle éployé ; la mitre remplace le petit écusson central, et les fanons étendus horizontale- ment tiennent lieu de ruban à devise. Par arrêt du conseil d’État, en date du 4° juillet 1686, il fut enjoint à l’abbé de Lérins d’avoir à cesser la fabrica- tion de ses monnaies. Peut-être ne s'agissait-il que de régulariser l'abolition d’un droit usurpé et négligé ; peut- être aussi les abbés continuaient-ils à faire usage de coins à la date de 1667, afin de fournir encore aux marchés du Levant ces luigini qui, vingt ans auparavant , avaient joui d'une si grande faveur et donné naissance à tant de contrefaçons. Ap. DE LONGPÉRIER. 62 MÉMOIRES GROS TOURNOIS DE JEAN D’ARKEL. Le monument numismatique qui se trouve reproduit ci- dessus est complétement inédit, et, pour cette raison, nous avons cru devoir le mettre en lumière et appeler sur lui l'attention des antiquaires. C’est une imitation parfaite des gros tournois de France. Cette pièce porte, à l'avers : dans le champ, une croix; en légende intérieure, +IOhANNES: DE: ARKIE; et en légende extérieure, +BNDICTV : SIT : NOME: DNI : NRI: - DEI:IhVXPI. Au revers, le châtel tournois surmonté d'une croisette ; en légende intérieure , TVRONVS. CIVIS. et une bordure extérieure de douze fleurs de lis dans des oves. Cette monnaie est en argent fin, ou au moins à un titre très-élevé; son poids est de 78 grains (4”,10); elle doit avoir perdu peu de son poids primitif, sa conservation étant très-bonne. Nous pouvons affirmer que son authenticité est incontes- table. Elle a été trouvée à Catenoy, canton de Liancourt, près Clermont (Oise), et la personne de qui nous la tenons ET DISSERTATIONS. 63 l'a recueillie dans le pays même peu de temps après sa découverte. À défaut même d’un certificat d'origine, son caractère et son aspect sont tels, qu'il n'y a pas à hésiter un instant. L’explication la plus facile de cette monnaie serait par IOHANNES DE... ARKIEpiscopus. Malheureusement il n'existe en France, en Belgique et en Germanie aucun archevéché commençant par DE. Il faut donc en trouver la lecture d'une autre manière. En compulsant les noms des seigneuries, des lieux et des familles nobles de la France et des États étrangers dans lesquels la fabrication des gros tournois a eu lieu, nous n'en voyons qu un seul qui ait une analogie très-grande avec le mot ARKIE qui se trouve sur le gros en question. C'est Arkel en Hollande, pays ou seigneurie dont la capi- tale était Gorcum (Gorichem), et qui renfermait un bourg ou village du même nom d'Arkel, beaucoup plus ancien que la capitale, sans aucun doute, puisque Gorcum n’a été bâti qu'en 1230 par un seigneur d’'Arkel. Voici ce que M. C. P. Serrure dit de ce pays et de ses seigneuries, dans une notice qu'il a faite sur un double noble à la rose de la seconde moitié du xvi* siècle portant les armes de la maison d’Arkel, avec les légendes MON. AVR. DOMINI. DAR; FORTITVDO. NRA. DEVS : « La seigneurie ou pays d Arckel ou Arkel, était située « dans l’ancien comté de Teisterbant (Cuilenburg), entre la « rivière de Lek et la Merwe. Elle était bornée à l'est par « la Gueldre, à l’ouest par la Hollande, au sud par le Bra- « bant, et au nord par l’évéché d'Utrecht. Les seigneurs 1 C’est surtout dans l’est de la France, dans les Pays-Bas et dans Jes con- trécs allemandes voisines du Rhin que le gros tournois a été imité. 6A MEMOIRES u d’Arckel remontent à une antiquité trés-reculée. Ils « étaient célèbres par leur richesse et surtout par leur « grande valeur, qui était héréditaire dans cette famille..... « Que la famille d’Arckel ait eu anciennement le droit de « battre monnaie, cela est probable et même à peu prés cer- u tain. La famille des seigneurs d’Arckel proprement dits « s’est éteinte dans la première moitié du xv° siècle dans la « personne de Jean XIII... » Nous dirons tout d'abord que nous n'avons pas assez de documents historiques sur le pays d’Arkel pour faire l'attri- bution de ce gros à l’un ou l’autre des membres de cette famille du nom de Jean. L'un d'eux, qui fut évéque d’ Utrecht de 1341 à 1364, puis évéque de Liége de 1364 à 1378, date de sa mort, pourrait cependant bien avoir des droits à cette attribution. C'était un prélat zélé, actif et habile. I] obtint de l’empereur Louis de Bavière, pour lui et ses successeurs , le droit de battre monnaie. On sait qu'il répandit le goût des lettres dans son diocèse, et s occupa de soins pacifiques et utiles. Il est donc probable qu'avec de telles dispositions il usa de la concession qui lui avait été faite, et la fabrication d’une aussi bonne monnaie que notre gros tournois aurait bien pu contribuer à sa répu- tation. Si le gros dont il s’agit appartient bien à cet évêque, il est certain qu il a été frappé pendant qu'il occupait le siége d'Utrecht, d'abord à cause du haut titre de la pièce qui indique qu'elle a été frappée quand les gros tournois étaient encore d'un très-bon aloi, et ensuite parce qu'on connaît ! des gros frappés à Saint-Pierre et à Tongres au nom de 1 Histoire numismatique de l'évêché et principauté de Liéye, par le comte de Renesse-Breidbach, pl. VIII, e ET DISSERTATIONS. 65 Jean d’Arkel, comme évêque de Liége , et qui sont faits à Yimitation des monnaies anglaises *. Passant maintenant à ]’examen de la légende, nous ferons observer que le nom d’Arkel est hollandais et flamand, et que lorsqu'il est écrit Arckel, c’est qu'on a suivi l’ortho- graphe allemande , dans laquelle on ne peut pas placer un K après une autre lettre sans interposer un C; ainsi les trois lettres ARK de la légende s'appliquent bien et entière- ment à la lecture que nous proposons. Le sens des deux dernières est plus douteux ; en examinant la position rela- tive des lettres de la légende, on voit que le graveur, ayant un peu trop espacé les premières, a rapproché d’une ma- niére sensible les dernières, et qu'il a pu, au lieu d’un L, faire un I*, qui tient moins de place : changement qui se 1 Il est assez singulier que les deux seules monnaies du moyen âge que nous ayons recueillies à Catenoy n’appartiennent pas à la série royale, et viennent toutes deux de la même région : ce sont le gros en question et un heaume de billon de Louis de Mâle, comte de Flandre (1346-1383), très-bien conservé et trouvé antérieurement seul aussi. C’est peut-être un pur husard, ces monnaies ayant circulé assez souvent de pair avec les monnaies royales ; peut-être aussi pouvons-nous expliquer comment il se sera répandu dans le pays un grand nombre de monnaies de la Flandre et des pays voisins par un épisode de la Jacquerie que nous trouvons dans les Chroniques de Froissart (liv. I**, 2° partie, ch. LX VI). Il rapporte que les gentilshommes du Beauvoisis et des environs mandèrent secours contre ces furieux paysans qu'on appelait Jacques, leurs amis de Flandre, Hainaut, Brabant et Hasbaing, qu'il en vint un très-grand nombre, et que le roi de Navarre mit à fin plus de trois mille Jacques, près de Clermont en Beauvoisis. Le lieu de cette défaite est situé sur le territoire de Catenoy, et porte encore le nom de champ ds bataille. Si ces monnaies ont été apportées par les troupes étrangères qui sont venues aider à la destruction de la Jacquerie, elles sont antérieures à l'an 1358, date de leur défaite à Catenoy. * Sur la pièce I'l et l’E semblent être réunis par le Las au moyen d'un petit trait qn’on pourrait croire être une partie de la barre horizontale de l’L: mais je pense que cet effet est produit par un grattage qui a eu lieu en cet endroit et qui a élargi l’épatement de l'T en diminuant sa hauteur, 1860. — 1. 5 66 MÉMOIRES rencontre assez souvent sur les monnaies du moyen âge; l'E qui suit serait linitiale d’ Episcopus, la lecture serait alors : IOHANNES. DE. ARKeL Episcopus, et notre pièce appartiendrait à Jean IV, évèque d'Utrecht. Il ne faut peut-être même pas donner à ces deux der- nières lettres une grande importance sous le rapport du sens de la légende. Le graveur, après avoir formé les trois premières lettres ARK , qui ont pu paraître suffisantes pour distinguer l'autorité qui faisait frapper cette monnaie , a pu y ajouter les caractères IE pour former, avec la croisette qui se trouve à la suite, l'apparence du mot REX qu’on voit sur les gros tournois des rois de France. Nous pouvons citer à l'appui de cette explication, qui paraît au premier abord très-hasardée, des faits qui lui donneront, nous croyons, une grande apparence de certitude. Ferri IV, duc de Lorraine (1312-1328), faisait frapper des gros sur lesquels on a gravé PhIRICVS DEVX ou LVTORINGIE DVX, afin de produire à peu près l'effet des légendes PHILIPPVS REX , LVDOVICVS REX :. Un autre gros, publié par Mader *, porte la légende PHETRVS EPVS X. Cet auteur l’attribuait à Pierre, évêque de Saintes (1281-1287). Mais M. Lelewel* a depuis long- temps proposé de le restituer à:Pierre III, archevêque de Cambrai (1307-1323), en même temps qu'il proposait d’at- tribuer à Eberhard , évéque de Munster, les deux gros tour- nois à la légende EBIRHDVS D. EPIS et EB’ARDVS DE EPS que Mader avait donnés à un Eberhard. évèque de Die, qui n’a jamais existé. 1 De Sauley, Monnaies des durs de Lorraine, pl. 1V, n°° 8 et 9. 2 Kritische Beyträge zur Münzkunde des Mittelaiters, tome V, pl. I, n°8 et 9, et pl. II, n° 11. ° 3 Numismalique du moyen dye, tome 1, notes suppiémentaires, p. xx. ET DISSERTATIONS. . 67 M. Lelewel pensait que l’X qui termine la légende PhETRVS EPVS X avait été placée là pour remplir le vide. M. de Longpérier a fait remarquer (Rev.num.,1839, p. 256) que cette lettre, qu'on a crue être l'initiale du nom de Saintes, n’a pour fonction, comme l’h introduit dans le nam de Petrus, que de rendre le gros épiscopal plus sem- blable à la monnaie royale dont la légende commence par Ph et finit par REX. On connaît un grand nombre d'autres exemples d’arrangements introduits dans les légendes mo- nétaires pour arriver à l’imitation des pièces qui avaient un cours bien établi. N. POoNTHIEUX. \ 68 ° MÉMOIRES SUR QUELQUES MONNAIRS INEDITES DB L'ADRERBAINIUT, Suite, — Voyez le n° 6 de 1859, p. 476. (PI. XXII, 1859. Kiz Arstan (dès 568, seul 582-587). Jusqu’a présent on ne connaît que deux variétés de types de ce prince; nous pouvons en ajouter une troisième , mal- heureusement rendue incomplète par une surfrappe. 3. — Au droit : el) LL at] eb Y.... Sous la surfrappe il reste .. }} sCUl!. Le nom du sultan Seldjoukide est sans nul doute celui de Togrul. Revers : A\L wed Ma. Je présume que c’est icile nom patronymique 53 Sut illle- ghiz). Nous voyons ici paraître pour la première fois la sin- gulière Tamgha (signe symbolique ou devise) qu'on retrouve sur lesmonnaiessubséquentes des Atabeks de I’ Adherbaidjan. Fraehn décrit dans son Supplément (p. 274, n° 6b) une autre monnaie de Kizl Arslan assez étrange par son type, et dans laquelle le nom du prince n'est accompagné ni du ET DISSERTATIONS. 69 titre d’atabek ni de celui de roi; il est seulement suivi ‘par un nouveau nom, celui de Mohammed, dont l'attribution est restée incertaine. Il me semblerait assez naturel d'y voir celui de Mohammed Pelhouwan, qui partagea le pou- voir avec son frère Kizl; l’un plus particulièrement chargé du gouvernement de l'empire , le second de l'armée ‘ ; mais cette attribution, en apparence si simple, devient plus dif- ficile à mes yeux depuis que je dois à l'amitié de M. le mar- quis de Lagoy un exemplaire plus complet de cette curieuse monnaie, où se trouve un nom patronymique qui n'a rien de commun avec celui d'Ildeghis. En voici la description : 4h. — Au droit, cavalier galopant à gauche et décochant une flèche derrière lui. 3. Dans le champ : au Marge (Set 7) J } ab ball! lbh... Les mots eii- tre parenthèses se trouvent sur l’exemplaire décrit par Fraebn (fig. A). On pourrait admettre à la rigueur que Mohammed, tenant par sa mère à la famille des Seldjoukides , s’est donné le nom de Seldjouk , de même que nous avons des monnaies des fils de Bouweïh ; mais le nom patronymique est un peu effacé , et il est possible que la découverte d’un meilleur exemplaire vienne détruire cette hypothèse, ABOUBEKR (587-594). Fraehn n'a décrit qu'une seule monnaie de ce prince ; elle se retrouve parmi celles que M. de Bartholomæi a re- 1 Weil, t. III, p. 341. 70 MEMOIRES cueillies : en voici une plus importante encore, parce que la lecture de la localité ne laisse aucun doute, et qu'elle est accompagnée d'une date. 5. — (Pl. XXII, n°5.) Droit: J>,ls dans le segment supérieur ; rien dans les autres. Dans le champ : nr’. Dans le champ : AY) NT EN an {| op thhedt WT Soar) dyer ac Ni Las sls ST gs pel (or) 5% >! Dans les segments : en bas, a; à droite, a)... pour ey! en haut, x. ; le mot de gauche est effacé proba- blement Wye. Ardebil, l'an (5)94. Cette pièce, indépendamment de l'étrangeté du type, offre des particularités assez remarquables; le titre d’ Atabek est remplacé par celui de Schah des Schahs (roi des rois ). En outre , le seigneur suzerain n’est indiqué à la première ligne que par son titre pal] JB). Ce ne peut plus être Togrul détrôné en 590, c'est le sultan de Kharisme Munkberny. Uzpex ( 607 - 622 ). Fraehn a fait connaître cinq monnaies de ce prince, toutes plus ou moins tronquées et de types fort simples. Nous pouvons en ajouter une nouvelle. 6. — Droit : pt polit nt yer] AN] 8. Dans le champ, entouré d’un double filet circulaire. ET DISSERTATIONS. 71 >» pour ;! se retrouve parmi les pièces décrites par Fraebn. 1] ne reste dans la légende marginale que le mot wis (Péhlouwan) qu'on puisse déchiffrer. Rois d Ahar. L'histoire fait mention de plusieurs Mamelouks des Ata- beks Ildeghis qui se sont rendus plus ou moins indépen- dants de leurs maîtres; mais les renseignements nous font défaut pour ceux qui résidaient dans la ville d’Ahar, et qui paraissent avoir été les plus puissants de tous, puisqu’ils ont fondé une dynastie proprement dite; leurs monnaies, déjà signalées par Fraehn, ne laissent plus aucun doute à cet égard, depuis la découverte d'exemplaires plus com- plets, et surtout d’une pièce postérieure à la destruction des Atabeks. N&TCBEGHIN, FILS DE MOHAMMED. 4. —Fels frappé à Ahar l’an 594. Dans le champ du droit : OY Jy AN Jen, Jo ile di Le Dans les segments: en bas, .,2.{1 1. Dans les au- tres, il y a, d’après M. de Bartholomæi, à droite, L5 3 en haut, ul, peu distincts sur mon exemplaire; celui. de gauche est entièrement effacé. a. Dans le champ : EL Sn] eo” Jo y 9! Lal ach 72 MEMOIRES Dans les segments: en bas, cet! ye! yrs en haut, din pb yo: à gauche, es 5 @ PE à droite, Tamgha. La forme de cette tamgha est très caractéristique etdiffére assez de celle qu’on observe sur les monnaies des Atabeks. Les légendes ont été complétées à l’aide de troisexemplaires. La lecture de Nechteghin, proposée par Fraehn, n’est pas admissible, comme il est facile de s’en assurer par la posi- tion de la lettre , , qui n'occupe que la troisième place. Cette monnaie est probablement la même que celle dé- crite dans le Supplément, par 276, n° 6ah. Si la lecture des deux segments Jzz eddounia oua eddin de l’avers est exacte, je ne saurais à quel autre prince l'attribuer qu'à Netche- ghin lui-méme; mais alors il se serait donné un double titre, puisque nous le voyons figurer au revers comme appui de l’émir des fidèles. MAHMOUD, FILS DE NETCHEGHIN. 2, — Fels frappé à Ahar l’an 623 (pl. XXII n° 6). D'a- près trois exemplaires se complétant l’un par l'autre. Au droit, dans le champ, comme dans la monnaie précé- dente. Dans les segments, on lit: en bas, . pol! ,1; à droite, mm pole yo; en haut’, wry LV ; à gau- che, als à #. Dans le champ : hi QU Sea" gy? 26)! ey ges Sr ope. ont B poe) 1 Cette date est fixée d’après un exemplaire de l’Ermitage ; du reste, je la retrouve très-distincte sur la variété suivante. Fraehn donne la date 612. L’exemplaire décrit dans le premier supplément Recensio, p. 618, n'offre que le nombre unitaire trois, et paraît devoir être le même que le nôtre. ET DISSERTATIONS. 73 Dans les segments : en bas, 5$ > cpt ups en haut y! ai ; à gauche, 11; à droite, Tumgha. 3. — Fels de la méme année, mais avec une variante dans la distribution de la date; à l’avers on lit dans les segments : à droite, “oS s.; en haut, ..p C'est en 622 qu’eut lieu la conquête de Tebris par les Kharismiens , et avec cette date cesse la domination des Atabeks ; Djelal eddin Munkberny s’empara en mème temps de la femme d’Uzbek et de ses Etats; le prince dépossédé se réfugia dans le voisinage de Nakhdjewan, où il ne tarda pas à mourir; d'après nos monnaies, on voit qu'il vécut jusqu'en 623, et que pendant quelques mois encore Mahmoud eut Ie courage de reconnaître sa suzeraineté : la monnaie suivante, postérieure à la mort d’Uzhek et frappée en l'honneur de Munkberny, ne laisse plus aucun doute sur l'existence des rois d’Ahar comme dynastie distincte de celle des Atabeks. A. — (PI. XXII, n° 7 ). Le type du droit est semblable aux précédents, mais le nom de la localité est effacé ; il ne reste de la date que le nombre centenaire lw. 3. Dans le champ : he JUL Déjà au commencement de son règne, en 644, Uzbek avait été contraint de reconnaitre la suzeraineté du Kharis- mien Mohammed‘ sur sa monnaie; mais cette marque de 1 Weil, t. III, p. 351, 7h MEMOIRES soumission dut être fort passagère, puisque nous n'en re- trouvons pas de traces sur les monnaies à nous connues de ce prince, non plus que sur celles contemporaines des rois d’Ahar, qui auraient dû imiter son exemple. Les détails qui précèdent sont riches en documents im- portants pour l'histoire, et suffisent pour démontrer, mon- sieur et cher ami, toute l'utilité des recherches locales que vous avez encouragées : de nouveaux envois, tout aussi précieux que celui dont nous venons de nous occuper, doi- vent être venus depuis lors enrichir le Cabinet. Une lettre fort intéressante de M. de Bartholomei m'apprend en particulier la découverte d'un trésor de cing cents monnaies d'argent, faite, il y a quelques mois, dans le voisinage du lac Gogtscha (entre Érivan et Tiflis). Le prince lieutenant, qui porte un vif intérêt à la conservation des antiquités de la Géorgie, a partagé ce trésor entre l'Ermitage et le Musée de la Société géograghique de Tiflis; M. de Bartholomei, chargé du soin de l’étudier, a reconnu qu'il était entière- ment composé de monnaies djélaïrides, jusqu'à présent fort rares dans les collections, et d'une cinquantaine de pièces appartenant au Modhafféride Schah Soudjah. Si les types sont déjà pour la plupart connus, il n'en est pas moins important, pour l'étude de l’histoire et de la géogra- phie , de prendre note des nombreuses localités monétaires qui viennent s'ajouter à celles dont nous devons déjà la connaissance aux travaux de MM. Fraehn et Sawelief. Parmi les monnaies de Scheik Oweis frappées entre les années 762 a 776, on voit figurer Tebris, Bagdad, Schamaky, Scha- beran, Bakouweih, Ani, Nakhdjewan, Thous, Berdaa, Ardebil, Sultania, Khoi, Kaswin et quatre autres localités indéterminées. Les monnaies de Houssein, en nombre égal aux précédentes , appartiennent presque toutes a Tebris; ET DISSERTATIONS. 75 les autres sont frappées à Selmas, Iroumy, Van, Mera- gha, Khoi, Kaswin, Thous, Alep, Bagdad, Schaberan, Schamakhy, Ardebil, Berdaa, Nakhdjewan , Ani et huit autres villes à déterminer, toutes de la seule année 777. Enfin les monnaies modhafférides, aussi de l’année 777, sont toutes frappées à Tebris, à ]’exception d’une demi- douzaine frappées à Meragha, Nakhdjewan et deux villes incertaines. Je ne mets pas en doute qu’il ne soit possible d'arriver à la véritable attribution de la plupart de ces localités, mais je ne crois pas qu'il soit prudent de se per- mettre des conjectures sans avoir sous les yeux les pièces originales ou des dessins exacts ; c'est un travail qui reste à faire, et que personne n’est.mieux en état d'entreprendre que le général, notre savant ami. Agréez, etc. F. Sorer. Genève, mars 1859, POST-SCRIPTUM. Postérieurement à l'envoi de cette lettre à la rédaction de la Revue numismatique, j'ai reçu de M. le général de Bartholomæi une communication fort intéressante relative à cette dynastie nouvelle que j'ai supposée pouvoir se rat- tacher aux Seldjoukides, et dont la domination ne paraît pas s’être étendue au delà des limites du Karabagh. Voici l'analyse de cette communication. Les monnaies de ces roi- telets ne se rencontrent que dans la région caucasienne li- mitée à l’orient par Derbend et Bakou, à l'occident par Nakhdjewan et pas au delà de cette ville; M. de Bartholo- mei n’en a point rencontré dans l’Anatolie ni parmi les monnaies de leurs contemporains les Atabeks; quant à la 76 MEMOIRES possibilité d'une petite dynastie indépendante dans le Ka- rabagh, et contemporaine des premiers schahs du Schirwan et des Ildeghis, elle n’est point infirmée par le peu de données historiques qu’on a sur cette époque; une lettre de M. Khanikoff adressée à M. Dorn mentionne les faits sui- vants empruntés à des auteurs contemporains. Ahistan [*, fils et successeur de Minoutcher qui avait régné trente ans, fixa sa résidence à Bakou, tandis que la capitale du Schir- wan, Schamakhy, tomba au pouvoir des Atabeks del’ Adher- baidjan; c'est là que Kizl Arslan se réfugia pour se mettre plus à l’abri des atteintes des Seldjoukides qu'il ne pouvait l'être dans sa résidence de Nakhdjewan. Le règne d’Ahistan I** se rapporte aux années 630-585. Les monnaies les plus anciennes de la nouvelle dynastie en question lui sont contemporaines, puisqu'on en rencontre qui portent les dates des années 555 et 558, tandis que ‘les plus récentes se rapportent aux dix premières années du - règne du khalife En Naser-lidin-illah jusqu'en 585. L’ar- rivée del’ Atabek Kizl Arslan à Schamakhy doit avoir eu lieu entre les années 582 à 587, probablement à cette dernière date, et avoir mis fin à la domination passagère de ces roitelets qui auront profité des luttes entre les Atabeks, les princes de Géorgie, des schahs du Schirwan pour s'emparer du Karabagh proprement dit. C’est une marge d'environ tente ans pour l'existence de cette dynastie, et si les histo- riens qui ont raconté l'histoire des guerres. de Giorghi III avec les schahs du Schirwan n’en ont pas fait une mention. plus spéciale, c'est qu'il est tout à fait à présumer qu'ils ont considéré comme tels ces roitelets, et les ont confondus avec la dynastie qui règnait à Bakou. Les plus anciennes. monnaies connues des schahs du Schirwan ne remontent qu’au règne de Kerchasp au vit siècle ; elles sont aussi en ET DISSERTATIONS. 77 cuivre, et ont la plus grande analogie de forme et de types avec celles du Karabagh : on y voit la même origine. Quant aux noms des khalifes qui se lisent sur les revers de ces fels, celui d'El-Mostandjed, accompagnant Modhaffer aux an- nées 555 et 556, n’est point un anachronisme. La présence du nom de Moktafi-biamr-illah sur les monnaies de Beybars - paraît être une erreur du graveur, peut-être intention- nelle, puisqu'on observe le même fait sur les monnaies géorgiennes. Quelques rares exemplaires de Beybars por- tent le nom d’El-Mostadhy, mais le plus grand nombre de ces monnaies ainsi que celles d’Abdulmelik, qui ne doit avoir régné que pendant trés-peu de temps, sont frappées sous le khalife En-Nacer. En terminant ce rapide extrait de la communication que nous avons reçue, il nous est précieux de pouvoir ajouter que M. de Bartholomæi prépare un grand travail sur les nombreuses monnaies orientales inédites qu'il a pu recueillir dans son voyage en Perse, et dans lequel nous avons tout lieu d'espérer que nous rencontrerons des monnaies de YAdherbaidjan et du Caucase plus complètes et plus inté- ressantes encore que celles dont il nous a été donné de pouvoir publier la description. F. S. BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE. 79 Les fouilles du Lodo ont procuré une pièce de Maximien, une de Constance-Chlore, cing de Constantin, trois avec la légende VRBS ROMA, cinq avec CONSTANTINOPOLIS, quatre de Constantin le Jeune, une de Crispus, quatre de Constant, une de Constance, trois de Magnence. Ces pièces portent à l'exergue des marques d’ateliers que M. Lallemand interprète d’une façon tout à fait arbitraire. | B. Signe monétaire de Nicomédie. T.P. Trevirorum [monetæ) pr'ocurator. P.T R. Procurator (monete) Trevirorum. RPP. Romanz pecuniæ procurator. PBC. Procurator (monet) Byzantii Constantinopolis. S.CONST. Sacra ‘moneta) Constantinopolts. P.CONST. Procurator (monet) Constantinopolis. TF. (Deux gamma additionnés). Sixième année de Licinius (p. 439). P.LC. Procurator (monet) Lugdunensis. S.TR. Sacra (moneta) Trevirorum. COS. Consul (p. 144). TRS. Trevirorum sacra (moneta). Nous avions l’intention de faire voir combien de semblables interprétations qui se reproduisent souvent sont en désaccord avec les notions que fournissent l’étude des monnaies et l'épi- graphie telle que la seconde moitié de notre siècle parvient à la constituer. lorsqu’en consultant pour un fait topographique l'ouvrage de M. Estrangin intitulé £'tudes archéologiques , his- toriques et statistiques sur Arles ( Aix, 4838), nous avons eu la bonne fortune d’y rencontrer (p. 156) une lettre adressée à l'auteur par M. le marquis de Lagoy, dans laquelle la question est traitée fort nettement. Notre savant collaborateur ne nous a jamais révélé lexistence de cette lettre, que nous aurions dû citer plus d’une fois, et qui demeure oubliée par suite de l’im- pardonnable modestie de son auteur. | 80 BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE. Voici en quels termes s’exprime M. de Lagoy: «L'on voit dans la Nofitta imperii qu’Arles était l’une des six villes de l’Occidént où résidait un intendant des monnaies (procurator monetæ). Tout porte à croire que cet établissement a été formé à Arles par Constantin, qui, comme on le sait bien, s'était plu à embellir et à enrichir cette ville à laquelle il avait donné son nom. Ce sont effectivement les médailles de Constantin et de Licinius, son collègue à l'empire, qui nous offrent pour la première fois le nom d’Arles en abréviation. « Voici la manière dont l’hôtel des monnaies d’Arles est dési- gné sur les médailles des trois métaux de Licinius, Constantinus, Crispus, Constantinus junior, Constans, Constantius II, Ma- gnentius, Constantius Gallus, Helena, Jovianus, Gratianus, ainsi qu’on peut le voir dans Banduri, mais surtout dans Occo. Après les empereurs que je viens de nommer, je crois que l’on adopta une autre manière pour désigner la fabrication arlésienne; mais cela nécessiterait un trop long développement. a AR—ARL —PARL—P*AR—SAR—S. AR—S.ARL—S*ARL —TAR—T.AR— ARL.T—Q.AR—Q'AR— Q.ARL. — Sous Gra- tien , OF.AR.S. a Jobert {Il° vol., p. 42), Mangeart ( p. 429) et Occo (p. 502) s’accordent sur l’explication de ces lettres, qui sont toujours placées à l’exergue du revers des médailles; selon eux, P*AR, PARL signifient Pecunia ARelatensis ou Percussa ( moneta) ARelate;—SAR, S.ARL , Signata (moneta) ARelate ; — T.AR, Tertia (officina) ARelatensis — Q AR, Quinta (officina) ARela- tensis. a L’explication de ces savants ne me parait pas satisfaisante, en ce qu’elle ne suit pas une marche uniforme, puisqu'elle sous- entend tantôt un mot, tantôt un autre. Voici une explication plus simple et plus naturelle, que je m'étonne que l'on n'ait pas donnée. Je vous propose d'expliquer les P, S,T, Q qui précèdent l’abréviation du nom d’Arles par (officina) Prima, Secunda, Tertia, Quarta. La lettre numérale grecque I dans BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE. 81 ARL]". désignera le troisième atelier monétaire; OF.AR.S sera OF ficina ARelatensis Secunda. « L’on ne peut pas douter que, dans chaque ville monétaire, la fabrication était partagée en plusieurs ateliers ou officines. Eckhel ( VIU® vol., p. 151) cite les médailles de Valentinien, Valens et Gratien, sur lesquelles ces officines sont indiquées par OF. II—OF.III., etc., et encore de cette manière sur des mon- naies frappées à Rome, R.PRIMA (Roma prima officina) , R.SECVNDA. — R.TERTIA. — R.QVARTA. Voilà bien, en toutes lettres, l’explication de nos abréviations P.S.T.Q. Plu- sieurs villes de l’Orient ont désigné leurs officines par les lettres numérales A.B.T. A.» Insérée dans cette Revue, la lettre de notre savant collabora- teur épargnera désormais aux numismatistes les regrets que cause une ingratitude involontaire. À. L. 1860.— 1. 6 CHRONIQUE. VENTE Des Médailles grecques de ta eollection de lord Northwiek. Cette vente a eu lieu à Londres le 5 décembre 1859 et jours suivants. Le catalogue, rédigé avec beaucoup de soin, contient 4625 numéros; il y a dans le nombre des lots de 3, 4, 10, 40 et jusqu’à 100, 150, 400 et 500 pièces. Quelques-unes des mé- dailles ont été portées par les enchères à des prix inouis. Ces prix exceptionnels sont dus uniquement au caprice et à la fan- taisie; aucune considération scientifique n’entre dans les vues des personnes qui achètent des médailles antiques, à eause de leur conservation extraordinaire et, quelquefois même, à cause de leur forme plus ou moins régulière. Aujourd’hui ib semble que ce soient les médailles grecques et romaines à fleur de coin, même les moins rares, les moins intéressantes, qui jouissent de la vogue en Angleterre. On néglige les pièces vraiment curieuses ct importantes au point de vue historique et l’on ne s'attache qu’à la forme et à la conservation. Les monnaies qui ont trait à l'histoire d'Angleterre, à partir de l’empire romain, continuent à intéresser les amateurs anglais ; mais les monnaies françaises, royales ou baronales, ne sont appréciées qu’en France et l’on peat dire même que les médailles grecques et romaines sont recherchées par plus de véritables amateurs et avec plus de CHRONIQUE. 83 constance en France qu’en Angleterre. Un de nos collaborateurs, M. Sabatier ‘, a fourni des preuves à l'appui de cette obser- vation. Voici quelques-uns des prix * qu’ont atteints les médailles de la collection de lord Northwick : x. 29. Alba du Latium. Tête de Mercure. ». Cheval. Arg. 3........ . se ss. 36. Freternum (!). Téte de Junon, de face. y. FENSERNV (caractères osques). Bellérophon combattant la Chimére. 47g. 4... .. .... . (J. Friedlander , Oskischen Münzen, pl. VIII, 1) 41. Cumes. Téte de lion de face entre deux tétes de san- glier de profil. y. Coquille et grain d’orge. 47g. Drachme. .... (Millingen, Ancient greek coins, London, 1831, in-4°, pl. I, 4.) 46. Cumes. Tête de nymphe, droite. y. Taureau à face humaine. .47g. Drachme. . . . .. (Mionnct, t. I, p. 114, n° 143.) 53. Nuceria-Alfaterna. Tête cornue du fleuve Sarnus à gauche 8. Un des Dioscures, tenant son cheval par la bride. Arg. Didrachme. ............... ... 55. Phistelia. Téte, de face, d’une déesse à longs che- veux. | #. Taureau à face humaine. Arg. Didrachme. . . (J. Friedlander, pl. V, 2.) 64. Aquinum. Téte de Pallas. . Coq debout et astre. Æsernia. Tête de Mercure. a. Bige. Autre. Téte d’Apollon. RW. Taureau à face humaine. 1 Recuenum., 1859, p. 304. 3 La livre sterling est calculée sur le pied de 25 fr. 46 25 62 50 84 CRRONIQUE. Numéros. Aquilenia. Tête de Minerve, à droite. n. Soldat debout, tenant une patère, à gauche. (J. Friedländler, pl. V.) | Cinq pièces de bronze... . 2.2. ce ee ee roe 76. Tarente. Tête de nymphe, à gauche. nH. TAPA. Cavalier, à droite, couronné par la Vic- toire. Or4............ ee ew ewww ewe ° 77. Autre exemplaire. O7 3 1/4 ........... oe 80. Tarente. TAPAS. Téte de nymphe, à gauche. À. Taras sur le dauphin. Or 2 3/4.........- 86. Bruttii. Téte de Neptune, à gauche. A. Néréide sur un hippocampe. Or 3. . . ... . .. (Noehden’s Selection of ancient coins from the Cabinet of lord Northwick, part. I, pl. I, 1824- 1825. ) | 100. Laïüs. Taureau à face humaine, à droite. N. Même type incus. Arg. 6. ........... (Millingen, Considéralions sur la numismatique de l'ancienne Italie, p. 51, Florence, 1841, a restitué cette pièce à Laiis.) 101. Métaponte. Tête casquée du héros Leucippus, à droite. y. Epi. Arg. Tétradrachme. ............ 112. Sybaris. ZY, Taureau. x. Même type incus. Arg. 7............ 160. Locri-Epizephyrii. Tête de Jupiter, à gauche. %. AOKPON POMA TIISTIZ, 4rg.41/2........ 171. Rbegium. Tête de lion. x. Jupiter assis. Arg. Tétradrachme. ....... 197. Mesma. Téte de nymphe, à droite. ñ. Le chasseur Æsarus assis sur un rocher, à gauche, et accompagné d’un chien. Br. 5 .... (Voy. Rev. num., 1839, p. 412. ) 204. Agrigente. Aigle dévorant un serpent. 4. Crabe. Or 11/2................. ( Torremuzza , tab. IV, 8.) 206. Syracuse. ZEYZ EAEY6EPIOZ. Téte de Jupiter Eleu- therius, à gauche. 125 #» 1100 » CHRONIQUE. 85 Naméros. fr. c. wy. Cheval ailé. Or2.........,....,.... 337 50 (Torremuzza, tab. LX VIII, 1.) 209. Syracuse. XQTEIPA. Tête de Diane, à droite. ». Tête d'Apollon, à gauche. Or 4 .........- 362 50 ( Torremuzza, tab. LX VIII, 4.) 210. Autre exemplaire. Or 4. ............... 675 » ( Torremuzza, tab. LXVTI, 3.} Plusieurs autres piéces d’or de Syracuse, offrant des variétés dans les types n'ont été vendues que dans les prix de ............. 4... LOA 130 » 217. Syracuse. Téte casquée de Pallas, à gauche. » Diane accompagnée d’un chien de chasse. Or 2.. 600 » (Torremuzza, tab. LXVIII, 18.) 218. Syracuse. Tête de Coré, à gauche. 3. Hercule étouffant le lion. Or 2 1/2... ...... 500 » (Torremuzsa , tab. LXVIII, 21.) 219. Autre exemplaire. Mémes types. Or 2........ 175 » 230. Siculi in genere. Tête de Cérès, à gauche. w. ZIKEAIQTAN. Victoire dans un quadrige. Arg. 51H... ose... 662 50 (Torremuzza, tab. I, 1.) 234. Agrigente. Scylla. Au-dessus crabe. 8. Deux aigtes dévorant un lièvre. 47g. 9.... .. 3975 » (Torremuzza, tab. V, 1. — Noehden’s Selections, part. I, pl. 3.) 2365. Agrigente. Aigle dévorant un lièvre. 8. Dorade et crabe. A4rg. 7. .....,...... 1500 » (Forremuzza, 4uct. 1, tab. I, 2.) 244. Alesa, AAAI. Bacchus debout. A. ZOTEP (rétrograde). Jupiter assis. Arg. Obole. 375 » 246. Camarina. Casque et bouclier rond. 3. KAMAPI. Deux palmes entre deux cnémides. Arg. 5. ° oe 28 @ . © @ @ oe &® «= © @« « @ 350 ”"- 251. Camarina. Tête d' Hercule, à gauche. 3% Quadrige. 4rg. 7 ........... ‘ . 562 50 (Torremuzza, tab. XVII, 7. — Noebden's Selec tion, part. I, pl. 5.) 86 CHRONIQUE. Naméros. fr. c. 252. Camarina. Téte cornue du fleuve Hipparis, de face. 8. Vénus sur le cygne. Arg. 5 1/3 ........ 1300 » (Torremuzza , tab. XVIII, 3.) 258. Catane. Téte d’Apollon, à gauche. #. Quadrige. Victoire volant et portant une tablette sur laquelle est inscrit le nom du graveur EYAIN (Évenète). Arg. Tétradrachme . ........ 1300 » (Torremuzza, tab. XX, 4.) 259. Catane. Tête d’Apollon. . Quadrige. Arg. Tétradrachme.......... 1125 » 264. Catane. Victoire debout. A. Taureau à face humaine. 4rg. Tétradrachme. . 1250 » (Torremuzza, tab. XXI, 7.) 265. Catane. AMENANOS. Tête cornue du fleuve Amena- nus, à gauche. #. Quadrige. 4rg. Drachme. . .......,. .. 262 50 (Torremuzza, tab. XX, 8.) 273. Eryx. Aigle debout sur un chapiteau de colonne.. yh. Crabe. drg. Drachme..........2.... 225 » (Torremuzza, tab. XXX, 4.) 279. Géla. ZOZINOAIS (rétrograde). Partie antérieure d'un taureau à face humaine, couronné par une nymphe. ». Bige. Arg. Tétradrachme. . . . . ee ee eee 500 » (Torremuzza, tab. XXXII, 1.) 288. Himéra. Héros sacrifiant. Satyre se Paugnant ». Bige. drg. Tétradrachme. . .. . .... .... 355 25 (Torremuzza, tab. XXXV, 4.) 300. Messana. Tête de lion de face. y. Partie antérieure d’un taureau. 4rg. Tétra- drachme. ............... 9. 525 p» (Torremuzza, tab. XLV, 8.) 311. Naxos. Téte de Bacchus. ñ. Silène accroupi. Arg. Tétradrachme....... 275 » (Torremuzza, Auct. II, tab. TV, 1.) 333. Syracuse. Tête d’Aréthuse, entourée de quatre dau- Numéros 334. CHRONIQUE. | 87 phins. Sur le bandeau le nom de l'artiste KIM. (Cimon). A. Quadrige. Arg. Décadrachme. . ... . . . . . 1325 » {Ce médaillon n’est pas gravé dans Torremuzza.| Syracuse. Autre médaillon de Cimon. . . .. .. . . 875 » (Torremuzza , tab. LXXII, 1.) 336. Syracuse. Autre médaillon sans num d'artiste. . . . 300 » 351. 353. 383 #10. 417, (Torremuzza, Aact. T1, tab. VI, 2.) Syracuse. Tête de Pallas, casquée de face, entre quatre dauphins. Sur le casque le nom de l'artiste EYKAEIAA ( Euclide ). 3. Quadrige. Arg. Tétradrachme. . . .. . . . .. 1275 » Syracuse. Téte d’Aréthuse, de face. Sur ke diadème le nom de l'artiste EIMQN. Au-dessus [Aps0]OZA. . WH. Quadrige. Arg. Tétradrachme. . . . . . . .. - 1026 » (Torremuzza, Auct. IL, tab. VI, 3,) Agethyrnus et Tyndaris, TYNAAPIAOZ. Téte d'A- pollon, à gauche. nH. ATAOYPNOZ, Le héros Agatbyrnus débout. Br. 41/2............... coe seve 231 26 (Millingen, Ancient coins of greek cities, pl. II, 9, and p. 28, London, 1831.) Panorme, plutôt Carthage. Tête de Cérès. Bl. Cheval. Or51/2......... ° oe eee 65 » yee plutét Carthage. Téte de Cérès. n Légende en caractères phéniciens. Pégase. Arg. 111/2 ........... ss... 850 » 418 Autre. Téte de Cérès. 454. 469. 470. 3. Buste de cheval, Avg. 8 1/2... ....... ° 1275 » Hiéron, tyran de Syracuse. 4rg. 9. . .., .. . . 1000 » Chersonesus Taurica. XEP. Téte juvénile radiée. x. Femme tourrelée. Or 4 ............. 183 75 (Cette pièce est estimée par Mionnet, t. I, p. 346, n°1, 1000 fr.) Panticapée. Tête de Pan, à gauche. W. Chimère. Or6...,....,......... -. 81 2 EÉstimée par Miennet 800 fr. 88 CHRONIQUE. Numéros. 481. Cosséa. Aigle. ' W. KOZON. Brutus entre deux licteurs. Or 5... .. 30 » Un exemplaire de la collection de M. l'abbé Greppo a été vendu à Paris en 1856, 37 fr. (Voyez mon Catalogue Greppo, n° 349.) 482. Abdera. Griffon. #. Aire en creux, divisée en quatre parties. Arg. 7. 100 » 483. Abdera. Griffon. 3. Trépied. Arg. 5 1/2:......... 488. Ænus. Tête de Mercure, de face. 9). Pressoir.—Chévre.—Deux pièces. Arg. 3 et 1. . 175 » 557. Mostis, roi de Thrace. Arg. Tétradrachme. . . . . 1275 » 570. Amphipolis. Tête d’Apollon, de face. ». Bouclier béotien. Arg. 5 3/4. . . 680. Orthagoria. Buste de Diane. À. Casque. 4rg. 61/2.,....... ss... 825 » 594-60$. Les statéres d'or de Philippe IT, roi de Macé- doine, ont varié dans les prix de. ,. ....73à 2 » 610. Autre statère d'or de Philippe, frappé à Rhodes... . 737 50 (Millingen, Ancient coins of greek cities and Kings, pl. IL, 9 and p. 46.) 611. Alexandre III. Double statère d’or...... 2 +e. 183 75 612, 615-625. Les statères d'or d'Alexandre le Grand ont été vendus dans les prixde........6250& 25 » 613. Alexandre IH. Demi-statère d'or, . . .. .. . . . . 362 50 614. Idem. Quart de statère, . ............. 6280 644. Alexandre I (1), roi de Macédoine. Soldat debout auprès de son cheval. 8. Aire en creux divisée en quatre parties. 4rg. 9. . 1685 » 686. Antigonus, roi d'Asie. Tête de Neptune, à droite. 4. Apollon assis sur une proue de vaisseau. Arg. Ce tétradrachme, signalé comme faux dans le catalogue, a été vendu. . ....... «+ 300 » 687. Un autre exemplaire. . .. ...,..,........ 625 » 691. Démétrius Poliorcète. Tête diadémée. 3. Neptune debout, le pied posé sur un rocher. Arg. Tétradrachme. .......... ee tee ++ + . + 306 25 fr. oc. . ee 875 » CHRONIQUE. 89 Numéros. fr. ¢€. 701. Philippe V, roi de Macédoine. Tête de Persée, à gauche. H. Massue. 4rg. Tétradrachme. . . . . . .. ... 537 50 708. Persée, roi de Macédoine. Téte diadémée. 3. Aigle. Arg. Tétradrachme. . 0... -- 450 » 749. Pyrrhus, roi d’Epire. Téte de Pallas. à. Victoire. Statére d'or. . .. 2.2.2 0 2 +0 © 2 0 + 1975 » 750. Alexandre IL Tête laurée. w. Lion, à droite. Or 4, .............. 400 » 756. Thèbes. Tête de Bacchus, à droite. 3. Hercule enfant étouffant deux serpents. Or 2... 128 » ( L’exemplaire était percé; celui de la collection Thomas a été vendu 425 fr.) 759. Étolie. Téte d'Hercule jeune. 3. L’Etolie personnifiée assise. Ærg. Tétradrachme.. 531 25 65. Delphes. Tête de Cérès, à gauche. 5. AMHIKTIONON. Apollon assis sur l'omphalos. Arg. 5 3/4. .... soso. ves + 1725 2» 819. Elis. Jupiter Olympien assis. + 3. FAA (rétrograde). Aigle. Arg. 8... . . ... 750 » 832. Messénie. Téte de Cérès. #. Jupiter Ithomate debout. 4rg. 3 1/4. . . . ... 750 » 835. Argos. Téte de Junon, coiffée de la tiare , à droite. 3. Deux dauphins. Arg.6 1/4.......6...2.. 22810 867. Cydonia (Créte). Téte de nymphe. 3). Miletus allaité par la louve. 4rg.51/2,..... 500 » 878. Gortyme. Tête de Pallas, à droite. 3. Brétas d’une divinité semblable à la Diane d'É- phèse. 4rg. 9. .................. 1287 50 889. Phæstus. Taureau. ñ. Le géant Talos ailé. 4rg. 6 1/2. ... ...... 1031 25 892. Phalasarna. Tête de nymphe, à droite, y. A entre les pointes d'un trident. 47g. 4 1/2... 450 » 893. Polyrbenium. Tête de Jupiter, à droite. W. Bucrane. 4rg. 7. 2 ............... 425 » 89%. Polyrhenium. Téte casquée de Pallas. A. Chouette sur une amphore. Arg. Tétradrachme, . 950 » 90 CHRONIQUE. Numéroe. 896. Priansus. Téte- casquée de Pallas. 4. Chouette sur l’amphore. Arg. Tétradrachme. . . : 898. Tylisus. Tête de Junon ou de Vénus coiffée de la tiare, à droite. H. Éphèbe tenant une téte de bouc et un arc. Arg. 61/2 ........ rss. 911. Mithridate VI Eupator. Téte diadémée. 912. 913. 914. 915. 919. 928. 1047. 1048. 1049. ny. Cerf, à gauche. Statère d'or. . . . . . . .. es Asandre, Statère d'or, portant la date I (der). . . .. Mithridate VI Eupator. 4rg. Tétradrachme. . . . . ‘Un autre exemplaire. ............... . Un autre exemplaire. ..... 0.2... ee eee ree Pylæmènes, roi de Paphlagonie, Tête d'Hercule jeune. 4. Victoire. Br.4 1/2... we ee ce ewe cee we (Mionnet, Suppl., t IV, p. 585, n° 186.) Héraclée de Bithynie. TON KTICTAN. Buste d'Her- cule, & gauche. H. HPAKAGIAC MATPO[c axowwv nJOAIGON. Jupiter assis entre deux autres divinités. Br. 10. . . .. . Prusias IL, roi de Bithynie. Tête diadémée. A. Jupiter. Arg. Tétradrachme. ........:.. . Lampsaque. Tête de Jupiter-Ammon, de face. #. Hippocampe. Or 38/4... ........,... . Abydus. Buste de Diane, 8. ABYAHNON I®IAAOY, 4rg. Tétradrachme. . .. . Ilium. Tête de Pallas. 4. Minerve Iliade. Arg. Tétradrachme........-. Phocée. Téte de lion, & gauche, et phoque. w. Aire en creux. Orl... cee eee eee eee Chios. Partie antérieure d'un lion, à gauche, ye Sphinx. Or 11/2 ................ Clazomène. Lion. #. Partie antérieure d’un sanglier. 4rg. Tétradrachme. 1061. Magnesia ad Mæandrum. Tête de Diane, à droite. 675 nv” 375 #n 725 ” 75 60 898 75 175 nn 325 « 343 75 256 25 1 M. Sabatier (Revue num., 1859, p. 296) attribue aux tétradrachmes de Mithridate une valeur de 500 à 600 fr. CHRONIQUE. 94 Naméres fr. cc. 1062. 1068. 1073. 1077. 1152. 1153. fe. MATNHTON MAYSANIAE IJIAYZANIOT. Apollon debout, appuyé sur le trépied. 4rg.Tétradrachme. 6625 » Cette pièce est estimée 200 fr. par Mionnet. Le Ca- binet de France en possède deux exemplaires. Autre tétradrachme avec le nom d’EY@HMOS DAYZANIOT. oo... ++. 472 50 Smyrne. Tête tourrelée de la Ville ou de Cybèle- Sipylène, à droite. 4. Lion. Arg. Tétradrachme. . .....,...... 1125 » Chios. Sphinx sur une amphore. n. Aire en creux divisée en quatre parties égales. Arg. 6... .. soso esse se + s 600 » Samos. Tête de lion, de face. | 4. Hercule enfant étouffant deux serpents. 47g. 5 1/2. 2500 » { Mionnet, Suppl., t. VI, p. 409, n° 149. ) . Cnide. Tête de Vénus. 3. Téle de lion. drg.31/% ............. 400 » . Calymna. Tête casquée, à droite. wy. Lyre. Arg. 4 1/4. .....,........,. 65 » Cos. Apollon dansant et faisant résonner le tympe- num; auprès, trépied. 3. Crabe au centre d’un carré creux, Arg. 6. . .. . 101 25 Rhodes. Tête radiée du Soleil de face. W. Rose. Arg. 6. . we wee sr + ++. 187 50 Pièce lycienne. Tête de Satrape. y. Tête de Minerve. drg. 2. ............. 205 n Antiphellus. Buste de Gordien II. W. Fortune, Br.8.,..........:...... 150 » (Le prix de Mionnet est 200 fr.) Limyra. Buste de Gordien III. #. Jupiter entre deux autres divinitiés. Br. . . .. 56 25 Myra. Buste de Gordien III. 8. MYPE€WN. Brétas de Diane sur un arbre. Br. 9.. 750 » (Voy. Revue num., 1849, pl. XIII, 1, et p. 418. La pièce de la collection Greppo, n° 1068, a été vendue 92 fr. ) | 92 CHRONIQUE. CHRONIQUE. Naméros. 1852. Cléopâtre et Antiochus VIII, avec la date 6IIP (189). Arg. Tétradrachme... .............. (Mionnet, Supplément, t. VIII, p. 63, n° 923.) 1360. Antiochus IX Philopator. Arg. Tétradrachme. or 1404. Auguste. Médaillon d’argent frappé & Antioche et portant la date HK , 28 de l’ére actiaque..... . 1408. Othon. Médaillon d'argent frappé à Antioche.... . 1413. Nerva. Médaillon d’argent frappé dans la méme ville: 1415. Septime-Sévère. Médaillon d'argent frappé à Antioche. 1422. Auguste. Médaillon d'argent frappé à Séleucie et portant une double date, ,.....,....... 1428. Balanea. Tête tourrelée de la Ville. W. Victoire. Br. 5. ..... sus. Larissa Cassiotidis. Tête d'Apollon. WH. Diane. Br. 6. .............. ote 1443. Aradus. Téte tourrelée de la Ville. 3. Victoire. Arg. Tétradrachme. . ......... 1476. Darique. Archer. | y. Aire en creux. 4rg. 61/2 ............ 1477. Rol de Phénicie. Tête de Minerve. 3. Même tête. Légendes en caractères phéniciens. Arg. 41/2... .. ss... 1496, Euthydème, roi de la Bactriane. Téte diadémée. ». Hercule assis sur un rocher. Arg. Tétradrachme. 1496, Tiræus, roi de la Characéne. Tête diadémée. a. Hercule. Arg. Tétradrachme........ cee 1499. Ptolémée I Soter. Médaillon d’or...........- 1500. Autreexemplaire....... eee ee ee 1509. Arsinoé Philadelphe. Médaillon d'or. or. 1510. Autre exemplaire. .........,....... 1511. Autre exemplaire. . .....,.......... 1516. Ptolémée III Évergète. Médaillon d’or à quatre têtes, 1519. Ptolémée VIII Epiphane. Médaillon d'or. . . . .. 1532. Arsinoé Philadelphe. Avg. Décadrachme. . . . .. (Mionnet, VI, p. 14, n° 129.) 1569. Annia Faustina. L.A (an 4). Pièce de pofin, frappée à Alexandrie .. ........... tee es 212 50 94 CHRONIQUE. Numéros. fr. 6. 1563. Tranquilline. L.Z (an 7). Potin, .. ........ 1674. L. Verus. Pièce de bronze frappée à Alexandrie, grand module. .................. 550 » 1581. Cyrène. Jupiter debout, à droite. wy. Quadrige. Or 4 1/2..............: 1588. Barcé. AKEZIOZ. Téte de face de Jupiter-Ammon. A. BAPKAI. Silpbium. 47g. Tétradrachme. . .. 775 » 1591. Cyrène. KYPA. Tête de Jupiter-Ammon, à droite. 4. Silphium. Arg. Tétradrachme. . ........ 525 = °F Le total de la vente des médailles grecques de la collection de - lord Northwick a produit la somme de 212,853 fr. 75 c., non compris les frais, qu’il faut ajouter encore aux prix indiqués ci-dessus. JW. . 462 50 DENIER D’EBERHARD DE STRASBOURG. Je ne sais si parmi les lecteurs de la Revue il en est qui se rappellent encore une dissertation , déjà vieille de plus de deux années, dans laquelle j’ai essayé de classer et d’expliquer un certain nombre de monnaies frappées 4 Strasbourg pendant les x* et x° siècles. Il est peut-être téméraire de compter sur des souvenirs qui impliqueraient une importance à laquelle mon travail ne peut prétendre. Cependant je considère que ce re- ” cueil s'adresse aux antiquaires, gens dont la mémoire est un attribut professionnel , et je crois leur donner une marque de mon respect en leur faisant part de ce qui peut contribuer à rendre moins indigne d’eux un travail qui a été accueilli avec beaucoup de bienveillance lors de sa publication. J'avais été conduit, par l’étude d’un denier dont j’ai publié le dessin (1857, pl. IX, n° 6), à introduire dans la série numisma- tique de Strasbourg le nom d’Eberhard, entre Richwin (914- 933) et Ruthard (937-950), à une époque où les annales de la ville présentent une lacune considérable; j'étais, à la vérité, guidé par le style de la monnaie, ce qui est toujours, à mon avis, un argument très-fort , mais qui, je le comprends parfai- tement, ne peut pas frapper, au même degré, les érudits qui se sont occupés de numismatique d’une manière accessoire. Depuis, en consultant l’ouvrage de M. J. F. Bôhmer : Fontes rerum germanicarum, publié à Stuttgardt en 1853, j'ai trouvé un document de nature à jeter quelque jour sur la question : CHRONIQUE. 95 c'est un catalogue, Series episcoporum Argentinensium e codice £Ellenhardi Magni (t. lil, p. 6), qui nous fournit les noms des évêques de Strasbourg depuis l’an 346 jusqu’à l'an 1299. Ce catalogne diffère de tous ceux qui avaient été précédemment édités, par l'orth he de plusieurs noms d’abord, puis par l'addition du nom d’Enthenhardus. Je crois devoir placer ici la liste épiscopale que j'avais dressée à l’aide des anciens auteurs en face de celle que M. Bühmer nous fait connaître : 840— 874. Ratald . . . . . . Radoldus. ” 874— 888. Reginhardt . . . . Reginhardus. 888— 906. Baldramm.. . . . Waltrammus. 907— 913. Othbert. . . . .. Orbertus. #43. Godfried . . . . . Gotfridus. 914— 933. Richwin . . . .. Richwinus. Ueberhard . . .. 937— 950. Ruthard ..... Ruthardus. 950— 965. Uoton. . . . . .. Uto. ~ 2 ee ees... Enthenhardus. 965— 991. Erkenbald . . . . Baldus. 991— 999. Widerold . . . . . Vinderoldus. 999—1001. Alutwic. . . . .. Altwicus. 1001—1028. Wernher ..... Wernharius. L’orthographe évidemment vicieuse de Orbertus, de Vinde- roldus, la mutilation du nom d’Erkenbald, célèbre dans l’église de Strasbourg, donnent le droit de considérer Enthenhardus comme une altération du nom d’Ueberhard. Il reste à savoir . pourquoi ce nom vient après celui d’Uoton. Il nous paraît im- possible que la monnaie au type de Henri l’Oiseleur, sur la- quelle se trouve le nom VEB—, ait été fabriquée après les de- niers ottoniens. D'ailleurs il faudrait admettre qu'Erkenbald, dans le catalogue qu’il nous a laissé, n’a pas mentionné son prédécesseur immédiat, tandis qu’on peut croire qu'il aura passé sous silence un personnage mort depuis un demi-siècle et qui d’ailleurs n’a peut-être pas été évêque ; nous avons rappellé ce ede la ghronique d’Hermann Contract: « Anno 934, Eberhardus Argentinensis præpositus primus incola Celle Ma- inradi venit; » et nous avons supposé qu’Eberhard avait pu, ns un moment où les troubles causés par les incursions des Hongrois faisaient obstacle à l'élection d'un prélat , frapper monnaie sede vacante. Quoi qu'il en soit, le catalogue publié par M. Bohmer nous montre que l’église de Strasbourg avait conservé le souvenir d’un personnage qui avait été pour quelque chose dans son gouvernement, et dont le nom offre avec celui d’Eberhard un rapport qui serait plus grand sans doute si un copiste de Ja fin du x: siècle n’en avait altéré la première partie. A, DE LONGPÉRIER. 96 CHRONIQUE. NECROLOGIE. Nous avons encore à enregistrer la triste nouvelle de la mort prématurée d’un homme distingué par l’esprit et par le cœur, de M. Joseph-Étienne de Fontenay, président de la Société Éduenne des lettres, sciences et arts, décédé à Autun le 17 dé- cembre 1859, dans sa quarante-neuvième année. M. de Fontenay avait d’abord appartenu à l’armée et ses premières études n’a- vaient pas été dirigées vers l’érudition; mais il était devenu un des plus fervents adeptes de la numismatique, et il s’est attaché surtout à mettre en lumière une série de monuments pendant longtemps fort négligée, les méreaux et les jetons. Nous lui devons les publications suivantes : Fragments d'histoire métallique, première partie, 1844, ac- compagnée de 9 planches. —— Deuxième partie, 1845, avec 16 planches. Nouvelle étude de jetons, 4 vol. in-8°, 4850. Manuel de l'amateur de jetons, 1 vol. in-8°, 4854. Ces deux derniers ouvrages sont remplis de vignettes dessi- nées par l’auteur, qui avait aussi fourni les dessins dont l’ou- vrage de M. Rossignol, intitulé : Des libertés de la Bourgogne d’après les jetons de ses Etats, est abondamment orné. Les travaux de M. de Fontenay pèchent un peu par la mé- thode ; ils constituent une sorte de conversation facile et variée au cours de laquelle viennent s’encadrer, sans beaucoup d’ordre, de nombreuses vignettes représentant des jetons de tous les temps qui appellent l’attention et ont souvent donné lieu à d’utiles rapprochements. Il faut le dire, chacun des ouvrages de M. de Fontenay marquait un pas progressif, et nous étions en droit d’attendre de son zèle de nouvelles publications auxquelles une expérience laborieusement acquise auraient imprimé un caractère aussi sérieux qu'était vif et sincère le goût de l’auteur pour notre histoire nationale. À. L. MEMOIRES ET DISSERTATIONS. MONNAIES DES ÉDUENS. (PL. IV et V.) Une partie du travail sur les monnaies éduennes que nous publions aujourd'hui parut, pour la première fois, en 1846, dans les Annales de l'Institut archéologique de Rome'. Ce recueil étant malheareusement trop peu ré- pandu en France, et quelques nouveaux monuments de la numismatique éduenne nous étant parvenus depuis, nous avons cédé au désir de nos honorables amis et confrères, les directeurs de cette Rerue, en donnant à leur recueil une deuxième édition de notre mémoire complétement remanié. Un monument numismatique des plus intéressants venait alors d'être découvert, et grace à l’obligeance de M. Deville, de Lyon, était venu enrichir notre médaillier gaulois. Nous indiquant le point de départ de la numismatique éduenne, il nous permettait d'ajouter aux deux seules pièces qu’on lui avait attribuées avant nous”, la série que nous allons faire passer de nouveau sous les yeux des numismatistes. ‘ T. XVII, p. 98 et suiv. ? Cf. marquis do Lagoy, Notice sur l'attribution de quelg méd. des Gaules, p. 38. Aix, 1837, in-4°, 1860. — 2. ° 7 ET DISSERTATIONS. 99 li est d’ailleurs certain que la double forme a existé chez les Gaulois. Le fait est attesté par la grande inscription fragmentée publiée par notre ami Adr. de Longpérier dans l'article Meaux qu'il a fourni à l'Histoire des villes de France, éditée par M. A. Guilbert. Cette inscription, tra- cée sur une pierre longue de plusieurs mètres, est ainsi conçue : .... AVGTHEATRVM:CIVI. ....M°'D°:S"P-D°EFFECERVN...… se cecsevee AVRICVS ‘FIL... Elle fut trouvée, il y a environ trente ans, à Meaux, au faubourg de Chaage, construit sur l'emplacement de la ville gallo-romaine , et elle fait partie de la collection d’an- tiques formée par feu M. C. J. Dassy. Le type de l'ours qui accompagne la légende Orgetirix, est un symbole si naturel du pays de forêts et de montagnes où commandait ce chef, qu’il y est encore aujourd'hui le type monétaire et l'arme parlante de la ville de Berne :. 1 Baer, ours; plur. Baeren.—Ce type n’était connu, dans toute la numismatique grecque, que par une médaille, dont voici le dessin, et dont l'attribution n'était pas encore faite quand j'ai publié, pour la première fois, ce mémoire. La lé- gende MA et le dauphin m'avaient porté à croire qu’elle avait pu être frappée à Marseille, vers les premiers tempe de son autonomie, Si le dauphin est un attribut tout naturel de Ja Diane des ports, Atueviti, protectrice de Marseille, Yours peut convenir également comme attribut de la Diane des montagnes, Grelenc, faisant allusion au nom d'Orgétorix, et nous voyons, d'ailleurs, ce type associé, sur la monnaie d’Orgétorix, à celui de Diane, L’ours s, comme on sait, plus d'un rapport avec Je mythe de cette déesse. Je n'ai qu'a rap- ET DISSERTATIONS. 404 Helvétes contre les libertés de la Gaule , sous le comman- dement d'Orgétorix, époque qui, comme on va voir, peut seule expliquer la présence du nom de ce chef sur une monnaie des Eduens. On se rappelle que, vers l'année 59 avant notre ère, Orgétorix , généralissime des Helvétes , Casticus , chef des Séquanes, et Dumnorix, frére du célébre Eduen Divitiacus, formèrent le projet audacieux d’envahir toute la Gaule et de la soumettre à leur domination‘. Dans ce triumvirat, qui rappelle celui dont le monde romain devait plus tard subir le joug , le rôle d'Orgétorix était semblable à celui d'Octave ; comme lui, le chef gaulois voulait, après avoir fait servir l'influence de ses collègues au succès de ses des- seins, se défaire d'eux et régner seul sur son pays; mais le patriotisme ombrageux des Helvètes causa la mort de l'auteur du complot avant sa perpétration *. Les Helvètes n’en continuérent pas moins les projets d’Orgétorix , et on sait que ce fut le prétexte de l’arrivée de César dans les Gaules. Sans aucun doute, notre médaille est un précieux monu- ment de l’alliance d'Orgétorix et de Dumnorix. Le premier y a seul inscrit son nom en qualité de généralissime ; Dumnorix y mit celui de la cité , dent les habitants avaient été, par ses intrigues, disposés à favoriser leurs projets. Nous avons déjà publié une médaille où le nom de Viri- dovix, chef des Unelli, se trouve ainsi associé à celui des Lizorii, comme généralissime de la confédération des cités armoricaines . 1 Per tres potentissimos ac firmissimos populos, tolius Gallix sese potiri posse - sperant. (Cæsar, Bell. Gall., 1,3.) "4 Jbid.,1,2 4. 2 Rerue numismatique, 1811, p. 345, 402 MEMOIRES La beauté du travail de la médaille des Eduens et le choix de la tête qui en forme le type principal indiquent que ce peuple, placé par la civilisation en avant de tous les autres peuples de la Gaule indépendante, avait attiré chez lui des artistes de Marseille, ou en possédait de nationaux formés à l’école de cette ville célèbre. Soit que les Éduens, en raison des troubles qui suivirent l'invasion de César et interrompirent, pour un temps, la culture des arts dans la Gaule, soit que les Helvètes, encore barbares, auxquels notre médaille rappelait le nom d’un homme célèbre parmi eux, aient frappé des imitations grossières de cette pièce, les cabinets en renferment un assez grafd nombre d'exemplaires semblables aux n°° 2-5 de notre planche IV. On pourrait encore supposer qu'elles ont été fabriquées chez des tribus voisines des Éduens et moins avancées en civilisation, qui copiaient ces pièces sans discernement, en altérant successivement les types par une série de copies. La numismatique des na- tions barbares fournit une multitude d'exemples de ce genre. Sur les n°° 2 et 3 les légendes existent encore; mais les coins étaient trop grands ou trop mal ajustés sur les flans, et il faut réunir plusieurs exemplaires de la même pièce pour retrouver en entier non-seulement ces légendes , mais encore les types de la médaille. Le caractère idéal de la téte a complétement disparu; on reconnaît cependant en- core la forme de la coiffure, dans le développement exagéré donné aux mèches de cheveux qui couvrent les tempes. L’ours, dont les pattes s’allongent de plus en plus et dont le corps va s'amaigrissant, prend tout à fait l'apparence d’un loup sur le n° 3, et il a été décrit sous ce nom par tous les numismatistes qui se sont occupés avant nous de cette ET DISSERTATIONS. 403 médaille ‘. Le poids de la monnaie diminue aussi de plus en plus. Sur plusieurs autres pièces, d’une plus grande barbarie, la figure a perdu encore davantage de son caractère; au revers , à l'ours a été substitué le cheval en course , type le plus habituel des monvaies de la Gaule, et qui se présentait naturellement sous le burin des graveurs de coins. Une lyre, au-dessous du cheval , et un annelet, au-dessus, forment les symboles accessoires du type sur les n* 4 et 5. Sur une médaille du cabinet de M. le marquis de Lagoy, une rouelle remplace l’annelet du n° 4. Les symboles sont omis sur le n° 6, où la barbarie a atteint ses dernières limites. Ce sont surtout ces trois dernières pièces que l’on pourrait considérer comme des imitations de la monnaie éduenne, faites par quelqu’une des cités voisines qui formaient une confédération sur laquelle les Éduens exerçaient la supré- matie, telles que les Ambarres, les Bellovaques, les Boiens , ete. *. J'ai cru devoir placer sur ma planche, n° 7 et 8, les dessins d'un statère et d’un quart de statère d’or dont il est impossible de méconnaitre l’analogie avec les pièces- précédentes. La coiffure de Ia tête est la même; sur le revers, le cheval conduit, débris du bige des statères grecs, est accompagné des mêmes symboles accessoires qu’au n° 5. Ce que l'on pourrait prendre peur un.autre symbole, placé en avant du poitrail du cheval, doit être considéré comme l'extrémité de la flèche du char. Sur le quinaire d'argent n° 6, on remarquera que le graveur a essayé, comme celui. 1 Cf. Mionnet, Descript,, t. I, p. 89, ne 61, et Suppl., t. I, p. 166, n° 42. — Marquis de Lagoy, Notice sur l'attribution de quelques méd. , p. 38. — Lelewel, Type gaulois, p. 367, eto. * Cæsar, De Bell. Gall., paesim. 404 MÉMOIRES des statères, de figurer le conducteur penché au-dessus du cheval. Quant aux monnaies qui portent le nom seul d'Orgétorix, écrit, ORCITIRIX , elles sont complétement barbares, et durent être frappées chez les Helvètes (voy. la pl. V, n°* 4 et 2). L'imitation de la tête diadémée de la Diane mas- saliote est toutefois reconnaissable sur la pièce n° 1. Mon savant ami et confrère, M. de Saulcy, pense que le nom ATPILI, inscrit sur le n° 4, et qui rappelle ceux d'Epillus et d’ Atepilos , inscrits sur d’autres médailles gau- loises*, est un nom de dignité : celui qui appartient à la dynastie : d At, appartenant a, et pilla, famille. On convaît une variété de cette pièce sur laquelle on voit un dauphin au lieu de l’astre placé sous le cheval du revers *. Par le nom COIOS , qui se voit sur le droit de Ja médaille ‘n° 2, on pourrait avoir cherché à rendre le prénom Catus, ce qui rappellerait un patronage romain, et l’on sait que les princes barbares ambitionnaient souvent cette sorte de distinction, sans se douter que les relations amicales qui en résultaient préparaient et facilitaient les conquêtes de Rome. Bouteroue voyait dans COIOS un nom de lieu; mais son opiaion avait été repoussée par Bochat (Hist. Suisse, t. 1°", p. 585), qui considère COIOS comme une forme celtique de Caius. Ce sentiment est attaqué, il est vrai, par le P. Oderici dans le mémoire qu’il a consacré à la monnaie du chef des Helvètes *. Oderici pense que COIOS est le nom 4 Cf. Lelewel, Type gaulois, p. 246, note 559. 2 Jbid., pl. VIII, n°7. — Duchalais, Catalog. des méd. gaul, du Cabinet du roi, n° 449, 3 Gasparis Aloysi Oderici, societatis Jesu, academici etrusci ad Caistanum Mari- nium de Argenteo Orcitirigis nume conjecture. Roma, 1767, in-4°, p. 50, ET DISSERTATIONS. 405 d'un second personnage, différent d’Orgétirix. Il suppose même , et à tort, que la médaille pourrait , en réalité, porter COTOS, et rappelle le passage de César qui mentionne les prétentions rivales de Convictolitanus et de Cotis à la ma- gistrature des Eduens. . Bochat prétendait aussi qu'Orgétirix n’est pas un nom, mais un titre; le P. Oderici n’admet pas ce sentiment, et en ce point, il a raïson '. L'ouvrage du savant correspondant de Marini est orné d'une planche dans laquelle la monnaie d’Orgétirix est re- présentée en grand (7 centim. de diamètre), ainsi que cela se pratiquait communément pour les pierres gravées. Un petit disque placé plus bas et contenant ces mots : Numi magniludo , indique le module réel de la pièce. Un faus- saire, qui apparemment ne savait guère de latin, a repro- duit en métal le dessin grandi, et créé ainsi un monstre numismatique dont M. de Saulcy possède dans sa collection le curieux spécimen. Après la mort d’Orgétorix, les Helvétes , comme nous le disions tout à l'heure, n'en poursuivirent pas avec moins d’ardeur leurs projets contre les libertés de la Gaule : Dumnorix et les Séquanes continuérent d'être leurs alliés. Les Séquanes accordèrent aux armées helvétiennes passage sur leur territoire, mais les Éduens résistèrent aux intri- gues de Dumnorix et appelèrent César à leur secours. Le chef éduen qui commandait la cavalerie auxiliaire de l’ar- mée romaine lui fit essuyer une défaite en prenant la fuite devant les Helvètes , et il allait être livré à la rigueur des lois gauloises sans l’intercession de son frère, Divitiacus *. 1 Voyez, à ce sujet, notre mémoire sur la médaille de Vercingétorix, Revue num., 1837, p. 161 et suiv. 3 Cesar, De Bell. Gall., I, 5-20. 406 MEMOIRES Le proconsul sacrifia cette fois sa vengeance à sa politique; on sait que plus tard il fit massacrer impitoyablement Dum- norix, en désespoir de réussir à l'attacher à sa cause ‘. Dumnorix, que César nous représente plusieurs fois comme un homme audacieux, entreprenant, d’une grande autorité parmi les Gaulois et aspirant à la royauté, à la- quelle il pensait arriver à l’aide des Helvètes *, dut sans doute profiter du moment où il resta seul à la tête de la ligue helvétienne, pour frapper, comme Orgétorix, une monnaie à son nom. Nous croyons, du moins, devoir lui attribuer les pièces dont nous avons dessiné plusieurs va- riétés (pl. V,n*3 a6). © Sur ces pièces, dont la fabrique est plus romaine que grecque, on peut reconnaître , d’un côté , la tête de Diane, type introduit par les Massaliotes dans les Gaules, où il acquit une grande popularité et persista très-longtemps. Au revers, se voit un guerrier revêtu du costume gaulois, tenant d’une main l'enseigne nationale du sanglier *, et de 1 bid., V, 6. 8 Dumnorigem, summa audacia, magnaque apud plebem, propter liberalitatem , gratia... Si quid accidat Romanis, summam in spem regni per Helvetios obtinendi venire...(1, 18.)— Cupidum imperii, magni animi, magna inter Galles auctori- tatis. {V,6. ) 4 J'ai essayé de démontrer ailleurs que le sanglier était le symbole, l’em- blême national de tous les peuples d’origine gauloise, (Cf. Recue num., 1840, p. 245-260.) J'ai omis alors une des preuves les plus curieuses et les plus convaincantes à l’appui de mes assertions; je la rapporterai ici. « Ergo jam « deztro Suevici maris littore Æstyorum gentes adluuntur : quibus ritus habilusque « Suevorum; LINGUA BRITANNICÆ PROPIOR. Matrem Deum vcenerantur : insigne « superslilionis FORMAS APRORUM GESTANT ; id pro armis omnique tutela: se « curum Dex cultorem etiam inter hostes præstat. n (Tacit., De Mor, Germ., XLV.) Voilà un peuple d'origine gauloise, ainsi que l'indique son langage, qui a le simulacre du sanglier comme symbole de son culte, comme talisman contre tous les dangers. On voit un grand nombre de ces simulacres dans les collections. ET DISSERTATIONS. 107 l'autre, une tête humaine. Sur les variétés n°’ 3 et 4, le guerrier porte seulement l'enseigne qu'il tient à deux mains. Les légendes du revers, DVBNOREIX et DVBNOREX, rap- pellent parfaitement le Dumnorix des Commentaires ; le changement de bn en mn est tout à fait dans le génie de la langue latine*. La légende du droit avait été lue DVRNOCOV, et rap- prochée, bien que la fabrique en soit très-différente, de DVRNACOS des médailles que l’on classe communément à Tournai”. Une étude plus attentive m'a fait reconnaître, sur la médaille de Dumnorix, le mot DVBNOCOV, et les deux légendes s’interprétent parfaitement par Dubnorez, fils de Dubnocus *. On connaît une monnaie d'argent avec DVBNO — ANORBO; mais elle n’a aucune analogie de types et de fabrique avec les monnaies de Dumnorix. L'infériorité de la fabrique de celles-ci, à l'égard des monnaies presque contemporaines des Éduens, me porte- rait à croire qu'elles ont été, comme les pièces barbares d'Orgétorix, frappées chez les Helvètes. La situation de Dumnorix à l'égard des Romains, qu'il ne trahissait pas ouvertement, commandait cette précaution. En outre, la tête coupée que tient à la main le guerrier gaulois, rap- 1 Comme dans sommus, rapproché de Gxvoc et d'autres. 2 Cf. Bouteroue, Rech. cur. des monoyes, p. 45. — Pellerin, Méd. des peuples et eilles, t. 1, p. 28. — Eckhel, D. N.,t. I, p. 74. — Revue numism., 1836, p. 318.— De Witte, Rerue de la numismatique belge, t. IV, deuxième série, 1854, p. 145 et suiv. — Revue num., 1856, p. 69 et suiv. 3 M. de Monard, qui, dans un mémoire sur les médailles gauloises trou- vées à Antun, retient pour les Eduens les médailles avec l'inscription Durnacos , cite un bourg assez considérable, accompagné d’un château, ap- pelé Dorna dans une charte de l’abbaye de Saint-Andoche, et qui porte aujour- d'hui le nom de Dorne ( V, Mém, de La Société Eduenne, t. 1, p. 41-47 ). ET DISSERTATIONS. 109 Lagoy a prévalu, et celle de son adversaire ne mérite pas d'être réfutée *. L'émission de ces deux pièces doit se rapporter a l’an- née 55 et à la grande insurrection gauloise commandée par le célèbre Vercingétorix. Convictolitanus, chef supréme des Eduens, établi par César, séduit par l’or des Arvernes, avait partagé le prix de sa défection avec Litavicus et ses frères, jeunes gens d'une famille illustre du pays, et les avait chargés du commandement de dix mille auxiliaires que leur avait demandés le proconsul, alors occupé à faire le siége de Gergovie. Litavicus, en approchant de l’oppidum des Arvernes, harangua ses troupes et les gagna à la cause nationale; mais le complot des chefs éduens, découvert par Viridomare et Éporédorix, fut porté à la connais- sance de César. Celui-ci, avec son impétuosité ordinaire, coupa la marche de Litavicus, qui n’eut que le temps de se réfugier, suivi de ses seuls clients, dans les murs de Gergovie. Mais, pendant que les Romains épuisaient leurs efforts contre cette place, Litavicus, avec une activité digne de son adversaire, était retourné à Bibracte, en soulevant tout le pays sur son passage. Il avait été reçu en triomphe par ses concitoyens, et ce fut alors que s'orga- nisa , sur les frontières des Eduens, la révolte générale des Gaules ’. On ne saurait placer à un moment plus convenable la fabrication des monnaies au nom de Litavicus, car bientôt il n’est plus question de ce chef, et le pouvoir militaire était aux mains de Viridomare et d’Eporédorix 1 Cf. Pierquin, de Gembloux, Hist. monet. du Berry, p. 34, et Reoue num., 1840, p. 252. 2 Cæsar, De Bell. Gall,, VII, 37-40, 54-56. 440 MEMOIRES quand le proconsul, après la prise d’Alise et la défaite de l’Hector gaulois, triompha sans combattre de la cité des Eduens '. . Sur les monnaies de Litavicus, l’inflnence de l’art romain se fait sentir : le module, la forme et l'épaisseur du flan, la composition et le style des types, tout dénonce un gra- veur de l’école romaine, et fait encore quelque honneur au goût des Éduens pour les arts. On reconnaît toujours la tête de Diane sur le droit de la monnaie : le sujet du revers est emprunté aux deniers consulaires; c'est une altération du type des Dioscures, nationalisé par l'enseigne du san- glier que le cavalier porte en main. Un type analogue, comme on l’a vu tout à l'heure, figure aussi sur les mon- naies de Dumnorix : le porte-enseigne y est représenté à pied, tandis qu'il est à cheval sur les monnaies de Litavicus. Au droit de celle-ci, on remarquera que l’une des deux en- seignes, placées à droite et à gauche de Ja tête de Diane, est surmontée d’une fleur ou d’un fer de lance parfaitement semblable à la fleur de lis héraldique qui devait être plus tard l'emblème des Gallo-Francs. D'autres médailles, portant la légende VIIPOTALO, dont 1 Jbid., 66 et 90. — I1 est probable que c’est le nom du même Litavicus qui se lit sur cette inscription peu connue du musée d’Épinal : SEX’ M4 SENOVIRI DVBNOTALI’ F IVL’ LITVMARA’ LITAVI €1’F MATER’ FACIENDVM CVRAVIT. En effet, le prénom de Julia, emprunté au nom de famille de César, et la forme gauloise de tous les autres noms propres contenus dans l'inscription doi- vent lui faire assigner une époque trés- voisine de celle de la soumission de la Gaule, ET DISSERTATIONS. 411 l'attribution n’a pas encore été suffisamment établie, et qui portent également pour types la tête de Diane et un guerrier tenant à la main l'enseigne du sanglier (voy. pl. V, n° 10), pourraient aussi être rapportées, sinon aux Édues, au moins aux circonstances de la ré- volte organisée par ce peuple. Ces médailles et plusieurs autres de types et de fabrique analogues, rapprochées de celles dont nous avons parlé d’abord, formeraient une réunion de pièces importante qui pourrait être publiée sous le titre de Médailles de la ligue éduenne. Si ces diffé- rentes médailles ne présentaient pas toutes, au même degré , l'intérêt d'art qu’offrent celles de la ligue achéenne, par exemple, nous serions en droit, nous autres descen- dants des Gaulois, de leur trouver un intérêt au moins égal, au point de vue de l’histoire, en raison du pays où se sont passés les événements dont elles rappellent le sou- venir. A la pièce gravée sous le n° 10, vient naturellement se joindre une autre monnaie d'argent de ma collection, que j'ai tout lieu de croire unique , et qui représente , au revers d'une tête de femme, diadémée, tournée à gauche, un lion en marche avec la légende VIIPOTAL (voy. pl. V, n°41). Elle n’est pas sans rapports avec la monnaie de Marseille, bien que le lion ait un mouvement particulier. On peut aussi la comparer avec le bronze d’Aulus Hirtius, publié par Lelewel ( Type gaulois, Atlas, pl. VI, n° 36) et par Barthélemy (Rev. num., 4842, p. 403), expliqué enfin par Saulcy (Rev. num., 1858, p. 441 et suiv.), et nous devrons remarquer combien la pièce portant le nom du lieutenant de César est inférieure pour le style à la monnaie du chef ‘gaulois, évidemment plus ancienne. “412 MEMOIRES Le nom de ce chef a été lu de bien des façons sur les pièces au type de notre n° 10. Mais, avec le lion, nous trou- vons une légende dans laquelle le caractére P est trés- nettement exprimé, et nous rappellerons à ce sujet que M. de Longpérier, se fondant sur une inscription de Pompéi qui contient des noms gaulois, avait proposé de lire près du guerrier appuyé sur son bouclier et tenant un sanglier- enseigne , le nom d’homme Verotal, en donnant au P la valeur du rho grec (Rev. num., 1856, p. 84). Assurément la médaille si remarquable que nous publions aujourd'hui démontre bien clairement que ce caractère ne saurait être pris pour un gamma. Quant à la lettre du droit, elle offre une ressemblance frappante avec les pièces de Duratius, chef des Pictaves (cf. Revue num., année 1854, pl. XVI). L. DE LA SAUSSAYE. ET DISSERTATIONS. - 443 LETTRE A M. ADRIEN DE LONGPERIER LA MÉDAILLE GAULOISE PORTANT LA LÉGENDE VBROTAL ET SUR LE COSTUME DES GAULOIS. (Pl. VI.) MONSIEUR ET CHER DIRECTEUR, Bien des antiquaires ont cru pendant longtemps qu'il n’y avait plus rien à dire sur la numismatique gauloise, après le curieux ouvrage du vénérable Lelewel '. Ce travail était, il est vrai, si fort au-dessus de tout ce qui avait été publié jusqu'alors et par le grand nombre de médailles offertes, pour la première fois, aux érudits, et surtout par l’excel- lence des dessins de l'illustre savant, qu'il fut comme une révélation pour la plupart d'entre nous, au point que de longtemps, personne ne dût espérer dire rien de bien neuf sur un sujet qui semblait avoir été, sinon complétement élucidé, du moins profondément fouillé. Cependant cette appréciation était tout à fait erronée : le sol de la numismatique gauloise avait été, il est vrai, re- tourné dans tous les sens par l'illustre maître, mais la pé- nurie de matériaux d’une part, et peut-être la rapidité du 1 Etudes numismatiques ef archéologiques, par Joachim Lelewel. Type gaulois ou celtique , in-8°, Bruxelles, 1840. Atias. 1860. — 2. 8 ET DISSERTATIONS. 415 le nom VIIGOTALVS au chef gaulois dont la monnaie nous occupe *. Cependant la lecture de M. Lelewel, sans étre correcte, était un acheminement vers une lecon plus en rapport avec le génie gaulois; le P de VIIPOTALO évoquait naturelle- ment l'idée du p (rho) des Grecs *; en ne tenant aucun compte des transcriptions de ce savant, Duchalais com- pliquait donc la question, ou du moins en retardait l'éclair- cissement, et nous étions, sur ce point, dans une impasse fâcheuse dont vous nous avez tirés à l’aide d’un rensei- gnement emprunté à l'épigraphie. Dans uu article de cette Revue, intitulé : « Note sur la u forme de la lettre E dans les légendes gaulotses*, » vous avez, le premier, démontré qu'il fallait lire VEROTAL sur notre médaille, résolvant à la fois une double difficulté. Je ne rentrerai pas dans la discussion à laquelle vous vous êtes livré au sujet de l'E à double jambage (II) des médailles gauloises; c’est désormais un point acquis à la science et que personne ne sera tenté de contester. En est-il de même de la lettre fr de VEROTAL, et est-il certain qu'aujourd'hui encore, les leçons de Bouteroué, de Mionnet et de Duchalais n’aient pas conservé de partisans? Vous vous êtes borné, il est vrai, dans l’article précité, à énoncer le fait de l'existence de I'R dans la légende VIITOTAL; et, en effet, la mention des inscriptions de Pompéi était un trait de lumière qui, aux yeux du plus grand nombre, devait éclairer suffisamment la question. t Description des médailles gauloises faisant partie des collections de la Bibi. royale, par Adolphe Duchalais , in-8°, Paris, 1846, p. 4. | ? M. Lelewel transcrit ce nom Viipotalo ou Vipotalo, et la place qu'il lui donne dans son Index alphabétique montre clairement qu'il n’a pas pensé au rho grec. Type gaulois, p. 286, 349, 362, 463. 3 Revue num , 1856, p. 74. 446 MÉMOIRES Cependant j'ai été frappé de la nécessité de démontrer l'exactitude de votre leçon, par les médailles elles-mêmes, en voyant, avec surprise, l’ancienne lecture se reproduire dans |’ Essai sur les monnaies des Arverni de M. Peghoux, ouvrage postérieur à votre mémoire *. Il m'a semblé de plus qu’il y avait lieu de rétablir cer- tains faits secondaires relatifs à cette médaille, dans l'é- noncé desquels l'honorable antiquaire s'est évidemment trompé. | Permettez-moi, je vous prie, de rappeler brièvement les diverses lectures auxquelles notre médaille a donné lieu : on comprendra mieux ensuite la nature du service que vous avez rendu à la science, et mon insistance à le pro- clamer. Bouteroué, je l'ai dit, avait lu VHGOTAI; Pellerin crut faire merveille en proposant de voir LVIIPOT sur un exem- plaire qu'il trouvait mieux conservé, mais qui laissait ce- pendant beaucoup à désirer, puisque depuis lors personne n’a vu le caractère L initial que cet antiquaire avait cru dis- tinguer. Mionnet revint au G de Bouteroué, et lut VIIGOTAI et VIIGOTAL. M. de La Saussaye, dans un intéressant « mémoire sur les médailles qauloises trouvées dans la com- a mune de Cheverny en 1827 * » a publié un charmant spécimen de cette monnaie; mais il s'est borné à faire re- marquer la dissidence des auteurs, sans trancher la question ; toutefois, il paraissait voir comme Bouteroué et Mionnet un gamma dans la lettre douteuse. Puis, viennent Lelewel qui tient pour le P de Pellerin; enfin, Duchalais dont j'ai rappelé plus haut la leçon rétrospective. 1 Essai sur les monnaies des Arverni, par À. Peghoux, in-8°, Clermont, 1857, p. 54. 2 Recus num., 1836, p. 317, pl. VIII, n° 16. » ET DISSERTATIONS. 447 : Votre lecture VEROTAL, si elle est exacte, est donc une acquisition importante ; il me reste à vous faire part des cir- constances qui m'ont mis à même d’en reconnaître et d'en démontrer la réalité. Le signe contesté T que vous avez justement, selon moi, interprété par notre lettre R, n’est point caractérisé de la même manière sur tous les exemplaires où il est visible; d’ailleurs sur le plus grand nombre des monnaies, l’insuf- fisance du flan et la rapidité de la frappe ne permettent pas de voir le sommet de cette lettre. Par un heureux hasard nous possédons, vous et moi, deux exemplaires qui offrent ce caractère empreint avec une grande netteté et dans des conditions de style toutes différentes. Mon exemplaire, plus ancien sans doute que le vôtre, donne ce signe : {*”, dans lequel je trouve tous le’ rudiments de notre r minuscule. Veuillez bien remarquer que le G gaulois (le e que l’on trouve aussi bien sur les monnaies de Tasget et de Divigiagus que dans les inscrip- tions tracées à la pointe par les Romains, ou sur les mé- dailles byzantines) a, lui aussi, donné naissance à notre G minuscule (g). Il ne faut donc pas s'arrêter à ce que la forme de cette lettre r a d’insolite au premier aspect. Votre exemplaire (pl. VI, n° 3), d'un faire moins soigné et moins aucien, donne aussi un r minuscule, mais plus ru- dimentaire, et dont on n’explique suffisamment bien les éléments qu'à la vue de la monnaie qui m’appartient. J'insiste sur ce point, et je dis que ce signe r n’a rien de commun avec l’ancien [ (pi) des Grecs, adopté par les Gaulois , et conservé par eux à une époque où il avait pris la forme II dans les contrées helléniques : conservé notame ment dans les monnaies de PIXTILOC. 118 MÉMOIRES Ce caractère n'a rien de commun non plus avec le gamma, T, dont la légende AFHA des médailles d’Age- dincum nous fournit un bon spécimen. Sur ma médaille, l’aileron supérieur est ondulé de ma- nière à présenter à l'œil tous les détails de l'r minuscule; dans la vôtre, cet aileron n’est plus qu'un point dont la partie extérieure est arrondie; mais dans l’un et l’autre exemplaire, cet appendice ne tient pas à la hampe par une barre horizontale d’égale épaisseur, comme dans le cas du I ou dul’. J'ai figuré sous les n°* 2 et 3 de la planche VI votre médaille et la mienne; de plus j’ai donné sous les n°’ 10 et 44, le développement des deux inscriptions, afin que tous les yeux pussent saisir les détails caractéristiques que je signale pour la première fois. J'ai cru devoir reproduire avec les mêmes dimensions les légendes CRICIRV et VIIRICO de deux médailles de ma suite, afin de faire mieux juger de l'extrême mobilité de l'alphabet gaulois qui, réellement, semble avoir retenu toute la physionomie du caractère cursif, c'est-à-dire cette liberté d’allure qui fait que la main du graveur est tou- jours visible dans les produits du monnayage de nos aïeux. Ainsi les R de l'inscription CRICIRV, notamment, présen- tent déjà une tendance visible vers la forme r de VIITOTAL. J'ose espérer qu'après cette discussion, dont vous vou- drez bien me pardonner l'aridité, il ne restera plus de doute à personne sur la réalité de l'existence de la lettre R dans notre légende. Je vais aborder maintenant un autre 4 Tl est fort curieux de retrouver les deux formes de l'r avec crochet on- dulé et crochet à courbe simple, réunies dans les mots Mercurius pater de l’é- pitaphe de Gandentia, tracée en caractères rustiques, et datant de l'an 838 de J.-C. Voy. Buonarroti, Veltri ant, p. XV1. ET DISSERTATIONS. 119 ordre de faits qui vient corroborer la preuve matérielle ci- dessus développée. Il s’agit du rapprochement de la mé- daille VIP.T que j'ai publiée dans ma première lettre à M. de La Saussaye *. Vous vous rappelez que, dès cette époque, j'avais été conduit à comparer la légende de cette médaille avec celle VIITOTAL, et il m'avait paru qu'on pouvait raisonpable- ment voir dans cette monnaie de bronze le nom abrévié du personnage qui avait émis nos charmantes médailles d'argent. Je dois dire cependant que la lecture VIr.T (VIROT) ad- mise par Duchalais n'avait pas toutes les sympathies; mon savant confrère, M. Fillon, en me cédant cette pièce, avait cru y lire VIRT, et il avait pensé à l’attribuer à Vertou, bourgade située non loin du lac de Grand-Lieu, où la mé- daille avait été trouvée. Cette lecture, abstraction faite de l'attribution à Vertou, n'est pas sans valeur, et j'y attache, même aujourd'hui, beaucoup plus d'importance qu'autrefois, car elle pourrait n'être que l'abréviation de la légende VIROTAL de votre médaille. Cette leçon VIRT ou VIT.T, si l'on sépare le point de la lettre précédente, a tant de chance d'être exacte, qu'on la trouve reproduite avec l’R romain et l'O dans la médaille VIRO....., publiée par M. Fillon sous le n° 3, planche I, de ses Études numismatiques *, avec tous les caractères d'une médailie aquitanique, et comme la sœur de la précédente. J'ai donné une nouvelle représentation plus exacte de ma médaille VIT.T (pl. VI, n° 7); je regrette qu'un exem- § Revue num. , ann. 1853, Lettre à M, de La Saussaye sur les médailles gauloises, pr 17. * Études numismatiques, par Benjamin Fillon, in-8°, Paris, 1866, p. 20. 420 MEMOIRES plaire mieux frappé ne me permette pas de trancher la difficulté que présente sa légende, et de décider si elle offre bien les lettres f ou simplement un R. Malheureuse- ment cette médaille est restée unique jusqu'à ce jour. Mais, on le voit, son interprétation ne saurait étre douteuse, puisque les deux modes de lecture arrivent au même ré- sultat depuis votre découverte , et que d’ailleurs la légende bien accentuée VIRO... semble ne laisser prise à aucun doute sur ce point. Tout ce qui précède me donne donc plus que jamais le droit de rapprocher ma médaille VIRT ou VIR.T de nos curieux VIROTAL ou VEROTAL , et d'ajouter ainsi, pour fortifier votre lecture, un élément de conviction à tous ceux qui résultent de l'examen matériel de ces médailles, et du texte de l'inscription de Pompéi. Veuillez remarquer, je vous prie, que les médailles VIT.T et VIRO présentent toutes deux un édicule sur le dos du cheval en course ; qu’il en est de même de la médaille de bronze portant la légende VIREDISOS que j'ai publiée dernièrement dans ma lettre à M. de Saulcy ‘; nous avons donc là un groupe de trois médailles découvertes dans la Gaule aquitanique, qui lui appartiennent évidemment par le style, et qui offrent les initiales identiques VIR ou VER’. § Reoue num., 1859, pl, II, n°* 1-8, et p. 82 ct suiv. Lettre à M. de Saulcy sur la numismatique gauloise. 3 » Vous êtes vous jamais demandé pourquoi les gens rustiques prononcent « Verginée au lieu de Virginie, et pourquoi virtus est devenu vertu? » Telle est la question que vous me posez dans votre aimable lettre du 16 octobre dernier, en me faisant remarquer encore que ver et tir s’échangent dans les noms, comme Treveri et Treviri, Veromandui, Viromandui, ete. Je crois que ces permutations sont tout à fait dans le génie gaulois; de nos jours les gens de nos campagnes se permettent des altérations bien plus graves, ainsi, dans le Maine, }’r se change en !, on dit rale pour rare, Durar pour Duval, emballe, pour faiseur d'embarras , etc. ET DISSERTATIONS. 494 Ne pensez-vous pas que cette syllabe initiale joue dans la composition de ces noms le même rôle que DVBNO que nous trouvons dans une autre partie de la Gaule en com- binaison avec les syllabes terminales REIX, TAL, et COS. Ceci me conduit nécessairement à justifier l’origine aqui- tanique de notre médaille VEROTAL, et ce ne sera pas une tâche difficile. L'exemplaire que j'ai reproduit sous le n° 4 de la pl. VI vaut, par le style, les médailles massaliotes de la deuxième .époque, en supposant qu’on classe dans la première celles dont le type est le plus pur ; c’est-à-dire que cette pièce est au moins digne de figurer à côté des Duratius, des Luccios et des Contoutos. Il y a plus, la Diane de l'exemplaire dont _je parle est supérieure, au point de vue de l’art, à celle de la médaille de Duratius à laquelle elle ressemble beaucoup cependant. Or ce premier indice est suffisant pour classer cette pièce dans les provinces méridionales de la Gaule : en continuant l'examen minutieux de son type jusque dans les détails de la facture, vous remarquerez que le globule qui paraît fiché dans le front de la Diane de Duratius ‘, se trouve identiquement placé dans Il’effigie des monnaies de VEROTAL ; c'est une circonstance qui n’a rien de fortuit, car le même globule figure dans les trois exemplaires, n*2, 3 et 6 de la planche VI. Est-ce à dire que VEROTALVS «uit monnayé dans Limonum mème? Non sans doute; mais ce rapprochement combiné avec celui des médailles VIRO et VIr.T m'autorise suffisamment à établir que notre mé- daille VEROTAL a été frappée dans l’une des provinces de l’Aquitaine voisine des Pictones et des Santones. On a pensé, non sans raison, que cette pièce avait une 1 Montfaucon n’a pas omis ce globule dans sa représentation de la Diane de VEROTAL, pi. LII, p. 28 du t. III de l'Antiquité expliquée. 422 MEMOIRES grande analogie de type avec celle sur laquelle on lit LVC qu’on attribue à Luctère des Cadurci. ET DISSERTATIONS. 423 Je transcris ici le passage relatif à cette inscription : VIRIOTAL: C, VALER: XXV AMWYN: LXXV SERVIL’ C MARCYS. L SEQVAN. LXXV SEDVLA. XXV DE . VIRIOD. LXXV ITOTAG L’ ANARTO, LXX. Le R. P. Garrucci ajoute ce qui suit : a Ceci est une liste de gladiateurs avec l'indication du « nombre de leurs victoires. On trouve cette inscription « dans la ruelle qui sépare les deux théâtres et débouche à dans la rue qui mène à la porte de Stabie. « Plusieurs noms barbares se font remarquer : VIRIO- « TALVS, Sequanus, Sedulatus, Viriodus, Itotagus , « Anarto. » Dans l'intérêt de la science, on doit éviter de laisser se perpétuer des erreurs qui peuvent ne pas avoir de gravité pour ceux qui sont au courant de la question, mais qui jettent des doutes et de l'incertitude dans l'esprit des novices. Je ne puis, en finissent, résister au désir que j’éprouve de vous parler de la charmante effigie de guerrier gaulois placée au revers de notre médaille : j'appelle toute votre attention sur celle du n° 4 de la planche VI. C'est la pre- mière fois que je vois tant de détails curieux accumulés dans un si petit espace. Nos peintres et nos statuaires, qui commettent souvent de si lourdes erreurs lorsqu'ils repré- 42h MÉMOIRES sentent nos aieux, parce qu'ils vont chercher leurs types dans les incroyables figures de Dom Martin et de Mont- faucon, devraient bien s'inspirer de cette curieuse effigie *. A voir la tournure fortement hanchée de notre guerrier, on reconnaît immédiatement le gaulois à haute et molle stature des historiens *. Sa taille, veuillez le remarquer, est entourée d'une ceinture, espèce de lemnisque dont les bouts sont ornés de franges; serait-ce la ceinture officielle qu'Éphorus regardait comme le critérium de l’agilité de nos aieux *, ou bien cette cartamera qu'avait citée Varron 1 Il est curieux de lire dans Montfaucon, à propos de l’habit des Gaulois : « Nous n'avons aucun monument de l’habit des Gaulois avant qu'ils fussent « subjugués par les Romains. » Et, en effet, le docte bénédictin reproduit les informes images de dom Martin, sans oublier la statuette évidemment chinoise de la page 86, pl. L du vol. III de l’Ant, ezpl., et les Hercules velus du moyen âge (n°e 4 et 4 bis dela même planche). On se demande à quoi lui avait servi de recueillir les médailles gauloises , et de les reproduire d'une manière supé- rieure à tous les antiquaires de son temps dans la pl. LI, p. 88 du même volume. 2 Cf, Calpurnii Flacci, Declamat. 2.— Strab., IV, p. 195; VII, p. 290. — Paus., Phoc., XX, p. 847. — Amm. Marcell., lib. XV, cap. XII, p. 106; lib. XXXI, cap. III, p. 620. — Appian., Celtic., p. 1220.— Diod. Sic., V, p.212.— Arrian., Exp. Alex. , p. 11.— Flor., I, 13.— Sil. Ital., XV, v. 715; XVI, v. 471; IV, v. 1384. — Camill., ap. Liv. V, 44.— Manl., ap. Liv. XXXVIII. — Tacit., Agric., cap. 2; Germ., cap. 4. — Cæs., 1,39; IV, 1. — Pomp. Mel., lib. III, cap. III, p. 75. — Columell., De re rust., lib. III, cap. VIII, p. 225, — Veget., De re mil., lib. I, cap. L.— Vitruv., lib. VI, cap. I, p. 104, — Hegesipp., lib. 11, p. 448. — Manil., Asir., lib. IV, p. 102. — Isidor., Orig., lib, IX, cap. IJ, p. 1006, et lib. XIX, cap. XXIII, p. 1300 ; Chronic., pe 731, — Plutarch., Paul. Æmil., t. I, p. 264. — Procop., Vandal., lib. I, cap. II, p. 178. — Eunap. Sardens., De Gothis in excerp. legat., p. 18. — Q. Cart., lib. IV, cap. 18. — Plin., lib. V, cap. XXII, p. 695; lib. II, cap. LXXVII, p. 230. — Hieronym., In vita Hilar.,t. 1, p. 159.— Aristot., Problem. , Sect., XIV, n° 14. 3 « Ephorus soutenait que les Celtes, c’est-à-dire les Gaulois, portaient des « ceintures pour ne pas prendre trop d’embonpoint, Comme elles étaient toutes « d’une certaine mesure, les jeunes gens qui ne pouvaient plus tenir dans leur « ceinture étaient condamnés à l’amende. — Tov & urep6addcpevov tay vetov u td tH Covns péteov, Cnprovaba, » Strab., lib. IV, p. 199. ET DISSERTATIONS. 125 et dont vous avez retrouvé la mention dans l'ouvrage de Jean Lydus ‘? Ce curieux appendice que je signale pour la première fois, manque sur tous les autres exemplaires que j'ai vus. La ceinture n’est partout caractérisée que par un trait horizontal et par l’étranglement de la taille. Du reste, on peut voir dans toutes les médailles armori- caines que j'ai précédemment publiées dans cette Revue, combien les Gaulois tenaient à la finesse de leur taille. Le même luxe d'ornementation des lemnisques se fait remarquer dans les médailles portant les légendes CATAL et PIXTILOS dont j'ai reproduit le droit sous les n™ 44 et 45 de la planche VI. Mon exemplaire de la première de ces pièces est remar- quablement beau *, et il est très-facile de saisir dans mon dessin qui, je l'espère, sera fidèlement reproduit, les dé- tails jusqu'à ce jour inédits de cette jolie coiffure; la mé- daille de PIXTILOS est également à fleur de coin; mais déjà le type en est dégénéré; c'est bien le CATAL qu'on a voulu reproduire, mais ici l’élégant lacis du lem- nisque est supprimé, et les pendants n’auraient pas de raison d'être, si l’on n'avait pas sous les yeux pour les expliquer, la médaille précédente. Tel est l'art gaulois, et telle est, par conséquent, l’im- 4 Johan. Lydi, De magistrat P.R, lib. Il, 13. Voy. Bulles. archéol, de PAthe- azum francais, deuxième année, juin 1656, p. 42. 2 Notre excellent maître J. Lelewel a complétement échoué dans la repro- duction de son exemplaire de CATAL (| fig. 40 de la pl. VII), qui, sans doute, n'était pas assez bien conservé. Bouteroué ne donne pas cette médaille. Pel- lerin l’a représentée avec ce faire flou et lâché qui se retrouve malheureuse- ment dans toutes les gravures publiées par cet auteur (fig. 16 de la pl. IV du premier volume). La reproduction de Pellerin est d'autant plus impardon- nable, que quarante ans auparavant Montfaucon en avait donné une qui est presque satisfaisante; en effet, le lacis que je signale y est déjà indiqué : seu. lement le nom est écrit IATAL. (Ant, expliquée, t, III, p. 88. ) 126 MÉMOIRES portance qui s'attache à la médaille mère, si je puis m’ex- primer ainsi, c’est-à-dire à celle qui sert comme de mo- dèle à tous les coins d'un même monnayage; celle-là est complète, et celle-là seule peut expliquer tous les détails d'une monnaie gauloise un peu compliquée. Permettez-moi, maintenant, de profiter de la présence de cet exemplaire exceptionnel pour vous faire remarquer la position oblique du sanglier relativement à la hampe de l'enseigne ; il est bien visible ici que ce simulacre, que Duchalais considère comme appuyé contre la lance, est réellement ainsi que je l'ai dit ailleurs, tenu à la main du personnage ; déjà sur l'exemplaire n° 2, ce détail ne sau- rait être méconnu; mais ici il acquiert un degré de certi- tude tel qu’il me parait inutile d’insister davantage sur ce point. Je ferai simplement observer que sur votre médaille, il semble qu'il n'y ait eu ni hampe ni sanglier ; le bras droit tombe ; en outre, entre la main et le bord de la pièce, il existe un petit espace lisse. Sur la plupart des exemplaires de cette médaille, la tête du guerrier paraît nue ou recouverte d'un casque sans vi- sière, dessinant presque exactement la forme de la tête, au point qu'on pouvait douter même de son existence ; aussi Duchalais, qui relève tous les détails de son costume, ne parle-t-il point de casque. Sur mon exemplaire n° 1, le casque existe évidemment ; il est nettement caractérisé par une crista du genre de celle qui se voit sur le casque de la médaille d'EPAD (Epasnactus) et encore par le bord inférieur qui, une fois qu'on en est prévenu, est visible sur presque tous les exemplaires figurés dans ma planche. Enfin vous remarquerez l'entourage radié qui accompa- gne la tête du guerrier, et qui paraît se composer des mè- ET DISSERTATIONS. 427 ches de sa chevelure, et des ailerons latéraux qui décoraient sans doute le casque. Duchalais dit que «le guerrier est couvert d'une cui- rasse et d’une cotte d'armes. » Si notre regretté confrère a vu l'indication d'une cuirasse dans les deux appendices qui chargent les épaules de ce personnage, et qui ressemblent si bien, en effet, aux épaulières des soldats sculptés sur la colonne Trajane, il s’est, je le crois, mépris; M. le marquis de Lagoy a déjà dit que ces reliefs ne sont rien autre chose que les plis du sagum ‘, sorte de vêtement en usage dans la Gaule, et qui s attachait, comme on le voit, non sur l’é- paule, mais sur la poitrine à l’aide d’une agraffe très- nettement caractérisée sur les exemplaires n°° 1, 2 et 4, pour pouvoir être rejeté sur les épaules, où les plis s’ac- cumulaient au point de produire un relief trompeur. Veuillez me pardonner d’être entré dans d'aussi minu- tieux détails de costume à l’occasion de la discussion d’une inscription. Je n'ai pu résister au désir de rendre service à nos peintres et à nos artistes, et de faire mieux connaître un des monuments les plus curieux de l’art gaulois. Sans doute le dernier mot n’est pas dit sur cette mé- daille ; je n'ai pu même trancher les difficultés principales que soulève son examen : ainsi la question de savoir si le personnage représenté est VEROTALVS lui-même, où s'il offre l’image du dieu de la guerre, cette question est tou- jours indécise à mes yeux; de même j'hésite à vous pro- poser de voir la hampe d'une enseigne décapitée dans la haste souvent fleuronnée, placée entre le personnage et le sanglier, enseigne que VEROTAL se préparerait à cou- ronner de nouveau de l'emblème national, le sanglier. 1 Rech. numism. sur l'armement et les instruments de guerre des Gaulois, Aix, 1849, in-4°, p. 18. 428 MEMOIRES Cette idée qui semble, au premier abord, un peu recher- chée, n’est pas contraire au goût et au génie de l'antiquité ; les Romains ont souvent été plus loin; vous connaissez la charmante médaille de la famille. Junia sur laquelle on voit la Victoire ou peut être la Liberté marchant sur un sceptre brisé et tenant dans la main un bandeau roÿal ou une cou- ronne largement ouverte; la légende BRVTVS IMP est ici toute une révélation‘. Dans la médaille de VEROTAL, nous pouvons voir l’image du guerrier courageux s’efforçant de relever l'enseigne na- tionale, mais nous n’avons pas là l’histoire pour confirmer nos inductions. Les n* 4, 2, 4, 6, 7, 44 et 15 sont dans mes cartons. Le n° 3 vous appartient. Le n° 5 fait partie de la collection de M. l'abbé Barraud. Agréez, je vous prie, etc., E. Hucuer. 1 Cette monnaie , imparfaitement décrite par Eckhel et Mionnet à l'ar- ticle Servilia, a été expliquée par M. le comte Borghesi. Elle est donnée deux fois par Riccio, Monete delle antiche famiglie di Roma, à l'article Junia, pl. XXVI, n° 17, et à l'article Servilia, pl. XLIV, ne 11. — Voy. H. Cohen, Descr. gén. des monn. de ta rép. rom., pl. XXXVIII, Servilia, n° 10, Un exem- plaire unique de ce denier faisait partie du trésor découvert, en 1848, dans le jardin du collége du Mans. Voir le Catalogue publié par nous, p. 48, n° 17. ET DISSERTATIONS. ‘429 MONNAIES CONSULAIRES DU BAS-EMPIRE. (PI. VII, n°1.) En général on oublie trop facilement les anciens et les maîtres, lorsque l’on est emporté par le désir de faire con- naitre la solution d’un problème que l'on se flatte d'avoir trouvée. Je vais donc réparer les torts involontaires commis par moi, lorsque je publiai les Monnaies consulaires du règne d'Héraclius, ily a bientôt deux ans’. L'occasion m'en est fourrie tout naturellement par un nouvel aureus que M. H. Zæpffel a eu l'obligeance de me communiquer, et qui provenait, primitivement, de la collection de M. le docteur Tesson. Cet aureus, qui est une variété du n° 2 de la planche qui accompagne mon pre- mier travail, est d'une excellente conservation, et ses lé- gendes ne peuvent laisser aucun doute : DMNH.RACAIO CONSVAIIA. Deux bustes de face, l'un imberbe, mais de même dimension : entre eux une croix. 8. VICTORIA. CONSABIA. Croix sur quatre degrés; à Yexergue CONOB. — AV. 4,4. | On peut conclure maintenant de cette pièce que la légende du droit étant au singulier, s'applique seulement à un seul personnage, c'est-à-dire au consul; il reste les dernières 1 Recue num., 1857, p. 247 ct suiv. 1859, — 2 9 430 MÉMOIRES lettres des deux légendes qui sont toujours un problème dont l'explication est à deviner. Pellerin n’a connu que le decanummium gravé aux n° 6 et 7 de ma planche : il pense que cette monnaie re- présente Héraclius Constantin, et qu'elle a été frappée sous le règne de son père, qui se le serait associé au consulat « quoiqu on ne trouve pas qu'Héraclius I°' l'ait fait consul, « ni même qu'il se soit donné aucun collègue au consulat. » Pellerin pressentait la vérité, mais il eut le tort de ne pas feuilleter assez attentivement les historiens byzantins”. Eckhel ne connut aussi que le bronze édité par Pellerin, et il persista à l’attribuer à Héraclius Constantin créé consul en 617, d'après Nicéphore ; je crois que le docte viennois a pris une date erronée dans l'historien, mais enfin il est encore plus près de la vérité que Pellerin, puisqu'il constate qu'Héraclius I* fit des consuls’. On a vu que ces decanummium, ainsi que les deniers, les demi-follis et les pentanummium qui portent un buste seul, appartiennent, suivant moi, à Héraclius I* lui-même; tandis que les aureus nous donnent les consulats d'Héra- clius Constantin et d'Héracléonas. — Aucune objection ne m'a été faite depuis qui pit modifier ma première attri- bution. C'est donc le baron Marchant qui a eu, le premier, la malheureuse pensée de l’exarque d'Afrique : après lui son opinion fut adoptée sans contestation : Pellerin et Eckhel étaient si bien mis de côté que leurs noms ne sont même pas prononcés dans la dissertation de M. Marchant. Quand je me suis surpris à parler des monnaies consulaires } Peilerin, Meélang., t. I, p. 220. * Eckhel , Doc. num. vet.,t, VIII, p. 224. ET DISSERTATIONS. 431 byzantines, je ne me doutais guère que je ne faisais que poursuivre l'idée de nos anciens maîtres. J'ajouterai qu'à propos du decanummium consulaire d' Hé- raclius, Eckhel rappelle très-judicieusement plusieurs mé- dailles qui rentrent dans le même système. C’est, par exemple, le médaillon d’or et le médaillon de bronze de Dioclétien et Maximien, avec la légende IMPP. DIOCLETIANO III et MAXIMIANO COSS : le type est un quadrige d’éléphants. C’est le moyen bronze de Maxence, au type soit du char attelé de six chevaux, soit du quadrige d'éléphants, avec la légende FEL. PROCES. CONS. IN. AVG. N. —Voila bien un exemple des processions consulaires sur lesquelles j'ai donné quelques détails. C’est le médaillon contorniate portant la tête de Valenti- nien III, et la légende PETRONIVS MAXSIMVS. V. G. CONS’. Rappelons ici que, d'après Nicéphore et Théophane, il y eut aussi des cérémonies à propos de l'accession au consulat des fils de Constantin Copronyme, et de Tibère Constantin : je pourrai peut être, un jour, soumettre quelques attribu- tions, à cet égard. À. DE BARTHÉLEMY. 1 Eckhel , ibid., p. 386. — Mionnet, t. II, p. 141, 146, 201. 132 MEMOIRES ET DISSERTATIONS. 133 plus grande analogie avec celui du lien d'argent de Louis de Male, comte de Flandre (1346-4384). Sur le casque du duc Robert on remarque ce grand panache, qui se voit si distinctement, au-dessus de l'écu penché qui forme le type d'un autre gros, publié par Dom Calmet (Suppl., n° 45), par Duby (pl. LXVIII, n° 4), et par M. de Saulcy (Comtes de Bar, pl. Ill, n° 8). On remarquera encore la chaînette qui rattache à l'ar- mure l'épée de marquis que le duc tient à la main. Le cheval. a la tête empanachée et le corps couvert d’une housse sans broderies. On lit autour : ROB’ DVX : BAR[EJNSIS Z M{archio]. Au revers, une croix fleuronnée dans un entourage formé de quatre cintres, à l'extérieur desquels sont placés dans les angles rentrants quatre bars accompagnés de six croi- settes et de six étoiles. Autour : MONETA : SANCTI : MICHAELIS. Les monnaies, au type du cavalier, que nous avons citées sont des espèces d’or; tl semble que le gros de Robert soit une rénovation, en plus grand,. du: gros au cavalier armé d'une épée et d'un bouclier, frappé par Jean d’Avesne, comte de Hainaut (1280-1304) ‘, peut-être un siècle aupa- ravant, car Robert de Bar, comte en 1352, duc en 1355, west mort qu’en. 1411 ; le-gros, dont le revers porte quatre fleurs de lis aux extrémités de la croix, doit avoir été fabriqué après 1364, époque du mariage de Robert avec Marie de France, fille du roi Jean. La série si restreinte des monnaies de Bar aura à s’enri- © Recus num , première série, t. 1, pl, LV, n° 1, 134 MEMOIRES chir encore d’un denier du même prince, que possède M. le comte de Widranges. C’est une variété qui diffère de la pièce décrite par M. de Saulcy (voy. sa pl. IV, n° 3) tant par le module et les légendes que par le type du revers. L’écu, en forme de losange, est plus.grand et renferme douze croisettes au lieu de six. + ROBT : DVX : BARS : Z MA (et marchio). Revers. + MONETA : SANCTI : MIC’. La croix est placée dans un entourage formé de quatre cintres. A ces deux pièces frappées à Saint-Mihiel , je joindrai la description d’un jeton de la ville de Bar, ayant au re- vers les armes de J. B. Colbert, seigneur de Saint-Pouange et de Villacerf, intendant de Lorraine, conseiller d'État qui, le 21 avril 1661, termina à Bar-le-Duc les négociations entamées pour l'exécution du traité conclu entre Louis XIV et le duc de Lorraine. M. de Fontenay, dans son Manuel de l'amateur de jetons (p. 158), attribuait par erreur cette pièce au grand Colbert, et il n’en a décrit qu’un seul côté. + DE L'INTENCE DE M® COLBERT DE ST PGES CONS® D'ESTAT. Écu aux armes de Colbert timbré d’une cou- ronne perlée; dans le champ [1658]. 3. JECT DE LA CHAMBRE DES COMTES DE BAR. Armes du Barrois. La date a disparu par suite de l'impression de deux pensées en contremarque. Léon Maxe. ET DISSERTATIONS. 135 MON NAIES FRANÇAISES INÉDITES. MANTES. — REIMS. — LYON. {PL VIL.) MONNAIES DE MANTES AU XI° ET AU XII° SIÈCLE. Dans l’ouvrage dont M. F. Poey d'Avant vient d'éditer le premier volume sur les monnaies féodales de France, je remarque, p. 10, la description d’un denier fort intéres- sant, provenant d’une découverte numismatique faite der- nièrement à Bain (Ille-et-Vifaine)‘. Le dessin de ce denier est arrivé trop tard à M. Poey d’Avant pour qu'il pdt lui trouver place sur ses nombreuses planches. Je puis le donner aux lecteurs de la Revue, grâce à l’obligeance de M. A. Bigot, de Rennes. SILIPVS REX. Deux creisettes pattées, et deux annelets- posés er croix. #. MEDANTEVNC.... Croix. 22 gr. (pl. VII, n°2). Icr les légendes ne laissent aucun doute : nous avons- sous les yeux un denier de Philippe I** frappé à Mantes, Medanteum casirum : les chartes donnent au nom de cette ville les formes suivantes : Medunta, Medonta, Medontha, Meduunta, Medanta. Le type est une dégénérescence du t Voy. Recue num., 1858, p. 351 et sui. 136 MEMOIRES monogramme d' Eudes : ajoutons qu'il est identique à celui des deniers attribués à Louis VI portant la légende CASTRVM MAT, NAT ou MATA, ou encore CASTRYH HAYT suivant M. Delombardy. Les dernières pièces avaient été longtemps classées à Mâcon, sur la foi de Duby, puis elles furent revendiquées pour Mantes, et M. Poey d'Avant a maintenu cette dernière attribution. Je pensais trouver quelques renseignements dans un ou- vrage qui vient de paraître dans les Mémoires de la Société des sciences morales, des lettres et des arts de Seine-et-Oise, mais mon attente a été déçue ; l’auteur de cet opuscule n'a apporté aucun document nouveau qui put éclairer la ques- tion : ses planches elles-mêmes sont exécutées de telle ma- nière qu'il faut de la bonne volonté pour y apercevoir quelque chose *. Leblanc, p. 164, n° 8. a donné un denier de Louis VI, au même type que les pièces à la légende NAT, ou MATA, mais qui porte en toutes lettres MEDANTE GASTELLV. Je ne sache pas que cette monnaie existe aujourd hui en na- ture, mais on peut affirmer que Leblanc l'a vue : ne con- naissant pas le denier de Philippe I‘, il ne pouvait pas supposer le denier de Louis VI qui offre avec le premier des rapports d’analogie si évidents. Nous avons donc deux pièces, de Philippe I‘ et de Louis VI qui toutes deux, frappées à Mantes, portent § Recherches sur des monnaies, méreaur, sceaur, jetuns historiques de la ville de Mantes à dicerses epoques de son histoire, par J. N. Loir (de Paris). — J'ai été asser maladroit pour ne pas retrouver les deux chartes de 1006 que M. Loir a vues, citées par Le Blanc, et dans lesquelles il serait fait mention de la mon- naie de Mantes. Mon savant confrère Léopold Delisle a eu l'obligeance, à ma prière, de consulter le manuscrit original de l'Histoire ecclésiastique d'Orderio Vital : on y trouve la mention de solidos medantensium, t. II, f 155, v° lig. 16, et fe 157, r° lig. 8. p— ET DISSERTATIONS. 137 l'ethnique Medante, Medanteum : dès lors il est permis de penser que NAT, MAT, ou NATA CASTRVM nest pas Mantes. Je dirai, comme M. Cartier, en 1836, quil parait assez invraisemblable que la même ville ait porté deux noms aussi différents simultanément . J'ai cherché si, dans le Vexin, il se trouvait quelque loca- lité qui eût pu être l'atelier monétaire des deniers de Louis VI, à la légende castrum nat ou nata; mes investigations, ainsi que celles de mon savant confrère M. Léopold Delisle ont été complétement vaines. J'en suis donc réduit aux conjectures, et voici celle que je hasarde trés-timidement. Le Vexin, dont Mantes était la capitale, fut réuni à la couronne par Philippe I en 1081 ou 1082 : à cette date mourut Simon, comte de Vexin, de Valois, de Bar-sur-Aube, sire de Péronne, Montdidier, Mantes, etc. Ce baron, l’un des plus riches du royaume, avait embrassé la vie reli- gieuse aprés avoir soutenu une interminable lutte contre le roi Philippe qui en voulait à ses domaines. Simon était petit-fils de Raoul [*', comte du Vexin et du Valois : celui-ci avait eu deux fils de sa femme Adèle, fille de Haudouin, sire de Nanteuil, Rameru, Breteuil et Cler- mont. L'un, Raoul II, fut le père de Simon; le second, Thibaut, fut seigneur de Nanteuil-le-Haudouin et eut des descendants jusqu’au x111° siècle. Ne serait-il pas permis de penser que, sous Louis VI, les seigneurs de Nanteuil-le-Haudouin, Adam de Crépy, dit le Riche, ou Thibaut Il, ont frappé monnaie dans leurs domaines, en imitant le type royal de Mantes, berceau de leur famille? Louis VI même n’aurait-il pas pu établir tem- porairement un atelier monétaire à Nanteuil-le-Haudouin ? 1 Recue num., 1836, p. 251 et suiv. 138 MEMOIRES C'est la un fait que les archéologues de cette ville peu- vent étudier et discuter : il est certain que le castrum Nan- togilum peut très-bien, sur une légende monétaire, devenir castrum nat ou nata. Il est certain aussi que ce rappro- chement répondrait à la remarque de M. Cartier qui, dans l'article déjà rappelé, trouvait également invraisemblable qu'un type identique ait pu être employé dans deux villes différentes : les cadets de la maison du Vexin conservaient le type de la capitale du Vexin. | DENIER ATTRIBUÉE A ABNOUL, ARCHEVÊQUE DE REIMS. + GRATIA D....REX. Monogramme carlovingien. x. + REMIS CIVITAS. Croix cantonnée au troisième d'un oméga (pl. VII, n° 3). La fabrique et le style de cette monnaie indiquent le x° siècle : l'oméga qui est gravé dans l’un des cantons de la croix appartient également à cette époque et au commen- cement du xr° siècle. Nous le retrouvons sur un denier au type d'Eudes attribué, il y a quelques mois par M. de Long- périer, à la ville de Soissons : il est gravé également sur les deniers de Reims au nom de Louis IV et de Louis V, et sur des pièces de Philippe I** émises à Senlis‘. Les monnaies rémoises au type carlovingien sont assez communes, et leur style indique clairement qu’elles ont été frappées longtemps après le règne de Charles le Chauve : c'est un type immobilisé qui dut servir aux archevéques depuis 940 époque à laquelle Artaud eut, avec la dignité 1 Revue num., 1859, p. 455, pl. XXI, 1. — Notice de la collect. Rousseau, p. 217, pl. II], 542. — Poey d'Avant, I, 19 et 18. ET DISSERTATIONS. 139 de comte, le droit de frapper monnaie. Le méme fait se présente 4 Chalons-sur-Marne, évéché suffragant de Reims. Depuis 987 époque a laquelle mourut Louis V, le dernier roi dont le nom paraisse sur la monnaie de Reims, jusqu’en 1033, date de l’avénement de Gui I de Châtillon qui paraît avoir signé le premier les espéces archiépiscopales, il y a une suite de quarante-six ans pendant lesquelles l'atelier de Reims ne dut pas chômer : nous savons déjà que de 1021 à 1023, sous l’archevéque Ebles de Roucy, Eudes, comte de Champagne, s’empara du comté de Reims, et frappa monnaie dans cette ville. À la mort de Louis V, l'archevèque de Reims était Arnoul qui, durant sa vie politique mélée aux événements contem- porains, occupa deux fois ce siége, d’abord de 988 à 991, ensnite de 996 à 1021. Arnoul contribua à faire élire Hugues Capet roi de France : c'était un devoir de reconnaissance envers le duc de France qui l'avait sauvé de l’accusation de lèze-majesté dont il avait à répondre devant l’assemblée des barons. Si on a égard à ce fait que les ducs de France copiaient sou- vent, ou imitaient dans sa forme le monogramme carlovin- gien, on reconnaitra qu’Arnoul dut naturellement adopter un type qui avait un double avantage ; il suivait le type de son bienfaiteur, du roi de France : en outre il avait une monnaie qui était semblable à celle de son voisin et sufira- gant , l’évéque de Châlons. L’oméga de Louis IV et de Louis V ajouté dans un des cantons de la croix me semble dater presque rigoureuse- ment cette renaissance du type carlovingien à Reims. Je serais tenté de lui attribuer une variété de cette monnaie que j'ai vue dans la riche collection de M. Saubinet, membre de l’Académie impériale de Reims : 440 MÉMOIRES + GRATIA D-I REX. Monogramme carlovingien. ET DISSERTATIONS. 4141 qui semble présenter un certain nombre de problèmes à résoudre ’. 4350, 30 août. L’archevéque, le doyen et le chapitre afferment leur monnaie pour trois ans à Simon de Beaujeu, moyennant nne somme de 1,800 florins d’or. La part affé- rente sur cette ferme au prélat et montant à 990 florins, est abandonnée par lui au chapitre en échange du tiers de la juridiction de la ville qui lui avait été cédée. 4359, 27 juin et 2 juillet. Amphélise du Péage, bour- geoise de Lyon, possédait par droit héréditaire la charge de graveur des fers de la monnaie : elle cède cette charge à son fils Guionnet l’Amoureux, avec le consentement de l'archevêque Guillaume, du doyen et du chapitre. 1363, 9 septembre. Le chapitre ordonne, sauf le consen- tement de l'archevêque, que l’on fasse à Lyon de la bonne monnaie. 1365, 25 février. Le chapitre confirme les priviléges des monnayers de Lyon, ut est fieri consurtum. 1366, 23 décembre. L'archevèque Charles d'Alençon confirme la cession faite par Amphélise du Péage : il est à remarquer, par les termes de l'acte, qu'elle était de famille de monnayers, puisque c’est elle qui fait personnellement la cession, avec le consentement de son mari Hugonin Garnier *. 1 Les documents dont M. Morin-Pons a déjà fait l’objet d’une communica- tion sommaire à l’Académie de Lyon, sont empruntés à deux sources : d’abord - des actes conservés aux archives départementales du Rhône: ensuite le Re- gistruem de certis gestis super administratione sedis archiepiscopalis Lugdunensis, ms. latin n° 5187 de la Bibliothèque impériale. 3 Cum Amphelesia de Pedagio, uror Hugonini Garnier, ad hoc per eumdem ma- ritum, cum solennilate juris, sufficienter auctorisata, magisterium et sculturam fer- rorum monete nosire Lugdunensis, ad ipsam tunc jure hereditario, ex successione parentum suorum pertinentia, una oum omnibus franchistis, juribus et libertatibus magisterdi ef sculture predictorum, Gutonneto Amerosi, filio suo, dedisset et ces- sisset, ete. 142 MÉNOIRES 1366, 24 février. L'archevèque et le chapitre nomment tailleur de leurs monnaies Raoul ou Rolet Aymerici, clerc, en remplacement de Jacquemet Rotule, bourgeois de Lyon, qui s'était démis de cet emploi : le nouveau tailleur reçoit les mêmes émoluments que son prédécesseur, savoir : 2 deniers par marc ouvré; 20 florins d'or commun pendant les chômages ’, un vêtement complet et une tunique com- mune. 1367, 30 juin. Le chapitre délégue au doyen le droit de choisir le tailleur et le garde de la monnaie, ainsi que de recevoir leurs serments, au nom de l’église et du cha- pitre. Méme date. L'archevèque et le chapitre nomment Petrus de Copaliis de Campania, tailleur de leurs monnaies : son salaire se composait de deux deniers par marc ouvré, un vêtement complet, et une tunique commune, tunica mala de panno, par an; plus 20 florins d'or commun, au poids, par année de chômage. 1367, 18 et 20 septembre. Le chapitre assisté de deux délégués de l'archevêque nomment garde de la monnaie Barthélemy Lamberti, de Romanis. 4367, 4h mars. Prestation de serment de Raoul Aimery, tailleur de la monnaie de Lyon en présence du chapitre. 1368, 5 mars. Jacques Fabri, sacriste de Saint-Just, et Martin de Ulmo, vicaires généraux de Charles d’Alencon, en son absence, ainsi que le doyen Jean de Talaru et le chapitre, nomment garde de leur monnaie Barthélemy de Virbant, changeur, bourgeois de Lyon, pour l'année cou- rante *. Le 19 août de cette mème année, je remarque la 1 Quia contigit dictas nostras monetas plerumque chomare, A cette époque |’a- telier monétaire de Lyon était donc peu actif, ? I] résulte de l'ensemble des documents que nous analysons ici, que le ET DISSERTATIONS. “443 nomination de Jean de Vianne, bourgeois de Lyon, à l'em- ploi de garde de la monnaie ; mais cet acte ayant été biffé dans l'original, il y a lieu de penser qu'il n’y fut pas donné de suite. 1368, 2 octobre. Le chapitre délégue le doyen pour rece- voir les serments du maître et des officiers de la monnaie. 4368, 9 novembre. Le chapitre donne pouvoir au doyen et au chantre de s'entendre avec les gens de l'archevêque pour régler la fabrication de la monnaie. 1368, 17 novembre. Les grands vicaires, en l’absence de l'archevêque et le chapitre, nomment Barthélemy de Mon- tens, dit Thomassin, changeur, maître de leur monnaie qui devra pendant un an être frappée dans le château archié- piscopal de Bechénelein? : il s'agissait de deniers blancs, ayant cours pour 6 deniers viennois, d’autres deniers blancs, dits forts viennois, ayant cours pour 2 deniers, et de deniers noirs, ayant cours pour un denier viennois. — Les premiers devaient être fabriqués à raison de 7 liv. 40 sous viennois au marc d'argent fin, de 4 deniers de loi, 8 sous 4 deniers de poids, et à 2 grains de loi, et un denier de poids de remède : le seigneurage était de 5 sous. — Les seconds étaient 4 2 deniers 8 grains de loi, 44 sous 7 de- niers de poids; le reméde était de 2 grains de loi et 2 deniers de poids : le seigneurage de 4 sous viennois. — Les troi- sièmes étaient à 4 denier 12 grains de loi, 18 sous 9 de- niers de poids; le reméde de 2 grains de loi et 3 deniers de poids ; iln’y avait pas de seigneurage pour les deniers noirs. garde et le tailleur de la monnaie de Lyon étaient choisis, chaque année, de préférence, parmi les changeurs. Pendant tout le temps que durait leur mandat, ils jouissaient, même pendant les chômages, des priviléges attribués aux mon- nayers; à cette époque, le graveur et les ouvriers subalternes étaient done seuls monnayers héréditaires. TAA MEMOIRES Nous remarquons dans cet acte que le maitre est laissé libre de faire graver sur la monnaie tels signes qu'il lui plaira, au gré et pour l'avantage de l'archevêque et du chapitre, pourvu qu'il maintienne l'inscription Prima sedes Galliarum". Cette clause me semble donner la date des contrefaçons que l'atelier archiépiscopal ne se géna pas de faire pour assimiler ses produits aux espèces royales et à celles des États voisins. Cet article permettait non-seulement d’imiter les types, mais aussi de graver le nom ou l'initiale du prélat. Je suis porté à croire que les monnaies de Charles d'Alençon proviennent de la fabrication faite dans son ché- teau après 1368, et je crois fournir aujourd'hui le texte, et aussi une monnaie qui prouvent mathématiquement, con- trairement à l'opinion de M. Poey d'Avant, que Charles d'Alençon signa vraiment des monnaies frappées sous son épiscopat. Qu'il y eut là contrefaçon, c'est évident : seulement il me semble que cette spéculation peu délicate ne peut être considérée comme le fait direct du prélat ; c'est là une ma- 1 Item columus, concordamus et dicto magistro concedimus quod ipse dictas mo- nelas superius declaratus possit et sibi liceat, dicto durante tempore, facere fieri et cudi in dicto castro de Bechineleyn cum omnibus signis, signaculis seu caracteribus que sibi placuerint et videbantur oportuna pro commodo et ulilitate domini archieptscopi ef nosirum decani et capituli prediciorum, et quorum interest, dum tamen in dictis monetis sit scripium in articulo prima sedes Galliarum. Il résulte aussi de cet acte que le maître devait soumettre la monnaie fabri- quée au garde, chargé de procéder aux essais. En cas de contestation entre le garde et le maître, l'archevêque et le chapitre désignaient deux chargeurs ou deux bommes experts dans l’art du monnayage et du change pour juger en dernier ressort. A cette même date, Louis de Fuer, changeur lyonnais , est nommé garde, cusios monetarum sedis Lugdunensis ; Aimon de Neuro et Gilet de Cuyselio, chan- geurs, sont nommés experts, en cas de contestations. ET DISSERTATIONS. 445 nœuvre d'agents subalternes qui, après s'être engagés à payer des redevances assez considérables, employaient tous les moyens pour faire des bénéfices qui leur permissent de s'enrichir en faisant honneur à leurs engagements. Le seigneur, souvent, n'était peut-être guère plus responsable ici que les rois de France ne l’étaient des exactions des fer- miers généraux. 4369, 27 juin. Charles d'Alençon et le doyen Jean de Talaru nomment garde de leur monnaie Jean de Villars, bourgeois de Lyon, avec plein pouvoir de faire tout ce qui touche à la fabrieation, hormis les cssais. Le garde jouissait de toutes les immunités attribuées aux monnayers des ser- ments de France et de l'empire. 1369, 9 septembre. L'archevèque et le chapitre créent Humbert Vialet, bourgeois de Lyon, maître de leurs mon- paies, et mandent à Jean de Villars, garde de ladite mon- naie de lui remettre les espèces fabriquées qu il avait entre les mains. — Il s'agissait de forger au château archiépis- copal de Bechivelleyn des monnaies suivant le règlement du 47 novembre 1368, avec les modifications suivantes : Deniers blancs, ayant cours pour 6 deniers pièce, à 3 de- niers 20 grains de fin, 8 sous 4 deniers de poids, 1 denier de remède en poids. | Denirs blancs, ayant cours pour 2 deniers viennois pièce, à 2 deniers 4. grains de fin, 14 sous 7 deniers de poids, 2 deniers de remède. Deniers noirs, ayant cours pour 4 denier viennois, à A denier 6 grains de loi, 16 sous 8 deniers de poids. Le seigneurage était de 3 sous viennois par marc de monnaie blanche. Le nouveau maitre des monnaies était maintenu dans le droit de choisir le type qui lui conviendrait sub quocumque 1860.— 2. 10 4h6 MEMOIRES signo el contrasigno quod eidem placuerit, pourvu qu'il con- servat la légende Prma sedes Galliarum. — Le 10 octobre, Jean de Villars et Humbert Vialet prétaient, devant le cha- pitre, le serment accoutumé. 4371, 22 avril. Le chapitre prescrit de faire des mon- naies au type ancien : Voluerunt ef consensierunt quod scudatur moneta ad signa et formam antiquiora, aliler non. Cette courte délibération semble indiquer qu'il y avait eu quelque remontrance faite au sujet de l’imitation trop ser- vile des monnaies royales. Si ma conjecture est fondée, nous aurions ainsi la date exacte de la période pendant laquelle Charles d'Alençon signa les monnaies de Lyon. I} est à remarquer, d'ailleurs, par tous les actes analysés ici, que la monnaie appartenait par indivis au prélat et au cha- pitre : il se pourrait que ceiui-ci ait pris de l’ombrage de apparition du nom archiépiscopal qui, à la rigueur, aurait pu être revendiqué ultérieurement pour assurer au prélat, exclusivement, le droit de frapper monnaie à Lyon. 4371, 28 avril. L’archevéque et le chapitre créent de nouveau Barthélemy Lamberti, garde de leurs monnaies, pour ouvrer sous Conto de Comilibus, bourgeois de Valence, maître récemment nommé. — Il s'agissait de frapper des gros d argent, ayant cours pour 8 deniers viennois, à ..s.. deniers 8 grains de loi, 8 sous de poids, 2 grains de remède en aloi et À denier en poids; des deniers blancs, ayant cours pour 6 deniers, à 3 deniers 8 grains de loi, 8 sous 2 de- niers de poids, 2 grains de remède d’atoi et 4 denier de poids; des deniers noirs appelés forts, ayant cours pour 2 deniers, à 2 deniers de loi, 13 sous 8 deniers de poids, avec même tolérance que les précédents; des petits deniers noirs, ayant cours pour 4 denier, à 4 denier de loi, 16 sous de poids, 2 grains de remède d’aloi et 3 deniers de poids. ET DISSERTATIONS. 4h7 Ii est ajouté que le maitre pourra diminuer ou augmenter les monnaies suivant les variations des espéces du roi de France, et aussi qu’elles devront porter la légende Prima sedes Galliarum, avec le type du soleil et de la lune. Le seigneurage dû par le maître était de 400 florins d'or, 4 payer annuellement. 4371, 30 avril. L’archevéque et le chapitre nomment Conto de Comitibus, bourgeois de Valence, maître de leurs monnaies qui étaient toujours frappées dans le château de Bechevelin, aux conditions analysées dans l'acte pré- cédent. 4374, 29 mai. Nouvelle confirmation, par Charles d’A- lencon , de la cession d'Amphelise du Péage. 4373, 2 octobre. Pendant l'absence de l'archevêque , ses grands vicaires et le chapitre nomment mattre des mon- naies Pierre de Vareyo, bourgeois de Lyon, pour ouvrer soit au château de Riorliers, soit à celui de Bechivellene : le maître pendant l’année précédente paraît avoir été Ma- thieu Burgo. Pierre de Vareyo devait faire des blancs, ayant cours pour 6 deniers viennois, à 3 deniers 16 grains de loi, 8 sous 6 deniers de poids, en remède 2 grains d’aloi, et 2 deniers de poids; des Fors, ayant cours pour 2 deniers, à 2 deniers de loi, 15 sous de poids, en remède 2 grains d’aloi et 3 deniers de poids; des peti!s deniers noirs, ayant cours pour 1 denier, à 1 denier de loi, 18 sous de poids, en remède 2 deniers d’aloi, et 3 deniers de poids, le tout au marc de Lyon. . Les types et les légendes devaient étre les mémes que sous le maitre précédent, et le cours ainsi que la valeur identiques à ceux de la monnaie royale; le seigneurage s'élevait à quadragintos francos auri legilimi ponderis et va- 148 MEMOIRES loris, à partager suivant l’usage établi entre le prélat et Ie chapitre. 4375, 8 avrit. Le chapitre confirme aux monnayers et à leurs familles des priviléges semblables & ceux du serment de France. 1378, 29 mars. Ordonnance du chapitre au sujet d'une fabrication de monnaies. 1379, 10 décembre. Le chapitre nomme un procureur pour poursuivre des individus accusés d'avoir contrefait les monnaies dans l’étendue du comté de Lyon. — Ser- ment du garde, maître et tailleurs de la monnaie lyon- naise. 4380, À février. Jean de Talaru, archevéque, et le doyen du chapitre créent Barthélemy Lamberti maître de la mon- naie sedis ecclesie nostre Lugduni. Je passe à la description des monnaies inédites de la pé- riode à laquelle se rapportent les textes ci-dessus. + PRIMA SEDES. Deux annelets terminent la légende. KROL, au-dessus, une mître, au-dessous, une fleur de lis, le tout cantonné de quatre annelets. R). + GALLIARVM. La légende commence par deux an- nelets ; croix fleurdelisée et haussée sur un pied, 45,30. : Cette pièce, décrite dans la Numismalique du Dauphiné, de M. Morin-Pons, est une imitation du pelit dauphin de Charles V sur lequel la mitre est remplacée par un dauphin, et qui pèse le même poids (pl. VIT, n° 6). + Même légende que ci-dessus. L cruciforme, accosté d'un croissant et d'un soleil. Ry. Mémes type et légende que ci-dessus. Cette monnaie qui offre la plus grande analogie avec celle qui précède a été évidemment frappée après la délibération du chapitre du 28 avril 43714 (pl. VII, n° 6). ET DISSERTATIONS. 449 + Entre quatre points; PRIMA: SEDES. L cruciforme, accosté du soleil et de la lune, dans un trèfle. GA LL IAR YM. Croix fleurdelisée coupant la légende et cantonnée au premier d'un soleil, au deuxième et troi- sième d'une fleur de lis, au quatrième d’un croissant (pl. VII, n° 7). + Même légende et mème type, sauf que le type lyon- nais n’est pas aceosté du soleil et de la lune. ÿ. + GALLIARVM. Croix grecque cantennée comme celle- qui est gravée sur la monnaie précédente dont celle-ci semble être une subdivision. (pl. VII, n° 8). À. DE BARTHÉLEMY. ET DISSERTATIONS. 454 Une imitation du delphinal de Guignes VIII (1343-1350) *. C'est encore une contrefaçon du gros à la couronne de Philippe de Valois dont je donne ici le dessin. Gette pièce, que j'ai achetée à Bourg en Bresse, diffère en plusieurs points de celle qu'a publiée M. Soret, laquelle est fabri- quée à Pierre-Chastel *. Sur la mienne on lit : LVD:D-SABAVDIA ( Ludovi«us de Sabaudia) entre les bras d'une croix; autour : + BNDICTV:SIT NOME:DNI:NRI:DEI ( et non IhV, comme sur le gros de M. Soret ). Revers. M CA NIONIS (moneta castelli Nionis) autour de tournclles surmontées d'une couronne fleurdelisée. Bor- dure de dix fleurs de lis, avec une croisette ( onze lis sans croisette sur le gros de Pierre-Chastel ). Argent. Poids, 17,95. Le gros publié par M. Soret nous monire des tournelles surmontées d'un petit édifice à créneaux qui imite la cou- ronne royale, tout en représentant le Petri-Castellum. Le nom de Nyon ne justifiait pas ce détail, aussi le gros que je publie offre-t-il une copie plus hardie de la couronne de Philippe VI. Cette contrefaçon constituait une bonne spéculation, car les espèces françaises avaient cours un peu partout; et le roi, n'ayant aucune autorité sur le baron de Vaud, ne pou- vait, comme l'avait fait précédemment l'empereur Albert d'Autriche, interdire l’usurpation de ses types monétaires, On peut remarquer, au reste, que l'empereur lui-même, bien qu’évidemment pressé par l'évêque de Lausanne, avait usé de ménagements dans sa charte d'interdiction. « Fa 1 Promis, Reali di Savoia, pl. supp. 111, et Rod. Blanchet, pl. V, n° 11. 2 Recue num., 1850, p. 142, vignette. 452 MEMOIRES ET DISSERTATIONS. propter fidelitati tue committimus et iniungimus studiose quatenus ab huiusmodi cesses penitus et desistas donec coram maiestate nostra edoceas legittimis documentis si quid tibi iure competat in hac parte hoc nullatenus. » M. Rod. Blanchet parait croire que le gros de Pierre- Chastel appartient à Louis I‘; mais, comme il est évident que cette pièce, aussi bien que celle portant le nom de Nyon, est une imitation d’une monnaie royale française d'émission postérieure à la mort du premier baron de Vaud, on ne peut hésiter sur son attribution à Louis II. . Voici donc la monnaie de Nyon retrouvée ; les docu- ments recueillis avec tant de soin par M. Promis nous ap- prennent que les comtes de Savoie ont fait fabriquer dans cette ville des monnaies à divers types, et nous fournissent les noms des onze maîtres qui ont dirigé la fabrication de- puis 1390 jusqu'en 1427; mais le savant antiquaire de Turin n’a publié aucun acte relatif à cet atelier, à l'époque des barons de Vaud. Nous savons seulement que Nyon fut cédé, en 1294, à Louis I par son frère le comte Amédée V, et fit retour à la couronne de Savoie en 1359. On ne saurait dire si les émissions de l'atelier de Nyon furent abondantes; mais il est constant que maintenant les monnaies des barons de Vaud doivent être comptées parmi les plus rares. Je ne connais pas un second exemplaire du gros dont je publie ici le dessin. FEUARDENT. 1 Monn. du Léman, p. 81. BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE. Pau. Lampnros. ’Avéxdoroy voutope TovdéApou tod Budzp- Govtvou, ©: tprécyou Ev6orzs (Monnaie inédite de Guil- laume de Villehardouin comme tiercier de I’Eubée), dans la Né« Ilasdwpa. Athènes, t. X, numéro de février 4860, p. 481. Le curieux denier que vient de publier M. Lampros appar- tient à cette riche collection dont nous avons donné le sommaire à Ja page 489 de notre dernier volume. 11 porte, d'un côté, la croix ancrée, avec la légende G.P’AC ( Gulielmus princeps Achate); de l’autre, +4-NE.GRI.P. ( Negripontis ); au centre, le chiffre Ill surmonté d’un signe d’abréviation et exprimant le titre tertiarius. Billon. Cette monnaie si précieuse, unique , que l’auteur a recueillie lui-même chez un paysan de Chalcis, dans l’ile d'Eubée, est le premier, le seul monument connu de la domination franque dans cette ile qu'il ait pu découvrir jusqu'ici après de persévé- rantes recherches. Guillaume de Villehardouin, prince d’Achaie de 1246 à 1277, avait d’abord épousé (vers 1234) une fille de Narjaud de Toucy 454 « BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE. et de N., fille naturelle d’Agnés de France, sœur de Philippe- Auguste, Cette première femme étant morte, Guillaume se remaria en 4259, à Patræ, avec Anne, fille de Michel IT, despote d’Epire. C’est là tout ce que Buchon avait pu re- trouver quant aux alliances du prince d’Achaie, et ces ren- scignements ne permettaient pas de comprendre comment Guillaume de Villehardouin était devenu seigneur de Negre- pont. Mais les recherches historiques de M. Hopf sur Carysto ! ont fait voir qu'ayant d’épouser Anne, Guillaume avait eu une seconde femme qui mourut en 1235. Celle-ci, nommée Carin- tana, était fille de Ricardo dalle Carceri, seigneur, pour un tiers, de l’Eubée , et c'est ainsi que Villehardouin acquit un titre à la possession de ce fief. M. Lampros, à l’aide de ces documents, donne un historique entièrement nouveau de la baronnie de Negrepont. Jacques d’Avesnes, lieutenant de Boniface de Monferrat, roi de Salo- nique, s’empara de l’ile en 1205, et la divisa en trois fiefs qu’il céda à ses compagnons d’armes Ravano dalle Carceri, Peccoraro dei Peccorari di Mercanovo et Gibert, dont le nom de famille demeure inconnu , mais qui était venu de Vérone avec les deux autres. A Jacques d’Avesnes , mort en 1210, succéda Ravano, qui réunit les trois fiefs. Après la mort de celui-ci, en 1216, par suite de l’intervention de Venise, l’ile fut divisée en trois seigneuries indépendantes. L’une, au midi du pays, où se trouve la ville de Carysto, échut à la veuve de Ravano; la partie sep- tentrionale, avec l'important château d’Oreo, fut donnée à Merino et Ricardo dalle Carceri, fils de Redondello et petits- fils de Ravano. Enfin, le centre où est située la ville de Negrepont ou £'gripos appartint à Guillaume et Albert, fils de Gibert men- 1 Ces recherches, d'abord traduites de l'allemand en gree par le savant M. R. Rhangavi, ont paru dans les n°° 131, 132 et 133 de la Pandore; elles ont été ensuite traduites en italien et publiées à Venise en 1856 par M. G. B. de Sardagna. BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE. 155 tionné plus haut. Chacun des seigneurs d’un tiers de l’Eubée fut Bommé Z'ercier de Negrepont. En 1209, Venise avait établi dans l'Eubée un bail , magistrat qui devait seulement protéger et juger ses nationaux, mais qui ne tarda pas à s’immiscer dans les affaires intérieures de l’île. Cependant, après la mort de Ricardo dalle Carceri (1220), son domaine et le château d’Oreo revinrent à sa fille Carintana, femme de Guillaume de Villehardouin , ct celle-ci étant morte sans enfants en 1255, son mari fit valoir ses droits, Mais les deux autres tierciers, Guillaume de Vérone et Narzoto dalle Carceri, excités par le bail vénitien , s’emparérent d’Oreo, vou- lant conférer cette troisième seigneurie à un de leurs parents, Grapella dalle Carceri. Villehardouin, irrité, appela prés de lui les tierciers et les retint prisonniers. Leurs femmes et un grand nombre de chevaliers de leurs familles accourant vers le bail vénitien , obtinrent sa protection. La République envoya des forces, sous le commandement de Marco Gradenigo , qui en- traina Guy de la Roche , seigneur d’Athénes; après treize mois ils s’'emparèrent de l’Euripe , en 1259. Mais Guillaume leur fit la guerre, les défit à Carydi, et envoya Guy de la Roche à la cour de saint Louis. Puis s'étant uni à son beau-père, Michel II, des- pote d’Epire, pour combattre l’empereur Michel Paléologue, il , fut vaincu et fait prisonnier. Guy de la Roche, rappelé de France, reçut le titre de duc et délivra les barons de l’Eubée , Guillaume de Vérone et Narzoto dalle Carceri. La prise de Constantinople par le césar Alexis Stratégopoulo, en 1261, mit fin aux dissensions des Francs de l'Eubée. Villehardouin, après trois ans de captivité, donna pour sa rançon à Michel Paléologue ses meilleures forteresses, et con- sentit à se réconcilier avec ses barons et les Vénitiens. 11 fit donc la paix, le 44 mai 1262 , avec Narzoto dalle Carceri, Guillaume de Vérone et Grapella dalle Carceri, à qui il céda les droits de Carintana sur le tiers de l’île. Deux jours après, le bail Andrea Barbadigo confirma cette paix au nom de la République. Il ré- a OA VO PMU OS C 456 BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE. sulte, dit en terminant M. Lampros, dont nous abrégeons beau- coup le récit, que Guillaume de Villebardouin prétendit, du chef de sa femme Carintana, à la possession d’un tiers de l’Eubée, de 1255 à 1262, et que prisonnier de Michel Paléologue, il ne put pas réellement battre monnaie pendant les trois dernières années, C'est donc entre 1255 et 1260 que le denier décrit plus haut doit avoir été fabriqué , suivant l’opinion du savant numis- matiste d'Athènes exposée dans les intéressantes pages que nous traduisons ici. A. L. Lemovi DE LA Germanie. — Un passage du VI° livre de César, relatif à la présence des Volces Tectosages dans la Germanie, vient d’être, comme on sait, expliqué et justifié par notre savant ami M. de Saulcy, à l'aide de la numismatique (voy. Revue, 1859, p. 318). Dans un très-intéressant mémoire de M. Deloche sur les Lemovices, que l’Académie des inscriptions a couronné en 1856, et qu’elle vient de faire imprimer, nous trouvons un fait qui offre une grande analogie avec celui que M. de Saulcy a mis en lumière. Tacite nous apprend qu’il y avait en Germanie un peuple appelé Lemovit, voisin de la Poméranie, et paraissant avoir occupé un territoire qui forme aujourd’hui le Mecklem- bourg. Les Lemovit étaient voisins des Gofhones , lesquels par- laient la langue gauloise : Gothinos gallica.... lingua coarguit non esse germanos (Tacit., Germ., lib. XLHI); M. Deloche, frappé, du reste, comme M. de Saulcy, de l’assertion de César au sujet des colonies que les Gaulois envoyaient au delà du Rhin , pense que les Lemovit étaient aussi de race gauloise, et tiraient leur origine des Lemovices. Nous nous bornons à si- gnaler le mémoire de notre savant collaborateur à l'attention des archéologues, qui trouveront dans cette œuvre substantielle et considérable d’utiles recherches et des aperçus nouveaux. A. L. CHRONIQUE. MÉDOC M. l'abbé Cavedoni a publié dans le Messaggere di Modena, n° 1587, du 31 août 1857, une notice sur une découverte de deniers romains faite en Hongrie dans le voisinage de l’antique ville de Sabaria, aujourd’hui Sarwar. Cinquante-neuf de ces deniers sont venus enrichir le Musée d’Este à Modène. Au nombre de ces deniers se trouve une pièce dont voici la descrip- tion : IMP. CAESAR. DIVI F. HT VIR. R. P. C. autour du champ qui est vide : au milieu un petit objet de forme allongée. 5. Simpulum, aspersoir, preefericulum et lituus. — Æ. Ce denier est de la plus grande rareté. Ni Orsino, ni Patin, ni Morell, ni Vaillant, ni même Mionnet, ni M. Riccio n’avaient eu connaissance de cette pièce. Goltzius semble en avoir eu un exemplaire sous les yeux; mais, à son ordinaire, il altère la légende et dit que la pièce est d’or (Fast., p. 190; Numism. Aug., tab. XXVII, 8). M. Cohen en a donné le premier la des- cription et le dessin en publiant un exemplaire qui faisait partie de sa collection, dans son bel ouvrage sur les Médailles de la République romaine, p 163 , n° 56, pl. XXI, Julia, 33. Lorsque M. l'abbé Cavedoni rendit compte de l'ouvrage de M. Cohen dans le Bulletino arch. Napol. (aono V della nuova serie, p. 122), il avait pensé que M. Cohen était tombé dans une grande erreur, en publiant comme authentique une médaille supposée par Goltzius. Plus tard, lorsque je donnai dans la Revue une tra- duction de l’intéressante critique de M. l'abbé Cavedoni, j'avais tenu à défendre l’authenticité de la pièce de la collection de M. Cohen, en rappelant le jugement qu’en avaient porté les 458 CHRONIQUE. plus habiles connaisseurs français, MM. Prosper Dupré et Rollin hen ab an ainulant ana fnnie avamnlaimns da na nana danias sa CHRONIQUE. 459 Jules César, qui porte AVGVR. PONT. MAX., et ces pièces peuvent servir d’une certaine façon à expliquer la présence de ces insignes d'augure et de pontife. Octavien avait été admis dans le collége des Pontifes dès l'année 706, le jour même où ilrevêtit la robe virile, et dans le collége des Augures vers Pépoque de la bataille de Philippes (Borghesi, Decad., VII, oss. 7). Je pense, ajoute M. Cavedoni, que la forme allongée du præfericulum, semblable à celui des aureus de Munatius Piancus, septemvir épulon, et un peu différent du pref riculum augural des monnaies de Jules César et de Marc-Antoine peut- être rapporté à la dignité d’augure qu'Octavien reçut le septième jour de janvier de l’an 741 (Borghesi, 2. cit.). On peut prendre deux des insignes pour des attributs de la dignité d’augure, et deux pour indiquer celle de pontife. Ii y avait dans la découverte de Sabaria plusieurs deniers d'argent de Tibére fayant au revers le type habituel de la Piété assise. Et M. l’abbé Cavedoni fait la remarque que c’est probablement un de ces deniers portant au droit la tête laurée de Tibére, TI. CAESAR DIVI AVG. F. AVGVSTVS que les disciples des pharisiens présentèrent à Notre-Seigneur Jésus- Christ : comme il est dit dans l'Évangile, l'effigie et le nom de César étaient gravés sur cette pièce : Cujus est imago hæc et superscriptio? Matth., XXII, 20. Tibère avait conquis la Pannonie vers la fin de l'empire d’Auguste, et en triompha l'an 12 de notre ère. C'est vers la fin du règne de Tibère que le dépôt de Sabaria parait avoir été ‘ enfoui. J. W. COLLECTIONS DE MÉDAILLES EN AMÉRIQUE. Monnaies devenues rares. — Depuis plus d'un an, la recherche et la collection des anciennes pièces de monnaie est devenue chez les Américains presque une passion. C'est une maladie de toutes les classes de la société : elle règne chez les deux sexes. 160 CHRONIQUE. Il faut dire que l’attention de ces intrépides collectionneurs est surtout portée vers les anciennes monnaies de leur patrie; ce- pendant celles des autres nations commencent a étre recher- chées. On pourrait supposer que la série des monnaies du nouveau monde est encore fort restreinte, et qu’un collectionneur peut les réunir toutes en peu de temps : il n’en est rien. Il existe des centaines de variétés de monnaies américaines. Elles commen- cent avec la pièce des îles Sommer, frappée pour les Bermudes au xvur® siècle (vers 1612, au type du sanglier et du vaisseau), et pour laquelle tout amateur est disposé à payer aujourd’hui un prix fabuleux ; elles finissent avec le cent (centième de dollar, valant 5 centimes) de 1859, frappé en nickel. C’est donc un sujet de grand intérêt. Les monnaies coloniales, comme on les appelle ordinairement, sont également nombreuses, et quelques- unes sont devenues très -rares. Elles ont toutes une connexion plus ou moins directe avec l’histoire des premiers temps du pays, et l'examen d’un cabinet de monnaies de médailles bien pourvu est l’exact résumé des annales de l'Amérique. On a , en effet, les monnaies frappées par la France pour la Louisiane , par l’Angleterre pour le pays tout entier, mais qui n'ont jamais eu circulation que dans les Carolines (par exemple, le halfpenny de 1694 au type de l’éléphant }; celles que les dif- férents Etats ont fait frapper avant l'établissement d’un hôtel des monnaies fédéral; enfin une grande variété de monnaies et médailles de Washington. La valeur de ces monnaies dans le commerce des médailles parait maintenant à peu près fixée. On a même un prix courant pour les spécimens les plus rares. De nombreuses ventes aux enchères pour les monnaies seulement ont eu lieu cette année, et les prix ont été à peu près unifurmes, en tenant compte tou- tefois du bon état comparatif des monnaies ainsi vendues ; mais les bons spécimens d’une belle conservation ont toujours obtenu à peu près le même prix. Le cent de Washington compte parmi les plus chères espèces. CHRONIQUE. 461 Celui de 1792 a obtenu 20 dollars (le dollar = 5 fr. }; celui de 1791, 15 dollars; le cent de cette dernière année diminue main- tenant, et l’on peut en devenir acquéreur pour 10 et quelquefois 6 dollars. Le cent de Washington de 1794, dont nous nous occu- pons, est celui qu’on nomme communément le grand aigle. Le cent au petit aigle de la même année est très-rare et a une valeur beaucoup plus grande. Il s’en est vendu depuis 17 dollars jus- qu’à 35. Le cent à l’aigle des États-Unis se vend 5 dollars 95 c. C’est probablement un essai du premier hôtel des monnaies ; il porte d’un côté les lettres U.S. A. (États-Unis d'Amérique) et de l’autre treize barres. Le cent du Kentucky est en réalité une monnaie anglaise avec treize étoiles an revers, et dans chaque étoile l’initiale d’un Etat. Il se vend 3 dollars 50 c. Le granby, la première monnaie de cuivre frappée en Amé- rique , est l’œuvre du D: Highley, à Granby (Connecticut); il se vend de 13 dollars 50 à 44 dollars 50. Le demi-dollar de Washington, qui a le méme type que le cent de Washington de 1792, se vend 87 dollars. Comme cette monnaie est trés-rare , elle peut trouver un prix beaucoup plus élevé, s’il y a des amateurs. Les monnaies aux N. E. (ainsi appelées parce qu'elles portent sans autre type ces deux lettres, initiales des mots New England), et qui sont les premières monnaies d’argent américaines (frap- pées vers 4651), se vendaient très-bien 22 dollars 50 le shilling, et 14 dollars le six-pence (60 centimes), et valent actuellement beaucoup plus. Le groat (40 centimes) de lord Baltimore, frappé sous le règne de Charles II par ce lord pour le Maryland (CAECILIVS DNS TERRÆ MARIÆ), s’est vendu 28 dollars, et le shilling de Chalmers, frappe particulière à Annapolis vers la fin de la guerre de l’indépendance, 9 dollars. La pièce coloniale franco-américaine, frappée en France pour une colonie qui se proposait de former un établissement dans 1860. — 2. ll 162 CHRONIQUE. le New-York septentrional , s’est vendue 5 dollars 50; l’immunis columbia, pièce de cuivre de New-York de 1783 ou vers cette époque, a obtenu le même prix. Les pièces à la rose américaine (Rosa americana, utile dulci ; sous George I** et George II), frappées par le célèbre Wood, qui, après avoir fabriqué pour l'Irlande ces impopulaires monnaies de cuivre que Swift attaqua du haut de la chaire en 1724, avait obtenu un brevet pour frapper des pièces de cuivre, destinées aux plantations anglaises, se sont vendues, suivant la variété et le bon état relatif des exemplaires, de 4 dollar à 4 dollar 25 la pièce. Les monnaies de cuivre de la Louisiane de 1724 et 1722 : deux L enlacés sous une couronne ; COLONIES FRANÇAISES, se vendent de 2 dollars 75 à 3 dollars 50 (43 fr. 75 c. à 17 50 c.). Les frappes de Washington et de l’In- dépendance de 1783, de 1 à 2 dollars; enfin, la frappe de Washington (Galles du Nord), 3 dollars 75. Ce que nous venons de dire est suffisant pour donner une idée générale des prix payés pour de simples monnaies par les collectionneurs. Quelques-unes des monnaies des séries régu- lières de l’hôtel des monnaies des États-Unis sont excessive- ment rares, ainsi qu'on peut s’en convaincre par les prix payés pour de simples spécimens de la liste suivante : Dollar de 17%. ..,....,....,., 7 dollars 25 (36 fr. 25 c. | Demi-dollar de 1796. ........... 8 — 75(4 fr. 75 c.) Demi-dollar de 1797. ...... 5 — 26 (26 fr. 25 c.) Aigle volant (demi-dollar de 1838 qui n’a jamais été dans la circulation ). . 14 — 650 (72 fr. 60 0.) Cent de 1793, de. ..,..,..... 2 à 9 » (10 à 45 fr.) Cent de 1/99,de. ,....,... 2àù 10 — » (10 à 50 fr.) Cent de 1804, de. ,,.,,.,..., la 6 — n ( 5 à 30 fr.) Ces cents sont fort rares, et quand on en rencontre aujour- d’hui, les prix n'ont plus de limites. Nous devons dire que , malgré les prix élevés que nous venons de citer, les collectionneurs amateurs doivent payer beaucoup plus cher, parce que ce sont des marchands spéciaux qui achè- CHRONIQUE. 463 tent à ces prix dans les ventes aux enchères, et qui prélévent en- suite un grand bénéfice lorsqu'ils revendent. M. M. DÉCOUVERTE DE MONNAIES ROMAINES. Dans le delta formé par les communes dé Méro uville , Intre- ville et Rouvray-Saint-Denis (Eure-et-Loir), se trouve une vaste plaine connue sous les noms de Sampuy et la Mône; dans ce dernier champ on a découvert depuis deux ans des grands bronzes par centaines de kilos : Auguste, Trajan, Hadrien , Antonin , Faustine, Marc-Aurèle, Gordien , Philippe , Postume, tous trés-frustes; j’ai cependant trouvé quelques piéces dans un bon état de conservation : Pauline, Albin, Pertinax. Il y a quelques jours, j’ai été assez heureux pour acquérir, provenant du même endroit, quelques centaines de petits bronzes : Postume, Marius, Victorin, Quietus, Macrien ; mais le dépôt le plus important qui soit venu en entier dans mes mains, celui-là trouvé dans la plaine de Sampuy, se compose environ de huit mille pièces, dont je donne ci-dessous le nombre par règne, y joignant la quantité des revers; les pièces de Postume, comme on le verra, quoiqu’en plus grand nombre, n’offrent que dix variétés de revers, et entre autres des pièces portant l’indi- cation de son second consulat, ce qui donne lieu de croire que l’enfouissement a été fait la seconde année du règne de ce prince. Avec les huit mille monnaies décrites, on a trouvé un grand nombre d'objets en bronze : fibules, serrure, clef, des frag- ments d’un coffret, etc., et une bague d’argent, dans le châton de laquelle est encastré un Marc-Aurèle d’or. On a aussi découvert, it y a environ dix-huit mois, un petit pot de terre noire, contenant une centaine de pièces d’or et un collier formé par quatre monnaies romaines encastrées. Les deux champs indiqués au commencement de cette note sont parsemés d’une quantité si considérable de débris de tuiles et de poteries romaines, que depuis 1856, époque à la- MEMOIRES ET DISSERTATIONS. ne mme PS nee mn LETTRES A M. DE LONGPÉRIER SUB LA NUMISMATIQUE GAULOISE. (PI. VIII.) Quatrième article. — Voir le n° 6 de 1858, p. 437, le n° 5 de 1859, p. 313, et le n° 6 de 1859, p. 401. V. Mon CHER AMI, Une fois de plus l’étude des monuments numismatiques noas vient en aide pour éclaircir un point de critique vi- vement débattu depuis plus de deux ans. Je veux parler de la position des Mandubiens sur le territoire de la Gaule celtique. Existe-t-il des monnaies de cette peuplade? Si elles existent, quels caractères présentent-elles? En d’au- tres termes, de quelle civitas les Mandubiens furent-ils certainement les clients, à en juger par les espèces cou rantes qui se sont fabriquées chez eux ? Grâce à quelques heureuses rencontres, je suis aujour- 1860.— 3. 12 ET DISSERTATIONS. 467 lettres MA sur deux statéres, comme sur le quart de statére. Qu’en conclure? Que ces piéces d’or appartiennent incon- testablement aux Mandubiens ; car où trouverions-nous une autre explication de la présence constante de cette lé- gende ? Les Mandubiens étaient donc, ces monnaies le démon- trent, des clients des Eduens, dont ils copiaient les types monétaires, et ils n’ont rien eu, absolument rien, de commun avec les Séquanes, dont on ne connaît pas une seule pièce d’or; il est vrai que ce peuple nous a laissé quelques rares drachmes d'argent à légende nominale, et un nombre énorme de pièces de potin, qu’il a répandues à profusion dans toute la Gaule, l’Helvétie comprise. Ceei jai pu le constater à plusieurs reprises en visitant les col- lections locales, et en prenant des notes sur les provenances des pièces qui les composaient. Or ces monnaies des Sé- quanes ne ressemblent en rien à nos monnaies éduennes primitives. Voilà qui me paraît décisif pour fixer notre choix sur l'une des deux localités qui se disputent avec acharnement l'honneur d'avoir été l’Alesia de César. Laissons donc sa gloire séculaire à Alise Sainte-Reine et ne nous occupons plus d’Alaise de la Franche-Comté, que comme d’un lieu fort intéressant pour les archéologues, sans aucan doute, mais qui n’a de commun avec l’Alesia de César, qu’une analogie de nom, analogie qui, à vrai dire, est plus apparente que réelle. | Tu connais les pièces coulées de potin, imitées tant bien que mal des monnaies massaliètes, et que leur fabrique interdit de la manière la plus absolue d'attribuer à l’an- tique Massalie. Au-dessus du taureau cornupéte, on voit les deux lettres MA, et jusqu'ici la présence de ce type a 168 MEMOTRES suffi pour faire considérer les monnaies en question comme appartenant à une émission barbare, ordonnée par le peuple de cette opulente cité (pl. VIII, n° 9). C’est une erreur numis- matique que je repousse de toutes mes forces, précisément parce qu'on serait fort embarrassé de montrer une seule pièce de Marseille, frappée sans les traces les plus évi- Jentes d'un art grec plus ou moins dégénéré. Or ces pièces coulées de potin, j'en ai manK bon nombre, et toutes ve- paient ou du pays des Carnutes , ou du fond de la Seine, ou du pays des Séquanes, ou de la Bourgogne. Je n'en connais pas encore un seul exemplaire provenant de la Provence. Je propose donc de les classer, sauf meilleur avis, aux Mandubiens, à la suite des pièces d’or que je viens de faire connaître, et qui présentent la même lé- gende, dont l'application pour elles ne saurait être dou- teuse. Le carnet sur lequel je note patiemment les provenances des monnaies gauloises finira par parler assez haut, pour que la classification des monnaies anépigraphes de nos an- cétres ne présente plus de difficultés sérieuses. VI. La namismatique bretonne est si proche parente de Ja numismatique gauloise proprement dite, que plus j’étudie l'une et l’autre, plus je suis frappé de la difficulté de sé- parer d’une manière nette et précise les monuments qui appartiennent à l’une plutôt qu'à l’autre des deux côtes de la Manche. C'est ici que les provenances deviennent un élément indispensable d'appréciation , quoiqu’a vrai dire on puisse, jusqu à un certain point, être guidé à priori par ET DISSERTATIONS. 4169 de légers indices que comportent le style et la fabrique des deux séries parallèles , indices plus faciles à saisir d’instinct qu'à signaler en termes intelligibles. Heureusement si Robert et moi nous poursuivons avec une véritable passion le but que nous nous sommes proposé, à savoir la classification générale des monnaies de notre Gaule française, de l’autre côté du détroit des hommes d'un savoir et d’un tact au-dessus de tout éloge, étudient avec la même passion les monnaies de la Gaule bretonne, et préparent une publication qui sera la contre-partie de la nôtre. Tu sais à merveille les services déjà rendus à la nu- mismatique bretonne par notre excellent ami S. Birch ; M. John Evans, en entreprenant une classification générale,. comme nous le faisons nous-mêmes, résoudra d'une ma- nière définitive, je n’en saurais douter, les curieux pro- blèmes que présente la numismatique gauloise d’outre- Manche. C'est ainsi que nous verrons se classer, avec toute la pré- cision désirabie , les belles et rares monnaies de Commius et de ses fils et successeurs, Tinco, Epillus et Vericus, puis celles de Tasciovanus et de son fils Gunobelinus, descendant probablement tous les deux de Ségonax, etc., etc. Je n'ai pas la prétention de poser ici des principes que M. Evans établira avec bien plus d'autorité que moi; je dois donc me contenter de signaler à son attention certains faits qui, je le crois fort, doivent se rattacher à la belle série qu’il affec- tionpe. C’est en quelque sorte pour m'éclairer définitivement sur l’origine de deux rares médailles, que je fais dans | cette lettre qu il lira certainement, un appel à sa rare con- naissance des monnaies bretonnes. Je puis parfaitement me tromper, faute de moyens suffisants de comparaison ; mais, à coup sûr, ce savant ne se trompera pas, et l’opinion MÉMOIRES ET DISSERTATIONS. 474 Remarquons d'abord que le style de cette pièce n’est pas purement gaulois, et qu'il se rapproche bien plus du style breton. S'il en est ainsi, la légende s’éclaircit un peu, sans toutefois devenir d’une interprétation indubitable. Rap- pelle-toi les belles monnaies gallo-bretonnes des fils de Commius , et tu seras certainement tenté, comme je le suis, de voir dans le groupe COMIN. les mots COMI. Nepos, le petit-fils de Commius, remplaçant les mots COMF et COMIF, Comi filius des monnaies de Tinco, de Vericus et d’Epillus. Reste à deviner ce que signifient la première et la troi- sième ligne, et c’est un soin que je laisse à nos savants con- frères d’ Angleterre. Je me contenterai de remarquer que le mot ARTVE est probablement un nom propre significatif, puisqu'il semble commencer par l'artiele AR., quelque chose d’analogue peut-être au nom Artur ot Artus, et que le mot VIR de la troisième ligne peut cacher ou le nom de VERICVS, fils immédiat de Commius, nom que devrait suivre alors la sigle F, filius ‘ ; ou un titre honorifique quel- conque analogue au Vergobretus du continent ; ou enfin un nouveau nom propre dont nous retrouverions peut-être la trace dans le nom Arviragus, sur le compte duquel je vais revenir tout à l'heure. | Quoi qu’il en soit, je persiste à croire à l'origine bretonne de là pièce en question , tout en ne tenant pas le moins du monde à l'explication que je propose faute de mieux, et en. » voit un sanglier au revers d’un vase et d'ane cresse pontificale, inserits de « ARTVE-COMVN (pl. IX, 15), on conçoit que c’est le sanglier d’artuenna « ( arduenne, ardennes ) communitas, d’une commune organisée sous les aus- « pices de l’autorité provinciale, et non pas une liguc politique. » 1 Dl est bon de remarquer toutefois que cette traduction est rendue peu pro- bable par l'expression d'une filiation qui indiquerait l'aïeul avant le père, tandis que régulièrement , si le sens que je viens de proposer étuit certain , on devrait lire Artue. vir. f. comi. n. 472 MÉMOIRES attandant ana MM Rich ot Inhn Ruane tranwant la anlution ET DISSERTATIONS. 473 Gweiridd. Comme de plus la chronologie milite en faveur de ce Meuragius, c'est à l’identité de ce dernier et d'Arvi- ragus que je m’arréte sans scrupule. Maintenant existe-t-il des monnaies de ce prince? Je le crois; mais d'abord faisons abstraction de celle que Camden lui attribue et qui n’est qu’un Arivos, chef des Santons, puis des deux tétradrachmes pannoniens que Gough classe au nom d’Arviragus, parce qu'ils présentent la légende ARVI. Ces deux médailles , frappées sur les bords du Da- nube, n'ont rien de commun, qu'une coïncidence fortuite de nom, avec le prince breton; quelle est donc la monnaie que je crois devoir attribuer à Arviragus? C'est la suivante: Tête barbare, à gauche. N. Sanglier, à gauche, et au-dessus BIRACOS.— Argent. Ma collection. Cette monnaie, gravée dans le recueil des médailles du comte de Pembroke (pars. 2, tab. 94), a été décrite d'après cet ouvrage par Mionnet, dans son Supplément, sous le n° 41 des chefs gaulois. Je copie textuellement cette des- cription : 11. — Tête virile nue, à gauche; devant, des lettres effacées. FR. BIRACOS. Sanglier marchant à gauche (Pembroke, p. 2, tab. 94). — Æ. 4. — RK. A. — EF. 0. L’exemplaire gravé dans le recueil de Pembroke est pré- _cisément celui que je possède (pl. VIII, n° 11); il n’est pas possible de conserver le moindre doute sur ce point, lorsque l’on compare le monument a sa représentation. Ainsi l’on n’en connaît qu'un seul exemplaire jusqu'ici ; il m’est arrivé de la vente de Northwick. Le R. 4 de Mionnet . est donc un peu hasardé. Devant la figure il n’y a pas de lettres effacées, mais MÉMOIRES ET DISSERTATIONS. 475 ‘ NOTE SUR LA FORME DE LA LETTRE F DANS LES LEGENDES DE QUELQUES MEDAILLES GAULOISES. Lorsqu'il y a quatre ans j’entrepris de montrer que le caractère II qui se trouve sur un certain nombre de mon- naies antiques est bien réellement un E, et non pas un double I, fait qui, je le pense, ne saurait plus étre contesté par les numismatistes ’, j’avais eu la tentation de parler aussi du caractére F qui donne lieu 4 quelques observations utiles pour l'intelligence des monuments. Mais mon travail était déja bien long, et je craignais d’abuser de la patience du lecteur ; j'ai done remis à un autre temps la publica- tion de mes notes sur cette question, que des devoirs de rédaction m'ont fait ajourner jusqu'ici pour conserver dans notre recueil un légitime équilibre entre l'antique et le moyen âge. J'espérais, je dois le dire aussi, que d’autres anti- quaires, intéressés par les résultats satisfaisants qu'avait fournis l'étude du caractère II, voudraient examiner com- parativement l'ancien alphabet latin et l'alphabet gaulois, 1 Revue num., 1856, p. 73 et suiv. 176 MÉMOIRES et seraient ainsi amenés tout naturellement à trouver ce qu'il y avait à dire au sujet de la lettre F. A mon grand regret, il n'en a pas été ainsi, et je re- prends mon travail au point où je l'avais laissé interrompu. L’F dont je veux parler appartient au même système que II, système que l’on pourrait appeler vertical; cette lettre se présente sous la forme l', composée de deux traits pa- rallèles dont l’un est d’un tiers ou de moitié plus court que l'autre. On voit que ce caractère, tracé avec négligence ou rencontré sur quelque monument altéré par le temps, peut facilement être confondu soit avec un II, soit avec deux I. ll importe cependant de lui attribuer sa valeur réelle; les monuments épigraphiques nous la donneront d’une ma- nière irrécusable. J'avais déjà cité l'inscription C-AVIN-A VICIUICT (C. Ovio Oufentina fecit) qui est gravée sur un petit buste de Méduse conservé au Musée Kircher, à Rome‘. Je dois ajou- ter que sur la lame de plomb trouvée dans la Vigna Ma- nenti et portant une imprécation antiérotique dont j'ai rapporté le texte d'après M. G. B. de Rossi, on lit M. LICINIVM-I'A VSTVM (lignes 4 et 5) et M-LICINI®- l'A VSTA (ligne 14°). Maintenant, si nous étudions les urnes si antiques découvertes dans le tombeau de la fa- mille Furia, à Tusculum, nous relèverons : Q ‘I'OVRIO : A ‘I: (Quinto Fourio Auli filio), P‘F'OV:C°T' (Publio Fourio Caii filio), A‘T'OV-P-I—C-T'OVR—C-T'OVR‘I-M:I—TOV- RIO‘M:F:C:F*°. Nous voyons sur la célèbre lame de 1 Brunati, Mus. Kircher. inscript., p. 51, 104. — Cf, Otto Jahn, Die Ficoro- nische Kista, 1852, p. 61. 2 Bullet. dell’ Inst, arch., 1852, p. 20 et suiv., et le fac-simile dans le Bul- let. arch. nap., nuov. ser., t. I, tav. XIII. 3 Fabretti, Inscript. domest., cap. IIT, p. 120, n° 12, 13; p. 240, n° 644. — ET DISSERTATIONS. 477 bronze trouvée à Rapino les mots l'IIRIINTIIR (ligne 3) et l'IIRIIT (ligne 9*). La curieuse coupe trouvée à Ardée, publiée par le P. Garrucci et par M. Ritschl, nous offre l’in- scription tronquée..... OMO I‘, MIILIAI.DONO.....*. Fabretti nous a fait connaitre deux inscriptions dans les- quelles on trouve T -ALI'ACIVS-SEVERYS et MESTRIAE PROVICTRICI-T'IICIT-M::°. Un graffito du musée de Vienne en Dauphiné, recueilli par M. Delorme, nous four- nit le nom RVI'J... A Pompéi, sur les murailles, le R. P. Garrucci a calqué parmi tant de textes curieux gravés à la pointe : l'IILIX HIC LOCVS IIST—I'ÎRMVS —T'LORVS — TADIVS—AD I'ABIANVM -- J'IILICITIR — QVID l'ACIAM VOBIS et dans l’épigramme contre Rufus : IN RVI'VM..... !ACTITAS*. M. Minervini a relevé au même lieu CL.I'AVSTVS °. Un des fragments de vases trouvés, en 1806, dans le jardin du Luxembourg, porte en grands caractères l'in- scription l'ELIX que Grivaud de la Vincelle rangeait parmi les illisibles °. Les estampilles de potiers me fourniront aussi : OI'.CATI Ritscbl, De sepulcro Furiorum Tusculano disputatio gramm. Berlin, 1853, in-4°, planch. . 1 Mommsen, Die Unteritalischen Dialekte. Leipsig, 1850, Taf. XIV. ® Bullett. arch. napoletano, nuov. ser., t. I, 1853, tav. VI.— Ritschl, De fictit. lilieratis latinorum antiquissimis. 3 Inscr. domest., cl. III, p. 346. — Le P. Garrueci a confondu ces deux in- scriptions en une seule, dont il cite le texte ainsi: T. Alfucio Scantiano Mestrio Provictrix fecit (Inscript. de Pompéi, p. 21). * Raff. Garrucci, Inscript. gravées au trait sur les murs de Pompét. Bruxelles, 1854, in-8*, pl. VII, 2; XVI, 1; XVII, 8; XXII, 4 (Bull. nop., 1V,7); XXVII, 19,31; XXVIII, 18, 19, 58 ( Bull. aep., Il, 6). 5 Bullet. arch. nap., 1858, t. VI, p. 114. © Antig. gaul. ef rom. recueillies dans les jardins du palais du Sénat, 1807, pl. VIN, n° 127. ET DISSERTATIONS. 179 exagére un peu la longueur du second jambage du dernier caractère, déjà altéré par la gravure anglaise. J'ai sous les yeux un exemplaire de la monnaie d'argent qui offre un l' parfaitement caractérisé. Dès lors , plus de difficulté; Orgitirix Atepili filius donne un sens complet auquel nous sommes préparés par la légende Q.DOCI—SAM.F que portent d'autres monnaies d'ar- gent autrefois attribuées aux Santons* aussi bien que par les légendes T.POM.—-SEX.F inscrites sur un petit bronze de travail gaulois *. Si nous jetons un coup d’cil sur la nu- mismatique des Bretons, nous remarquerons : EPPILLVS —COM.F; EPPI.COM.F; E.C.F; VIR.REX—COM.F; VIR— COM.F; VIRI—CO.F; TING —C.F; TIN —, KOM.F; CVNOBELINVS—TASCIOVANI.F; CVNOBE —TASC.FIF; CVNO—TASC.F*. Ces exemples nous montrent en même temps l'usage des abréviations dans les noms d'hommes, et nous autorisent à penser que les mêmes t Dans cette légende, qui a été si souvent mal lue, l'A et I'M sont liés. L'F a tantôt la forme vulgaire, tantôt la forme du [qui est bien connne dans les ioscriptions. Le nom de Dociriz se retrouve inscrit sur deux patèrcs d'argent découvertes à Berthouville (Eure): DIICIR: LVPERCVS EX TEST. PLAC. DOCIRIGIS. Togirix est peut-être aussi au génitif sur les monnaies d'argent qui présentent au droit IVLIVS, car TOGIRI semble être plutôt l’abrége de Togirigis qu’un nominatif privé de la seule lettre finale à laquelle le graveur pouvait facilement donner place, ainsi que le prouve Ja disposition du type. 3 La Saussaye , Gaule narbonnaise, pl. XXII, n° 3.— J. Y. Akerman, 4n- cient coins of cilies and princes, pl. XVII, n° 13. — On sait combien Jes noms de la famille Pompeia s'étaient multipliés chez les Petrocorii. Ce fait, mal compris, 2 même donné lieu à ane espèce de roman qui a pour sujet la famille du grand Pompée dans les Gaules. 3 Materials for the History of Britain, t. I, pl. I. — Akerman, Ancient coins of cities and princes, pl. XXI, XXII, XIII et XXIV, Il est à remarquer que plusieurs monnaies de Cunobelinus ont, comme celle de Germanus, un taureau cornupète pour type. 180 MEMOIRES abréviations existent dans les légendes monétaires du continent. J'ai écrit Atepili bien que la monnaie ne présente que ATPILI. Mais nous connaissons le nom ATEPILOS sur la monnaie de cuivre qui porte aussi le nom TOVTOBOCIO’ ; et il est d'ailleurs à remarquer que l'écriture phénicienne, dont tous les peuples chrétiens de l'Europe font encore usage aujourd'hui, avait à l’origine conservé chez les Grecs, les Latins , les Gaulois, les Ibériens, la faculté d'exprimer certaines voyelles et les consonnes redoublées sans qu'elles fussent tracées. Cette faculté sémitique (je ne dis pas usage régulier) se constate par les monuments épigraphiques; elle semble inhérente à l'emploi du caractère et n'affecte en rien la langue. C'est une anomalie évidente quand il s’agit de la transcription de mots appartenant à des idiomes indiens tels que le grec, le latin et le celtique. Mais il faut en tenir compte pour l'explication de nos antiques mon- naies. J'arrive à une légende bien plus souvent discutée que celle du fils d’Atepilus, ou plutôt Atepillus : GERMANVS INDVTILLI-T C'est ainsi que je la lis sur de bons exemplaires de cette monnaie de bronze portant pour types un taureau cornu- pète au revers d’une tête imberbe ceinte d’un diadéme. Mionnet a vu sur ce bronze INDVTILLI.I., et Welzl de Wellenheim donne la même légende dans son catalogue ; c'est assurément la meilleure forme qui ait été publiée. t Ajoutons Atepo (vase de terre rouge), Atepo (inscript. d’Apt), Ateporiz inscript. d'Ancyre), Atepomarus (Plutarque et inscript. de Narbonne), tous noms propres qui ne peuvent pas plus qu’ Atepillus être pris pour des titres ho- norifiques, ET DISSERTATIONS. 484 Tristan avait attribué à la colonie d’ Industria les monnaies de Germanus; Laurent Beger, en 1672, le réfata, et pre- nant Germanus pour un adjectif, il eut le premier, je crois, l’idée de lire le nom abrégé d’Induciomarus, INDVT suivi du chiffre III *. Le P. Jobert disait en 1692 que « dans la petite médaille de Germanus ou Sermanus, INDVT. III. que personne na pu encore entendre, pourroit bien signifier Indic- tione VIII ou XIIII, le T étant peut-être une faute du moné- taire.» Ce à quoi Bimard ajoutait, en 1739, qu'il avait vu dans le cabinet de M. de Cléves six ou sept médailles en petit bronze semblables à celle que cite le P. Jobert, et que sur la mieux conservée il apercevait un B aprés INDV- TILL]; il fallait, suivant cet antiquaire, séparer I LLIB de INDVT et attribuer les monnaies à Illiberis, Germanus et Indutius ou Induciomarus pouvant être considérés comme des noms de magistrats. Dans le catalogue du musée Tiepolo, imprimé à Venise en 4737, nous trouvons aux addenda de la page 1310 : GERMAN.INDVTI... Bos cornupeta (Indutiomarus prin- ceps Treveri in Germania inferiori tempore Cæsaris). Cin- quante ans plus tard, le catalogue de la comtesse de Ben- tinck répète exactement la même chose. C’est toujours l'opinion de Beger qui prévalait et qui a entraîné le docte Eckhel à condamner la meilleure portion de la lecture proposée par Bimard (qui cum perperam legeret INDV- TILLI), comme aussi à adopter le nom d’/ndutiomarus qu'il inscrit en capitales parmi les légendes véritables. La tradition constante, reposant, il est vrai, sur des er- 1 Obsercationes et conject, in numismata. Cologne, in-4°, 1672 et 1691, p. 47. — Cf. Thesaur. Brandeb., t. I, p. 309. 1860.— 3, 13 482 MEMOIRES reurs, l’autorité d’Eckhel ont sans doute influencé M. Le- lewel qui, en 1841, disait à son tour : « Sur la monnaie des Trèves on lit GERMANVS INDVTILLIL qu'on a bien at- tribué à Induciomar; c'est donc une autre terminaison mar changée en ilil. Ne convient-il pas de considérer cette terminaison pour une distinction honorifique résultant de la réunion du titre epilil, at’pilil par laquelle la contraction de la prononciation forme, au lieu de Induc-mar, un Indut illil ? En 1848, le rédacteur anonyme du catalogue de la vente Pembroke (M. Burgon) , arrivait bien près de la vérité. Dans une longue note, il faisait remarquer que l'E de GER- MANVS étant, sur la médaille qu'il décrivait, réduit à un simple trait, I, il était possible que le dernier caractère, qui lui paraissait avoir la même forme I, eût la valeur d’un F que le sens exige. | M. Edmund Oldfield n'a pas osé accepter cette explica- tion, et se contente de faire remarquer qu'elle lui paraît avoir la probabilité en sa faveur *. Un autre antiquaire bien distingué, M. Samuel Birch, la rejette tout à fait, revient à la légende INDVTILLI.L qu'il interprète par Indutilli li- bertus *. | Je ne crois pas nécessaire de pousser plus loin l’ahalyse. des opinions diverses auxquelles a donné lieu la monnaie de Germanus. 11 me suffit de montrer que malgré les efforts de tant d’habiles antiquaires la question qu’elle soulève n'a 1 Type gaulois, p. 247. Cf. p. 324, 325, 327. — M. Senckler, lisant comme M. Lelewel, a repris à nouveau l'attribution de Beger, Juhrbuch. des Vereins von Alterthums Freunden, 1846, p. 44. 2 Catalogue of the entire Pembroke cotlection of coins and medals, p. 63. 3 On the orthographical form of the names inscribed on gaulish and britieh Coins, dans le Num. Chronicle, 1852,t. XV, p. 116. à On the coins of Germanus, dans le Num. Chronicle, 1855, t. XVIII, p. 166. ET DISSERTATIONS. 183 pu être résolue, uniquement parce qu'aucun d’entre eux n'avait eu recours à l’épigraphie, et que, sans le secours des inscriptions, il ne pouvait venir à lesprit qu’un petit trait isolé appartint au caractère que les plus exercés repré- sentent comme un I séparé d INDVTILLI par un point. C’est à peine s’il est nécessaire de faire observer que les monnaies de bronze au type du taureau cornupète n'ont aucunement rapport au chef des Trevires, Induciomar. Elles sont frappées par Germanus dont on peut comparer le nom avec celui d Hermann ou Arminius. Indutillus n’a d'autre relation avec Induciomarus qu'un élément commun. On ne peut pas plus confondre ces deux noms qu’on ne confondrait Andebrogirix et Andecombus, Ambigatus et Ambiorix, Vercondaridubius et Vercingetorix, Eposognatus et Eposterovidus, Cannitogimarus et Dinomogetimarus , Dagodubnus et Connetodubnus, Vercombogius et Abrextu- bogius. Que l'élément commun soit placé au commence- meut ou à la fin du nom, ce n’est toujours qu'une des par- ties constituantes d’un mot, et les règles élémentaires de la philologie s'opposent à ce que nous prenions cette relation pour une identité. On remarquera qu'il ne s’agit pas de deux copies d’un manuscrit donnant, en un même passage, un nom sous deux formes différentes dont une doit néces- sairement être altérée, si elles ne le sont pas toutes deux. Nous avons, d'une part, un nom bien gaulois (Induciomar) appartenant à une classe connue par les monuments, dont rien ne peut faire suspecter l'authenticité, et de l'autre, un nom (Indutillus) inscrit sur une monnaie antique arrivée jusqu’à nous, au sujet de laquelle nous n'avons pas à ad- mettre des erreurs produites par la négligence ou l’igno- rance des copistes du moyen âge. Quelle singulière histoire on produirait en mettant au 184 MÉMOIRES compte des trois Childebert les actes des trois Childéric sous prétexte de conformité de nom ! . Lorsqu'il s'agit de numismatique gauloise, on ne s est pas cependant toujours fait scrupule de prendre pour identiques des noms qui diffèrent essentiellement les uns des autres. C'est là un vice contre lequel nous ne saurions trop hautement protester. Indutillus appartient à une riche famille de noms gau- lois terminés en illus qu'il est facile de retrouver tant dans les textes que sur les monuments, ainsi qu on le peut voir par la liste suivante extraite de mes notes relatives aux noms d'hommes : ABDUC AGED ALB ARANT Asc CANTAT Cap CARANT Car CAR Cass illus (Cesar, Bel!. civ., III, 59), allobroge. illus (vase de terre rouge). illus (vase id. ). illus (inscription de Metz). illus (vase de terre rouge). illus (vase id. ). illus (vase id. illa (inscription de Messimy), féminin’. i‘lus (vase de terre rouge). illus (vase id. ). illa (inscription d'Auxerre), féminin. illus (inscription de Fleuri, près Orléans). illus (inscription de Dijon). illus (vase de terre rouge). illa (inscription de Meylan, Isére), féminin. illus (inscription de Toulouse). 1 Il existe des noms d’homme gaulois terminés en A, comme Arda, Ateula, Tocca, Cabucea, Suicca, etc.; mais les noms en illa sont des féminins ayant leur correspondant masculin en illus. CATIAT CAVAR CELT CELT COBER Coc- Coc COMIT Coris Cor ~ Cri Cucc CurM Daés DIVICIANT ELv Ep Epp EXCING Fan Fasc GIAM INDERC IÜRAT Mac Mar Maro Mars MarT METH ET DISSERTATIONS. 485 illus (vase de terre rouge). illus (Cesar, Bell. Gall., Vil, 67), Eduen. illus (Cesar, Bell. Gall., VII, 4), pere de Vercin- gétorix. tlla (inscription de Miramas, près Aix) féminin. illus (inscription de Metz). illus (inscription de Feurs). . illa (inscription de Langres), féminin. illa (inscription de Mayence), id. illus (vase de terre rouge). illus (vase id. ). illa (patère d'argent de Brissac), féminin. illus (vase de terre rouge). illus (vase id. ). illus (inscription de Luxembourg). illus (inscription d'Aramon). illus (vase de terre rouge). tllos (médaille gauloise). tllus (médaille de la Grande-Bretagne). tlla (inscriptions de. Narbonne et de Nimes), féminin. illa (J. Capitolin, Anton. pius, I), nimoise. tilus (inscription de Rehweiler). illus (inscription de Grand, près Metz). illus (inscription de Bordeaux). tila (inscription de Marseille), féminin. illus (vase de terre rouge). illus (inscription de Metz). illus (vase de terre rouge). illus (inscription d'Orléans). illa (inscription de Dijon), féminin). illus (vase de terre rouge). 186 MoGET MoNTAN PIsT REG Ric Romoc ‘Rosc Sack SALIC SAM SANV SUR TARV Tasc Tasc Tasc TEss Tour illus (inscription de Nimes). illus (inscription de Como). MEMOIRES illa (inscription de Messeiran), féminin. illus (terre cuite d’Autun) (Inscr. de Worms). tila (inscription d'Aix), féminin. illus (inscription d’ Antibes). illus (vase de terre rouge). illus (Cesar. Bell civ, III, 59), allobroge. illus (terres cuites de Moulins). illa (inscription de Luxeuil) , féminin. illa (inscription de Luxeuil), id. illus (inscription de la Crau d’Aubagne). illus (vase de terre rouge). illus (vase de terre rouge). ). illa (inscription de Luxeuil), féminin. illus (colonne de Cussy). illa (inscription de Narbonne), féminin. illus (vase id. Trouc illus (inscription id. Un Uxap Varic Vass VIN Vix — bu ). illus (inscription d'Orange). illus (vase de terre rouge). illus (inscription de Metz). illus (inscription de Meylan, Isère). tila (inscription de Luxeuil), féminin. illa (inscription de Virieu), id. On trouve encore dans les inscriptions de la Gaule un grand nombre de noms à base latine, tels que Decumilla (Die), Servatilla (Nimes), Bassilla (Saint-Pons), Nepotilla (id.), Jucundilla (Vence), etc., que j'omets afin de mé- nager ici l'espace. J'ai retranché aussi pour la même raison les noms dont la terminaison ilus doit être prononcée illus. Pour compléter le chapitre relatif à la lettre F, il faudrait ET DISSERTATIONS. 487 encore parler des formes let K qui lui ont été données quel- quefois ; mais il suffit pour le moment de les signaler. On les retrouvera tout comme les A d’Atepilus et du rémois Atisius, les R des Petrucori, les G de Divigiagus, les P carrés de Pixtilus et des Petrucorii, dans les inscriptions tracées à la pointe, soit sur les murailles de Pompéi, soit sur les vases d’argent et de terre découverts dans les Gaules. Plusieurs de ces lettres se voient sur les célèbres vases recueillis en si grand nombre à San-Cesario et sur des deniers romains du temps de la république. Nous sommes donc autorisés à penser que les Gaulois ont adopté l'antique alphabet qu'ils ont trouvé en usage lors de leurs expéditions en Italie. L'E sous la forme II s’est conservé longtemps chez nous. On en a la preuve par une inscription d’Aurélien trouvée dans la commune de Tréteau, près Moulins, et récemment publiée par M. E. Tudot* : IMP-CIISARI-L-DV MIITIO‘AVRIILIAN O‘M:GIIRMANICO TRIBVNICII-P-V-CO SS-II1-P-P°CI.AR-L'XXXVI Ainsi, en 275, on faisait encore usage de cet E, qui se voit sur les monnaies de Tasgetius, de Luchterius* et d’Epas- nactus, contemporains de César. M. Peghoux a publié des monnaies trouvées 4 Gergovia, sur lesquelles on lit CALIIDV *, nom placé dans un cartel et qu'il faut rappro-- + Voy. les copies données par Baldini, Saggi di dissert. di Corton., 1738, t. IT, p- 156, et par Garrucci, Bullet, arch. napol., nuova serie, t. I, pl. XI. 2 Enseignes et inscriptions murales qui subsistent encore sur des..construclions enciennes à Moulins, in-8°, p. 14. 3 J'écris Luchterius à cause de la présence du X grec;.cf. lucht, abondance, en celte irlandais. * Peghoux, Essai sur les monnaies des Arverni. Clermont, 1857, pl. I, n° 18, 488 MÉMOIRES cher de la légende bien anciennement connue CALEDV- SENODON:. Le même antiquaire a recueilli à Gergovia un petit bronze portant en réalité CICED VeBRI, ainsi que j'ai pu le reconnaître après un examen minutieux de l’eriginal, pièce importante à comparer avec celle de la Bibliothèque impériale, sur laquelle on lit CICIIDV-BI. M. de Saulcy m'a fait aussi voir le dessin d'une monnaie rémoise de la Bibliothèque de Metz, dont la légende RIIMO-ATISIOS offre une variante instructive. Il est probable encore qu’on doit lire BPIINOS (si l'on examine bien la pièce d'argent publiée par M. Edouard Lambert, pl. XI, n° 16), le nom dans lequel on a vu BIIINOS pour BELINOS. Brennus est un nom célèbre ; je l'ai remarqué isolé, gravé en grands caractères, BRENNOS, sur une pierre du musée de Bordeaux. C'est un nom d'homme et non pas un titre comme on l’a pré- tendu. La présence du P dans VIIPOTA, LVXTIIPIOS, BPII- NOS, Verotalus, Luchterius, Brennus, ne doit pas nous étonner, lorsque nous nous rappelons les relations des Gau- lois avec la Grèce, l'emploi qu'ils faisaient parfois de lé- gendes purement grecques sur leurs monnaies. L’introduc- tion du rhô grec dans une légende latine de la Gaule s'explique donc tout aussi facilement que sa présence dans une inscription recueillie à Alep par le marquis de Nointel et publiée par Spon (Mise. erud. sect. X, n° 37). 10”. — Les dessins sont tellement inexacts qu’on ne peut se faire une idée des légendes ; il en est de même du n° 37 de la pl, III, CICEDV-BRI. 1 J'ai cru, comme tant d’autres, que la légende SENODON pouvait s'appli- quer à un nom de lieu, mais une inscription de Bordeaux, dans laquelle figure Senodonna , fille de Cintugnatus et de Gematua, D'M‘L'SEC-CINTVGNATO ET CEMATVAE’CON-ET SENODONNAE"FIL-SECVRBALA, me prouve que Senodon est bien un nom d'homme, ET DISSERTATIONS. 489 T-FL'IVLIAN VS: VETEPANVS LEG VIH AVG DEDICAVIT MONVMENTVM SVVM SEMPITEPNVM DIS MANIBVS SVIS ET LAETITIAE VXOPI SVAE LIBEPISQUE HEPEDIBUS SVIS POSTEPISQUE EOPVM NE LICEPET VLLI EOPVM Mionumentum alienare] VLLO MODO C'est l'effet que doit naturellement produire l'usage pa- rallèle des alphabets grec et latin dans un mème pays. C'est ainsi que l'influence de l’étrusque amenait l'emploi du K non pas seulement devant l'A, ce qui est conforme au système des grammairiens latins ‘, mais devant l'T et devant l'E, comme nous le voyons dans ce texte publié par Maffei *. D:-M KATTIA AVGV STINA IIT VALIIR MVKIANVS PA RIINTIIS WT VALR FRATRIIS KATEIANYV MVKIANV IIT AVGV STA POSVIIRVNT BIIN MIIRIINTI VALIT MARKIILLINO QVI VIXIT ANNOS XXVIII MIINS Il DI V Je m'arrête ici, souhaitant que cette note ramène les numismatistes vers l’épigraphie antique sans le secours de laquelle ils ne pourront jamais apprécier avec solidité les monnaies de la Gaule. Je m’estimerais fort heureux si plu- sieurs points que je n’ai fait qu'indiquer étaient repris et discutés de nouveau avec tout le soin que notre savant col- laborateur, M. Hucher, vient d'apporter à l’étude du nom de Vérotal. ADRIEN DE LONGPÉRIER. 1 Voy. Revue num., 1858, p. 246. — Cf. Gramm. lat. auct. ant., ed. Putsch, 1605, col. 417, 2252, 2253. 3 Museum Veron., p. 156, n° 1. ET DISSERTATIONS. 494 Ne 6. Téte de Diane à droite, avec le carquois sur l'épaule. - x. Téte de bœuf, la corne gauche abaissée. — Æ. 5. N° 7. Tête d’Apollon à droite. x. AA. Trépied. — A. 3 (pl. IX, n°5). N° 8. Tête d’Apollon à droite. 8. AA. Lyre. — Æ. 5 1/2 (pl. IX,n°6). N° 9. À au milieu du champ. x. À dans un carré creux. — Æ. 3 ( voy. Revue num., 1859, n° 1,pl.I,n°1). N° 40. À à la partie supérieure prolongée. __ x. À de la même forme. — Æ. 2 1/2 (voy. Revue num., 1859, n° 4, pl. I, n°3). ( Les n°° 2 - 40 de ma collection. ) La Rerue numismatique (1857, p. 85 et suiv.) a publié une intéressante et savante dissertation de M. le marquis de Lagoy sur une monnaie dont il propose l'attribution à une ville de Larissa en Thessalie, près du mont Ossa. Cette monnaie est remarquable par la tête bizarre de bœuf re- présentée au droit , et dont les cornes sont recourbées en deux directions opposées. Le revers porte dans le champ les lettres 4, que M. le marquis de Lagoy lit avec raison AA, ce qui le porte à attribuer cette monnaie à la ville de Larissa. M. le docteur Müller, inspecteur du Cabinet royal à Copenhague, conteste cette attribution dans une savante dissertation insérée dans la Revue numismatique (1859, p. 4 et suiv.), et donne cette médaille à Lacédémone, avec d’autres semblables portant sur les deux faces la lettre A, ou la tête de bœuf au droit, et la lettre A au reverse 492 MÉMOIRES Je me permets de proposer une autre attribution, celle à Lappa de Crète, qui me semble plus sûre, et appuyée sur les motifs suivants : Au printemps de 1858, j'achetai dans une vente à Lon- dres un assez grand nombre de ces pièces avec beaucoup d'autres monnaies de l'île de Crète‘. Ces médailles pro- venaient de la collection du capitaine Thomas Graves, qui avait longtemps résidé en Crète, et trouvé ainsi l’occasion de recueillir particulièrement des monnaies de cette île. Dirigé sans doute par la provenance des pièces à la tête de bœuf et au grand lambda isolé, M. Graves les avait de lui-même réunies à celles déjà connues de la ville de Lappa. Le type de la tête de bœuf convient tout naturellement aux monnaies de Crète; la fabrique, la disposition du grè- netis qui entoure les types sur les pièces n° 4 et n° 4, rap- pellent tout à fait les monnaies de cette île. La forme ex- traordinaire des cornes dont la tête de bœuf est munie est peut-être le résultat d’une tradition locale qui nous reste inconnue. La direction dans laquelle se recourbent les cornes varie sur les exemplaires de ma collection: c’est tantôt la corne de droite, tantôt celle de gauche qui s’in- cline de haut en bas. Une monnaie très-rare et inédite , la seule d'argent que je connaisse avec ces types, se trouve parmi les incer- taines de la collection de S. A. R. le grand-duc de Saxe, à Weimar (pl. IX, n° 1), et m'a été communiquée grâce à l'obligeance de M. Preller, conservateur de la bibliothèque et du cabinet des médailles à Weimar. Cette pièce est du même module et porte le même type * Je me propose d'en publier encore qnelques pièces curieuses et inédites. ET DISSERTATIONS. 193 que les plus petites pièces de cette espèce de cuivre; c'est la corne gauche qui s’y trouve courbée en descendant. Sa fabrique est tout à fait crétoise , et par ce motif, comme à cause du type, je crois qu’elle appartient à la série des mé- dailles de Lappa. C'est une obole. Le poids convient aussi aux monnaies crétoises qui sont frappées d'après le système monétaire d'Athènes. L'histoire nous apprend qu'Athènes avait beaucoup de relations avec la Crète; au deuxième siècle avant notre ère, beaucoup de villes crétoises adoptè- rent le pied attique. Nous trouvons même les types d'Athènes sur les médailles de Cydonia, Hiérapytna, Gor- tyne, Polyrhenium et Priansus. Le poids d’un tétradrachme de Polyrhenium avec la chouette (dans le Catalogue Northwick, n° 895) est de 16,08, ainsi la drachme devait peser 4,02 et l’obole 0,67. La médaille de la collection du grand-duc à Weimar pèse 0,71 ; le poids de l’obole de 0,71 donne une drachme de 4,26, et c'est le poids de la drachme d'Athènes au deuxième siècle avant notre ère. | Les types des autres pièces gravées pl. IX, la tête de Diane , la tête d’Apollon, le trépied et la lyre , conviennent aussi à Lappa, et se rattachent au culte des divinités ho- norées dans cette ville. Mionnet (t. II, n° 220) a décrit une médaille de Lappa, semblable à celle du n° 8 (voy. pl. IX, n° 6), mais avec la légende entière AATITIAION auprès de la lyre, et des autonomes d'argent, ainsi que des impériales de bronze avec Apollon lyricine et Diane chasseresse. Quaud on pense que toutes les pièces décrites dans cet article (excepté le n° 4) ont été trouvées en Crète (j'avais acquis vingt-cinq pièces de Lappa de la collection du ca- pitaine Th. Graves), qu'il est certain, en les comparant, 104 uéunibee ET DISSERTATIONS. 495 NOTE © SUR LES MEDAILLES DE LAPPA DE CRETE. (PL IX.) L'attribution proposée par M. A. de Rauch à Ja ville de Lappa de Crète des médailles portant la lettre À au revers de la tête de bœuf, se justifie, ce me semble. de la ma- nière la plus satisfaisante. Les réflexions qui vont suivre confirment cette attribution. On connaît quelques monnaies de Lappa : elles sont de la plus grande rareté. Afin de mieux faire ressortir les rapports de fabrique qui existent entre ces monnaies et les pièces nouvellement attribuées par M. de Rauch à Lappa, j'ai fait graver sur la planche IX deux médailles autonomes et une pièce impériale de cette ville; ces trois monnaies sont tirées du Cabinet des médailles de la Bibliothèque impé- riale. En voici la description : Tête laurée d’Apollon à droite. gw. AATITIAI.ZYAQKOS. Apollon lyricine nu, marchant à droite. Grénetis. AR. 3. — Pl. IX, n° 7. Tète laurée d’Apollon à droite. x. AATINA..ON. Lyre. A. 5. — Pl. IX, n° 8. ©EQ KAIZAPI SEBAZTQ. Tête nue d’ Auguste à droite. x. AATITIAION. Apollon lyricine vêtu d'une tunique talaire, représenté de face. Æ. 5. — Pl. IX. n° 9. On remarquera que sur la drachme (pl. IX, n° 7) le ET DISSERTATIONS. 497 PREMIERE LETTRE A M. ADRIEN DE LONGPERIER QUELQUES COLLECTIONS DU PIEMONT ET DE LA LOMBARDIE, MON CHER DIRECTEUR, Je vous ai souvent entendu parler des numismatistes du nord de l'Italie et des collections dont ils sont les posses- seurs ou les interprètes; vous accueillerez donc avec intérét cette lettre dans laquelle je vais vous ramener à vos sou- venirs. - J'avais déjà entrevu, pendant la guerre, les richesses numismatiques de ce beau pays, et je regrettais que la rapidité des marches m'eût toujours arraché à mon admi- ration , lorsqu'une mission, en prolongeant après la paix mon séjour en Lombardie, m'a permis de revenir sur mes pas et d'accepter enfin l'hospitalité scientifique qui m'avait été si gracieusement offerte. $ I. Gênes. — La collection locale, confiée à l’habile direction de M. Agostino Olivieri ', est tres-nombreuse; l’œil s'étonne s M. Olivieri a publié une très bonne monographie des médailles et des 1860. — 3. 14 D —————— = os. 498 MEMOIRES seulement de l'uniformité du type génois, auquel se sont eux-mêmes soumis Louis XII et François I**. Milan. — J'ai visité à Milan le médaillier de Bréra, Ja bibliothèque Ambrosienne, les collections de M. Carlo Morbio , du comte Verri, du comte Ch. Taverna, et enfin : le Musée monétaire du palais Trivulce. . Brera renferme une collection grecque de premier ordre, des romaines du haut empire où les médaillons abondent, un exemplaire à fleur de coin du sou d'or anastasien au monogramme de Théodoric l’Amale ', une suite de monnaies milanaises *, et quelques types monétaires appartenant à toutes les époques et à tous les pays, parmi lesquels se trouvent de bonnes baronales françaises. Je citerai, parmi ces dernières, le denier de Raimond V, comte de Toulouse (1148-1194), frappé sur fla) d'or. Cette curiosité numis- matique a été exhumée dans les envirens de Nice au nombre de deux exemplaires, différant par le coin. J'ai été assez heureux pour devenir possesseur du second exemplaire, dont voici le dessin *. sceaux de la famille Doria. On a aussi de Jui un ouvrage intitulé : Carte e cronache manosrritte per la storia genovese, dont le troisième chapitre tout en- tier est cousaoré aux documents monétaires de la période comprise entre les années 1138 et 1630. 1 Cette belle pièce, dont l'existence nous a été révélée en 1847 par un article de M. Alfred Senckler, se rencontre assez fréquemment à Milan. + Les lecteurs de la Recue ont pu déjà apprécier la richesse des suites mila- naises par la description des monnaies de Jean Galéaz, comte de Vertus, que M. de Longpérier a donnée l’année dernière dans la fecue, p. 380-392, 3 Les épreuves sur or des deniers du moyen âge ne sont pas aussi introu- vables qu'on le pense généralement. Il y a quelques années on a découvert, sous mes yeux , au village de Vaux (Moselle), au milieu d'un amas de mon- naies d'argent du x111° siècle, une nièce d’or au coin des cavaliers de Mar- guerite de Constantinople , qui se trouve aujourd’hui dans la collection de M. Serrure, de Gand. ET DISSERTATIONS. 199 Le Musée monétaire de Brera, qui ne date que du siècle, a marché trés-rapidement, grâce aux larges sub- ventions que lui accordaient les archiducs. Les monuments monétaires, si variés, dont il se compose, sont très-bien classés par le directeur, M. Biondelli*. La bibliothèque Ambrosienne, legs somptueux du cardinal Frédéric Borromée, possède, à côté de magnifiques cartons de Raphaël et de précieux palimpsestes, des médailles ita- liennes peu nombreuses, mais remarquables par leur con- servation. La collection de M. Carlo Morbio comprend la haute féodalité et descend jusqu'à l’époque moderne ; commencée il y a peu d'années, elle réunit déjà de belles suites de toutes les provinces de l'Italie, des spécimens du mon- nayage des rois de France dans la péninsule, et des médail- lons, dus pour la plupart à l’habile ciseau des anciens gra- veurs italiens. Je vous ferai connaître prochainement un de ces médaillons, qui intéresse notre histoire. M. Morbio a publié la description sommaire de ses di- verses collections *, et donné à la suite la liste de ses pièces doubles *. 1 M. Biondelli, connu du monde savant par ses travaux de linguistique , = tracé, dans un ouvrage intitulé : Saggio sui dialetti yallo-italici, des circon- scriptions qui seront d'un grand secours pour l'étude des monnaies fabriquées par nos pères dans la Cisalpine. % Raccolts del Cavaliers Carlo Morbio, in-8*, Milano, 1857, fuori di Commercio. 9 Catalogo delle momete antic h: duplicate , che si offrono in cambio, p. 132-142. 200 MÉMOIRES Le médaillier du comte Ch. Taverna provient en grande martio do ann nèra le eamto l'natansnt - il renfarmo de ma ET DISSERTATIONS. 201 connue en France, le Victorin d'or portant la légende LEG. V MACIDONICA (sir). La collection des monnaies et médailles frappées au nom des Trivulce est aussi très- belle; on peut seulement lui reprocher de ne pas posséder l'écu d'or au lis du maréchal Jean Jacques. Cet important musée est dirigé par le comte Ch. Taverna, gendre de Ia marquise, et par le comte Jules Porro, son parent, auteur de l’article que je vous ai adressé il y a quel - que temps". Brescia. — Le Musée Patrio, célèbre par sa statue de la Victoire et si pittoresquement établi dans l'enceinte d’un temple antique, possède quelques bonnes pièces romaines et gauloises au type de Marseille. Un amateur de Brescia, nommé Boursoni, a réuni un nombre considérable de pièces italiennes. Pavie. — La coltection peu nombreuse mais très-variée de M. Brambilla, mérite l'attention des numismatistes.. Turin. — ll est inutile de vous parler des richesses der la Bibliothèque du roi. Les ouvrages de M. Domenico Promis, st justement estimés en Italie et en France, en ont déja fait connaitre une partie. Je ne vous dirai rien non plus des monnaies antiques. conservées dans l’Uni- versité; M. Barucchi, à la suite des longues séances que vous avez faites dans les salles consacrées à l’antiquité égyptienne, a dû vous montrer son médaillier. Vous con- naïssez aussi le Musée numismatique Lavy, dont le conser- vateur, M. Cornaglia, a publié en 1840 le catalogue dé- taillé *. 1 Voyez la Revue num., 1859, p. 380. 2 Museo numismatico Lary apparienente alla reale Accademia delle scienze di Torino, 2 vol. in-4®. 202 MEMOIRES § IL J'ai indiqué plus haut le médaillier Trivulce et le musée de Brescia comme renfermant des imitations de la monnaie marseillaise ; j'aurais dû dire que ces imitations se ren- contrent dans toutes les collections du Piémont et de la Lombardie, qu'elles paraissent être des tétroboles, et qu’elles. reproduisent constamment, mais avec un faire tout particulier, la tête de Diane et le lion du groupe classé par M. de La Saussaye entre l'année 400 avant J.-C. et la venue de César en Gaule’. On voit, en général, au- dessus du lion, MAZZA, commencement de la légende du prototype, ou seulement des Z disposés irrégulièrement dans le champ. Quelquefois le mot MASSA est remplacé par le nom du peuple : ainsi j'ai eu occasion de classer dans les collections plusieurs exemplaires dont les légendes 144414 et PIKO rappellent les LIBECI et les RICOMA- GENSES , peuples gaulois qui se groupaient, les premiers autour de Verceil *, les seconds autour d’une localité du nom de Ricomagus , que I’ flinératire d’ Antonin place au sud de cette ville *. M. de La Saussaye avait compris les monnaies des Libeci et des Ricomagenses parmi les pièces de la Gaule narbonnaise, où ces peuples avaient laissé une partie des leurs; mais, adoptant les scrupules de M. de Lagoy, il 1 Numismatique de la Gaule narbonnaise , n° 54 à 115. — Les n° 60 et 66 de Ja planche II de cet ouvrage donnent, par leur rudesse , une idée des pièces qui nous occupent. 2 Les Libeci ou Libui paraissent s'être étendus à l'ouest de Verceil sur Is rive droite de la Sésia jusqu’à la Stura. # Il est à remarquer que parmi les monnaies d’or qui se rencontrent dans le val d'Aoste et qu'on attribue aux Salasses, il en est une sur laquelle on lit le mot FDIK OV; c'est un rapprochement à vérifier. ET DISSERTATIONS. ~ 903 n'avait présenté son attribution que comme provisoire '. . Les diverses imitations de la monnaie marseillaise ont dd former le fonds du numéraire des Cisalpins. On rencontre aussi dans le nerd de l'Italie et surtout aux environs de Mortara, dans la zone comprise entre Novare, le Pô, le Tessin et la Sésia*, des copies de divers deniers consulaires sur lesquelles on lit en général RAVIS et quel- quefois RAVSCI. En voici un spécimen qui fait partie de ma collection : c’est une imitation d’un denier de la famille . Cornélia ?. Le. wonnailes sont assez communes dans les dépôts de la ” Bohème ; elles ont déjà occupé Eckhel* qui en décrit trente et une variétés, et M. Joseph Arneth * qui les considère comme frappées au temps de la république romaine par un peuple pannonien, les Ravisci de Pline, Aravisci de Tacite 1 J'ignore si les imitations des marseillaises aux noms des Libeci et des Ricomagenses ont jamais été mêlées aux dépôts monétaires exhumés en France. Dans tous les cas, ee n’a dû être qu’exceptionnellement, si on en juge par leur rareté dans les collections de notre pays. 2 Je dois ee renseignement à l'obligeanee de M. Cornaglia. ® Cohen, Description des monnaies de la république romaine , pl. XIV, fig. 10. à Numi Barbari inscripti RA VIS ae similiter,— anno 1796 in pradio comitis Sandor prope Budam , cui nomen Bia (bourg à deux milles de Bude ) repertum est depositum numos circiter 600 complexam, Inter hos erans octoginta hujus generis ,. ez quibus selagi sequentes omnes, qui in atiquibus differre sunt visi. Sunt omnes an- gentei, denarii forma et pondere. Qui una reperti sunt alii, erant denarii familiarum romanarum additis aliquot Augusti, Tiberii, ef uno Caligulæ, cujus adeo ætate aus non multo post , fuisse defossi videntur. 5 Zuëlf Remische Militär-Diplome, Vienne, 1843, in-4°, p. 72 et 73 204 MEMOIRES et de Ptolémée. Elles seront venues en Italie par le fait de la circulation. Le territoire que j'ai indiqué plus haut comme four- nissant habituellement en Italie les pièces portant RAVIS , ayant été occupé dés les premiéres expéditions des Gaulois par les LAEVI'; d'un autre côté, l’orthographe des noms de peuple ayant été souvent modifiée dans les textes anciens, et l'L ayant eu à peu près la même valeur que IR, j'avais été tenté d'admettre que les LAEVI et les ARAVISCI, tous deux sans doute de même origine, ne formaient qu'un peuple et avaient la même monnaie. Mais les Laevi ont dd disparaître de la scène politique avec les Insubres, vers 194 *, et, bien qu'on soit incertain sur l’âge du prototype romain, il est difficile de le faire remonter assez loin pour qu'il ait pu être copié par les Cisalpins, même en ad- mettant que ces peuples auraient, après la victoire des Romains, conservé l'usage de leurs ateliers monétaires pendant un certain temps, ainsi que cela se passa dans la transalpine du temps de César et d'Auguste. C'est donc, je le répète, par les échanges que la mon- naie des ARAVISCI est venue, à la fin de la république ou au commencement de l'empire, dans l’ancienne Gaule cisalpine ; et, comme elle s’y rencontre encore aujour- d'hui, il faut en induire que les provenances ne sont pas toujours un guide certain dans la recherche des ori- gines. Puisque j'en suis sur les monnaies des Gaulois, je veux vous dire encore, cher directeur, qu’on trouve très-fré- 1 Libui considunt ; post hos salluvii, antiquam gentem Lavos ligures incolentes circa Ticinum amnem. Tit.-Liv., lib. XXXIII, cap. 36, 2 Walkenatr, Géogr, des Gaules, t. J, p. 142. ET DISSERTATIONS. 905 quemment, dans le nord de I'Italie diverses variétés. de la piéce suivante : Bon or, poids, 75.45 ; ma collection. Cette monnaie est caractérisée par un flan épais, scy- phate , portant d'un côté, dans une couronne, un oiseau; de l’autre, une figure cruciforme placée sur trois globes et surmontée d'un ornement à branches symétriques. Elle est déjà conuue grâce aux travaux de Lelewel ‘, de M. Lambert * et de M. Hucher”. Le savant Polonais, après avoir proposé de l’attribuer à la Belgique, démontre que le nombre des globes ou points n’en indique pas la valeur. M. Lambert y voit un astre à quatre rayons; il n'indique pas à quel peuple elle appartient. M. Hucher en signale la présence parmi les aurei de la ligue armoricaine exhumés chez les Santons, tout en reconnaissant qu'elle n'appartient pas à ces derniers. Cet habile numismatiste en donne ensuite une interprétation peut-être trop recherchée, sur laquelle j'aurai l’occasion de revenir. Nous nous bornerons à constater aujourd'hui que la pièce qui nous occupe se trouve en Gaule, comme en Italie. Si maintenant on examine les dépôts monétaires de la Bohéme, on l'y rencontre encore. Le seu) trésor de Pod- 4 Type gaulois, p. 174 et 365, pl. Ill, fig. 34. 3 Essai sur la numismatique gauloise du nord-ouest de la France, p. 61 et pl. XI, fig. 1. 3 Revue num., 1852, p. 182 et pl. V, fig. 9. 206 MEMOIRES mokle en a répandu bon nombre dans les collections’. Ne faut-il donc pas la classer aux Boii que l'histoire nous montre en Aquitaine et en Italie, et qui donnérent leur nom à la Bohème *? La présence de ces monnaies dans la vallée de l’Éridan leur assignerait une origine assez ancienne, si l'on renoncait à l'expliquer aussi par le commerce, car il faudrait nécessairement admettre que les enfouissements ont eu lieu avant l’année 192 qui vit les Boii écrasés par la puissance romaine. Il me reste encore, mon cher directeur, à mettre sous vos yeux quelques monnaies et médailles franco-italiennes ; cette communication fera l'objet d’une autre lettre. Agréez, etc. Cu. RoBer. Milan, le 1°" novembre 1859. P. S. Permettez-moi de profiter de cette occasion pour redresser une erreur que j'ai commise à la suite de la des- cription du petit bronze de L. Munatius Plancus que vous avez bien voulu insérer dans votre quatrième livraison *. Les beaux deniers ségusiaves, frappés sans doute à Feurs , Forum Segusiavorum, et non à Lyon, que j'ai indiqués comme postérieurs à la fondation de cette ville, sont, il est vrai, classés par Lelewel au temps d'Auguste, c'est-à-dire à l'époque qui suit immédiatement cet événement; mais les 1 Outre la pièce dont j'ai donné la description, on en rencontre en Bohême d'autres de même forme et de même poids, mais nu les accessoires varient, Toutes ces monnaies forment un groupe très-considérable qui sera étudié plus tard dans notre œuvre collective sur la nnmismatique gauloise. 3 La puissante nation des Boii se montre aussi dans l’est de la Gaule, sur le Rhin, en Norique, etc. Une de ces monnaies, qui fait partie de la collection de M. de Saulcy, a été exhumée dans la haute Autriche, à Salzbourg. ® Revue num., 1859, p. 229 et suiv. ET DISSERTATIONS. 907 numismatistes les font remonter aujourd'hui un peu plus haut dans la chronologie. Je n'aurais pas commis cette er- reur sans la précipitation avec laquelle j'ai pris la plume, Ja veille de mon départ, pour vous signaler une découverte que je ne voulais pas laisser derrière moi. M. Monfalcon m'a fait remarquer aussi que la célèbre inscription de Gaëte n’a pas été correctement reproduite dans mon texte. Cf. pour la bonne leçon l'édition de Spon, publiée par MM. Léon Renier et Monfalcon, Lyon, 1858, — page 5, où elle est transcrite d’après l'empreinte prise sur place par un délégué de l’Académie de Lyon, et M. Mommsen, Juscriptiones regni neapolilani latinz. Leipzig, 1852, fol. 4089' : L‘MVNATIVSL:-F-L‘N- L-PRON PLANCVS: COS-CENS-IMP: ITER: VII-VIR EPVLON- TRIVMP-EX-RAETIS: AEDEM-SATVRNI FECIT - DE: MANIBIS- AGROS: DIVISIT: IN: ITALIA BENEVENTI-IN-GALLIA: COLONIAS: DEDVXIT LVGVDVNVM:ET:RAVRICAM _ 1 La version de M. Mommsen ne diffère de celle de MM. Léon Renier et Monfalcon que par le rétablissement d’un point entre MVNATIVS et L. ET DISSERTATIONS. 209 se termine par l'examen d'un sceau que l’auteur attribue aussi à Constantin XIII. C’est à cette dernière partie de la lettre que se rapportent les observations que je prends la liberté de soumettre à votre jugement et à votre approba- tion. Citons d’abord les paroles du baron Marchant, dont la lettre est adressée à M. de Serre, président de la Chambre des députés : « Votre Excellence ne verra pas sans intérêt les dessins d'un troisième sceau qui est encore de Constantin XIII Ducas, pl. IV, fig. 3. Ce monument est le petit sceau, ou du moins un sceau d'une moindre importance que ceux dont je viens d'avoir l'honneur de lui parler. Le dignitaire qui avait sa garde, et le droit de l'apposer en certaines circonstances , était tenu d'y joindre son nom à titre de responsabilité; il scellait de par l’empereur, comme on scelle en France de par le roi : c'est ce que la légende exprime clairement. « On lit, d'un côté, les mots ra ot dov2 (Tw Cw A8AW), autour du monogramme de Constantin XIII, et de l’autre, l'eopyéo Acxpäton (TEOPTIW ALCPATOPI ), qui complè- tent la légende. Tout est au datif, et ne peut être traduit littéralement que par cette phrase : A son serviteur Georges Dicrator. 11 faut par conséquent sous-entendre par l'ordre ou le commandement de Constantin, donné à, ou tout sim- plement, en employant le monogramme, lire Constantin à son servileur, etc. « Mais quelle était la fonction, la dignité que désigne le mot 4wpxrw: ? En exprimant la réunion de deux puis- sances, peut-être est-il encore relatif à la suprématie dans l'ordre judiciaire, Azz. Tout s'entend donc ici facilement : les fonctions du Awpztwe étaient probablement en rapport avec celles de chancelier et de garde des sceaux, qui, dans 910 MEMOIRES nos gouvernements modernes, se trouvent souvent réunies dans la méme personne. » Telles sont les explications du baron Marchant , explica- tions qui vous ont paru trés-peu satisfaisantes, et votre susceptibilité historique et philologique s'est éveillée juste- ment à l'apparition de ce Atez-wp inconnu jusqu'à ce jour. Aussi est-ce avec raison que vous avez ajouté cette observation : « Ni Meursius, ni Du Cange, ni M. Hase, dans sa nouvelle édition du Thesaurus d’ Henri Estienne, ne don- nent ce mot, qui ne se rencontre d'ailleurs chez aucun auteur byzantin. Le sceau de Constantin XIII Ducas est donc le seul monument où soit mentionnée l'expression de Aurgätwp. Cette circonstance fait supposer que les fonc- tions auxquelles elle s’appliquait n'eurent ni une grande durée, ni un grand lustre dans l'empire d'Orient. On peut méme se demander si notre auteur a lu correctement, et si le sceau porte réellement ce nom. » Je souligne cette dernière phrase parce que, selon moi, elle indique le nœud de la difficulté, et il me sera facile, je pense, de prouver que vos soupçons étaient fondés. Mais avant de nous occuper de ce Arzpztwo, nous devons exa- miner le monogramme que le baron Marchant attribue faussement à Constantin XIII, attribution malheureuse qui l'a jeté dans des constructions vicicuses et dans des expli- cations embarrassées. Le monogramme en question ayant la forme d'une croix, est, ainsi qu'il l'a remarqué lui-même, entouré des mots té c@ Oovdw. Mais les lettres qui le composent n'ont aucun rapport avec celles qui entrent dans le nom de KONCTANTINOC. Ces lettres sont KBOHO, et répon- dent à la formule KYPIE BOHOEN, qui se complète par les nots Tw Cw AOYAW venant se grouper autour du ET DISSERTATIONS. 944 monogramme. Cette formule ou invocation se retrouve sur un grand nombre de monuments du inéme genre, et par- ticulièrement sur quelques-uns de ceux que le baron Mar- chant a expliqués lui-méme. L’invocation est écrite ou dans le champ en lignes droites, ou en légende circulaire, ou bien enfin, comme ici, exprimée dans des monogrammes ayant forme de croix. Ces derniers présentent quelques diffé- rences soit dans le milieu, soit dans le haut de Ja croix. Un petit cercle occupe toujours le milieu, et est traversé par les branches horizontales, de manière à figurer à la fois un Oet un ©. Dans le dessin donné par le baron Mar- chant, le cercle est resté intact et reproduit un O. Bien que la même circonstance se retrouve sur un monogramme publié par Ficoroni (part. 1, cap. XVII, fig. 10}, mais d’ailleurs d'un dessin incorrect, je pense qu'il y a là une erreur, et que la petite barre transversale doit exister sur les monuments eux-mêmes. Dans d'autres reproductions d'un monogramme pareil, le petit cercle est partagé en quatre par les branches de la croix qui se coupent horizon- talement et verticalement (voy. Ficoroni, part. I, cap. XII, fig. 8 et 10; c. XVI, fig. A, etc. XX, fig. 7, et M. Sabatier, Revue arrhéol., mai 1858, pl. II, fig. 6) ; mais le dessin est- il exact? c’est ce qu'il faudrait vérifier. Une autre différence se présente à l’extrémité supérieure de Ja croix, qui se termine toujours par l’un des signes suivants: Y, X, T ou ?- . Ii serait inutile d'indiquer ici tous les monuments qui contienneut la légende en question. Il suffira de parcourir le recueil de M. Kirchhoff, où on trouvera toutes les manières plus ou moins abrégées dont elle est exprimée. On verra d’a- près cela que les moyens decomparaison ne manquaient pas au baron Marchant, et on a lieu de s’étonner qu il n'ait pas 212 MÉMOIRES reconnu la prière en question dans le monogramme qu'il a cru devoir attribuer à Constantin XIII. Une observation paléographique me paraît nécessaire. On sait qu en composition le motrp@-0ç s exprimait souvent par un À surmonté d'une barre ; les exemples en sont très-nom- breux : il nous suffira d’en citer deux, tirés des monuments que nous examinons ici. Dans le recueil de M. Kirchhoff, sous le n° 9005, on trouve un plomb publié d’après Castelli, et qui est ainsi conçu : K[YPIE] BO[HJOEI TO xO AOYAQ TPHTOPIQ YIIA[TQ] KAÏ ANOTAPIQ SIKEAÏAZ, c'est-à-dire rpurovoragiw Zislies. Sous le n° 2 de la planche II de la collection publiée en 41858 par M. Sabatier dans la Revue archéologique, nous trou- vons un monument du même genre avec cette légende : KYPIE BOHOEI TO 30 AOYAQ, et sur le revers : INANNH MATPIK{Q ASIIA@APIQ, ce que l’éditeur tra- duit par Jean Patrice Spathaire, ne tenant point compte de lA qui précède ce dernier mot, et qui est mis là pour . rpwro, C'est-à-dire [Iowrocnz97piw, Protospathaire. Ce u est pas la première fois que cette erreur a été commise, et on a déjà fait remarquer que Richard de Montaigu, dans son édition des Lettres de Photius, a écrit partout AorzSapie. au lieu de Tpwasra97ct»s, ne connaissant point l'abréviation dont nous venons de parler. D'après cette observation paléographique une première conjecture s était d'abord présentée à mon esprit, et, dans la légende dont .nous nous occupons, j'ai été conduit à lire ACTPATOPI au lieu de AICPATOPI, c’est-a dire [owrostoéton, Georges Prolostrator, en prenant le A pour un A et en changeant I( en CT. Mais cette conjecture , trop arbitraire, je l'avoue, a fait place à une autre qui me semble plus probable et plus conforme aux éléments paléographiques ET DISSERTATIONS. 213 fournis par le dessin du baron Marchant. Je proposerais de lire AICTATOPI qui reproduit presque exactement le mot AICPATOPI, la seule différence portant sur le changement du P en T. fl s'agirait donc là de la dignité de la cour im- périale connue ou plutôt désignée par le mot AIKTATOP. Suivant une glose citée par Du Cange et d’aprés Michel Psellus, ce mot serait synonyme de Acsimztoc, ce qui pa- rait confirmé par l'auteur anonyme du Catalogue en vers des offices de la cour de Constantinople, qui mentionne les ' Atatzrwpe: immédiatement après les Yratot, et qui ne parle point des Arsizzzo. Les fonctions du Aurätwp, ou, ce qui revient au même, du Acsinzto:, ne sont pas bien connues, et Du Cange avoue manquer de renseignements à cet égard. Parmi les personnages qui ont porté ce titre figure un Georges qui vivait à la fin du x11° siècle. Le monument dont nous avons le dessin sous les yeux serait-il le cachet de ce _ Georges Dictator? C'est ce qu'il serait difficile de dire ; tou- ‘jours est-il qu’il date à peu près de la même époque. Quoi qu'il en scit, et bien qu'on ne sache pas exactement en quoi consistaient Îles fonctions du Aurärwp, nous sommes certains de l'existence de cette dignité mentionnée par plusieurs écrivains , et je me crois suffisamment au- torisé à le substituer au mot AICPATOPI, dont l'existence ne s'appuie sur aucun renseignement historique. Je ne sais, mon cher monsieur, si vous approuverez cette dernière conjecture. Dans tous les cas, j'espère que la pre- mière partie de ces observations obtiendra votre assenti- ment, et que vous reconnaitrez.avec moi que le baron Marchant s'est singulièrement trompé en attribuant a Constantin XIII le monogramme en question. Agréez, etc. . E. MILter. 1860. — 3. ° 15 24h MEMOIRES QUELQUES MONNAIES DES PRINCES DE LA MAISON D’ANJOU. (Pi. xX.) N° 4. Grand K gothique, entre deux besans, dans un cercle. y. Croix allongée, entre les deux mots IE. XS. (Jesus Xpistus) , surmeontés de signes d’abréviation en forme de ©, Le tout dans un cercle uni. — Or. Poids, 4 grammes (pl. X,n° 4). N° 2. Grand K gothique entre deux lis, dans un cercle uni. Traces de quelques lettres en légende circulaire. n. Comme au numéro précédent. sauf que les branches de la croix sont accostées de deux points ou besans. — Or. Poids, 15,75 (pl. X, n° 2). N’ 3. Autre du Musée royal de Naples; on distingue une troisième fleur de lis au-dessus du K (pl. X, n° 3), mais on n apercoit aucun caractère au pourtour. N° A. Mémes types. Cuivre. Collection Benghi (pLX, n°4). | Taro et demi-tare de Charles I, d'Anjou, rei de Sieile, frappés à l'imitation des monnaies des rois normands ct allemands qui l'avaient précédé. Les. tari de ces derniers portent la légende grecque IC XC NIKA ({rcoës Xptora: vxa) > ET DISSERTATIONS. 246 à laquelle la monnaie du prince français substitue une abréviation latine. N° 5. Une petite monnaie de la collection Tafuri,. qui, d'après son poids, paraît être un tiers de ¢aro, a pour type du droit un cavalier, dont le cheval est couvert d'une housse fleurdelisée. Cette pièce, d’une excessive rareté, publiée par le prince San-Giorgio, ne peut appartenir qu'à Charles I (pl. X, n° 5). Charles I avait d'abord fabriqué des augustales , belles pièces d’or imitées de celles de Frédéric '. Il paraît avoir cessé cette fabrication en 1267, alors qu'il ordonua l'émis- sion des reali, mezzi-reali et nuovi tari, qui ont eu cours jusqu'en 1278, époque à laquelle vinrent les beaux saluts d'or, qui rentraient dans le nouveau système monétaire de son frère saint Louis. Les tari et reali de Charles I sont décrits par le prince San-Giorgio Spinelli dans uo ouvrage cité plusieurs fois par la Revue numismatique *, et qui donne les monnaies arabes, grecques et latines de la Sicile. Les Normands et les Arabes avaient imité le module et l'épaisseur des mon- paies byzantines. Les Allemands et les Angevins ont con- tinué. En raison de la rareté de ces pièces, qui n’ont encore paru dans aucun ouvrage de numismatique français, nous avons cru utile de faire dessiner ces tari d’après les exem- plaires très-beaux de conservation qui appartiennent à la 1 Voy. l’augustale de Charles dans l'ouvrage de Saint-Vincens sous le n° 12, dans le recueil de Duby, pl. XCIV, n° 2, et mieux encore dans le Trésor de nu- mismatique (art monétaire chez les modernes), pl. XXIX , ne 3, et dans Mader, Kritische Beyträge, t. V, pl. III, n° 30. — L’augustale de Frédéric avec cou- ronne a été pub liée par Muratori, recueil d’Argelati, t. 1, tab. XXVII, no 8, 2 Monete cufiche battute da principi Longobardi, Normañni e Suevi, Naples, | 1844 , p. 72, 201, 221, 252. | 216 MÉMOIRES bibliothèque de Marseille , en y joignant les variétés qu'a- vait rassemblées le savant numismatiste de Naples. N° 6. +KAROL-REX. Grand K gothique, entre deux besans. x. +--SIC-—IE-.. Ecusson à trois fleurs de lis, surmon- tées du lambel de Provence. —Or. Poids, 0*,9 (pl. X, n° 6). N° 7. Autre de la collection Tafuri, offrant partout des annelets au lieu de points; on y lit SICI-REX. (pl. X, n° 7). Sous le n° { de la pl. V, M. le président de Saint- Vincens donne le dessin, fort incorrect, de l’augustale (agostaro), portant l'effigie de Charles I, d'Anjou, roi de Sicile. Elle est bien plus exactement reproduite par Duby, pl. XCIV, n° 2. D’après M. de Saint-Vincens (Histoire de Provence, par Papon, t. 1I, p. 576), cette monnaie existe- rait à Vienne dans le Cabinet impérial. Un second exem- plaire était conservé dans le Cabinet de M. Haumont, à Paris, et fait aujourd'hui partie de la collection de la Bi- bliothèque impériale ; un troisième se trouve dans le Cabinet de feu M. C. J. Dassy, à Meaux. Après avoir décrit cette monnaie, Saint-Vincens dit. avec raison, qu'il y a beaucoup d'apparence qu'elle appartient à Charles I, de Provence, parce qu'elle ne porte que le titre de roi de Sicile. En effet, l'attribution ne saurait être dou- teuse. Charles I ne prit le titre de roi de Jérusalem que neuf ans après le supplice de Conradin. Mais, de même que Saint-Vincens, Duby, qui copie presque textuellement sa phrase. est étonné qu'aucun do- cument du règne de Charles | ne fasse mention de mon- naies d'or frappées à son coin. Nous avons déjà vu dans un précédent article (Rerue, 1860, pages 47 et 48) que le salut d'or qui ne porte pas d'épithète chrono- logique appartient à ce prince, puisque son successeur a ET DISSERTATIONS. 247 ajouté sur le sien le mot SCD (secundus). J'ignore jusqu'à quel point ont été poussées les recherches, du reste con- sciencieuses, du président de Saint-Vincens, qui avait les archives de Provence sous sa main. J’essayerai, dans un nouvel examen qui, malheureusement pour moi, nécessite un déplacement, d’arriver à un doeument monétaire relatif à la série provençale. Mais, en ce qui concerne la pièce qui nous occupe et les précédentes, je dois faire observer qu'il s'agit de monnaies frappées à Naples, et qui, par conséquent, ne peuvent avoir été l’objet d'aucune ordon- nance datée d’une ville de Provence. Il faut donc en recher- cher la création dans les ouvrages Kaliens qui, comme ceux. des deux Chiarito, des Fusco, de Chioccarelli ,. sont consa- crés à fa reproduction et au commentaire des chartes den- nées par les princes angevins dans l'Italie méridionale. Au reste, on remarquera l'analogie de notre pièce n° 6 avec le revers de l'augustale publiée par Saint-Vincens et Deby, Mader et le Trésor de numismatique. Cette monnaie, aequise récemment de M-. Rousseau, appartient 4 la bibliothèque de Marseille. Ne 8. I'IhR°ET—SICL-REG-: (Johanna, Jerusalem et Si- cilie regina). La reine assise sur un fauteuil à deux têtes de hon. . x. COM—TS PV—CE-AK—PDM- (Comitissa Provinciz ac Pedemontis ). Croix séparant les lettres de la légende et cantonnée de quatre lis. Type des carlins au lis de Robert. — Argent. Poids, 45,4 (pl. X,n°9). C'est pour la première fois que je trouve le type des carlins au lis de Robert avec le nom de Jeanne. Je ne connais pas non plus d'autre monnaie de cette princesse avec le titre de comtesse de Piémont. Saint-Vincens (pl. 1X, n° 5) donne, dans le même format, un demi-lis de Robert égale- 918 MEMOIRES ment avec le titre de comes Pedemontis, qui s’y trouve inscrit en toutes lettres. Cette pièce, extraordinairement rare, a été reproduite par Duby (Supplément, tab. VIII, n° 6). La bibliothèque de Marseille en possède un fort bon exemplaire. La monnaie de Jeanne dont nous donnons le dessin appartient au Cabinet de M. le comte de Clappier. N° 9. -+ MARIA: VNXIT: PEDES:XRISTI. Buste de face et nimbé de sainte Madeleine, dans un cercle perlé et can- nelé intérieurement. #. + O:CRVX :AVE:SPES : VNIGA: Double croix de Lor- raine, accostée des lettres R°R: aussi dans un cercle perlé et cannelé (Renatus Rex). Magdalin. — Or. Poids, 1#,5 (pl. X, n°140). | Jusqu'à présent aucune mention n'avait été faite d’un magdalin frappé par Réné de Provence. Dans le numéro de janvier 1860 de la Revue (p. 62, pl. III, n°12), nous avons décrit celui de son neveu et dernier successeur, Charles III. C'est après l'envoi de cet article que j'ai décou- vert la nouvelle pièce que je signale au milieu d’un fatras de pièces grecques, romaines, modernes, etc. Il y a à re- gretter que le peu d'épaisseur du flan ait amené une contre- frappe de la croix qui nuit à la description exacte du buste de la sainte : mais ce qu’on aperçoit est trop semblable à la pièce de Charles Il] pour ne pas voir que l’une est la copie de l’autre. Heureusement les: légendes sont dans un état trop parfait, ainsi que le côté de la croix et les ini- tiales Renatus Rex, pour laisser le moindre doute sur l’attri- bution. Ce revers et ces initiales ne sont, au reste , que la reproduction des monpaies d'argent de ce prince frappées à Tarascon et dessinées par Saint-Vincens avec la légende O GRVX AVE NOSTRA SPES VNICA. Duby les a fait graver à son tour pl. XCIX, n°* 3 et 4. Seulement ce dernier au- ET DISSERTATIONS. 519 teur a pris la farasque qui se trouve au début de la légende pour un lion. Le président de Saint-Vincens donne trois monnaies d'or frappées par René, et les indique comme se trouvant au Gabinet du roi. Le n° 3 est reproduit dans la Revue ( 1860, pl. III, n° 20). Quant aa n° 2, qui a le type du teston, ce ne peut être qu'un essai d'or. Duby en avait fait exécuter uve gravure (pl. XCVIH, n° 7) qui rend beaucoup plus exactement l'original. Au reste, cette pièce n’a rien à faire parmi les monnaies de Provence ; elle ne porte pas le buste da hon roi René, mais celui de René HW, due de Lorraine (1473-1508), à qui M. de Saulcy l'a restituée ‘, ainsi que les n°* 5 et 6 de la pl. XCIX de Duby et que le n° A de la planche de Saint-Vincens. La comparaison de ces pièces avec les monnaies de René IT, qui portent des dates , ne saurait laisser de doutes. René I n’étañ plus duc de Lorraine lersque la fabrication des testons s'est introduit en France. Ne 40.}-+ REG-NATVS:IhR:EST SIL (Renatus Ferosolymz et Sialiæ). Armes de Hongrie, d'Anjou et.de Bar, dans un eercle perlé.. | Rf. + COMES:PVICIE:E:POR: (Comes Provinciz et For- ealquerii). Armes de Provence et de Jérusalem, aussi dans un cercle. — Bas argent. Poids, 48,5 (pl. X, n°44. C’est la première fois que je rencontre une monnaïe de. Provence portant des.armoïries sur chaque face. lu reste,. eette singularité n'a rien qui doive étonner dans la série monétaire de René, que nous treuvons jaloux de ses:titres plus ou moins imaginaires, et dont les nombreux signes 1 Recherches sur les monnaies des ducs héréditaires de Lorraine, 1841, p. 103- 196, pl. XIII, n° 2. 220 | . MÉMOIRES héraldiques étaient mal à l'aise resserrés et groupés dans un seul écusson sur quelques-unes de ses pièces d'argent ou de billon. Peut-être mème prend-elle son origine dans certains sols couronnats de Jeanne, de Louis 1, de Louis II et de Louis III, qui, outre l’écusson du revers, répètent les lis et le lambel de Provence sous la couronne du droit. Cette pièce appartient à M. le comte de Clappier, à Marseille. Ap. CARPENTIN. ADDITIONS A L’ARTICLE PRECEDENT. { PI. X.) Aux pièces si intéressantes que décrit M. Carpentin, nous pouvons ajouter deux dessins appartenant à la série pro- vençale, Le premier représente une petite monnaie de billon frappée pour Robert, avec le type de la couronne, + R'HR'ET'SICIL-REX. Au revers, COMES PVINCIE, légende divisée en quatre parties par Jes bras d'une croix (pl. X, n° 8). Poids, Os',53. | Cette monnaie porte un R., et l’on pourrait hésiter entre les noms de Robert et de René, si le style de la pièce, la forme des lettres, n'indiquaient pas très-clairement l’époque à laquelle le premier de ces princes a régné. Ce denier de Robert me paraît avoir servi de modèle à la monnaie d'Orange attribuée à Bertrand III (1282-1335 ) ou à Rai- ET DISSERTATIONS. 294 mond IV (4335-1840 ) ', et qui porte aussi une croix dont les brascoupentla légende. Notre pièce est en assez mauvais état, en sorte qu'on ne peut voir si le P du mot PVINCIE est barré comme il le doit être. Cette lettre barrée en arrière est une abréviation de pro bien connue dans les manuscrits et dans les livres imprimés au xv° siècle, C'est ainsi qu'on trouve _peurator, pridus, princia, pul, pdigalitas, qui se lisaient prorurator, providus, provincia, prout, prodigalitas. Jamais, bien entendu, le nom de la Provence n'a été Puincia; il ne s’agit, sur les monnaies comme dans les . textes, que d'un usage graphique’. On peut remarquer que les sceaux des Raimond-Béranger offrent aussi une abréviation dans le mot BENGARII écrit pour Berengarit, et qui se prononçait ainsi bien certainement. Feu M. Giulio di San-Quintino a publié en 1837 à Turin, sous le titre de Notizie sopra alcune monete battute in Pie- monte, un savant travail dang lequel il fait connaître une charte conservée aux archives de Marseille et relative à la monnaie piémontaise de Charles II. La ville de Cuneo avait été la premiére 4 ouvrir ses portes au comte de Provence, en 1257. C'était là qu'était le palais où résidait le sénéchal, lieutenant du comte,-et ce fut dans cette ville que Charles II établit, par l'acte du 31 mars 1307, l'atelier monétaire dont il confia la direction à Tommaso Riba, Ardizio Merllo et Reccardino di Sommaripa. Les espèces indiquées dans la charte consistent en un gros d'argent qui devait être fabriqué sicut est illa moneta grossa dive memorie domini Lodoyci regis Francorum, et devait 1 Revues num., 1839, pl. V, n° 10. — Cf. les observations de Duchalais, Revue num., 1844, t. IX, p. 63. 2 Voir, par exemple, dans Duby, p. XCIII, n 14 et 15, les deniers de Charles 1, portant les légendes PVINCIALIS et PROVINCIALIS. 222 MEMOIRES valoir 2 sous et demi d’Asti. De plus, on devait frapper une monnaie valant six petits deniers d’ Asti, et une autre encore représentant le vingtiéme du denarius grossus. M. de San- Quintino possédait deux demi-gros de Charles Ii avec la. légende +KAROLVS-SCL-REX autour d’une croix simple et offrant au revers : +COMES-PEDMONTIS autour des armes d'Anjou. Ces monnaies sont fort rares, et le savant antiquaire qui en avait pu voir cinq exemplaires en Italie n’en a jamais rencontré en France, où il a fait de longues . recherches. Il n'était pas non plus parvenu à retrouver la monnaie piémontaise de la reine Jeanne. Les trois monnaies de Charles II, de Robert et de Jeanne publiées par M. de San-Quintino, Saint-Vincens et M. Carpentin, ne sont pas les seules pièces que l'on doive attribuer à l'atelier de Cuneo. Si l’on compare atten- tivement au demi-lis d'argent décrit par M. Carpentin (pl. X, n° 9) le sol couronnat de Jeanne donné par Saint- Vincens (n° 8) et reproduit par Duby (pl. VIM, n° 44), pièce qui porte les légendes insolites : IOVA-D-G.SHCIL-REG — COMTSA-P'AC--, on reconnaîtra à la forme de la eroix aussi bien qu'à la disposition de la légende du revers que l’une et l’autre pièces ont étéfabriquées dans le même lieu. Là où le dessinateur de Saint-Vincens a placé des points indi- quant des caractères effacés, on peut rétablir les lettres PD, et lire, comme sur le demi-lis d’argent : ac Pedemontis. La monnaie qu'il me reste à décrire est un gros d argent frappé pour le roi René (1434-1480 ). + RENATVS : IHRLM ET: SICILIE: REX: Trois fleurs de lis surmontées d’un lambel et d’une couronne. n. + COMES: PVINCIE ET: FORCALQUERI: Croix fleur- delisée. — Argent. Collection Desjobert, au Mans (pl. X, n° 12). ET DISSERTATIONS. 223 Ce magnifique gros d'argent est une copie trés-adroite- ment faite de la monnaie royale. ’ Charles VIL par des ordonnances du 27 juillet 1447 et du 26 juin 1456, Louis XI par des ordonnances du 22 juillet 1461, de juillet 1465 et du 8 janvier 1473, ont prescrit la fabrication de gros d'argent. C’est surtout à la monnaie de Louis XI que ressemble le gros de René sur lequel le graveur s’est appliqué à faire pour ainsi dire dis- paraître dans la couronne le lambel de la maison d'Anjou. Du côté du droit, sous la quatrième lettre, on remarque un point qui a peut-être été copié avec le reste d’après le gros de. Louis XI frappé à Montpellier, mais qui pourrait aussi indiquer un atelier de la Provence. . Ap. DE LONGPÉRIER. 22h MÉMOIRES ET DISSERTATIONS. — 225 monnaies des princes lombards de Bénévent et de Salerne ; 2° à celles des rois lombards. Tous les monuments lom- bards en général sont trés-rares et trés-recherchés, mais plus spécialement les objets d'orfévrerie et les monnaies. De celles-ci deux ou trois seulement furent connues du grand Muratori ; Yinfatigable Zanetti, le hardi et heureux res- taurateur de la numismatique du moyen âge, l'illustre Lelewel, en ont pu étudier un bien petit nombre, et ce dernier fait observer qu'elles causent plus d’embarras pour les décrire qu’elles ne fournissent de lumière à la science. Le chevalier de San-Quintino se plaint encore de l’extrême rareté de ces monnaies ; et, de fait, nous ne saurions nous en étonner si nous réfléchissons à la briéveté et à l’état d’agitation de la domination des Lombards dans nos con- trées. Maintenant nous donnerons environ 150 pièces, beaucoup d'inédites ou même inconnues. 3° L'ouvrage contient aussi des croix d’or lombardes réparties en trois classes, à savoir les anépigraphes, celles qui portent des figures, celles qui portent des monogrammes, et parmi ceux-ci se trouvent les marques de la reine Théodelinde, de son mari et de Didier, dernier roi des Lombards, ce prince qui fut livré plutôt que vaincu. Telle est l'esquisse de l'ouvrage que j'aurais l'intention de publier dans quel- ques mois si je trouve les encouragements nécessaires ; et afin que les amis de la numismatique et des études histo- riques puissent avoir une idée de mon travail et de l'im- portance des monnaies qui y sont publiées et expliquées, je donnerai ici un fragment relatif aux monnaies obsi- dionales franco-italiennes, dans lequel sont décrites les monnaies frappées à Novare par le duc d'Orléans (de- puis roi de France sous le nom de Louis XIT) pendant le siége de 1495. Ces pièces sont non-seulement iné- 226 MÉMOIRES dites, mais encore étaient restées inconnues jusqu'à pré- sent. Le chevalier D. Promis, dans l'introduction de son esti- mable opuscule intitulé : Monete ossidionali del Piemonte , imprimé à Turin en 4834, dit : «Che ne esistano ( de ces monnaies obsidionales) appartenenti a Novara, del principio del XVI serolo, é opinione dé alcuno (je pense qu'il s’agit ici de moi) ma non confermata fin'ora da prora, e perd tralasserd di parlarne. Le savant numismatiste com- met deux erreurs : 4° Les monnaies auxquelles il fait allu- sion ne sont pas du commencement du xvr° siècle, mais bien de la fin du siècle précédent et préciséinent de l’anu- née 1495, alors que Novare, occupée par le duc Louis d'Or- léans, était assiégée par les armées de la ligue, c'est-à-dire par celles des Vénitiens, du Pape, et de Louis le More duc de Milan, après le fait d'armes de Taro et la retraite de Charles VIII à Asti. A l'occasion d'aucun autre siége de No- vare il n’est fait mention par les historiens de moneaies obsidionales ou de nécessité comme on les appelle. 2° L’exis- tence de ces monnaies obsidionales ne s'appuie pas seule- ment sur une opinion particulière, mais elle résulte de . Yattestation d'écrivains contemporains et des numismatistes les plus distingués qui en ont apporté les preuves les plus complètes et les témoignages les plus décisifs. Bien plus, on a retrouvé les monnaies elles-mêmes, et nous allons les dé- crire ci-après. Paul Jove, dans le tome Itt de la Storia del suo tempo, dit que Ja ville de Novare était réduite à une telle extrémité par la famine et la maladie des soldats que le duc d'Or- léans, par une nouvelle invention pour parattre leur assurer leur paye, fit frapper, vu la disette de numéraire, des monnaies de cuivre en place d'argent, et s’engagea par ET DISSERTATIONS. 227 serment à leur en restituer la valeur en argent après la guerre. | Bembo affirme la même chose dans le deuxième livre de sa Storia veneziana. Nous avons, en outre, le témoignage très-important d'un écrivain non-seulement contemporain, mais qui, de plus, assistait à ce siége dans le camp des alliés : je veux parler de Messer Alessandro Benedetti, mé- decin de Vérone, distingué pour le temps, mais un peu trop adonné à l'astrologie, lequel prit soin du comte da Pitti- gliano, un des principaux chefs de l’armée, gravement blessé d’un coup d’arquebuse pendant le siége. Ce Benedetti a laissé une précieuse relation ou journal de ce qu’il vit et entendit par lui-même. Il marque entre au- tres choses que, le 4 de septembre, le duc d'Orléans fit bat- tre de la monnaie de cuivre pour de l'argent, monnaie que personne n’osa refuser ‘. Ces précieux renseignements n’ont pas échappé aux sa- gaces numismatistes le comte Carli* et Guid’ Antonio Za- netti*, et m’appuyant sur leur autorité comme sur celle de Paul Jove, de Bembo et de Benedetti, j'ai, dès l’année 1841, dans le cinquième volume de mes Storie dei municipj tta- liani, mentionné le fait de l'existence de ces monnaies obsi- dionales, n'imaginant pas que plus tard je serais devenu numismatiste et que j'aurais l’occasion de publier le type. de ces mêmes pièces. Dans cet ouvrage, j'ai rapporté aussi les moindres détails de ce mémorable siége mis devant No- 1 Benedetti, 14 fatto d'arme del Taro fra $ Principi staliani e Carlo ottavo re di Francia, insieme con V'assedio di Novara, tradotto per Messer Lodovioo Dome- nichi. Vinegia, Gabriel Giolito de’ Ferrari, 1549 ( trés-rare ). 2 Opere, t. III ( I* pour les monnaies). Milano. Nel monistero di S. Am- brogio, 1784. 3 Nuova raccolta detie monete e zecche d'Italia, Bologna, 1775. 228 MEMOTRES vare par la plus formidable armée que, suivant les histo- riens, on eût encore vue en Italie et qui comptait parmi ses capitaines les plus illustres épées de ce pays. Le duc d’Or- léans, bien que dépourvu de moyens de défense, avec un petit nombre de soldats réguliers et quoiqu'il fût lui-mème miné par la fièvre quarte, soutint, de concert avec des ci- toyens déterminés, quatre longs mois de siége, et dès lors fit présager le royal héros qui sous le nom de Louis XII de- vait gagner en personne la bataille d’Aignadel contre les Vénitiens, s'exposant aux plus grands périls, malgré les vives remontrances de ses généraux. J'arrive maintenant à la description des précieuses mon- naies en question. 4° Fleur delis. LYDOVICVS. DVX. AVR. MLI. AC. AST. D. (Ludovicus dux Aurelianensis Mediolani ac Astensis : do- minus). Porc-épic tourné à gauche, tenant une barre de fer entre ses dents. Revers. + SANCTVS GAVDECIVS. P. N. (Sanctus Gauden- tius protector noster) Dans le champ, buste de face mitré et nimbé; à lexergue : NOV. OBS. (Novaria obsessa ). Cuivre. : Les caractères P. N. pourraient signifier encore protector Novariz, ou être les initiales du nom d'un monétaire. Saint Gaudentius figure aussi comme patron sur la monnaie de Rimini; mais il est différent de celui de Novare. ET DISSERTATIONS. 229 2° Fleur de lis. D.X A.RE.....ISIS M ET. (Dux Aure- lianensis Mediolani et cxtera). L majuscule, initiale de Lu- dovicus. Revers. + N. VAR... IN.. OB.... NE. (Novariæ in obsi- dione), au centre une croix. Cuivre. Peut-être un édit avait déterminé la valeur arbitraire de ces monnaies qu'on devait accepter comme si elles eussent été d'argent ; mais cet édit ne nous est pas parvenu. Jusqu’à présent on avait cru que la plus ancienne mon- naie obsidionale d'Italie était celle qui fut frappée à Pavie en 4524. Mais actuellement il faut revendiquer la priorité pour celles de Novare. Sous ce rapport, elles peuvent être considérées comme des monuments fort précieux. J'entends parler toutefois des monnaies métalliques, car on trouve des monnaies de cuir très-anciennes citées par les historiens. Ainsi, dans la Cronaca Faentina publiée dans mes Storie dei Municipj italiani, il est fait mention des monnaies de cuir émises par Frédéric II, en 1240, sous les murs de Faënza. Je compte publier les monnaies obsidio- nales de Charles I* de Nevers, frappées avec le plomb de balles de mousquets. Ces pièces ne seront pas moins cu- rieuses et intéressantes que celles de Novare. Canto Monnio. 1860,— 3. 16 CURTIA DoMITIA. . EGNATIA . EPPIA. .. FABIA. . FARSULEIA . . FLAMINIA... FUNDANIA. FoNTEIA.... FUFIA.... FULVIA... FURIA... HERENNIA. . . .. HOSIDIA..... HOSTILIA . JULIA... JUNIA... LICINIA. . LIVINEIA . . LOLLIA ... LUCILIA. . LUCRETIA. . LUTATIA . MÆNIA .. MAMILIA. . MANLIA... MARCIA... MARIA ....-. MEMMIA. . MINUCIA . MussiDIA . . NAVIA.. NONIA. . . NORBANUS. . . OPEIMIA. CHRONIQUE. Rremplaires. ore wore on ban NI (© = = À ln a D NO © ro ee D Ronmmbonwse ant bi O Pm à NO DA «I PAPIA..... PLÆTORIA. PLANCIA. . PLAUTIA ... POBLICIA . . POMPEIA. . POMPONIA. . PORCIA . . POSTUMIA . PROCILIA . . QUINCTIA RENIA. . .. ROSCIA . . RUSTIA . . RUTILIA . . SALVIA .. SATRIENA . . SCRIBONIA. SEMPRONIA SENTIA .. SEPULLIA . . SERGIA . . SERVILIA . SESTIA. . . SULPICIA. « THORIA . TITIA . . VIBIA . » VOLTEIA. ° + . @ e e a 2 + Gauloise lyonnaise. . bent us S par tv D © © © à à CO à C9 be =? uni Om — DW À ot C'est à Pobligeance de M. Boyé, curé d'Arbanats, que nous devons les détails et la liste qui précèdent. | J. W. 232 CHRONIQUE. M, Janssen. conservateur du musée d’antiquités de Leyde, nous communique, sous le titre de Monnates épiscopales trouvées près de Wageningen, une note en hollandais dont nous nous empressons de donner ici la traduction. « On vient de découvrir une soixantaine de petites monnaies épiscopales d’argentsur la colline de Wageningen, près desruines de l’ancienne chapelle , située dans la propriété de M. le baron W. A. de Constant Rebecque. Toutes ces pièces sont du xu* siè- cle, excepté trois pièces de cuivre très-minces qui n’ont reçu d’empreinte monétaire que d’un seul côté, et qu’on doit consi- dérer peut-être comme des brartéates. Les pièces d'argent, de la grandeur et de la valeur d’une pièce de 10 cents des Pays- Bas, portent au droit le buste d’un évêque. accompagné d’une crosse , et au revers une croix dans les bras de laquelle sont placées quatre autres petites croix. Le type de la plupart de ces monnaies correspond au type qu’on trouvera dans l’ouvrage de M. Van der Chijs sur les monnaies des évéques d’Utrecht (pl. IV, fig. 4 et b; pl. V, fig. 1). Le savant numismatiste regarde plusieurs de ces pièces comme d’une attribution incer- taine ; quant aux autres, il les croit avec quelque vraisemblance appartenir à Héribert, évêque d’Utrecht (1139-1150). Les traces des légendes qu’on voit encore sur quelques exemplaires, et qui, à notre prière , ont été examinées par M. Meijer, directeur du cabinet royal des médailles à la Haye, n’ont pas confirmé l’at- tribution de M. Van der Chijs, et n’ont fourni avec certitude aucun noni. M. Meijer a lu au droit d’une de nos pièces + HYDDI ou + HYDDO....NA, et sur une autre, en caractères tracés à rebours de droite à gauche, TRAIEC+TVM. Nous espérons avoir l’occasion de revenir sur cctle trouvaille. Nous ajouterons seulement que ces pièces de monnaies étaient placées près d’un squelette, ce qui indique sans aucun doute que là se trouvait un ancien cimetière. Hl y a quelques années, on y avait déjà déterré d’autres squelettes humains. » J. W. CHRONIQUE. 238 NOTICE BIOGRAPHIQUE SUR M. E. CARTIER. Étienne-Jean-Baptiste Cartier naquit à Tours le 41 octobre 1780. Son père, Étienne-Alexandre-Gaston Cartier, était fabri- cant d’étoffes de soie, industrie de ses ancêtres. Sa mère, Ma- deleine-Perrine Champoiseau, appartenait à une famille très- honorable de ta Touraine, vouée aujourd'hui encore à la même industrie. Eminemment pieuse, cette dame éleva son fils dans de profonds sentiments de religion. Son mari, partisan des idées. nouvelles, prit d’abord une part assez active au grand mouve- ment patriotique de 1789; mais les excès de la révolution ne tardèrent pas à modifier ses opinions. Dénoncé comme suspect, it ne dut son salut qu'à l’estime générale dont H était entouré: En 1789, M. et madame Cartier avaient placé leur fils à: l'École royale et militaire de Pontlevoy. Les études de l’enfant, et plus tard du: jeune homme, furent aussi fortes que le per- mirent les agitations de l’époque. Il se distingua dans toutes les classes; les mathématiques, toutefois, lui valurent ses plus beaux succès. E. J. B. Cartier passa à Pontlevoy les plus redoutables années de la tourmente révolutionnaire. Il fut témoin de expulsion de la congrégation de Saint-Maur et de Porganisation laique de- l’École. Ces. graves changements n’étaient pas accueillis favora- blement par tous les élèves; le jeune Cartier, exalté sans doute: par les persécutions dont son père avait faillr devenir la victime, élevé d’ailleurs dans des idées de piété sévère, se fit remarquer. parmi les écoliers les plus opposés aux nouvelles mesures. II manifestait déjà ces sentiments politiques abselus qui en firent quelques annécs plus tard le champion militant d’une restaura-. tion royale. Ces dissentiments ne paraissent pas avoir altéré l’affection qu'il inspirait à ses condisciples, car il entretint toute sa. vie, 23h CHRONIQUE. avec la plupart d’entre eux, même avec les plus haut placés, sous les différents gouvernements, des relations amicales. En 1795, lorsqu'il sortit de Pontlevoy, sa seiziéme année commençait à peine. Dès son retour, ses parents l’appliquèrent au commerce des soies. Peu de temps après, satisfaits de sa conduite et de son intelligence, ils crurent pouvoir lui remettre la direction de leur maison. Ses occupations commerciales ne firent point perdre de vue au jeune lauréat de Pontlevoy les lettres et les sciences pour lesquelles il se sentait une vocation décidée. Ses soirées seules étaient libres; il les mettait à profit pour compléter son éduca- tion. L’étude de l'italien et de l’anglais, qu'il avait commencée au collége, la littérature et des expériences de physique et de chünie se partageaient tout le temps dont il disposait. Il le pro- longeait parfois fort avant dans la nuit, bien qu’à cinq heures du matin, en toute saison, il fallût se rendre au magasin. Telle était son ardeur à s’instruire , qu’il employait tous ses appointements en achats d'instruments et de livres. Les affaires du commerce paternel l’appelant fréquemment à Paris, le met- taient à même de servir sa passion ; il n’en revenait jamais sans de nouveaux trésors. Mais il prenait soin de les cacher à son père, fort jaloux du temps de son fils. Les sciences occultes, qui avaient tant occupé les imaginations blasées de la seconde moitié du xvim* siècle, faisaient encore quelque bruit au commencement du xix°; M. Cartier, qui ne négligeait aucun moyen d'apprendre, résolut de les approfondir. Ses relations de société lui donnèrent la facilité de connaître quelques-uns de leurs principaux adeptes. Il put ainsi se mettre en rapport avec M. de Saint-Martin, avec les élèves de Mesmer, MM. de Puységur, et se lier avec le fils du célèbre et infortuné Cazotte. Mais ni ses entretiens avec les dépositaires de la science bermétique, ni ses analyses des principaux ouvrages des illu- minés, des mystiques, des magnétiseurs, ne réussirent à le convertir. CHRONIQUE. 335 En 1808, son père lui céda sa maison de commerce. Bientôt après, il épousa mademoiselle Gaillard, fille d’un juge au tribu- nal civil de Blois et d’une ancienne famille d’Amboise, alliée aux Robertet et aux Hurault. Les soins de son commerce ne l’empé- chèrent pas de continuer, à ses heures de loisir, ses chères et douces études. Sa réputation de capacité commençait alors à franchir les bornes de son magasin. Le 5 août 1812, il fut reçu membre de la Société d'encouragement pour l’industrie nationale. De cette époque datent ses premiers travaux historiques et litté- raires : ce sont des recherches, entreprises dans les archives de Tours, sur la fabrication de la soie sous Louis XI, et une discus- sion, engagéc dans le journal d’Indre-et-Loire , à propos d'un passage de M. de Bonald et des langues transpositives. Dans ce secoud travail, M. Cartier expose ses idées sur la place que la hiérarchie sociale doit réserver au roi, an pontife et au peuple. Le jeune auteur avait traversé la République et l’Empire. sans perdre ses convictions de chrétien et de royaliste. Au commen- cement de 1814, l’astre de Napoléon, qui pâlissait , lui fit con- cevoir la possibilité du retour des Bourbons. ll y travailla acti- vement. Au moment de la déchéance, à publia dans le journal d’Indre-et-Loire des lettres sur l’empereur. Le jugement qu'il porte de cet immortel géaie est écrit sous l’influence de cette opinion passionnée, qui dictait, dans le même temps, au chantre des Martyrs des pages regrettables. M. Cartier présente aussi quelques aperçus, assez remarquables, sur les questions du mo- ment. Sa ligne politique était dès lors. tracée ; il ne s’en écarta pas ua seul instant de sa vie. Pendant les cent-jours , il se mit à la tête des conspirations royalistes dans sa province, et fit passer en Vendée des armes, des munitions, des officiers. Signalé à la police, il fut sur le point d’étre arrété. Le retour des Bourbons le sauva. La seconde restauration le vit continuer sa vie militante. Il devint, à Tours, Vame de la société secrète des chevaliers de l’Anneau et des Francs régénérés. A cette époque, mis cn rapport direct avec 236 CHRONIQUE. les princes, avec MM. de Montmorency, de Rougé, d'Autichamp. il combattit le ministère Decaze. Le plus grand service qu’il rendit à son parti fut d'empêcher une insurrection que la police avait organisée dans la Vendée, contre Louis XVII, au nom du comte d'Artois. Il fit donner, par ce prince, des ordres qui pré- vinrent le soulèvement. | Puis les élections l’occupérent. Son influence était considérable. Ne se servant de son crédit que pour protéger ses amis et ses con- citoyens, il ne demanda jamais rien pour lui; mais il acceptait volontiers les emplois gratuits. C’est ainsi qu'il fut nommé, de 1815 à 1825, membre du bureau d’administration du collége, du conseil municipal et de la Société d'agriculture, sciences, arts et belles-lettres de la ville de Tours; il prit une part active à toutes les délibérations importantes de ces différents corps. Il s’opposa, mais inutilement , au tracé du canal du Cher à la Loire et à la destruction des fortifications de la Madeleine qui défendaient la ville contre les inondations. On eût évité peut- être les désastres de 1856 si ses conseils eussent été suivis. Il fut plus heureux dans l'établissement des écoles chrétiennes et de la bibliothèque des bons livres. Tours, depuis 1818, lui doit ces deux institutions. Cinq ans après, en 1823, il accompagnait à Bordeaux M. de Boisbertrand , son ami, nommé préfet de police extraurdinaire dans le midi, pendant la guerre d'Espagne. Chargé de l'aider de ses conseils , il fut alors initié aux secrets de la politique royale et eut connaissance de la conspiration orléaniste qui préparait la révolution de 1830. On lui offrit une mission en Espagne; il la refusa et revint à Tours. L'année 1824 le vit nommer juge au tribunal de commerce de Tours, puis membre du comité chargé de la surveillance des écoles et du conseil général des manufactures. Cependant un ami, qu’il avait placé près de M. le marquis de Rougé, l'avait recommandé au ministre des fiaances; celui- ci le présenta au choix de Charles X pour la place de caissier CHRONIQUE. 237 de la Monnaie de Paris. Le roi signa la nomination avant que le titulaire improvisé sit même les démarches qu’on avait faites pour lui. | En arrivant à Paris, c'était en 14825, M. Cartier offrit sa dé- mission de membre du conseil général des manufactures; le ministre la refusa, en objectant qu'on pourrait, au contraire, profiter désormais plus facilement de ses lumières. Le nouveau caissier de la Monnaie suivit avec zèle les réunions du conseil, travailla principalement à l'établissement des pru- dhommes, et, dans un rapport qui lui fut demandé, proposa de faire du monument inachevé du quai d'Orsay (aujourd’hui le Conseil-d’Etat) un palais de l'Industrie pour les expositions publiques. La place de caissier, qui lai laissait beaucoup de loisir, lui donna la première idée d’étudier la numismatique française. Chaque jour on lui apportait à son bureau, pour les fondre, des pièces anciennes que personne ne connaissait dans l’administra- tion. Il les achetait au poids et s’ingéniait à les déchiffrer. Il se forma ainsi peu à peu un médaillier, qu’il augmentait par des échanges avec d’autres amateurs, et mit en ordre la belle collection de la Monnaie, qui était complétement négligée. Il faisait en même temps des recherches, pour le nouvel objet de ses travaux , dans les archives et les bibliothèques publiques de Paris. La révolution de juillet éclata, et M. Cartier commença son déménagement avant d’avoir reçu sa destitution, d’ailleurs iné- vitable. Il vint se fixer à Amboise, dans la famille de sa femme, par économie et pour se tenir à distance des inimitiés politiques qu’il avait laissées à Tours. Dans cette retraite, il cessa complétement de s'occuper de politique , et lorsqu’à la veille de l'entreprise chevaleresque de madame la duchesse de Berry on vint sonder le vieux conspi- rateur, il fit dire à ses anciens complices «que ce mouvement, « favorisé par la police de Louis-Philippe, était une faute; le 238 CHRONIQUE. a continuer était nuire à la légitimité plutôt que la servir; « pour lui, ses convictions resteraient toujours les mêmes; il « conservait des espérances, mais il ne prévoyait pas comment e la Providence les réaliserait un jour. » | Bien que ne partageant pas les opinions politiques de M. Car- tier, les habitants d’Amboise l’accueillirent avee bienveillance: ils Pappelérent même, dans les élections de l’année 1840, à faire partie de leur conseil municipal. Lui, de son côté, leur rendit de nombreux services. Les archives de la ville et de l’hospiee d’Amboise reçurent de son zèle expérimenté un ordre et un classement convenables. Il envoya des extraits des principales pièces au ministre de linstruction publique, dont il était le cor- respondant depuis la fondation du Comité historique, en 1837. M. Cartier avait organisé sa vie, sans songer à un retour de fortune; il put donc se livrer tout entier aux études qui devaient faire le charme et l’honneur de ses dernières années. Les petites sommes qu’il pouvait prélever sur le revenu de son très-mo- deste patrimoine étaient employées à acheter des livres indis- pensables dans une ville dépourvue de bibliothèque publique, et à accroître sa collection. Ses rapports avec les amateurs, auxquels vinrent bientôt se joindre les savants, se multiplièrent, et l’intérêt de sa correspondance le rendit bientôt le centre d’un mouvement numismatique considérable. Son premier essai fut une courte Notece sur les monnaies chartraines. Ce travail, qui parut en 1835 dans les Annales de la Société d’agriculture , sciences et belles-lettres de Tours, fut le germe du bel ouvrage qu’il publia plus tard dans la Revue numismatique. Ea même année, il envoyait au congrès scientifique de Douai des Considérations sur l'histoire monétaire de France, en réponse à plusieurs des questions numismatiques de son programme. L'auteur y fait déjà preuve de cette science de l’histoire de notre monnayage national, qui fut le trait distinctif de son talent. CHRONIQUE. 239 En 1836, il payait son tribut a la Société des antiquaires de France , qui venait de le nommer son correspondant, par une Notice sur vingt-cing pièces d’or et d'argent, formant ensemble 5 sois, en monnaie de la première et de la deuxième race. Ce travail date de la première année de la Revue numismatique ; mais il ne fut pas inséré dans ce recueil parce que l'auteur l'avait adressé, dès l’année précédente , à la Société des anti- quaires. Il contient des renseignements qui témoignent d'une science avancée pour le temps où il parut. Aujourd'hui que les progrès de notre numismatique nationale, progrès auxquels M. Cartier prit tant de part, ont éclairé d’un jour si vif le mon- nayage de nos deux premières dynasties, il a un peu perdu de son intérêt. Un bordereau plaré à la. fin de ce mémoire donne, en effet , l'évaluation des vingt-cinq pièces à la somme exacte de 5 sols , annoncée par le titre. Nous arrivons à l’époque la plas glorieuse de la vie de M. Cartier, celle de la fondation de la Revue numismatique. Dès l’année 1833, le docteur Rigollot, d'Amiens, lui suggé- rait la première idée de la publication d’une Revue spéciale de la numismatique française. Cette idée gerina longtemps dans son esprit; elle était au moment de prendre un corps, grâce au savant libraire Merlin , qui s’offrait d’en être l’éditeur ; M. Cartier en avait rédigé le prospectus, quand la mort de M. Merlin ajourna l’entreprise. Enfin, en 1835 , dans une visite que faisait l'auteur de cette notice, qu'une communauté de goût et de for- tune avait rapproché de M. Cartier, le projet de Revue fut mis sur le terrain. M. Cartier opposait à mes encouragements l’im- possibilité de faire paraître un recueil périodique dans une ville où il n’y avait pas d'imprimerie. Je lui proposai alors de m'asso- cier à lui et de me faire le co-directeur-éditeur de la Revue, qui serait publiée à Blois. Nous en avertimes nos amis, et MM. de Saulcy et Rigollot furent nos premiers souscripteurs. Le prospectus fut imprimé au nom des deux associés, anciens employés des finances, et distribué par M. de la Saussaye au 240 CHRONIQUE. congrès sctentifique de Douai avec la brochure de M. Cartier, Considérations sur l'histoire monétaire de France , où se trouvait annoncée la future Revue. En 1836 parut le premier numéro de la Revue de la numismatique française. car on s’était renfermé dans l’idée première de M. Cartier. Les encouragements et les conseils qui arrivèrent de toutes parts engagèrent les éditeurs à modifier le titre de leur recueil. qui, à partir de 1838, fut ouvert à la numismatique tout entière. Dès ce moment, la direction du recueil fut divisée en deux : je me chargeai de la numisma- tique ancienne , M. Cartier s’occupa des monnaies et médailles du moyen âge et modernes. Tout ce que le monde savant comp- tait de personnes s’occupant de numismatique tint à honneur d’être du nombre de nos collaborateurs ou de nos abonnés. La part de M. Cartier dans cette entreprise est véritablement immense. Une analyse de ses divers travaux exeéderait le cadre de cette notice; je me contenterai d’en indiquer sommairement les sujets par leur titre. Le premier, dans l’ordre des dates et de l'intérêt, est son grand et beau travail intitulé : Lettres sur l'histoire monétaire de la France, commencé en 1836. Continué depuis, sans interrup- tion , il ne fut achevé qu'en 1850. Dès 1844, ä valut à son auteur une mention frès-honorable au concours des antiquités nationales à l'Académie des inscriptions et belles-lettres. Un autre travail, non moins important, ce sont les Recherches sur les monnaies au type chartrain. M. Cartier en avait, comme nous l'avons dit, jeté les bases dans un opuscule , publié avant l'apparition de la Revue. Mais en 1844 il le refondit en entier, lui donna les développements étendus que comportait Pétat de la science, et il y ajoutait un suppléinent en 1849. Au eoncours des antiquités nationales de 1846, cette monographie d’une section importante de nos monnaies baronales obtint une des trois médailles d’or du concours. Les autres travaux de M. Cartier insérés dans la Revue numes- matique sont, en suivant l’ordre de publication : CHRONIQUE. 241 1836. Une Dissertation sur une monnaie frappée par le comtat d Avignon , de 1398 a 1404, au nom du pape Boniface 1X. — Notes inédites sur la fabrication des monnaies de Blois, de 1315 à 1316. — Recherches historiques sur la monnaie, au type du cavalier armé, frappée a Valenciennes, et sur deux monnaies de Gand, Pune frappée, en 1383, par Philippe Artevelle, l'autre, en 1620, par l'empereur Ferdinand IT. 4837. Notes pour servir à l'histoire monétaire des provinces de France, monnaies du Mans, suivies de nombreuses pièces justificatives. 1838. Notice sur une ancienne monnaie de Nevers, au nom de Louis. — Notice sur des tiers de sol d'or, au nom de saint Martin, et sur d’autres mérovingiennes. En joignant à cette dernière notice toutes les autres disserta- tions , notes, recherches publiées par M. Cartier sur les mon- naies au type méruvingien, on obtient une œuvre considé- rable, savamment laborieuse, résumant, à plusieurs de ses époques de publieation , les connaissances acguises. 1839. Numismatique de Pancter comtat Venaissin et de la principauté d'Orange, long ouvrage de science et d'érudition, établissant les suites monétaires de ces deux eirconscriptions du territoire de notre Provence. — Notice sur douze tiers de sol d’or mérovingiens inédits. 1840. Catalogue des légendes des monnaies mérovingiennes, suivant l’ordre alphabétique des noms des monétaires. — Doutes sur Pattribution d'un denier de Senlis, donné à Hugues Capet. | 4841. Supplément au catalogue des monétaires mérovingiens. — Notice sur les monnaies ccelésiastiques et baronales du Limousin. 1842. Catalogue explicatif des médailles gauioises trouvées au camp da’ Amboise. 242 CHRONIQUE. — Notice sur des monnaies de l'époque carlovingienne, trouvées en Angleterre, d’une attribution incertaine. 1843. Notice sur quelques monnaies d’or de Cambray, d'O- range ct de Provence. — Notice sur deux monnaies frappées en Piémont, par deux capitaines français, avec le titre de comtes de Déciane. — Notice sur les monnaies frappécs par les prétendants a la couronne de Hongrie : les Zapolskt, les Bathory, les Racoczi, de 1526 a 1714. 1844. Note sur une trouvaille de grands bronzes romains , de- puis Nerva jusqu'a Septime-Sévère, faite à Nazelles, près Amboise. 1816. Traduction de la Notice de M. de San-Quintino sur des monnaies du XI° siècle, trouvées en 1843 près de Rome. — Extrait d'un manuscrit de la Bibliothèque impériale , con- tenant le règlement fait en 1354 par les ouvriers et monnoyers des monnaies royales de France; travail considérable, enrichi d'observations et de notes. 4847. Traduction par extrait de passages des Collectanea an- tiqua de M. Roach Smith, relatifs à des monnaies mérovingiennes trouvées en Angleterre. — Lettre à M. de la Saussaye sur la numismatique de Ra- belais. | — Notice sur des monnaies historiques russes. — Traduction dun document original du XILI* siècle, relatif a Vor et argent monnoyé ou non monnoyé envoyé en Palestine a Alphonse , comte de Poitiers. Un savant commentaire donne à cette traduction de M. Cartier une grande importance numis- matique. 1848. Monuments numismatiques de l'expédition de Char- les VIIT en Italie. Monographie complète et substantielle qui occupe dans la Revue une suite de 66 pages. — Notice sur quelques jetons du X VI° siecle. CHRONIQUE. 243 4849. Zraduction par extrait des Observations critiques de M. de S. Quintino sur l'origine et l'antiquité de la monnaie vénitienne, mtitulées Observations sur les deniers carlovingiens portant le nom de Venise. 1854. Essai sur la bibliographie des monnaies françaises. 1853. Des monnaies de Charlemagne, œuvre importante qui n’embrasse pas moins de 62 pages du recueil. — Notice sur l’écu de Louis XII, avec le titre de roi de Naples. — Notice sur les monnaies frappées en Corse par Théodore et Paoli. 4855. De quelques monnaies françaises nouvellement publiées, mérotingiennes, carlomngiennes, féodales, jetons et méreaux. — Notice sur la monnaie frappée au XIFI* siècle par les évêques de Maguelonne , avec le nom de Mahomet. A cette année s’arréte la collaboration de M. Cartier. Son grand âge et les infirmités inséparables de la vieillesse ne lui permettaient plus, disait-il, que de rédiger les Tables des vingt années de la Revue, qui devaient étre son testament numisma- tique. Occupé moi-même des soins administratifs qui m’étaient dévolus depuis la fin de Pannée 1854, il me devenait difficile de remplir, à Poitiers, mon office d’éditeur d’un recueil pério- dique qui continuait de s’imprimer à Blois. Nous fimes, dans le numéi0o de novembre et décembre 1835, nos adieux à nos lecteurs, et la Revue passa aux mains de deux nouveaux direc- teurs, nos savants amis et collaborateurs, MM. de Witte et de Longpérier, sous lesquels elle promet de parcourir une longue et brillante carrière. En 1858, M. Cartier, à l'âge de sotxante-dix-huit ans , faisait paraître la Table analytique des vingt volumes de notre publi- cation. Cette Table clot sa vie scientifique. Mais tous Jes travaux que nous venons d’énumérer ne furent pas les seuls que notre Revue dut à sa plume laboriease. Il faut y joindre un très-grand 2h44 CHRONIQUE. nombre de comptes rendus et d'analyses d'ouvrages nationaux et étrangers, articles dictés par une critique judicieuse, érudite, impartiale, qui me cessa jamais d’être bienveillante. Comme il est facile de s'en apercevoir à la nomenclature qui précède , M. Cartier ne fut étranger à aucune des parties de la science numismatique; ses premières lettres sur l’histoire monétaire de France, ses notes sur les découvertes remarquables faites au camp d’Amboise prouvent qu’il possédait des connais- sances étendues sur le monnayage de nos premiers ancêtres. Mais ce qui l’attira surtout, et presque uniquement, ce furent les monnaies françaises de toutes les époques. C’est dans l’étude de cette longue émission métallique de nos rois et de nos barons que brillent principalement son érudition et sa perspicacité ; c’est là qu’il fait autorité; là que se trouvent ses vrais titres de gloire. Sans doute des découvertes nouvelles viendront en- richir la science, des travaux subséquents pourront élucider les questions qu’il a laissées obscures ; néanmoins, on consultera toujours avec fruit les écrits de M. Cartier. Comme Eckhel, Pellerin, Barthélemy, Lenormant et d’autres illustres numisma- tistes de nos jours, il a jeté, dans son passage, quelques rayons lumineux sur les routes inexplorées de l’histoire des monnaies. Nous parlons d'histoire : ajoutons donc que l’immense occu- pation à laquelle M. Cartier avait voué son existence ne l’em- pécha pas de s'appliquer à l'étude spéciale des événements pas- sés. Dans ce genre ou lui dait une série d’études sur les origines et l’histoire d’Amboise. Le plus important de ces opuscules est intilulé : Recherches sur la ville et le chäteau d’ Amboise. Leur réunion forme une monographie aussi complète que possible, où l’on reconnaît un travail de loisir et de prédilection, fait à diverses reprises, rempli de recherches patientes, exact, con- sciencieux, écrit sans emphase, mais auquel on peut reprocher, ce qui a droit de surprendre, de ne pas montrer une critique assez sévère touchant les origines, certainement mélées de “fables , de la ville, objet du cuite de ses dernières années. CHRONIQUE. 2h5 Pour compléter la bibliographie littéraire de l’auteur des Lettres sur l’histoire monétaire de France, mentionnons encore les rares articles de politique, d'archéologie et de numismatique qu’il fit insérer dans plusieurs journaux et recueils : le Drapeau blanc, le Journal d’Indre-et-Loire, les Mémoires de la Société des antiquaires de l'Ouest , dont il était un des fondateurs et dont il aimait à s’appeler le parrain, parce que c'était sur sa proposition qu'elle avait reçu le nom, illustré depuis par tant de savantes publications ‘. Les travaux de M. Cartier lui méritérent, dans la seconde moitié de sa vie, nombre de distinctions académiques; nous avons déjà eu l’occasion de parler de plusieurs d’entre elles. Une foule de sociétés savantes et étrangères avaient tenu à honneur de l’admettre dans leur sein. Parmi ces dernières, nous citerons les Sociétés numismatiques de Londres et de Bruxelles, et la Société impériale d'archéologie et de numismatique de Saint-Pétersbourg. _ Mais, chose vraiment digne d’étonnement, l’Institut de France n’iascrivit point son nom parmi ceux de ses corres- pondants. Depuis la fondation de la Revue numismatique, en 4336 (le recueil le remarquait avec orgueil dans son numéro de juin 4854). l’un de ses directeurs et quatorze de ses collabo- rateurs étaient entrés à l’Académie des inscriptions et belles- lettres, en qualilé de membres ou de correspondants, et le fondateur, couronné deux fois dans les concours, ne put jamais siéger avec eux. M. Cartier se complaisait dans son isolement d’Amboise, venait très rarement à Paris, et n’y fai- sait visite qu’à d’anciens et rares amis. Le docteur Rigollot, lui, après avoir lorigtemps attendu, fut nommé correspon- dant le jour de sa mort; M Cartier, moins heureux, ne put jamais réunir chez nous que les voix de ses collaborateurs. 1 Voy., dans le premier volume de ses Mémoires, la Dissertation sur les monnaies d'Angouléme et de la Marche. 1860. — 3. 17 2h6 CHRONIQUE. Un ministre éclairé, membre de cette Académie, M. Fortoul, en 1856, adoucit l’amertume de cet oubli en proposant M. Cartier pour la décoration de la Légion d'honneur. L’Em- pereur, fidèle à la pensée de tout son règne, ne s’enquit point des antécédents politiques de M. Cartier, mais de ce qu’il avait fait de bon et d’honorable, et lui accorda la juste récom- pense de cinquante années employées dans les fonctions publi- ques et dans les travaux de l'esprit. M. Cartier accepta sans hésiter, avec la conscience de l’avoir méritée, une distinction qu’il avait refusée sous la restauration, alors qu’elle ne lui paraissait due qu’à la faveur. Au milieu d’une existence si studieuse, M. Cartier trouvait encore les moments d’organiser une Société de Saint-Vincent- de-Paul à Amboise et de fonder une école de religieuses à Lusseau, village voisin, et où se trouvait sa maison de cam- pagne. Mais les infirmités allaient toujours croissant avec l’âge, et il voyait avec calme s’avancer l'heure suprême. Le 24 juillet 1859, au matin, rien n’annoncait qu’elle fat si proche. Il travailla toute la journée au catalogue de sa biblio- théque. Pendant le diner, une attaque de paralysie lui dta le mouvement et la parole; quelques serrements de main furent ses adieux à sa famille. Il expira doucement, à dix heures du soir, en chrétien sincère et convaincu. Toute la ville d’Amboise voulut assister à ses obsèques et l’honora de regrets unanimes. M. Cartier laisse la mémoire d’un homme de bien. Si l’on considère le long cours des événements auxquels il prit part, on peut dire qu’il eut le bonheur de finir alors que pour son époque commençait l’histoire. Aussi ses dernières années furent- elles sereines. L’agitation à laquelle il avait pris part se taisait autour de sa retraite, et les ennemis soulevés par ses luttes politiques faisaient silence autour de ses travaux littéraires. L'âge , l’expérience , la religion surtout, tempéraient insensible- ment ce qu’avait eu parfois d’un peu âpre son caractère surex- cité dans l’orage des partis. En voyant ses jours s’achever sous CHRONIQUE. 2h7 l’héritier d’une dynastie dont il avait combattu le chef, il sentait mieux qu’un autre l’inanité des combinaisons humaines. La der- nière lettre qu’il ait écrite , adressée à l’un de ses plus anciens correspondants numismatiques, notre collaborateur M. Le- cointre-Dupont, témoigne d’un complet désintéressement des idées politiques qui avaient tant influé sur la première moitié de sa vie. Il s’y loue des soins pieux et de l’existence laborieuse de son fils*, puis, traçant en termes pénétrés de résignation le tableau de ses infirmités, il jette, attendri, un regard d’époux et de père, un suprême regard sur la famille qu’il va quitter. … « On ne vous a pas trompé, écrit-il, en vous disant que ma a santé était fort altérée. Votre pauvre doyen, chaque jour plus a infirme , n’est plus capable de rien et pense plus à l’autre « monde qu’à celui-ci... A travers tout cela, ajoute-t-il en ter- a minant, je ne me plains pas, et j'attends avec confiance a l’heure et l’ordre du départ. » L. De LA SAUSSAYE. . 1 M. Cartier fils s’est fait avantageusement connaître dans le monde des lettres par ses Recherches sur l'origine des monnaies au type chartrain, suite et complément de l’œuvre paternelle, publiées par le Recueil archéologique des PP. Martin et Cahier ; par la première partie d’un Manuel de numismatique, qui parut dans les Annales d'archéologie de M. Didron, et qui malheureusement n'a pas été continué; par des Recherches sur la peinture encaustique des anciens, insérées dans la Revue archéologique; par la Vie de Fra Angelico de Fiesole, 1 vol. in-8, 1857, eto. Aujourd’hui M. Cartier fils consacre ses travaux à la Biblio- thèque dominicaine, qui a déjà publié de lui l'Histoire des reliques de saint Thomas-d’Aquin et la traduction infiniment remarquable des Lettres de sainte Catherine de Sienne, 3 vol, in-8°, 1858. 248 CHRONIQUE. NÉCROLOGIE. Le 16 avril 1860 doit étre considéré comme une date néfaste pour la numismatique. Ce jour-là nous perdions M. le comte Borghesi et M. le marquis de Lagoy. M. Bartolomeo Borghesi, associé étranger de l’Académie des inscriptions et belles-lettres, mort à San-Marino à l’âge de quatre-vingts ans, n’a cessé pendant sa longue carrière scienti- fique de porter la lumière sur les points les plus obscurs de l'archéologie romaine. Ses Décades numismatiques sont des chefs- d’ceuvre d’érudition et de critique. Peu soucieux de la gloire contemporaine, M. le comte Borghesi faisait tirer ses mémoires à petit nombre ; il employait tout son temps, toutes ses forces à résoudre les questions difficiles, laissant aux autres à faire des livres pour la foule en utilisant ses découvertes. M. le marquis de Lagoy est mort à Aix, âgé de soixante-dix ans. Nous ne rappellerons pas en ce moment tout ce que lui doi- vent la numismatique et ce recueil qu’il aimait si sincèrement, et qu’il a, depuis 4837, enrichi de tant de savants et intéres- sants articles. Notre excellent collaborateur avait, comme cha- eun sait, puissamment concouru à la renaissance de la numis- matique gauloise ; il n’a cessé de s’en occuper et d’en activer les progrès. Nous aimmions à profiter de ses avis; nous espérions jouir encore pendant longtemps de cet affectueux concours qui ne nous avait jamais fait défaut. On comprend l’étendue de notre douleur, la vivacité de nos regrets, regrets qui seront par- tagés par tous ceux qui s’occupent de numismatique, par ceux qui savent combien M. de Lagoy était digne de respect, et bien- veillant malgré la fermeté de ses opinions. A. L. MEMOIRES ET DISSERTATIONS. tt OO Giga LETTRES A M. DE LONGPERIER acR LA NUMISMATIQUE GAULOISE. (Pl. XI.) Cinquième article. — Voir le ne 6 de 1858, p. 437, le n° 5 de 1859, p. 313, le n° 6 de la même année, p. 401 , et le n° 3 de 1860, p. 164. VII. Rectification de l'attribution à la Grande-Bretagne d'une monnaie de cuivre au type du sanglier. Mon CHER AMI, Au moment où la Revue vient d'insérer la lettre que je t'ai adressée sur deux pièces que je croyais devoir attri- buer à la Grande-Bretagne ', il m'arrive, à propos de l’une d'elles, des renseignements qui modifient complétement mes idées sur son compte, et me procurent l’occasion de rectifier une erreur. 3 Voyez p. 170 et suiv. ° 1860. — 4. 18 250 MEMOIRES J'avais exprimé le désir bien sincère que M. John Evans, l'habile et savant explorateur de la numismatique bre- ‘tonne , prononcat en dernier ressort sur le compte de ces deux rares monnaies. Il y a quelques jours j'ai eu l’hon- neur et le vif plaisir de passer quelques instants avec M. Evans, et je nai pas manqué de lui soumettre mes ARTVE doutes. Pour lui, la pièce de cuivre à la légende COMIN, VIR malgré la présence de cette légende tracée horizontale- ment dans le champ, n’est pas bretonne ; il est devenu évident pour moi dès lors qu’il fallait désormais lui trouver une autre attribution. J'attendais donc que la lumière se fit, et tu vas voir que je n’ai pas attendu longtemps. A son dernier voyage à Bruxelles, notre excellent ami J. de Witte a visité l’il- lustre créateur de la numismatique gauloise, Joachim Lelewel , et celai-ei, qui a si bien la mémoire du cœur, l'a chargé de me remettre de sa part un croquis et quelques empreintes de pièces intéressantes. Juge de ma joie en trouvant que le croquis en question était celui d'un nouvel exemplaire de la pièce de cuivre encore indéterminée pour moi. Cette fois la frappe nous fournit le commencement des légendes qui se lisent ainsi (pl. XI, n° 3) : d'où il résulte que le tout doit se transcrire : L(ucius) ARTVE.... C’aius) COMIN.... T-VIR (Duumviri.} ET DISSERTATIONS. 251 Voilà donc incontestablement las noms de deux magis- trats d’une ville importante soumise à la domination ro- maine; mais quelle est cette ville? Ici l'incertitude reparaît. Au revers on voit dans le champ et entre les pattes du sanglier la sigle S du semis; à l’exergue paraissent des lettres CAE, dont la première est douteuse. J'avais fait un pas, mais il n’était pas décisif encore, et ce n’est que depuis quelques jours que je sais enfin à quoi m'en tenir sur le compte des pièces en question. Je le dois à une bienveillante communication de M. le baron d’Ailly, le savant explorateur de la numismatique des familles ro- maines, et je me fais un devoir de transcrire intégralement ici la lettre qu'il m’a fait l'honneur de m'écrire, en le re- merciant hautement et avec empressement pour la forme délicate et charmante qu'il a donnée à la démonstration de l'erreur manifeste dans laquelle j'étais tombé. « Château d’Ailly, à Roanne (Loire ), le 8 juin 1860. « Monsieur, « La numismatique ancienne offre parfois de singuliers rapprochements à l'égard de monnaies qui n’ont aucun rapport entre elles. J'en ai été souvent frappé; et tout nouvellement encore, dans l’intéressant article que vous avez publié dans le dernier numéro de la Revue, sur la monnaie bretonne, à la légende ARTVE — COMIN — VIR, à laquelle vous avez donné une si ingénieuse attribution, j'ai trouvé un nouvel exemple de ces bizarres similitudes. « Vous connaissez très-certainement ces semis de Pæstum frappés [a l'époque d’'Auguste et de Tibére, dont Mionnet (Suppl., t. I, p. 316, n° 806 à 812) a publié diverses variétés. Mes cartons en contiennent trois exem- 252 | MÉMOIRES plaires que j'ai acquis en Italie, et dont je me permets de vous envoyer les empreintes. Vous serez frappé comme moi, je le crois, de la conformité générale de ces pièces avec votre monnaie bretonne (pl. VIII, n° 10). Sauf au droit, les prénoms des deux magistrats lucaniens L. ARTV.... et C. COMINVS, l'expression de leur duumvirat, le lituus et le præfericulum, symboles de leurs fonctions religieuses, et au revers l'épigraphe autonomique PAE à l’exergue, tout le reste, jusqu'au symbole indécis semblable à un trèfle sous le ventre du sanglier de votre médaille, qui rappelle la sigle du semis, à la même place duchamp sur la mon- naie de Pestum, tout le reste, dis-je, offre une identité de types, de disposition, de légende et de fabrique, à en juger par votre dessin , qui ne laisse pas que d'étonner dans deux médailles frappées à une telle distance l’une de l’autre. « J'ai pensé que cette ressemblance monétaire pourrait peut-être vous intéresser, et j'ai saisi avec empressement cette occasoin de me rappeler à votre souvenir, les circon- stances ne m'ayant pas fourni l'occasion de vous revoir depuis un laps de temps si long, en vous renouvelant ici, monsieur, l'assurance de ma considération la plus haute et la plus distinguée. « Signé Baron D'AILLY. » Tu le vois, cher Adrien , la question est jugée en dernier ressort , et ni les Bretons ni les Gaulois n'ont rien à pré- tendre sur une monnaie lucanienne de Pæstum. 1 Voyez Magnan, Lucania numismatica, tab. XXIX , n° 14; tab. XXX, n°6, 8, 10.— Fr. Carellii, Num. itatiz vet. tab. CCII, ed. C. Cavedonius, tab. CXXXI, n° 30. — Pellerin (Suppl., 11, Paris, 1766, pl. 1, n° 6) avait aussi publié une de ces pièces. — La monnaie de Pestum qui fait le sujet de la lettre de M. le baron d’Ailly n'existe pas dans le médaillier de la Bibliothèque impé- riale, et Mionnet ne l’a pas donnée dans son corps d'ouvrage. Gravée parmi ET DISSERTATIONS. | 253 VII. Monnaies de Vertico, chef des Nerciens, et de Dumnacus, chef des Andes. Tu te rappelles combien était petit naguére le nombre des chefs gaulois mentionnés dans l’admirable récit de César, et dont les monuments numismatiques nous prou- vaient l'existence. Ainsi lorsque notre ami La Saussaye publiait, dans les Annales de [Institut archéologique de Rome (en 1846), la première édition de son excellent travail sur les monnaies d'Orgétirix et des Éduens ', il constatait qu on n'avait ajouté jusqu’à cette époque aux noms histo- riques connus depuis longtemps par les médailles, que ceux de Duratius, de Lucterius, de Tasgetius, de Vercingetorix et de Viridovix. Les noms précédemment connus étaient ceux d'Orgétirix , de Dumnorix, de Litavicus, de Vergasillaunus, les médailles gauloises (pl. 1X, n° 15) dans le livre pablié par ML Lelewel en 1840, elle n'avait donné lieu , autant que nous pouvons le croire , à aucune rectification. Cela tient sans doute à co que, figurée assez incomplétement dans l'ouvrage du Père Magnan ( Eucania numismatica, 1775) et dans le Supplément de Pellerin (1766)., elle avait été seulement décrite, et toujours imparfaite- ment, dans les ouvrages postérieurs. La légende L'ARTV'C:COMIN fournie par Magnan a été reproduite par Eckhel et par Miounet dans son Supplément. On trouve L'ARTVR :: COMI dans le Musée Hunter de C. Combe; L'ARTVR» C-COMIN II VIR dans les [talix veleris numismata d’Avellino; L'ART:C- COMN (dignus? \'. Dans le champ est gravée une croix égale, ancrée et bou- letée, posée sur une base, cantonnée aux troisième et qua- trième cantons des lettres CL; séparée par une couronne perlée de la légende circulaire, laquelle est elle-même en- tourée de perles. | Tiers de sou d'or. Poids : 45,29. Deuxième quart du vii* siècle. — Collection de feu M. Renaud de Vaucouleurs. Ce triens, qui est d’une parfaite conservation, nous offre le spécimen le plus caractérisé du type limousin orné : les perles y ont été prodiguées. M. Ch. Robert’, guidé par le style de fabrication, l'avait déjà attribué, avec hési- tation toutefois, au Limousin, et sans indiquer d'ailleurs la position de l'atelier. Cette position, vous croyons pouvoir la fixer au lieu dit le Palais. Ajoutons que la pièce dont il s’agit nous paraît avoir été frappée au nom et pour compte de l’Église. Justifions d'abord la première de ces deux propositions. L'endroit que nous signalons, situé sur le passage de la voie romaine d’ Argentomagus (Argenton, en Berry) à Augusto- ritum (Limoges) *, a été tour à tour appelé, au moyen âge, 1 M. Berry y voit la formule XPIANA RELIGIO, dont les lettres sernient, en partie, défigurées ou transposées (Etudes historiques sur les monnoies de France, p. 48 49); mais cette conjecture ne nous semble justifiée par aucrine circonstance dans l'espèce. 3 Notice sur la collection des monn, méror. de feu M. Renaud de Vaucouleurs. Metz, 1851, p. 23. 3 Arbellot, Rer. archcol. de la Haute-Vienne, p. 99. 1860.— 4. 21 298 MEMOIRES Palatium et Palatium Jogentiacus, Jocundiacus , Jucon- ciacus ou Jovenciacus. Parmi les souscriptions du concile d'Agde, en 506, on rc- marque celle-ci : « Petrus episcapus de Palatio subscripsi.» Le savant Adrien de Valois a le premier reconnu, dans ce personnage, l'évèque de Limoges, qui avait joint à sa si- gnature le nom de sa résidence habituelle *. A l'appui de cette opinion, nous rappellerons que le Limousin avait été, de l'an 471 à l'an 507, soumis aux Visigoths ; que ces peu- ples, qui professaient l’arianisme, laissaient dégrader et tomber les édifices du culte catholique, persécutaient sans relâche les évéques catholiques qu ils savaient leur être pro- fondément hostiles, et s’abstenaient de nommer aux siéges que la mort, le découragement et la ruine rendaient vacants. Il est vraisemblable que l'évèque de Limog?s, fuyant cette persécution tyrannique, peut-être même exclu de la cité, se tenait dans la résidence dont il prit le nom au concile de l'an 506, c’est-à-dire alors que les Visigoths dominaient en- core dans le nord de l’Aquitaine jusqu'aux bords de la Loire. En 830, l'empereur Louis le Pieux tint en ce lieu une as- semblée générale de ses leudes : «Tunc Ludovicus con- ventum generalem tenuit in Palatio Jogentiaco in Lemo- vicino *.» Plus tard, et vraisemblablement à l’époque où 1 D. Boug., t. IV, p. 102. 2 Notitia Galliarum, p. 397. L’abbé Lebeuf, dans une dissertation lue à l'Académie de Soissons en 1740, avait cru pouvoir rapporter cette souscription à un évêque de Saintes; mais, d'un côté, D. Bouquet fait observer que Pierre, évéque de Saintes, quand il siégea au concile d'Orléans, prit cette qualité et non celle d’Episcopus de Palatio Enfin Lecointe a fait connaître qu’à la date du concile d'Agde, le siége épiscopal de Saintes était oceupé par un personnage nommé Gregorius, ce qui exclut la eonjecture de l'abbé Lebeuf. Cf. D. Bouq., loc. cit., note c. à Chronicon Ademari Cabanensis, dans Labbe, Nov. BibWoth. mss., t. II, ET DISSERTATIONS. 299 les Normands saccagérent Limoges, Saint-Yrieix et Soli- gnac, ce palais fut renversé; dans tous les cas, il était de- puis longtemps en ruines, et avait même disparu, lorsque Pierre le Scolastique, poëte du xu° siècle dont notre savant confrère M. l'abbé Arbellot a si heureusement restitué les œuvres, nous fait connaître que la localité avait conservé le nom désormais vain de Palatium . Depuis cette époque *, et même de nos jours, la localité a retenu le nom du Palais et l'a communiqué à la com- mune’. La filiation du nom de Palatium étant établie, et la légende de notre triens, Palati mo(neta), expliquée, nous passons à la deuxième proposition. Notre triens a été probablement frappé au nom et pour compte de l'Église. Disons tout d’abord que le titre de ré- sidence épiscopale, que le Palais a porté avant d’être rési- dence royale, rend à priori le fait très-vraisemblable : les lettres inscrites dans le champ du revers nous semblent en donner la démonstration. Nous avions pensé, dans le prin- cipe, qu'on pourrait y lire soit les trois syllabes ELICI, d’'Elicius pour Eligius, conformément à l'opinion de M. Ch. p. 159. Cette mention est reproduite dans le livre intitulé: Nomina ac gesta Lemocicens. episcopor., ibid., p. 266. 1 « Vinzennam propter fluvium tentoria figunt , » Nam Jovenciacus locus aulicus ille vocatur, » Atque Lemovicum non multum distat ab urbe, » Qui, regalis adhuc, quod erat monumenta Palati, » Fert ejus , vulgo, re lapsa, nomen inane. » ( Lib. III, poem. xiv. ) Bulletin de la Société archéologique du Limousin, t. VI, p. 157. — Bonaven- ture Saint-Amable , Histoire de l'apostolat de saint Martial, t. II, p. 270. 2 Nous le retrouvons dans un titre de 1223. Mas. de la Biblioth. impér , collect. Gaigniéres, t. 183-184, p. 338. | # Au nord-nord-est, et dans les canton et arrondissement de Limoges ( Haute-Vienne ). 300 MEMOIRES Robert, soit les sigles C.A. accostant la croix, dont on con- sidérait le sommet comme représentant, non plus une lettre, mais simplement la figure de l'ancre renversée. En réfléchissant depuis au rapport qui devait exister entre l'histoire du Palatium Jogentiacus au vr° siècle, et les inscriptions gravées dans le champ de notre monnaie, nous sommes arrivé à cette conclusion toute naturelle qu'elles désignaient l'émission ecclésiastique. On y voit en effet très-distinctement, en renversant la pièce, les syllabes ECLI du mot ECLISIAE, tel qu'il est au revers du sou d'or de Limoges (n° 4). LOCUS SANCTUS, ( Locaiité du Limousin dont la position est incornue. ) 22. — LOCO SANLO. Téte a droite, avec la couronne ’ perlée prolongée sur le col; buste habillé et orné de perles au pourtour. x. DIACIOALDIO I. Croix égale dans un cercle de perles fermé par un anneau de perles contenant un globule. Tiers de sou d’or. Poids : 45,36. Fin du vi" siècle ou premier quart du vi". —Cabinet des médailles de la Biblio- thèque impériale. | 23.—LOCO wANCTO. Tête à droite, ceinte d’un diadème perlé terminé sur la nuque par deux bandelettes; buste habillé et orné de quatre perles. x. DACOALDO MON. Croix latine dans un cercle de perles fermé par un anneau de perles contenant un globule. Tiers de sou d'or. Deuxième quart du vu: siècle. Bouteroue, Recherches curieuses sur les monnaies de France, p. 349, pl. III, n° 18.—Le Blanc, Traité des mon- naies de France, p. 58, pl. b, n° 33. ET DISSERTATIONS. 30f 24.—LOCO wANTCO. Tête à droite, ceinte d’un bandeau, de l'extrénrité duquel s’échappent sur le col des boucles de chevelure ou des bandelettes ; buste habillé, orné de perles au pourtour et d'une grosse perle au milieu. R. —+ DACOALDVea MON. Croix latine potencée ét ren- versée, dans un cercle perlé et fermé par un anneau de perles contenant un globule. Tiers de sou d'or. Deuxième ou troisième quart du vu: siècle. Bouteroue , los. cit., p. 349, pl. HI, n° 19. 401.— LOCO mANTCO. Tête nue à droite; buste orné de perles. x. DALOVALCDVS “+. Croix égale, potencée et fichée dans un cercle de perles, terminée à la partie inférieure par deux bandelettes de perles entre lesquelles se trouve un: petit globe. Tiers de sou d’or. Deuxième quart du vn: siècle. Conbrouse, Monët. mérov., pl. XXVII, n° 45. — Catalogue raisonné, n° 484. 402.— LOCO wANTO. Tête barbare à droite, ceinte d'un bandeau perlé terminé au sommet par deux perles, et sur le col par une croisette; buste habillé et orné d’une rangée de perles. F. + DALOALDO. Croix fourchue et renversée, accostée: sous les bras des lettres L.0. (pour L.0.), dans un cercle de perles fermé par un anneau de perles contenant un. globule. Tiers de sou d'or. Poids : 4**,20. Fin du vir siècle: — Cabinet de M. Ponton d'Amécourt. 403.— LOCO wANTO. Tête barbare, avec couronne ter- minée au sommet par quatre perles, et sur le col par une seule; buste habillé et orné de deux rangées de perles. 302 | MÉMOIRES H. .... AEAO MOIV (Dacoalio moiu). Croix fourchue dans un cercle de perles fermé par un demni-anneau perlé, dans lequel se trouve un globule. Tiers de sou d'or. Fin du vu: siècle ou premier quart du vii". Conbrouse, Monët. mérov., pl. XXVII, n° 16.— Catalogue raisonné, n° 1007. Les érudits qui se sont occupés des monnaies de Locus sanctus , les ont attribuées à Lieusaint, près Valognes (Manche) ‘, à Loursaint, près Ville l'Évêque , canton de Dreux (Eure-et-Loir) *, ou à Lieusaint en Brie, arrondisse- ment de Melun (Seine-et-Marne) *; on peut y joindre Lieu- Saint-Amand, arrondissement de Valenciennes (Nord), Saint-Lieux la-Fenasse, arrondissement d'Alby, et Saint- Lieux-lés-Lavaur, arrondissement de Lavaur (Tarn), et cette liste pourrait s’accroftre encore de tous les noms moins connus qui se sont formés de Locus sanctus. La difficulté du choix grandirait dans la même proportion, et .devien- drait même insurmontable si l’on s'en tenait à l’analogie des noms modernes avec les noms mérovingiens. Nous osons affirmer qu'en cette matière, et surtout lorsque le nom méro- vingien se compose d’un ou plusieurs mots significatifs, tels que Locus sanctus, Locus Dei’, Novus vicus, etc., la ques- ? Lecointre-Dupont et Lelewel. Rev. num., année 1836 , p. 322. ? Le Blanc, Traité des monnaies de France, p. 63. Il s'appuie sur l’autorité d'Adrien de Valois et de D. Michel Germain, qui concluent de l'existence de monnaies au nom de Locus sanctus que c'était une villa regia on fiscalis. 8 Adr, de Longpérier, Annuaire de la Soc. de Uhist. de France, année 1841. — Guillemot, Catalog. ° * Il existe aussi un grand nombre de localités appelées au moyen âge Locus Dei. On peut en voir deux exemples dans le seul pays de Rouergue ( Gallia christiana , t. 1, instr. p. 13). Il y a quatre localités appelées Lieu-Dieu dans les départements de Ia Côte-d'Or, de la Dordogne, de l'Isère et de la Somme. ET DISSERTATIONS. 303 tion d'attribution serait insoluble si l’on ne recourait pas à l'étude du type diocésain et du type cantonnal. Dans l'espèce, nous déclarons tout d'abord que le lieu d'émission des trien$ ci-dessus décrits ne nous est pas en- core connu, mais nous croyons fermement qu'ils ont été fabriqués en Limousin et dans la région située au sud-sud- ouest de Limoges, entre Limoges et Jumillac. Le n° 22, qui est un des plus beaux et des plus anciens: de notre série, présente une frappante analogie, par le type de l'effigie et par les dispositifs, avec nos triens de Limoges (n** 2, 5 et 6), de Jumillac, Chervix, Magnac et le Palais: (n°? 44, 18, 19 et 21). La tête du n° 101 est la même que: celle du n° 45, qui porte au revers les lettres (LEMO). Le: type du revers est peut-être encore plus caractéristique. La croix des n* 22, 101 et 102 est semblable à celle de Li- moges (n°5 et 6); celle des n°’ 23 et 24 est identique à la croix de Magnac-Bourg, de Chervix, de Brive, d'Espagnac, d'Yssandon, etc.(n°* 19, 18, 63, 71 et 115). Enfin le signe particulier des monnaies de Locus sanctus, le petit anneau de perles qui ferme le cercle perlé au revers , se retrouve dans l’une des piéces.de Jumillac (n° 99) et dans notre triens de Peyrafiche (n° 25). Une telle réunion de circonstances forme un certificat d'origine beaucoup moins contestable qu'une simple ana- logie de nom. Le nom mérovingien de l'atelier limousin d'où sont sorties les pièces dont il s’agit ici, a sans doute- disparu, comme tant d'autres, sous le nom du saint patron: de son église. Nous ne désespérons pas de le découvrir un jour. Nous devons faire observer que, malgré les différences trés-sensibles qui existent entre les triens de Locus sanctus: au point de vue de la fabrique, différences qui mettent L 304 MEMOIRES entre leurs dates d'émission respectives des intervalles trés- longs (il y a un siècle au moins entre le n° 22 et le n° 103), le nom du monnayer Dacoaldus' y est resté invariablement inscrit. C’est encore un exemple d'immobilisation du nom de monétaire, à moins qu'on n'y voie une série de mon- nayers, de la même famille et du même nom, se succédant pendant une période d’un siècle et quart. MARSAC. 20. — + MARCIACO FIT. Tête à droite, ceinte d’une double couronne perlée, terminée sur le col par un enrou- lement de perles, le col orné d’une rangée de perles qui se relie à la couronne; le tout dans un grènetis. #,—+ CERANIO MONETA. Croix latine, cantonnée de qua- tre points ou globules dans un cercle qui la sépare de la légende : celle-ci est entourée d’une couronne de perles. Tiers de sou d'or pur. Poids : 4 gr. Troisième quart du vir siècle, — Musée départemental à Tulle. (Il existe un double au Cabinet des médailles de la Bibliothèque impé- riale.) 405. — MARCIACO. Effigie barbare, avec couronne de perles; les lignes du buste figurent une M. R, CERANIO MO. Croix égale dans le champ. Tiers de sou d’or. Poids: 45,25. Fin vu siècle ou plutôt premier quart du viri®. — Cabinet de M. Ponton d’Amé- court *. " 3 Le nom de Daocoaldus est écrit Dacovaldus dans le n° 101. Dans le n° 22, la voyelle qui suit chaque consonne du mot est séparée de cette consonne par un I ou une cloison. ? M. Conbrouse (Atlas des monn. nat. mérov., p. 35,n° 507) décrit un triens qui porterait au droit MARCIACO, avec un profil droit, et au revers ET DISSERTATIONS. 305 L'un des deux exemplaires du n° 20, qui est au Musée de Tulle, a été trouvé à Meilhars, sur les limites septentrio- nales de la Corrèze. Le type de l'effigie et ses ornements de perles la rattachent manifestement au Limousin et à une contrée de cette province peu éloignée du Palais et de Ma- gnac-Bourg : il ne saurait par suite convenir à une localité située à l'extrémité méridionale du Limousin, désignée dans deux chartes du Cartulaire de Beaulieu sous le nom de Marciacus, et appelée de nos jours Marsac . L'atelier d'où sont sorties les deux pièces qui nous occu- pent, est à Marsac, chef-lieu de commune du canton de Bénévent, arrondissement de Bourganeuf (Creuse). Par une charte du x1° siécle (1073-1086), Guy. évêque de Limoges, fit don à saint Barthélemy de Bénévent de l’église de Marsac : « ecclesiam S. Petri de Marciaco *. » Dans les deux siècles suivants, nous retrouvons ce lieu nommé al- CHILDIERMWS, avec une croix potencée, et il le désigne comme ayant appartenu à la collection de M. J. Rousseau; mais nous ne l'avons retrouvé ni dans cette collection ni au Cabinet des médailles de la Bibliothèque impériale, qui s fait l'acquisition de la presque totalité des monnaies de cette riche collection, ni enfin dans le beau médaillier de M. Ponton d'Amécourt, qui est devenu récemment propriétaire des pièces de Ia nouvelle série recueillie dans ces dernières années par M. J. Rousseau. 1 Cartulaire de Beaulieu, ch. LXXXV, ann. 984-985, et CXLIX, ann. 954- 967. Marsac est dans la commune de Saint-Bazile de Meyssac, canton de Meyssac, arrondissement de Brive ( Corrèze). Encore moins pourrait-on at- tribuer cette pièce soit à Marcillac en Poitou, comme l’a proposé M. Controuse (Catal. des monn. nat., 1839, n° 507), et, après lui, M. Adr. de Longpérier Armuaire de la Soc. de (hist. de France, année 1841, p. 223), soit à Marcillac en Quercy, ou à tout autre lieu du même nom. Marcillec n'est pas la traduction du latin Marciacum, mais de Marciliacum, ainsi que le montre une troisième charte de Beaulieu (XLIX, ann. 930), où Marcillac en Quercy recoit cette dé- nomination. Marçay indiqué par M. Guillemot ( Catalog.) conviendrait mieux, mais le type s'oppose à cette attribution. 3 Mas. de la Biblioth. impér., collect. Gaignieres, t. 183-184, p. 93. 306 MEMOIRES ternativement Marciacus' ou Marsac, suivant la forme ac- tuelle du mot *. | Le n° 105 offre, quant à la forme de l'M initiale, une par- ticularité assez remarquable, et sur laquelle nous appelons l'attention du lecteur. Quoique le nom du monétaire soit le même que celui du n° 20, un long imervalle s’est évidemment écoulé entre l'é- mission des deux pièces. Est-ce un successeur du Ceranius du vrr° siècle , est-ce 14 un exemple de l’immobilisation du nom du monnayer? Nous ne pouvons le décider. Nous ren- voyons à ce qui en est dit plus haut à propos du n° 12 de notre série. PEYRAFICHE. 25. — PETRA FICTA (rétrograde). Tête à droite, dans un cercle; couronne terminée sur le col par deux bande- lettes. Bo. MVN MONIu. Croix pattée, surmontée d'un glo- bule; légende entre deux grènetis, dont l’un, celui qui est à l’intérieur, est fermé par un petit anneau également en grènetis et contenant un globule. Tiers de sou dor. Poids : 45,05. Troisième quart du va siècle. — Cabinet de M. T. Grille. Cette pièce, trouvée à la Beaugisière, est la seule parmi les triens du nom de Petraficta *, qui par son type appartienne au Limousin. Mais cette attribution ne saurait faire l'objet 1 Jbid., p. 106 et 107, et Acta visitat. Simon. archiepisc. Bituric., dans Baluze, Miscellanea, édit. Mansi, t. Ier, p. 282. 2 Mss. Biblioth. impér., collect. Gaignitres, loc. cit., p. 104, 105 et 107. 3 Voir Le Blanc, Traité des mona. de France, p. 46. — Conbrouse , Catalog. rais., n° 300, 301, 1022 et 1023. — Monst. mérov., pl. XXXVI, n° 16.— Rev. num., année 1839, pl. IX. ET DISSERTATIONS. 307 d'un doute, et M. Fillon' l’a reconnue avec sa sagacité ordi- naire. La petite houpe qui est sur le front , caractérise une grande partie du monnayage limousin; le dessin du revers et spécialement l’anneau en grènetis qui forme la couronne et se voit dans les pièces de Jumillac et de Locus sanctus (n° 99, 22, 23, 24, 101, 102 et 403), sont autant de signes de son origine. Quant à la position de l'atelier, nous avions à choisir en- tre les nombreuses localités de la province, nommées Pierre- fitte, Pierrefiche et Peyrafiche, et dont plusieurs sont men- tionnées dans des actes d’une époque reculée *. C’est dans ces circonstances que notre mode de classement est d’un se- cours précieux pour déterminer l'attribution. Notre choix est restreint par le type particulier du troisième groupe, au ter- ritoire situé immédiatement à l’est, au sud et au sud-ouest de Limoges. Or nous trouvons, tout près et au sud-est de cette ville, un village appelé de nos jours Peyrafiche et en 944 Petraficta : « a Petraficta manso uno et dimidio, et alio manso in ipso loco *. » C’est 14, suivant notre opinion, qu’a été très-vraisemblablement frappé le triens qui nous oc- cupe. C'est peut-être au même endroit qu'on pourrait placer le palatium Petraficta, où Pépin I*, roi d Aquitaine, fit un di- 1 Lettres à M. Dugost-Matifeux , p. 66. 3 La charte LXI du Cartulatre de Beaulieu ( ann. 943-948 ) contient la dona- tion d’une villa de ce nom: «“ ... Et est ipsa villa in orbe Lemovicino, in vi- caria Spaniacense, quæ dicitur Petrafcta. » C’est Pierrefiche près d'Espa- gnac, arrondissement de Tulle. — Une autre charte tirée du Cartulatre de Tulle, et datée de 950, fait mention d’une villa nommée Petraficta, et située dans la vicairie de Chambonlive. Baluz., Histor. Tulel., append., col. 349. Cette dernière est Pierrefitte, canton de Seilhac, arrondissement de Tulle | Corrèze ). 2 Mss. Biblioth. impér., dépôt des chartes. 308 MEMOIRES plôme daté de 826, et sur l'emplacement duquel les au- teurs sont demeurés incertains *. DIGN AC ? 104.— wDANACOHI VIL. Tête à droite, avec double bandeau perlé, dans un cercle qui la sépare de la légende. R. NATTIOAL..0. ( Nantoald mo?). Croix égale, légère- ment bouletée, ancrée, avec un R appendue au sommet de la haste (côté droit); dans un grénetis, au-dessous duquel un anneau de perles contenant un globule. Tiers de sou d’or. Poids, 15,20. Troisième quart du vii‘ siècle. — Cabinet de M. Ponton d’Amécourt. L'effigie semblable à celle de Peyrafiche (n° 25), le dou- ble bandeau perlé (analogue à ce'ui de Jumillac, n° 90), la houpe qui est sur le front, et l’anneau de perles qui est au- dessous du grénetis, et engagé dans la légende du revers, pareil à celui de Peyrafiche , de Locus sanctus et de Jumil- lac (n°* 22 à 25, 99 et 101 à 103), déterminent la position de cet atelier dans un lieu du Limousin, situé dans le terri- toire du troisième groupe, à l’ouest et au sud-ouest de Limoges. Mais les lettres que nous avons de la légende du droit ne permettent guère de fixer d’une manière plus précise le lieu d'émission. Les syllabes DANACO sembleraient pouvoir s'appliquer au village appelé Dignac ou La Dignac, arron- 1 “ Actum in Petraficta palatio. » D. Bouquet, Historiens de France, t. VI,. p- 665. 3 D. Michel Germain , dans son traité des palais des rois francs, qui forme le livre IV* de la Diplomatique de Mabillon, déclare ne pas connaître la posi- tion de cette résidence royale. (Mabill., De re diplomatica, lib. IV, cap. cx11 ,. p. 313-314. ) — Cf. la Liste des palais et résidences royales, par M. Guadet.. Annuaire de la Soc. de l'hist, de France, année 1841. ET DISSERTATIONS. ‘ 309 dissement de Saint-Yrieix (Haute-Vienne), et situé dans la direction indiquée par le type du triens. Peut-étre faut il transposer la syllabe HI et lire DAHINACO VIL, ce qui nous donnerait la leçon latine de Dignac. Mais l’ couché reste- rait à peu près inexphqué , car il est difficile d'en faire la terminale de VIGVS, qui mettrait ce mot au nominatif, tandis que le vocable est à l’ablatif. RIEU (près DUN). 45. — RIEODYNIN. Téte a droite, avec un bandeau, les cheveux rejetés en arrière; buste habillé. x. + JIIEODOLENO M ( Theodoleno m.?). Croix égale, cantonnée des lettres D. LC. M.o. (L.E.M.0.) dans un grénetis. Tiers de sou d'or. Poids, 45,20. Troisième quart du vu* siècle. —Cabinet des médailles de Ja Bibliothèque impé- riale. La position de ce lieu est restée jusqu'ici inconnue. Pourtant son attribution, du moins quant au pays d'origine, ne nous semble pas douteuse. L’effigie et la coiffure ne sont pas seulement analogues, mais identiques à celles du Lo- cus sanclus gravé sous le n° 24. Au revers, la croix égale dans la couronne, la croisette qui est au dessous, sont semblables à celles de Limoges (n° 2), de Jumillac (n° 15), de Saint-Yrieix (n° 44), de Beynat et de Sarrou (n* 68 et 69) ; enfin les lettres (L.L.M.o.) inscrites dans le champ de notre triens, seraient à elles seules une preuve convain- cante de son origine limousine. Quant au type secondaire, nous sommes de plus en plus 1 M. Conbrouse a énoncé que cette pièce sortait de l’Austrasie, du pays Messin. Cette indication est d’autant moins admissible , que la pièce, prin- cipalement au revers , a un caractère méridional trés-prononcé, . $10 MÉMOIRES frappé de l'identité qui existe entre Je droit et celui du Locus sanctus précité (n° 24), et nous devons peut-être l'attribuer au troisième groupe plutôt qu au cinquième. D'ailleurs, dans le troisième groupe se trouve la pièce de Chervix (n° 18), signé du même nom que notre triens (Theodolenus). Nous sommes amené ainsi à chercher le lieu d'émission appelé RIEODVNIN, dans le centre et dans le nord du Limousin. Une charte du milieu du xur1° siècle, nous signale près de Dun-le-Palleteau (le castrum Idunum mentionné, au vr° siè- cle, dans la Vie du prêtre Eptadius‘), un lieu nommé Ri- vus *, et de nos jours le Rieu ?. Cet endroit a communiqué son nom à une famille de la basse Marche , dont un mem- bre signait, à l’époque précitée, Willelmus de Rivo*. Or, l'appellation de Rirus, comme toutes celles qui sont tirées d'une circonstance aussi ordinaire que celle du voisinage d'un cours d'eau, s'est fort multipliée, et il ne serait pas étonnant qu'on l’eût distinguée dans l'espèce en y ajoutant lc nom du lieu le plus important du canton, sous la forme de l'adjectif Duninus, ce qui, dans l'espèce, donne à RIE ODYNIN le sens de Rieu-en- Dunois ou Rieu-le-Dunois, comme on dit encore de paroisses situées à peu de dis- tance de l'ancien castrum de Dun, telles que Saint-Sulpice- le-Dunois, ou la Celle-Dunoise. Max. Derocne. (La suite à un prochain numéro. ) | 1 Vie écrite daas la premiere moitié du vit siecle, Ph. Labhe, Nova Biblio- theca mss., t. 11, append. 2 « Guillelmus de Duno dedit pro canonica sua..... mansum de Riro in par- rochia de Culonzanas. » Ms. Biblioth. impér., collect. Gaign., t. 183-184,. p. 103. 2 Rien (le) est dans les commune et canton de Dun-le-Palleteau, arron- dissement de Guéret (Creuse ). ® Mss. Biblioth. impér., loc. cit. ET DISSERTATIONS. 3)1 RESTITUTION A TOURS D'UN TRIEXS MEROVINGIEN ATTRIBUÉ A SAINT-MARTIN-AUX-GÉMEAUX D'AMIENS PAR M. RIGOLLOT ET A REBAIS (SEINE-ET-MARNE) PAR M. DUCHALAIS. Une grande discussion s'éleva , il y a vingt-deux ans. eotre M. Cartier et M. le docteur Rigollot au sujet d'un tiers de sou d’or appartenant au musée de la ville de Metz, et que le dernier, dans une dissertation lue à l’académie d'Amiens et publiée dans les mémoires de cette compagnie, avait cru devoir attribuer, d'après l'opinion de M. Le- lewel ’, à une petite église de sa localité. M. Rigollot , voyant dans le calice qui forme le type de cette pièce une coupe à boire, le considérait comme un emblème du culte de saint Martin, qui est, disait-il, en quelque sorte le successeur du dieu des vendanges, et c'est principalement à justifier cette proposition que l'auteur avait consacré sa dissertation, pleine de recherches sa- vantes et curieuses, ainsi que le disait fort bien M. Car- tier *. Mais celui-ci n'était pas homme à accepter le rappro- chement fait ainsi entre Bacchus et saint Martin. « Je ne puis, nous disait-il en riant, laisser passer cette mauvaise 1 Essai sur une monnaie d'or frappee sous les Méroringiens et portant le nom de l'église de Saint-Martin auz Jumeaux d'Amiens, par M.J.R... 2 Numismatique du moyen-dge, t. I, p. 50, et atlas, pl. IV, n° 14, 3 Recue num., 1838, p. 258 et suiv. 312 MEMOIRES attribution qui donne au saint évéque de Tours, patron de ma province, la clientèle des ivrognes; peu disposé , en général, a adopter les explications des fétes chrétiennes par celles du paganisme, je m'inscris en faux contre celle- ci, ne fût-ce que par esprit de patriotisme. Jamais , disait- il encore, dans la Touraine, où la tradition de saint Martin est toujours vivante, on na pensé à en faire le Bacchus chrétien en concurrence avec saint Denis, qui, sans doute, n’y a pas plus de droits. » M. Rigollot soutenait fermement son opinion, fondée sur le rapport qu'il trouvait entre les deux côtés de la monnaie ; et, suivant lui, MAR SCI pour SCI MAR signifiait Sancti Martini, tandis que GEMELLOS, qui entoure la croix, achevait la phrase ad gemellos, pour exprimer que le tiers de sou avait été fabriqué à Amiens pour l'église connue anciennement sous le nom de Saint-Martin-aux-Gémeaux, église près de laquelle, suivant une antique tradition, saint Martin partagea son manteau avec un pauvre. Nous avouons franchement que cette interprétation avait quelque chose de spécieux qui, à cette époque, nous séduisait par son apparence de vérité. M. Cartier ne renonçait pas cependant à son système. « D'abord, disait-il, SCI MAR est-il bien l’abrégé de Sancti Martini? Notre empreinte (Rev. num., 1838, pl. IX, n° 4), exactement coprée sur celle du savant Lelewel et adoptée par lui, fait voir aussi MARia Sa.CtA comme sur les pièces épiscopales de Clermont (l'I final est dou- teux), ou SCS MARcial comme sur celles des évéques de Limoges...» Puis il joignait & ses dires des détails fort intéressants sur diverses monnaies de la méme époque, attribuées à saint Martin au détriment de saint Martial, mais qui n'ont aucun rapport avec celle que nous allons ET DISSERTATIONS. 313 faire connaître aujourd hui, et terminait ainsi sa savante appréciation : « Je crois donc que Gemellos est le nom d’un monétaire, le même que Gremellus , et que si l’on peut voir de l’autre côté la désignation de saint Martin , comme cela west pas improbable, ce serait plutôt saint Martin de Tours ou une de ses dépendances qu'une église peu impor- tante d'Amiens '. » Sept années plus tard, M. Duchalais*, revenant sur ce sujet, prétendait, à son tour, qu'il fallait mettre à néant. toutes les anciennes attributions. « Gemellos Mar, dit-il. n’a aucun rapport avec Amiens, Tours, ou avec un moné- taire du nom de Gemellus ; c'est l'ancien nom d’une petite ville de Brie, Rébais (Seine-et-Marne, arrondissement de Coulommiers), où saint Oin, du temps de Dagobert, fonda une célèbre abbaye, dont saint Aile, Agilus, fut le premier abbé (654). » Le savant numismnatiste entre dans de grands détails pour arriver à établir cette nouvelle attribution , et conclut ainsi : «Ne voyant sur ces pièces aucun nom de saint, d'abbaye, d'église, nous les regardons comme ap- partenant à Rébais. » M. Duchalais s'était trompé aussi bien que M. le docteur Rigollot, ainsi qu'on en pourra juger par la publication du nouveau tiers de sou d'or qui nous reste à décrire, et qui, nous l’espérons, tranchera définitivement la question. perles. Fr. SCI] MARITINI. Croix ancrée. — Or. Poids, 48,20: 1 Voir Recue num., 1838, p. 262. 3 Rerue num.,1845,p. 127. 1860. — 4 22 314 MÉMOIRES Gette pièce prouve fort clairement, à notre avis, que Gemellus , comme le pensait M. Cartier, est bien un nom d'homme, le nom d'un monétaire de Saint-Martin de Tours. Ajoutons que l'état de bonne conservation dans lequel elle se trouve , ainsi que sa provenance, ne nous laissent aucun doute sur son authenticité. . Si notre regrettable doyen, M. Cartier, existait encore, il eût éprouvé la double satisfaction d'avoir en quelque sorte deviné ou prévu l'existence de notre monnaie, et d'ac- quérir un très-fort argument qui lui manquait en faveur de l'attribution à Tours de la monnaie conservée dans le Cabinet de la ville de Metz, et d'autres pièces qui étaient encore en question. L. ROILLEAU. ET DISSERTATIONS. 315 DE LA MONNAIE DE DOL EN BRETAGNE. (Pl. XIV.) Une trouvaille assez considérable de monnaies, faite il y a quelques années à Issoudun, a répandu dans les col- lections numismatiques des deniers portant les légendes ODO DVX — DOLEO CIVES, qui ont été attribués à Eudes, seigneur de Déols, en Berry. C’est avec le nom de ce per- sonnage que M. F. Poey d Avant les a classés dans le pre- mier volume de ses. Monnaies féodales de France (pl. XL, n° 46 à A). | Quelques-unes de ces pièces portent une étoile à cinq; pointes, bien connue comme type des deniers sur lesquels on lit DE DOLIS. Telle est, à n'en pas douter, l’origine de l'attribution nouvelle sur laquelle nous avons à présenter ici des observations. Radulfus de Dolis se traduit très-exactement par Raoul' de Déols. Dolis est en effet l’ablatif du nom pluriel Doli. Mais. on trouve déjà Dolis à l'état indéclinable dès le x° siècle, «in villa Delis, prope villam Dolis, in castro Dolis, de «a monasterio Dolis '. » La trace de ce pluriel subsiste dans la forme française. { Dom Bouquet, Histor. de Fr., chartes d'Ebbas, de 917, et du roi Raoul, de 927,t. VIII, 0. 713, 714, 510, 511. 316 MEMOIRES Déols, de même que la forme féminine de Dole en Franche- Comté, Dola, se reconnaît encore à l'E muet qui termine ce nom. Nous n'avons pas besoin de rappeler que Cabilonnum et Catalaunis ont produit Chalon et Chaalons. Ce fait gram- matical , qui trouve de si nombreuses applications, est de - venu élémentaire. Déols n'était qu'un virus; la qualification de civitas ne peut donc lui convenir : la légende DOLEO:CIVES s’ap- plique, au contraire, très-complétement à Dol, ville archié- piscopale fort ancienne, à laquelle nous sommes étonné qu'on n'ait pas pensé. Le nom latin de Dol, masculin ou neutre , est toujours au singulier. La légende ODO DVX devait tout au moins faire hésiter à chercher sur la monnaie qui la porte le nom d’un des sires de Déols qui n’ont jamais été ducs. Dol appartint pendant longtemps au comte Eudes, im- proprement appelé Eudon’, qui prit le titre de duc. La chronique de Saint-Brieuc nous offrece témoignage : Eudo.... regnavit in Britanniam tanquam dux et fecit monetam argen- team. On connaît déjà deux monnaies de ce seigneur, re- cueillies à Rome dans le trésor de Saint-Paul-hors-les-Murs, publiées d'abord par M. de San-Quintino *, et reproduites depuis par divers auteurs. Les deniers de Dol nouvellement découverts doivent être rendus à ce même personnage. Geoffroy, duc de toute la Bretagne, mourut en 1008. L’ainé de ses fils, Alain, lui succéda ; et Eudes, son frère, portant le titre de comte, figure avec lui dans tous les actes publics de quelque importance,entre 1010 et 1040, époque 1 A. de Barthélemy, Rerue num., 1856, p 267. — Voy. aussi Geslin de Bourgogne et A. de Barthélemy, Anciens éréchés de Bretugne, t. I°", 1855. - 4 Monete del X e dell” XI secolo scoperte nei d'intorni di Roma nel 1843, Turin, 1846, pl. I, n° 4 et 12, ET DISSERTATIONS. 317 de la mort d'Alain. Guillaume de Jamiéges dit : « Gaufri- a dus..... duos filios genuit, Alannum videlicet et Eudo- a hem, qui post ejus excessum Britannicam patriam robus- « tissimo vigore diutius rexerunt *. » Et Orderic Vital : « In « Britannia Eudo fratri suo Alanno successit et XV annis «ita libere, ut sine dominio esset alicujus, principatum « exercuit?. » Alain avait fait frapper le denier dont nous reproduisons la figure sous le n° 1 de la pl. XIV. Il est facile de voir que l’un des deniers à la légende DOLEO CIVES (pl. XIV, n° 2) est une imitation de la monnaie d'Alain ; le monogramme est en partie renversé, de façon que l'O occupe la place supérieure. Ce monogramme, assez bien conservé sur le denier d'Alain, contient Je nom de Salomon ou Salnmo, sui- vant la forme primitive. Alain reproduisait peut-étre un des types de Salomon (857-874) contemporain de Char'es le Chauve, ou bien peut-être encore les ducs avaient-ils l'intention de rappeler aux rois de la troisième race qu'ils ne faisaient que conti- nuer la fabrication concédée par un prince carlovingien à l'un des plus puissants de leurs devanciers : «.... Rex « Carolus Salomoni Britonum regi habere permisit coronam «auream gemmis pretiosis ornatam, seu circulum aurenm «ad ejus libitum, et purpuram atque archiepiscopalem « sedem et numismata aurea et argentlea *. » Le mono- gramme salomonien pouvait constituer un éloquent me- mento. Une autre variété de deniers 4 la légende DOLEO CIVES, celle qui a di conduire à l'attribution que je combats ici 1 Lib. V, cap. V, apud Duchesnes, Hist. de Norm., p. 251. ? Lib. V, cap. XLV, apnd Duch., Hist. de Norm., p. 567. 3 Chronique de Saint Brieuc , apnd D. Morice, t. I, 25. ‘318 | MÉMOIRES (pl. XIV, n° A), est encore une imitation d’un denier d'Alain (pl. XIV., n° 8). On a supposé que le duc de Bretagne avait imité le type de Déols, ce qui serait contraire aux habi- tudes monétaires de tous les temps, fondées sur un intérêt qui ne peut varier dans ses causes. On conçoit qu'un petit seigneur comme le sire de Déols ait copié la monnaie du duc de Bretagne pour faire participer ses deniers au cours étendu qu’elle avait sur de vastes domaines et profiter du crédit dont elle jouissait; mais on ne comprendrait pas qu’un puissant duc ait diminué le crédit de sa monnaie en adoptant un type créé par un hobereau d'une province voisine. On ne manquera pas de nous opposer les mon- naies carlovingiennes au type de l'étoile (pl. XIV, n*9 et 10), qui sont communément attribuées à Déols, et qui ont été publiées par Le Blanc et par M. C. Robert d’après un dessin de Mory d’Elvange. Mais l'attribution de ces monnaies à Déols ne repose sur aucune donnée sérieuse. On a rappro- ché le type qu’etles portent de celui qui figure sur les de- niers de Raoul et de Guillaume de Châteauroux; c'est là tout. Le Blanc classe la première au règne de Charles le Simple, ce qui signifie pour nous que cette pièce avait un . aspect beaucoup plus moderne que celui des deniers de Charles le Chauve. « Les monnoyes que je donne à Charles le Simple, dit l'auteur du Traité historique, n'ont point besoin d'explication, n'ayant rien qui puisse faire de la peine. » Notre savant collaborateur pense que Mory d’Elvange interprétait sans doute avec trop de témérité par Mfcttis les lettres MIS qu'il voyait sur la seconde variété, et qui d'ail- leurs , ajoute-t-il, avaient pu être mal lues . 1 Études numism, sur une partie du sud ouest de la France, 1852, p. 218. ET DISSERTATIONS. 319 L'étoile formée de deux triangles qui se coupent est le type du sceau de Salomon, fils de David, suivant la croyance universelle des Orientaux; elle se voit souvent gravée sur les cachets de ceux qui portent le nom de Soléiman; c'était un talisman d'une irrésistible puissance. Cette étoile, à laquelle les juifs attribuent aussi de grandes vertus et qui est devenue un symbole astrologique, a pu étre placée sur la monnaie bretonne comme type salomo- nien; le nom de Charles qui y est joint rappellerait la concession faite par Charles le Chauve. Les caractéres que Mory d’Elvange considérait comme une abréviation du nom de Metz sont peut-être un reste dégénéré , SLM, du mono- gramme de Salomon. Dans tous les cas, pour montrer que les deux petites croix alternant avec les besants conviennent bien positivement & la Bretagne, je place dans la pl. XIV le dessin d'un denier (n° 8) dont l'origine bretonne n’est pas douteuse. et qui présente ces mêmes détails. Il est dif- ficile d’assigner une époque précise aux deniers à la lé- gende CARLVS .REX, qui ne se retrouvent plus dans les collections ; mais il faut remarquer que les idées orientales ont pénétré vers le Nord dès les temps carlovingiens. Le roi de Mercie. Offa, contemporain de Charlemagne, copiait servilement le dinar ou sou d'or du khalife Haroun-er- Raschid ; le voisinage des Arabes d'Espagne contribuait à introduire chez nous les noms et en même temps les croyances des Sémites. Dans une charte donnée en 812 à Aix-la-Chapelle par Charlemagne, on remarque parmi les noms des quarante chrétiens espagnols réfugiés en Septi- manie ceux de Zoleiman et du prêtre Solomo . On est d'autant plus autorisé à croire que l'étoile salo- 1 Batuz , Capit., t. 1, p. 500. 320 MEMOIBES monienne a été connue en France, que chez nous aussi ‘bien qu’en Orient, on attribuait toute œuvre remarquable, toute machine ingénieuse au grand roi de Juda. Les deux traditions ont dû faire leur chemin ensemble. Ainsi dans le Roman de Troies, de Benoit de Sainte-More, on trouve mentionnés les éperons ta.llés à i uerre Salemon. On lit dans le roman de Gérard de Roussil'on * : Teil aveir embla Karles qui molt fu bons Treiz cenz hennas que fist faire rei Salemona Le roman d'Auberi le Bourgoing nous fournit la descrip- tion d'une coupe de l'ouvrage le plus merveilleux que roi Salemons ot fait menourr.r, et qui est offerte à Aubri par Lambert d'Oridon *. La vaisselle d'or et d'argent de l'œuvre Salomon figure encore dans les statuts des Lorimers que renferment les registres de Guildhall, à Londres *. La table d’or et d’éme- raude qui appartenait aux rois wisigoths et que Tharik- ben Zéiad prit en 712 à Médina-Celi ou à Tolède, est célèbre dans l'histoire d’ Espagne sous le nom de table de Salomon, ce qui n'implique pas, comme on l'a cru, qu'elle avait été apportée de Jérusalem par Titus, mais nous montre qu’elle était d'un travail précieux. C’est ainsi que dans l’histoire de Sindebad-cl-Bahri nous voyons figurer une table de Salomon parmi les présents que le khalife Haroun-er- Raschid envoie au roi de Sérendyb. Enfin, sur un vase de Publié par Francisque Michel dans la Bibliothèque de P. Jannet, p. 304. 2 Hist, littér. de la France, t. XXII, p. 328, 329. 3 Collect. génér. des documents franç. qui se trouvent en Angleterre, publ. par Jules Delpit, t. 1°r, p. LXXAXIT. « Dedenz le terme de JII tides, le vicomte et le chamberlayn le Roy, deyvent venir à la neif, et s’il y a vessele d'or ou d’ar- gent de l’œuvre Salomon , ou pière preciouse , ou paille de Constantinople... s’il prendront à l’oeps du Roy. n ET DISSERTATIONS. 321 bronze en forme de paon que je crois avoir été fabriqué chez les Normands de Sicile au xt siècle, on lit, avec la signature arabe de l'artiste 4bd-el-Mulek le Chrétien, l'in- scription : Opus Salomonis erat. Jinsiste, un peu longuement peut-être, sur ce point, pour bien établir la communauté d'opinion qui existait, au sujet de Salomon, entre les musulmans et les chrétiens. Si les deniers à la légendé CARLVS REX reproduisent le type du roi de Bretagne Salomon, on ne s étonnera pas de retrouver l'étoile qu'ils portent sur les deniers d’ Alain et de son frère Eudes. Ensuite le seigneur de Déols copie la mon- paie des ducs de Bretagne ; DEDOLIS nous apparaît comme une adroite imitation de REDONIS, et je crois que les faits sont replacés sur leur véritable terrain. Après la mort d'Alain, son fils Conan, âgé de quelques mois, lui succéda. Eudes s’empara de la tutelle du jeune prince ; c'est alors sans doute que furent frappés à Rennes ces deniers sur lesquels on lit CONANVS COMES, et qui por- tent au centre EDONIS ou EDONIS CTS (comitis), pièces qui n'ont pas encore été étudiées avec une attention suffisante (pl. XIV, n° 7 et 5). Ce type se voit considérablement altéré sur certains deniers postérieurs à ceux que nous venons d'indiquer. Les monétaires de Dol me paraissent en avoir recueilli les débris pour en composer le type du denier que je place sous le n° 6 dans notre pl. XIV. Si ce rapprochement fort 1 L'étoile composée de deux A qui se coupent se voit sur la monnaie de Soleiman , schérif de Maroc, dont elle remplace le nom. Elle accompagne des inscriptions chrétiennes aussi bien que des inscriptions arabes, Voyez dans Fabretti ( Inscr. ant. xd, patern., p. 738 , n° 486), l'épitaphe datée du consulat de Jean et de Varanes; et Alberto de la Marmora, Memor. sopra alc. antichità sarde, Turin, 1853, p. 80 — On remarqne encore cette étoile sur un denier mérovingien frappé à Poitiers. 322 , MÉMOIRES simple est accepté, on devra reconnaître que le denier n° 6 ne peut avoir été fabriqué par Eudes de Déols (1012-1037), mort trois ans avant l’avénement de Conan; et l’on remar - quera qu à ces trois années il faut encore joindre toutes celles qui se sont écoulées entre l’émission des monnaies au monogramme bien accusé et l’époque où ce même monogramme a été assez déformé pour que les caractères IN aient pris ume importance égale à celle de la liga- ture EDO (voy. Poey d'Avant, Monn. féolales, t. 1°", pl. IX. n°* 8 et 9). Je me sers ici des belles empreintes que je dois à l’obligeance de M. Dréchesne, premier adjoint de la mairie d'Issoudun. Eudes était comte à Rennes, mais i] était duc à Dol. Je suis bien tenté de croire que le denier au type du temple qui porte EDO DVX BRITANIE et EDONIS CIVITAS n'a pas été frappé à Rennes comme on l’a pensé jusqu'à présent; Dol ou Saint-Brieuc pouvaient s intituler cité d Eudes et donner naissance à ce jeu de caractères qui permettait d’imiter le nom de Rennes. Nous n’entreprendrons pas de raconter ici les guerres qui eurent lieu entre Eudes et son neveu Conan, la mort de celui-ci en 1066, le siége de Dol , que son successeur Hoél fut obligé de lever par suite de l'intervention de Philippe I*. Eudes mourut en 1079, et Dol resta au pouvoir de son fils Geoffroy jusqu'en 1093. Toutes ces dates expliquent Ja fa- brication de la monnaie doloise et justifient, je crois, la restitution que je viens de proposer. J'ai dit que le seigneur de Déols n’était pas duc; on peut rappeler à titre d'objection les deniers à la légende RADVLFVS DOL—DVX MILICE. Mais qui ne voit que cette légende vient trés-directement à l'appui de l'opinion que j émets? Le Raoul qui a fait frapper cette monnaie, pos- ET DISSERTATIONS. 325 duc de Bourgogne Jean Sans-peur frappée eo Flandre, l’autre pour un denier tournois de Charles VII ou de ses successeurs jusqu'à François I", sont des monnaies des Guillaume de Sombreffe , seigneurs de Reckheim, petite localité située dans la province de Limbourg ‘. Elles ne se rapportent donc à la numismatique française que par leur aspect. Elles ont été trouvées, la première, dans |’ Artois, qui appartenait, à l'époque où elle a été émise, à la maison de Bourgogne , et la seconde dans la Guienne, c'est-à-dire dans des pays complétement étrangers au leur, et où elles n'ont jamais eu qu un cours furtif. Il est à remarquer à ce sujet que les monnaies des petites dynasties belges. parti- culiérement du xv° siècle, frappées en très-grande partie à des types imités de ceux de pays plus ou moins éloignés, étaient destinées à se répandre partout ailleurs que dans les possessions très-restreintes de ces seigneurs ; et elles étaient décriées en dehors de leur territoire avec d'autant plus de raison, qu elles étaient la plupart du temps plus faibles d’aloi et de poids que les monnaies dont elles affectaient l'appa- rence. L'exercice du droit de mongaie n'a, du reste, été que trop souvent, même pour des seigneurs infiniment plus _puissants que ceux dont il s'agit, un moyen de se créer des ressources aux dépens de la bonne foi du public. 1 Une monnaie d’un Guillaume de Sombreffe , seigneur de Reckheim, a déjà été publiée dans la Rerue, Ie série, t. XV, 1850, p. 284, article de M. Chabouillet. C’est un agnel d'or imité de ceux de Charles VI. Reckheim est à présent une simple commune du canton de Mechelen et de l'arrondissement de Maëstricht. On y comptait, il y a vingt ans, neuf cent quatre vingts habitants ( Dict. géogr. des prov. de la Belgique, par M. Van der Maelen }). Quant à la seigneurie de Reckheim, elle comprenait le bourg de ce nom, quelques villages voisins et d’autres fiefs au nombre d'environ cent soixante , tenus et mouvants d'elle comme terre souveraine. ( Notice historique sur l'ancien comté imperial de Reckheim , par M. Wolters, Gand, 1848. ) 326 MEMOIRES Trois Sombreffe du prénom de Guillaume ont été succes- sivement scigneurs de Reckheim. Guillaume I: le fut de 1394 à 1400, année dans laquelle il mourut. L'époque du décès de Guillaume II est inconnue. Guillaume III, qui est mentionné dans des actes dès 1442 suivast Butkens, et dès 4443 suivant M. Wolters, cessait de vivre en 1484. Les armes de la famille de Sombreffe étaient d'or, à la fasce de gueules accompagnée en chef de trois merlettes de même. On remarque que la branehe de Reckheim brisait ce blason d'un quintefeuille placé en cœur sur la fasce. Quant aux armes de Reckheim, elles étaient d'or, au lion de gueules. Sur les monnaies de Reckheim connues jusqu'ici, les armes de Sombrefle sont disposées comme uous venons de les décrire; mais sur la mite que nous publions, pour donner à cette pièce une plus grande ressemblance avec les mites de Jean Sans- peur ‘, où les quartiers 2 et 3 sont aux armes de Bourgogne ancien, et par conséquent composés de bandes, on a égaiement disposé en bandes l'intérieur des quartiers aux armes de Sombreffe, que l’on a même été jusqu à placer en seconde ligne dans l’écartelé, où elles cèdent la place aux armes de Reckheim, contrairement à la règle commune, qui faisait passer les armes de la fa- wille avant celles des fiefs. Quant aux armes placées sur- le-tout , on se demande ce qu'elles pouvaient être, puisque celles de Sombreffe figurent déjà, plus ou moins torturées, * Voir, dans la Revue num. de 1847, pl. XXII, fig. 4, le dessin que nous. avons donné d’une de ces mites. L'écu y est écartelé au premier et au qua- trième d’une fleur de lis, tenant lieu des armes de Bourgogne moderne; au deuxième ct troisième d’un composé de bandes représentant assez incompléte- ment aussi les armes de Bourgogne ancien, qui sont un bandé d'or et d'azur de six pièces, à la bordure de gueules: sur le tout, un petit écusson au lion de Flandre, ET DISSERTATIONS. 327 il est vrai, dans le champ de l'écu. On aurait été peu surpris sans doute d'y trouver. si la pièce était mieux venue, un lion comme sur les mites de Jean Sans-peur ; c'est un sur-le-tout que l’on connaît déjà sur d'autres mon- naies de Reckheim :. Notre mite appartient , suivant toute apparence , à Guil- laume II. Le denier tournois est plus moderne, et parait devoir être attribué à Guillaume III. Nous avons publié * de l’un de ses successeurs dans la seigneurie de Reckheim , Jean de Piermont, un double et une obole tournois. La nouvelle pièce que nous faisons connaitre donne la preuve que Jean de Piermont, en battant monnaie à ce type, n’a fait que suivre des errements établis de longue date dans ses do- maines. J. Rouyer. 1 Voir les figures 13 et 14 dans les planches de l'ouvrage de M. Wulters. ? Revue num. de 1852, pl. IT, fig. 3 et 4. ET DISSERTATIONS. 329 portant l'inscription Mesho krol polski (Miecislav III, 1173- 1177), recherchées alors, se trouvaient facilement, et c’est ainsi qu'elles prirent place dans les collections Wolanski, Radziwill, Sapieha, Reichel, dans le cabinet de Kopen- bague, etc. Wolanski, en 1827, m'avait fait cadeau d’une de ces pièces sur l’authenticité desquelles mon scepticisme était excusable, même en 1842 *. En cette année même, Bernhard Kehne, à Berlin, affirma l'authenticité de ces monnaies dans son journal *. Quoique les traditions ét les documents assurent que les Vendes- Slaves furent les instructeurs des Allemands pour I orfé- vrerie, Kehne pense que Miecislav III, n'ayant pas d’ artistes graveurs nationaux, appela les juifs à la fabrication de la monnaie, et que comme ils ignoraient l'alphabet latin, ils se servirent de l’hébreu. Cette opinion fat en partie contre- dite par Stronczynski qui présumait que la fabrication de la monnaie étant donnée à bail et confiée aux juifs, ceux-ci mirent en circulation celle de leur propre idiome. Sur l’au- thenticité des pièces à légendes hébraïques il ne pouvait plus subsister de doutes, parce qu'on en trouvait de diffé- rents coins, isolées dans les trouvailles qui se suivaient depuis 1844. . Cependant il m'a paru impossible de considérer ces pièces comme des monnaies courantes, des monnaies légales d’État. Les juifs égorgés partout dans l'Occident, trouvaient un refuge et un bon accueil dans les régions slaves et en Pologne. Mais la monnaie en circulation y était bien réglée: les princes apanagés ne la touchaient pas encore. C’est § Antiquités de Pologne, de Lituanie st de Slavonie , expliquées par Joachim Le- lewel ; notice sur la monnaie de Pologne, 1842, p. 15. (2) Zeitschrift fur Munz-Siegel-und- Wappenkunde. 1860. — 4. 23 330 MEMOIRES pourquoij ai dit, en 1851, dans un petit article sur la mon- naie du moyen âge‘, que les bractéates hébraiques étaient une manifestation de la reconnaissance d’une synagogue. Lorsqu’aprés ta mort violente de Zbignev, son frère, Boleslav III, allait faire pénitence, le clergé retrouva, en 4127, le chef de samt Adalbert dont le corps avait été en- levé par les Bohémes cent ans auparavant. Boleslav III fit faire pour cette relique retrouvée un feretrum auri purissimi et le type de sa monnaie forgée à Guesne représente cette chasse de forme carrée. On connaît un certain nombre de plaques ou de bractéates d'un plus grand diamètre représentant un personnage agenouillé devant un évêque (voy. pl. XV, n° 4) avec des légendes variées, mais analogues à celle que vous avez sous les yeux. Je pense que cette plaque a été frappée en commémoration de la pénitence et de l’absolution de Boleslav III. En effet, on pe manque pas de types historiques, par exemple le type liégeois rappelant la construction d'une église, et on a re- marqué en Allemagne de larges bractéates qui méritent d'être regardées comme des médailles. Ces considérations étaient sous presse à Posen (Pologne du moyen âge, t. IV, 4854) lorsqu'on exhumait, au mois de novembre 4850, un trésor de bractéates enfoui au plus tard vers 4220, en Kouiavie, près du village de Vienietz, canton de Vladislav. De nouveaux coins y apparurent, des coins variés à l'imitation de ceux d'Allemagne, portant les lé- gendes : Fides, Caritus, Tusticia, Sirena, Aquila et de nouvelles petites plaques inscrites en hébreu (pl. XV, n°3 à 28). L'examen des inscriptions m'a confirmé dans mon idée 3 Pologne du moyen dge, t. IV, p. 331-892. ET DISSERTATIONS. 331 que ces plaques ne sont pas des monnaies, mais des pièces de circonstance, des petites médailles plus parlantes qu’au- cune monnaie circulant légalement. Je n’ai pas dans ma bibliothèque la Chronique de Vincent Kadlubek, historio- graphe de l'époque ; mais je puis vous dire que la suite des légendes hébraiques, telle qu'on peut l'expliquer, paraît être une paraphrase de plusieurs passages ‘du IV* livre de cette Chronique. L'apparition de cette sorte de plaque fut de courte durée, de 1177 à 1220 au plus tard. Je doute qu'on trouve quelque chose de postérieur. La situation des juifs en Pologne com- niença à s'assombrir ; la contagion de la haine des fana- tiques d'Occident gagnait-les régions slaves et les popula- tions prenaient en aversion les juifs qui, résidant jusqu'à ce moment parmi elles, sans condition quelconque, cher- chaient à se sauvegarder par des priviléges qu'ils réussirent à se procurer en Turingie, en Bohème, en Pologne, 1264, en Silésie, en Moravie, 1268. Voici maintenant la transcription et la traduction des légendes hébraïques inscrites sur les pièces dont il vient d'être parlé. PLXV,ne 8. apy" pry? OMAN 337 Jubilate Abraham, Jsnac et Jacob. Nes 4, 5, 6. po ND a NM Mesha krol polski {rex Poloniæ ). 7. npwa Mesko (anno 1173-1177), 8. NNW Misaha (id. ). 9. wii Npwr Meska possessor heeres (anno 1199), 10. (pny vel Lby) Ÿ Nw Mesaha (ingressus vel senescens ( anno 1200), 11. 59m Dinan Ana DU Et antequam fugam dedit pertur- bavit presidium meum (anno 1178 ) 12. (729 Selectus (anno 1178 ). 13 et 14. 30902 Boleslov (altus + 1201). 15 et 16. "7292 Benedictus. 332 MÉMOIRES Nes 17. MMOWAIYX WIA Benedictio et gaudium. 18. ma27mn53 ñ292 Benedictio retecta est — splendor. -19. (UNNOT pts Justitia, gaudijum. 20. MD 210 Bonus mortuus (+ 1194 ). 21. 72"S2N1 7292 Cui inest magnitudo tamen perit — Kz ( Kazimir + 1194). 22 23 955 Retectus nepos (anno 1194). 28. Sip piow5 Liscus krol (Lisko rex, anno 1205). 24, awd Lisah (anno 1205}. 25 4973 Nazireatus ( caput cinctam ). 26 MAS“ VNDOp vel NOp Primus cel cinctus — princeps (anno 1194). 27. Do "2 He rex. 28. n% 0 Nonne obliti sumus. Vous remarquerez que le denier apporté de Dantzig par M. Jungfer (pl. XV, n° 2), et dont vous m’envoyez le des- -$in, n’a rien de commun avec les bractéates hébraiques ; il est plus ancien. Les croix figurées sur les deux faces sont de l’époque sinon encore carlovingienne, au moins saxonne, et je pense que le poids de la pièce répondra à cette der- aière époque. La légende qui entoure la plus petite des deux croix est arabe, suivie et liée. Je n’y vois pas de nom propre de per- sonne ou de localité. La légende du revers (côté de la plus grande croix) paraît être d'un autre genre; la plupart des ‘lettres sont posées isolément. Pour en faire une légende hébraïque, il faudrait admettre que plusieurs de ces carac- tères sont retournés. Mais puisqu’une des légendes est évidemment arabe, il doit en être de même de la seconde; je pense seulement que les caractères sont disjoints. Malheureusement la mon- naie appartenant à M. Jungfer est mal conservée; il faut attendre qu'un heureux hasard nous apporte quelque chose de meilleur. ET DISSERTATIONS. ‘333 Par les ouvrages de Saveliev nous savons combien de monnaies arabes du temps des Samanides, se répandirent par le commerce aux environs de Ja Baltique, en passant & traversles peuplades ouraliennes. Yacout (Notices et extraits des man. ortent., t. II, n° 35), dit que dans la ville de Mafa- bakha, ix’Liv, lisez as”li ou mieux ali , Magandja (Mayence) située auprès d’un fleuve Ain (Mein?) ou Zin 4»; ; (lisez > ,, Rin) le Rhin, circulaient des drachmes frappées- à Samarkand par Nasreddin al Azmani. Je ne sais pas en- core au juste qui est ce Nasr; mais ce qui est certain, c’est que les Arabes savaient que leur monnaie avait cours en- Allemagne. | Otton le Grand et en même temps un prince des monta- gnards slaves (de Krakovie) envoyèrent en 955 des ambas- sades au khalif de Cordoue. En Pologne, on a trouvé un denier que conserve M. Ras- tawietzki et qui est frappée aux noms du khalif Hescham (mort en 1009) et de Henri qui monta sur le trône des Ottons en l’an 1002. Elle n’est pas andalouse. Où fut-elle frappée: entre les années 1002 et 1009? La figure de cette mon- naie, dans ma Numismatique du moyen âge, pl. XVII, n° 2, est bonne, mais l'explication qui en est donnée t. III, p. 114, . est fausse ; elle est corrigée dans une note de la Géographie du moyen âge, article Slavia, t. IT, p. 118. -— Le monde à. cette époque était plus arabisant qu’on ne se l’imagine en- core. Le denier de M. Jungfer, s'il n'est pas si ancien que la: monnaie dont il vient d’être parlé, est cependant bien an- térieur aux bractéates juives de Pologne. Vous pensez que: les paillettes juives étaient une véritable monnaie de banque... Toujours est-il que cette monnaie reste éphémère, commé- morative, de circonstance par ses légendes, lorsqu'elle dit :: 384 MÉMOIRES ET DISSERTATIONS. ua bon prince est mort; un prince est proclamé non pas duc, mais roi, melek, krol ; un autre prétend comme héri- tier, il s’est enfui. Répandait-on de cette manière les nou- velles du jour pour opérer la hausse ou la baisse ? Ces paillettes juives sont d'argent de bon aloi comme les bractéates, avaient une valeur intrinsèque et pouvaient cir- culer, au moins se mêler impunément avec les bractéates et la monnaie légale, comme postérieurement les thalers de Sigismond (1540), de Thorn (1629) et les jetons que les hô- tels de monnaies forgeaient en or avec tant de luxe en Suède et en Pologne. Je citerai encore les différentes médailles et jetons ayant valeur monétaire, comme ceux qui ont été frappés pour le mariage du duc de Brabant, pour le vingt-cinquième anni- versaire du régne de Léopold, piéces qui circulent pour 40 centimes. Respectables souvenirs populaires, de même . que les paillettes juives sont un souvenir de la sécurité de ceux qui échappaient aux massacres, et qui s écriaient dans leur asile : réjouissez-vous Abraham, Isaac, Jacob! Croyez, je vous prie, aux sentiments affectueux de votre tout dévoué, J. LELEWEL. Bruxelles, 15 mai 1860. CHRONIQUE. La lecture des médailles est hérissée de tant de difficultés, que, lorsqu’on trouve l’occasion de détruire une erreur accré- ditée, on doit s’empresser de la signaler, surtout quand cette erreur se produit sous le patronage d’un nom cher à la science, car le respect dû à ce patronage devient parfois une pierre d’achoppement, je ne dirai pas seulement pour le débutant dans la science de la numismatique, mais encore pour l’érudit lui- même. L’évidence seule a done pu me décider à proposer une nouvelle lecture, là où un savant estimable avait donné, du reste avec une certaine réserve, une interprétation basée sur des hypothèses plus ou moins plausibles, «ll est des choses, dit-il lui-même, qu'il faut savoir ignorer jusqu’à ce qu’un heureux hasard nous les apprenne. » La médaille que je veux signaler à l’attention des lecteurs de la Revue est le moyen bronze d’Auguste, que M. de Pina décrit. ainsi ? : CAESAR. PONT. MAX. (Sa tête laurée. ) R. IVA. TENO. ( Autel entre deux Victoires.) « Les antiquaires les plus habiles s’accordent à regarder les- ' Leçons élémentaires de numismatique romaine, par M. de Pina (publices sans nom d'auteur, Paris, 1823, in-8°), notes preliminaires , p. 51. 3 Leçons élém. de num. rom., p. 72 et 73, 336 CHRONIQUE. médailles de ce type (M. de Pina parle ici des médailles portant la légende ROM. ET AVG.) comme n'élant point de coin ro- main, dont elles n’ont ni la fabrique ni la marque distinctive S.C. Ils conjecturent qu’elles ont dû être frappées à Lyon, où un temple et un autel avaient été érigés par soixante peuples gau- lois à Rome et à Auguste. » «a Ce même type se retrouve sur la médaille ci-dessus décrite, mais avec une légende propre à piquer la curiosité des savants. Le mot écrit au-dessous de l’autel offrirait-il le nom de l’un des soixante peuples ou de quelque magistrat? ou bien ne serait-il qu’une légende défectueuse? » Ce n’est point ici le lieu d'examiner Ja question si contro- versée de savoir si ces médailles ont été frappées en Gaule ou en Asie. Havercamp, Goltzius, Mezzabarba, etc., et par-dessus eux tous le savant Eckhel, ont discuté longuement cette ques- tion , et il est généralement adopté que ces pièces si communes appartiennent à la numismatique de la Gaule lyonnaise. Mon but, plus simple et moins savant, est de restituer une légende mal interprétée par M. de Pina. JVA. TENO doit se lire ROM. ET AVG., comme la légende si connue qui accompagne toujours le revers des médailles au type de l'autel. Tous ceux qui ont un peu étudié l’épigraphie et la numisma- | tique connaissent l’écriture rétrograde, c’est-à-dire tracée de droite à gauche. C'était, dans l'antiquité comme aujourd’hui, la façon d’écrire la plupart des langues séinitiques, et la Grande-Grèce l'avait très-certainement empruntée à lOrient, avec ses alphabets. Ce genre d’écriture n'est donc rétrograde que par rapport à celui des langues occidentales qui s’écrivent de gauche à droite, La médaille offre la légende IVA. TENof{ ou RoNGT. AVC. retournée et fort incorrecte, l’E n’étant pas lu de droite à gauche comme les autres lettres, le M étant remplacé par un N,et le R manquant par le défaut de la frappe dans CHRONIQUE. 337 Pexemplaire publié par M. de Pina. Encore pourrait-on ob- server que la tête de cette lettre paraît légèrement sur le bord de la pièce. Plusieurs personnes repoussant mon interpré- tation, dont la vérité est pourtant si palpable, voulaient soutenir Popinion de M. de Pina ou plutôt son doute sur le sens de cette légende , quand le hasard — l'heureux hasard invoqué tout à l'heure par M. de Pina lui-même — est venu ajouter une preuve de plus à l’évidence que je croyais suffisamment démontrée, en me faisant découvrir un second exemplaire de cette médaille, sur lequel le R, objet d’une discussion insoutenable, ap- paraît tout entier, le flan élant un peu plus large et la pièce mieux frappée. La vraie leçon est donc bien ROM. ET AVG.; si on y remarque une légère irrégularité, ceci doit être considéré comme le fait d’un graveur ignorant et malhabile. MM. de Longpérier et Duchalais ont publié aussi des médailles au même type, mais avec des légendes barbares ou incom- plètes. Il convient de les rapprocher ici et de les comparer avec celle qui est l’objet de cette notice. Je citerai d’abord la pièce que M. de Longpérier a décrite * à l’article de Lyon et à la suite des monnaies à légende régu- — lière, monnaie qui offre les mêmes lacunes que la médaille de M. de Pina : seulement il lit OVA. (sic) TENo, et ne discute pas cette légende, ce que, du reste, il ne pouvait faire dans un catalogue. Quant à celles que M. Duchalais it POMAETD et NTUNI‘ ?, je ne puis comprendre, à moins d’admettre une erreur de typographie, que l’auteur ait pu lire ainsi les légendes du revers de ces deux pièces. Pour mon compte, je les ai étudiées avec beaucoup de soin et d’attention au Cabinet des médailles, et { Description des médailles du cabinet de M. de Magnoncour, par Adrien de Longpérier, 1840, p. 11, n° 86. 3 Description des medailles gauloises de la Bibliothèque royale, p. 149, n° 429 et 431. 338 CHRONIQUE. je ne puis me résoudre à lire le n° 429 que de la manière suivante : Droit. Au lteu de DIPNG AVGVSTVS PATE, je lis de même, mais avec le dernier mot complet PATER. Les lettres DIPNG sont évidemment la représentation barbare du mot DIVVS, gravé par un monétaire maladroit. Revers. C’est tout simplement la légende ordinaire ROM. ET AVG., mais représentée ainsi: JOMAETA, le dernier signe res- tant inachevé, soit par la faute de la frappe, soit parce que la place manquait pour y caser les deux dernières lettres, et la lettre initiale étant gravée d'une manière incorrecte, ou peut- être même ne paraïssant qu’en partie à eause d'une lésion. du flan. Quant au n° 431 : TI. CAESAR... IMPE. ng. NTANI‘. C’est encore la légende RoM. ET AVG., mais rétrograde, et dont les deux dernières lettres manquent ainsi que dans la pré- cédente, mais non par la faute de la frappe. Je repousse donc complétement la leçon de M. Duchalais, et je lis cette légende barbare AT4Moñ, soit RoM ET A. _ Après ce que je viens d’exposer, on conviendra avec moi que toute question d'interprétation, autre que celle des médailles si connues de l’autel de Lyon, dot être repoussée. Je n’aï jamais vu dans cette légende le nom d’une ville, d’un chef ou d’un peuple, mais seulement la légende RoM. ET AVG., que personne ne peut lui refuser maintenant. La médaille de M. de Pina avait été trouvée dans le Vivarais ; c’est en Bretagne que, m’a-t-on assuré, le second exemplaire aurait été découvert. J'ignore la provenance des pièces publiées par MM. Duchalais et de Longpérier. - Gustave VALLIER. 3h0 CHRONIQUE, 246. Septime-Sévére. x. VIRTVS AVGVSTORVM. L’em- pereur et son fils à cheval. Or. . ....... .. 271 » 258. Caracalla, Septime-Sévére ct Julia Domna. Or. . . . 281 » 283. Gordien d'Afrique père. Arg. .....,.......... 146 » 287. Gordien d'Afrique fils. 4rg. . . . . .. oe eee ee 148 » 298. Tranguilline Avg... ..... ...... + 500 » 362. Nigrinien. Petit br. 2... 2 we ewe, oe. ee 59 60 362 bis. Julien, tyran. Or. ............... SO om 376. Domitius-Domitianus. Moyen br. . . . . . . . .. - 62 » 393. Martinien. Petit br. ................. 17,6 » 403. Constantin le Grand, Crispus et Constantin jeune. Médaillon d'arg.. . .... .... ss... 4 r 423. Constance-Galle. #édaillon d'arg. Revue numism., 1857, p. 407...................... 200 » (Ce beau médaillon, qui ne porte pas de marque d’a- telier par suite d'une fracture, a été acquis par le Cabinet des médailes de la Bibliothèque impériale.} 439. Procope. A7Tg. . 2... eee we te ee ee ees 151 453. Eugène. Quinaire d'or... ….... ew ee eee) ID, 464. Eudocie. Or... .................. 137 » 466. Jean. Or. ..............,.. + + 80 » 518. Léon Chazare et son fils Constantin. Or. ....... 83 » 554. Michel IV le Paphlagonien. Or............ 201 or (Cette rare pièce a été achetée par le Cabinet des mé- dailles de la Bibliothèque impériale. ) M. de Salis nous prie de signaler une erreur ccmmise dans le Catalogue. L'attribution du n° 554 ne lui appartient pas , cette pièce ayant été publiée et attribuée à Michel IV le Paphiagonier par le prince Théophile Gagarine (Mém. de la Société de numis- matique de Saint- Pétersbourg, vol.{, p. 150, pl. IX, n° 3, 1847). 558. Michel Ducas et Marie. Or. saucy Monn. byzant., pl. XXVI, 3. . Lene ee ee eee 22. 99 » 582. Julius Nepos. Quinaire d'or. mr cs. 25 »” CHRONIQUE. 3A1 MEDAILLES ROMAINES D’OR TROUVEES A PARIS. Une découverte fort importante, sous le rapport du nombre des pièces et de leur valeur intrinsèque, qui ne s’éléve pas à moins de 30,000 fr., vient d’étre faite 4 Paris. Dans le courant du mois d’août de cette année, en enlevant les déblais du ter- rain aux alentours de la place Saint-Michel ou en creusant les fondements d’une maison, les ouvriers ont trouvé réunies, sans doute dans un vase, plus de seize cents médailles ro- maines en or du Haut-Empire. Disséminées aussitôt et vendues aux bijoutiers, j'ai pu les voir presque toutes successivement ; si quelques-unes ont échappé à mes recherches, le nombre doit en être très-restreint. Examiné au point de vue scientifique, ce magnifique dépôt n’est pas moins digne d'intérêt ; on en jugera par la nomencla- ture suivante, comprenant la liste de tous les empereurs ou im- pératrices qui y étaient représentés. J’indique seulement le nombre des têtes rares et les revers qui offrent quelque chose de particulier. 4 Hirtia (famille). 1 Jules-César restitué par Trajan. Auguste. Tibère. | 4 Drusus senior. #. DE GERMANIS. Bouclier. Caligula. x). Auguste. Claude. Camp des prétoriens. Antonia. #. Claude. Néron. Les huit dixièmes de la trouvaille se composent de pièces à l'effigie de Néron, frustes ou usées par la circulation. 3 Galba. x. PAX AVG. La Paix debout. 342 CHRONIQUE. 4 Galba restitué par Trajan. 9 Othon. Une pièce offre le buste avec le paludamentum. Cette variété est inédite. 9 Vitellius. Le prince assis (3 exemplaires). Vitellius au revers de Vitellius père. Cette médaille est excessivement rare. Vespasien. Titus. 2 Titus restitué par Trajan. Nerva. Trajan. 2 exemplaires au revers d’Hadrien. — PROFECTIO AV- GVSTI. L'empereur à cheval et deux soldats.—REGNA ADSIGNATA. L'empereur sur une estrade et cinq figures.— Nerva ct Trajan père (3 exempl.).— FORVM TRAIANI. 4 Marciane. CONSi:CRATIO. Aigle. 4 Plotine. CAES AVG. Femme assise tenant une Victoire. — Au revers de Trajan (2 exempl.). Hadrien. AFRICA — HISPANIA — DISCIPLINA AVG. L'empereur et trois soldats. — ANN DCCCLXXIIII NAT VRB P CIR CON. Seul revers donnant la date de la fondation de Rome (Cohen, t. U, p. 441 . n° 92). — Tête du Soleil; au dessous, ORIENS. 4 Sabine. 3 Ælius. Antonin. TRIB POT COS IT. Mars debout et Rhéa en- dormie (2 exempl.). — Tête à gauche. VICTORIA AVG. Victoire conduisant un quadrige (2 exempl.).— TEMPL DIVI AVG REST. Temple. A l’exergue, COS III. — LIBERALITAS AVG IT. L'empereur assis sur une estrade et accompagné de la Libéralité. 3 Antonin et Marc-Aurèle. 2 Faustine mère. Un exemplaire à lête voilée. CHRONIQUE. 343 Marc-Aurèle. TRP XXXI, etc. Monceau d'armes. — TRE XXX IMP VIII COS II Captif assis au pied d’un trophée.— TRP XXX IMP VIII COS I PP. Trophée d’armes. Ces deux revers sont inédits; on ne les connaissait qu’en argent. — CONSECRATIO. Bacher. Faustine jeune. Verus. REX ARMEN DAT. Trois personnages sur une estrade; un en bas. 3 Lucille. PIETAS. La Piété debont ou assise. — VOTA PVBLICA en trois lignes dans une couronne de lau- rier. 46 Commode. TRP III COS II PP. L’empereur à cheval.— TRP VII [MP VI COS Il PP. L’empereur assis te- nant la Victoire. — PRINC IVVENT. L’empereur de- bout; à ses côtés, un trophée.—TRP [II IMP II COS PP. Castor debout prés de son cheval. 2 Crispine. VENVS FELIX. Vénus assise. Comme on le voit, ce dépôt est d’une haute importance. L'état matériel des pièces qui le composent laisse malheureu- sement quelque chose à désirer. Les plus anciennes en date, sauf quelques exceptions, sont de mauvaise conservation et accusent une longue circulation , tandis que les dernières sont à fleur de coin. L’époque de l’enfouissement est facile à déterminer; il a di être fait dans les premières années du règne de Commode, qui, comme on le sait, fut associé à l'empire avec le titre d’impe- rator et revêtu de la puissance tribunitienne en 176, devint Auguste en 177, et succéda à son père en 180; il avait épousé Crispine en 177. Le denier le plus récent de cet empereur fai- sant partie de la déconverte et portant la mention de la neuvième puissance tribunitienne, correspond à l’an 184 de notre ère. C’est à peu près à cette date que l’enfouissement a di avoir lieu. Quant aux causes qui ont pu l’amener, il est difficile de 3h4 CHRONIQUE. les établir d’une manière certaine. Peut-être , ainsi que nous en avons de nomureux exemples , était-ce la caisse militaire d’une légion. J'avais d’abord été tenté de rattacher ce dépôt au voisinage des therines de Julien. Dans ce cas, cette découverte viendrait à l’appui de l’opinion de ceux qui prétendent que cet édifice était bâti antérieurement au règne de cet empereur, qui l’au- rait seulement restauré. L'opinion générale est qu’il ne remonte pas au delà du règne de Constance-Chlore. La date du dépôt serait antérieure de près de deux siècles. Dans tous les cas, il est certain que le Paris romain était placé de ce côté. F. Pogy pv’ Avant. Au moment où venaient d'être tirées les premières feuilles du n° IV de la Revue, nous avons reçu de M. Fénélon Farez une lettre relative à la question que soulève la inédaille de Pæstum, discutée par M. de Saulcy et M. le baron d’Ailly. Nous sommes heureux de pouvoir dire que l’opinion de M. Fénélon Farez, appuyée par de bonnes empreintes et ex- posée avec beaucoup d’érudition , est en tout conforme à celle de nos savants collaborateurs. MEMOIRES ET DISSERTATIONS. LETTRES A M. DE LONGPERIER sur LA NUMISMATIQUE GAULOISE. Sixième articlo. — Voir le n° 6 de 1858, p. 437; le n° 5 de 1859, p. 313; « le n°6 de la même année, p. 401; le n° 3 de 1860, p. 164, et le n° 4 de la même année, p. 249, en) X. Monnaies des Meldes. Mon cher Adrien, Au risque de te fatiguer de mes recherches numisma- tiques, je reviens obstinément à la charge, chaque fois que ma bonne étoile me fait découvrir quelque fait nouveau & ajouter à la masse de ceux qui sont déjà du domaine de la science. . Il s'agit aujourd’hui d’une charmante nouveauté que je viens d’acquérir et qui complète une série à laquelle tu as plus que tout autre le droit de t'intéresser, d'abord parce que tu t'en es sérieusement occupé, ensuite parce qu'elle 1860. — 5. 24 346 MÉMOIRES concerne incontestablement le pays des Meldes. Tu devines sans doute que je veux parler des monnaies gauloises à la légende ROVECA. Dans la Revue numismatique (année 1859, numéros de mars et juin, pages 400 et suivantes), tu as rappelé une note publiée par toi, il y a quinze ans, dans la Revue ar- chéologique (numéro du 15 août 1845, p. 315), et relative à la curieuse trouvaille de Vendrest (canton de Lizy, Seine- et-Marne ). Sur les quinze monnaies qui composaient ce tré- sor, il y en avait : 1° sept d'argent avec la légende ROVECA; 2° une de cuivre avec la même légende accompagnant une tête de Gaulois, décorée du torques national; #. un cheval ; 3° deux exemplaires en cuivre de la pièce portant une tête casquée, devant laquelle on lit POOVIKA, transcription grecque du mot ROVECA, qui au revers accompagne un lion ; 4° enfin cinq pièces de cuivre présentant également une tête casquée , et au revers un Pégase, avec la légende CRICIRV. Tu rappelles, en même temps, que Duchalais a décrit ces monnaies, acquises par tes soins pour le compte du Cabinet des médailles, sous les n* 473, Æ. (2 exem- plaires), 474, ÆR. (2 exemplaires), 479, Æ. (4 exemplaire), k83, Æ. (2 exemplaires), au total sept pièces à la légende Roveca provenant de la trouvaille de Vendrest. Notre ami L. de La Saussaye avait acquis immédiatement les doubles. J'iguore combien le Cabinet a conservé de pièces à la lé- gende CRICIRV. | Quant à la collection de La Saussaye , elle contient seu- lement deux exemplaires de la pièce d'argent. J’ai tout lieu de supposer que le surplus de cette intéressante trouvaille était resté entre les mains de M. Lefebvre, de Meaux, de chez qui elles sont venues se caser dans mes tiroirs. J'ai acquis en effet, comme provenant de cette collection. ET DISSERTATIONS. 3h} un Roveca d'argent ayant exactement l'aspect des pièces = de Vendrest. J'ai de plus obtenu par échange un des doubles d'argent du Cabinet; voilà donc la répartition actuelle du petit trésor de Vendrest bien fixée. Des sept ROVECA d’ar- gent, les seuls connus jusqu'ici, trois sont au Cabinet des médailles, deux chez La Saussaye et deux chez moi: les deux Roveca bilingues de cuivre et la pièce de cuivre avec tête décorée du torques sont toujours dans les cartons du Cabinet impérial. Quant aux CRICIRV, peu importe ce qu'ils sont devenus, cette médaille étant assez vulgaire pour qu'il n'y ait aucun intérêt à le savoir. De la composition du trésor de Vendrest, il résulte pleinement que les monnaies à la légende ROVECA et les monnaies à la légende CRICIRV avaient cours simultané- ment et dans la même contrée, si bien que l’une des deux espèces étant attribuée à une peuplade de la Gaule, l’autre devra, suivant toute probabilité, être attribuée à la même peuplade. Ce qui me paraît encore très-probable, à en juger par la composition du trésor en question, c'est que les pièces à la légende ROVECA ont été émises pendant un temps plus long que les autres, et à une époque immédia- tement antérieure. Le trésor de Vendrest ne contenait aucun exemplaire de la jolie monnaie de cuivre bilingue à la légende EPENOS, et comme cette monnaie se retrouve en grand nombre à Meaux même ou dans les environs, et plus fréquemment que partout ailleurs, il faut bien encore attribuer, je crois, cette monnaie aux Meldes. Est-elle postérieure aux ROVECA et par suite aux CRICIRV? Je le pense, mais je n’oserais pas l'affirmer. Quoi qu'il en soit, tu as émis , sous forme de pure hypo- thèse, une opinion qui me paraît trés-plausible sur le 348 _ MÉMOIRES compte de la légende ROVECA , dans laquelle tu fais remar- quer qu'on pourrait retrouver le nom de Crouy sur Ourcq. J'adopte pleinement cette attribution, qui me paraît d’au- tant plus raisonnable qu'il est facile de se convaincre que le mot de ROVECA représente un nom de lieu, ainsi que je vais te le rappeler tout à l'heure, J'arrive à la pièce qui m’a décidé à parler de nouveau de ces trois intéressantes séries. Il y a quelques mois (vers le 45 février 1860), des ouvriers occupés à planter des arbres à deux lieues de Crouy ont exhumé une très-belle pièce d’or de la série à la légende ROVECA ; cette trouvaille me fut signalée dès le 16 février par M. Lefebvre, à l'obli- geance duquel je suis heureux de rendre publiquement témoignage , et dès le lendemain M. Charvet avait réussi à me procurer la pièce en question. Comme elle présente des types fort remarquables, j'ai cru ne pouvoir mieux faire que de la décrire, en rédigeant un petit catalogue de tout ce que je connais jusqu’à ce jour de monnaies épigra- phiques appartenant aux Meldes, c’est-à-dire de toutes les variétés que présentent les monnaies portant les légendes ROVECA, CRICIRV et EPENOS. Voici donc ce catalogue. PIÈCES A LA LÉGENDE ROVECA. Or. 4. Cheval galopant à droite ; au-dessus une croix pom- mettée, dont la crosse est formée d’un annelet centré. Sous le cheval un annelet centré et les lettres ROV.... nr. Plusieurs emblémes fort difficiles à décrire, et parmi lesquels on reconnaît l'espèce de grand filet triangulaire des belles pièces d’or des Parisiens, et le rameau des Senons. — Or rouge. Poids, 56,77. ET DISSERTATIONS. 349 Argent. 2. Buste de divinité féminine tourné à droite (on a sup- posé fort gratuitement, je crois, que c était Vénus). y. Cheval galopant 4 droite et placé devant un cep de vigne qui porte deux pampres et deux grappes de raisin ; devant la poitrine du cheval, dans le champ, une feuille à trois lobes, avec sa tige et entourée d'un grénetis. Cabinet des médailles; collection de La Saussaye, et deux exemplaires variés de la mienne. — Duchalais, n° 473. 3. Mèmes types, sauf que le cep du revers ne présente pas de traces de grappe. Cabinet des médailles en double exemplaire et collection: de La Saussaye. — Duchalais, n° 474. Cuivre. h. Buste tourné 4 droite de Ja divinité féminine des monnaies d'argent. Un petit génie ailé placé derrière elle pose une couronne contre la nuque. Devant le visage la légende ROVECA, dont le V et l'E sont liés. y. Un cheval au repos tourné à droite et levant la jambe de devant hors montoir. Au-dessus de la croupe une roue à plusieurs raies. Au-dessous du ventre un annelet centré: Un autre annelet centré devant les naseaux, et enfin ua triple annelet centré sous le pred en l'air. Le terrain est formé d’un grènetis rectiligne , au-dessous duquel on aper= çoit les traces d’un rameau. Cabinet des médailles ( 2 exemplaires). Collection de La Saussaye et ma collection en quintuple exemplaire, dont trois au moins proviennent de Meaux.— Duchalais, n°477 et 478. 350 MEMOIRES 5. Pièce tout à fait analogue, sauf que le petit génie ailé du droit tient un torques au lieu d’une couronne, et que l’R du mot ROVEGA a la boucle supérieure arrondie au lieu de l’avoir triangulaire. Ma collection. Tirée par la drague du fond de la Seine, près le pont au Change. 6. Mémes types, sauf que devant le cheval on voit deux annelets centrés réunis par une ligne ondulée. Cabinet des médailles. — Duchalais, n° 476. 7. Tête de chef gaulois, portant des moustaches , et dé- corée du torques national. Devant, ROVECA, avec I’R à boucle triangulaire. Cette tête est identique avec celle des pièces de Divitiac, roi des Suessions. 9. Cheval au repos et tourné à gauche, et levant la jambe hors montoir. Au-dessus un triple annelet centré. Sous le ventre un annelet centré. Ma collection. Provenant de Meaux. — Est-ce le n° 479 de Duchalais ? 8. Tête casquée à gauche (cette tête est identique avec celle des pièces de cuivre à la légende CRICIRV); devant, la légende POOYIKA. L’upsilon de cette légende est ainsi formé Y, y. Lion bondissant à droite, la queue en lair et la langue pendante. Sous le ventre, une croix formée d’un annelet central et de quatre globules. Au-dessous, la légende ROVECA dont le V et l'E sont liés, et dont I'R a la boucle arrondie. Cabinet des médailles ( 4 exemplaires) ; collection de La Saussaye ; ma collection (3 exemplaires, dont 2 provien- nent de Meaux). —Duchalais, n° 483. 9. Mémes types, avec la légende grecque régulièrement écrite POOYIKA. ET DISSERTATIONS. 354 N. Méme type du lion, mais sans croix au-dessous du ventre ; au bas du champ de la pièce la légende ROVECA, dont Y’R a la boucle supérieure triangulaire, le V et l'E liés, ainsi que le C et l'A. Ma collection ; provenant de Meaux. 40. Même tête casquée. Devant, la légende grecque est: rétrograde. #. Lion bondissant à droite, et d’un style beaucoup plus pur. Au-dessus de la croupe , un annelet centré, une barre- verticale et un rameau. Au-dessous du ventre, la légende: ROVECA, sans ligatures , !’R à boucle triangulaire. Ma collection (2 exemplaires); provenant de Meaox. 41. Tête jeune et nue tournée à gauehe, ornée d’un. collier en forme de barre qui termine le cou; au-dessous, diota, l'ouverture tournée à gauclie : deux annelets centrés: sont placés devant les extrémités renflées du collier. Devant. la figure, ROVECA. | #, Cheval galopant à gauche; au-dessus, trois annelets- centrés, placés 2 et 4; au-dessous, un annelet centré et la légende POOVIKA. Cabinet des médailles ;ma collection (5 exemplaires, de provenance incertaine ; deux d'entre eux faisant partie de la: collection Tochon d'Annecy). — Duchalais, n° 484. 42. Mémes types, d'un style beaucoup plus barbare. Ma collection; provenant du cabinet Tochon d'Annecy. 43. Mémes types, mais sans diota sous la tête du droit; qui a un collier perlé; au revers, le cheval est entier; au- dessus et au-dessous, un annelet centré. Il n’y a certaine- ment pas eu de légende au revers; mais pour le droit, le- fait est douteux. Ma collection. Provenance inconnue. 4h. Tête barbare, tournée à gauche; vis-à-vis, trois glo- 352 * MÉMOIRES bules assez gros. Cette tête est peut-être celle d'une femme; elle est nue, et une mèche de cheveux retombe sur le cou. 5. ROVEGA. Cavalier galopant à droite, ayant une de ses mains élevée; sous le cheval, un globule dans un cercle. Cabinet des médailles. — Duchalais, n° 475. 45. ARCANTODAN devant une téte casquée tournée & gauche ; derrière, ROVECA et un rinceau. y. Griffon femelle bondissant à droite ; une ligne perlée sépare l’exergue qui contient un rinceau semblable a celui du droit. Au-dessus du griffon des ~ couchés dont les deux ' boucles forment des annelets centrés. Collection de La Saussaye; ma collection (2 exemplaires provenant tous les deux de Meaux). Nul doute sur celle des deux légendes qui représente un nom d'homme; c’est Arcantodan. (Peut-être ce nom n'est-il que celui du Conetodunus de César.) Au contraire , le mot ROVECA représente certainement un nom de lieu , et dès lors l'hypothèse qui place le lieu à Crouy-sur-Ourcq devient extrêmement probable. Hatons- nous toutefois de constater que la présence des noms de ville sur les monnaies purement gauloises est un fait d’une rareté pour ainsi dire exceptionnelle. J'ai acquis, il y a très-peu de temps, une curieuse pièce d'argent fortement noircie par la sulfuration, et qui se rattache étroitement aux pièces précédentes. En voici la description : 16. Tête nue tournée à droite ; devant le visage, la lé- gende ARKAN. #. Griffon courant à droite; il semble n'être pas ailé. Au- tour, trace d’une légende dont on ne déméle que les lettres RI. O. 0..... (AVLERICO ?? ?) Ma collection. Trouvée au vieil Evreux. ET DISSERTATIONS. 353 ll me semble que l'existence de cette pièce offre une - présomption de plus en faveur de l'identification d’ Arcan- todan avec Conetodun. 47. Mémes types que sur la pièce 45, sauf que la légende du droit est remplacée par un rinceau, et qu'au revers le rinceau de l’exergue est remplacé par la légende ROVECA. Ma collection. Deux exemplaires, dont l’un provient de Meaux et l’autre de Chalons-sur-Marne. Tu vois, mon cher Adrien, que la suite des monnaies à la légende ROVECA présente un groupe déjà bien nombreux. Probablement, cependant, nous ne connaissons pas encore toutes les variétés qui ont été frappées. MÉDAILLES A LA LEGENDE CRICIRV. Or. 4. Tête de face? surmontée d’un cercle centré sur lequel s'appliquent à gauche l'œil des pièces aux légendes LVCO- TIOS , VOCARAN et OTTINA. Au sommet, une croix formée d'un annelet centré sur lequel sont diamétralement opposés deux à deux, quatre angles ouverts à l'extérieur. A droite enfin, le filet des monnaies d’or des Parisiens. x). Cheval galopant à gauche; au-dessous un annelet centré et la légende CRICR ; derrière les pieds du cheval, un annelet centré plus petit que l’autre; au-dessus, une figure méconnaissable. Or fin. Poids, 55,88. Collection de La Saussaye ; provenance inconnue. 2. Mème type avec variantes, mais fort effacé , non pas par mauvais état de la pièce, car le revers est à fleur de coin. R. Méme type, sauf que l'annelet centré placé sous le 354 MÉMOIRES ventre du cheval a la mème dimension que celui qui se voit derrière la queue de l'animal, et que la légende RICIRV a cette fois le sommet des lettres tourné vers le centre de la pièce. Or pur. Poids 65,97. Cette rare monnaie dont je dois la possession à l’amitié de M. le D* Voillemier, qui m'en a fait le sacrifice, a été trouvée près de Senlis. Sans contredit, si les monnaies d'or aux légendes ROVECA et CRICIRV étaient anépigraphes, il n’y aurait qu'une voix sur leur origine, et chacun s’empresserait de les classer à la Grande-Bretagne, et pourtant elles appar- tiennent indubitablement à la Gaule continentale et presque: aussi indubitablemant aux Meldes. Remarque en passant, mon cher ami, la présence, comme: types accessoires, des symboles propres aux peuplades. voisines. Il semble que ces pièces gauloises, pour avoir un cours moins restreint, étaient signées de symboles qui les rattachaient aux voisins de droite et de gauche. Il y a dans cette remarque la constatation d’un principe de clas- sification bien plus fécond que je n'aurais été tenté de le croire il y a un an. | Argent. 3. Buste de divinité féminine, tourné à gauche et dé-- coré du forques gaulois; devant la figure, un fleuron; derrière l'épaule gauche, un annelet centré. x. Cheval sanglé galopant à gauche; sur la croupe, un oiseau et deux annelets centrés. Sous le ventre du cheval, un annelet centré et la légende CRICRV. Collection de M. Hucher; trouvée à Reims en 1852. ET DISSERTATIONS. $55 Gette piéce a été publiée dans la Revue numismatique, (4853, pl. I, n° 3) par son heureux possesseur. h. Même buste ; devant la figure, une tige ondulée gar- nie de feuilles cordiformes. #. Cheval galopant à gauche. Au-dessus, la légende CRICIR ; au-dessous, un carnyx. Ma collection; provenant du cabinet Tochon d’ Annecy. L’aspect de cette pièce n’est pas satisfaisant ; elle est cer- tainement coulée ; mais est-elle antique ou coulée sur l’an- tique? c'est ce que je ne saurais décider, bien qu’à l'époque où vivait Tochon d'Annecy, personne certainement ne s’a- visât de contrefaire ni de copier des monnaies gauloises. Cuivre. 5. Tête casquée à gauche. y. Cheval ailé galopant-à gauche ; devant le poitrail, un annelet; au-dessous la légende CRICR. Derriére la queue du cheval, NI; et au-dessus de l’aile qui est courbe, S. Collection de La Saussaye; provient des environs d'Orléans et a été décrite dès la première année de la Revue numismatique (1836, p. 387), par M. Vergnaud-Roma- gnesi, qui l’a cédée à son possesseur actuel. 6. Téte casquée à gauche. WN. Cheval ailé galopant à gauche. Dessous CRICIRV. L’aile du cheval est courbe. Cabinet des médailles (5 exemplaires); collection de La Saussaye; ma collection (7 exemplaires), dont un trouvé à Meaux et un à Beaumont-sur-Oise; les autres de Vendeuil- Caply. J'en ai vu quatre exemplaires trouvés isolément dans les fouilles du théâtre de Champlieu (Oise).— Ducha- lais, n° 453. 356 MEMOIRES 7. Tête casquée à gauche, N, Même cheval avec aile courbe ; dessous, un annelet centré et la légende GAICIZ. Ma collection. Provenance inconnue ; faisait partie du cabinet Tochon d’ Annecy. 8. Tête casquée à gauche. , y. Cheval ailé galopant à gauche; l’aile est droite; au- dessous, un annelet et la légende CRICIRV, dont l’V final est rejeté entre la jambe de derrière et la queue du cheval. Collection de La Saussaye ; provenance inconnue. 9. Mêmes types. Au revers, la légende CRICIRV est écrite sans lettre séparée. Ma collection; provenance inconnue. 40. Mémes types. Deux wm couchés devant la tête cas- quée du droit. Ma collection; provenance inconnue. 44. Duchalais décrit sous le n° 452 une pièce du Cabi- net des médailles sur laquelle les mêmes types sont accom- pagnés de la légende CRICIRO N.D. C'était une pièce à étudier de près et que je soupçon- nais d’avoir été mal lue. Je l’ai examinée avec la plus scru- puleuse attention. Au-dessous du cheval il y a bien CRICIRo; mais l’O final est pour ainsi dire microscopique. Entre les pieds de derrière et la queue de l'animal il y a ND (sic) ; le point placé entre ces deux lettres par Ducha- lais n’a jamais existé. Peut-être bien ne faut-il voir dans ce nombre de lettres que la légende NIS ou SIN rétrograde, comme sur le n° 5 décrit ci-dessus et appartenant à La Saussaye. Je te laisse le soin de le décider. Duchalais et toi-même, mon cher Adrien, vous avez éta- bli de la manière la plus satisfaisante que cette légende ET DISSERTATIONS. 357 CRICIRV représentait un nom de chef’. Mais quel est ce chef? quel rôle a-t-il joué? C’est ce que nous ne saurons jamais. J'ai été bien tenté de croire dès l’abord que cette forme CRICIRV cachait le nom du chef bellovaque Correus, qui fut battu par César dans la forêt de Compiègne, et qui périt dans le combat. Mais j'avoue que cette hypothèse, admissible à la rigueur, n’a rien qui commande la con- viction. MÉDAILLES A LA LÉGENDE EPENOS. La série dont je vais maintenant te parler est bien peu nombreuse, et, sans aucun doute, tu connais toutes les va- riétés que je vais énumérer. 4. Tête tournée à gauche de chef gaulois (?), dont la physionomie est celle d’un homme âgé. Devant la figure la légende EZENVS. 3. Cheval bridé courant à droite; au-dessus un oiseau éployé. Le bas de la pièce est fruste. Æ. Ma collection ; provenance inconnue. Je possède quatre autres exemplaires provenant presque tous de Meaux, et sur lesquels la tête paraît âgée comme sur la précédente. Au revers, on voit sous le cheval un croissant renversé et la légende GJIHN, ou ETIHNO, ou enfin EITHNOC, légende qui constitue des variétés dis- tinctes. 2. Mêmes types, sauf que la tête du droit est très-jeune et que la légende latine se lit EAENOC. Æ. Ma collection; huit exemplaires, dont un provient de Vendeuil, un de Beaumont-sur-Oise, un de la Ferté sous- Jouarre, et la plupart des autres de Meaux. 1 Revue num., 1859, p. 103. 358 MEMOIRES M. Hucher: a le premier signalé la forme étrange de la seconde lettre de la légende latine. Son observation me paraît juste , et sur deux de mes exemplaires l'un porte & , et l'autre £. I] est trés-difficile de voir un simple apex dans la barre horizontale inférieure de ce caractère; il me pa- rait hors de doute qu'il y a là une ligature réelle, et ce- pendant comment accommoder cette légende EPÆENVS ou EPLENOS avec la légende grecque ETIHNOC, qui paraît bien en être la transcription? Je n'y comprends rien; mais je m incline devant un fait en admettant cette leçon pour la légende latine. Tu as, mais avec une entière réserve, émis le soupçon que cette légende pourrait bien cacher le nom IATINON que Ptolémée assigne à la métropole des Meldes*. On aurait pu penser aussi à Épernay, ville qui n’est pas éloignée de Meaux; mais le nom ancien de cette localité est Spar- nacum, comme celui d’Epernon est Sparno et celui d'Épone Spedona. L’S initial, ayant plus tard attiré un E prosthé- tique, a fini par disparaître, comme dans les mots épine et épée. Quittons donc bien vite ce terrain dangereux. Quoi qu'il en soit, aux Meldes appartiennent trés-vrai- semblablement les monnaies épigraphiques que je viens d’énumérer, et probablement tu connais aussi bien que moi les monnaies anépigraphes de cette peuplade. F. DE SAULCY. 1 Revue num., 1859, p. 87. 3 Ibid., p. 100. 360 MÉMOIRES Voici la première fois qu'il me soit donné d'observer une médaille indubitablement authentique de la première légion de Marc-Antoine. Beaucoup d'auteurs en ont décrit soit avec LEG.I, soit avec LEG.PMA., pour Legio prima. I] n'est que trop facile d’en faire avec celles de la seconde ou de la troisième légion , en enlevant adroitement un ou deux I à l’aide du burin. Quant à la légende PMA, j'ai déjà fait observer, dans ma Description des monnaies de la ré- publique romaine, qu'elle me paraissait une preuve évi- dente de la fausseté de la médaille, puisque ce n'est pas PMA, mais PMAE qu'il aurait fallu ; les légendes LEG.XII ANTIQUAE, LEG.XVII CLASSIGAE et LEG. XVIII LIBYGAE, prouvent suffisamment que le sens de ces mots est nummus legionis primz, secundz , etc.; que la légende est écrite au génitif et non au datif, ceci résulte des légendes CHORTIS SPECVLATORVM et CHORTIVM PRAETORIARVM qu'on lit sur d’autres pièces de Marc-Antoine. Goltzius est le seul auteur, et d’aprés lui Vaillant, qui ait donné la légende LEG. PRI. Ceci prouverait que Goltzius a réellement vu un exemplaire de ce denier, et qu'il n’a pas imaginé la des- cription qu'il fournit. La médaille de M. le duc de Blacas a fait autrefois partie de la collection Campana. Ill. IIT ou à rebours LII. Tête de la Piété à droite, cou- ronnée de chène. R, CAESAR. Trophée avec un bouclier ovale et une trompette gauloise (carnyx); à droite, une hache à tête de loup. — Or. Cette médaille, très-commune en argent, est de la plus extrême rareté en or. Je n'en connaissais de réputation ET DISSERTATIONS. 361 d’autre exemplaire que celui qui avait anciennement fait partie du Cabinet des médailles, d’aprés Je catalogue de 1685, et qui déjà, à l'époque où Caylus fit graver les mé- dailles du Cabinet du roi, semble en avoir disparu. L’exis- tence de cette pièce m’ayant paru en conséquence un peu difficile à contrôler, je m'étais contenté de la citer dans mon ouvrage sur les consulaires d’après le catalogue de 1685, sans en donner d'évaluation. Le prix de 200 fr. qui suit l'indication de cette médaille dans ma description des mon- naies de l'empire romain, tome I, p. 8, n° 41, doit donc être considéré comme une.erreur. Une telle pièce vaut au moins 4,000 fr. | L’exemplaire dont je donne le dessin, et qui a été frappé vers 706 (48 av. J. C.), a été trouvé dernièrement en même temps que d’autres médailles d'or de la plus grande rareté de Jules César, de Brutus, de Lépide, de Marc-Antoine, d’Octave et de quelques familles consulaires. Ce qui dis- tingue cette médaille à fleur de coin est son poids tout à fait exceptionnel de 8,40. Sauf les monnaies d’or de Sylla, dites du poids Lucullien, qui atteignent presque 11 grammes, le poids le plus-fort que j'aie jamais rencontré jusqu'ici parmi les médailles consulaires d'or est 85,16. Quant à l'interprétation des lettres IIT ou des chiffres LI, voyez ma description des monnaies de la république romaine, page 157. IV. ANTONIA AVGVSTA. Son buste à droite. 9. TI CLAV. CA. AVG. P. M. TR. P. S. C. Le tout dans une couronne de laurier. — Moyen bronze. (PI. XVI, n° 4.) Cette médaille est décrite dans le premier volume de mon ouvrage sur les monnaies de l'empire romain. page 136; 1860,— 5. - 25 362 MÉMOIRES mais ne l'ayant jamais vue, je ne l'avais pu citer que d'après Vaillant; et ce qui augmentait mon doute, c'est que la même médaille se trouve gravée dans un ouvrage italien du xviu* siècle comme étant d'argent. Une pièce du mo- dule du moyen bronze en argent devait être cunsidérée comme médaillon. Enfin deux exemplaires authentiques de cette pièce se sont vendus à Londres en 1859 à la verte de M. Hobler. M. Hoffmann en a acquis un dont je puis, grâce à cette circonstance, donner une représentation exacte. La fabrique et le style paraissent appartenir à un atelier de colonie. V. DIVVS VESPASIANVS. Tête laurée de Vespasien à droite. x. IMP. CAES. TRAIAN. AVG. GER. DAC. P. P. REST. Bustes en regard de Mercure avec le caducée et d’ Hercule? Dessous, une étoile. — Or. (PI. XVI, n°5.) Je connaissais cette médaille de Vespasien, restituée par Trajan par l'ouvrage de Khell. qui la cite comme ayant fait partie de la collection de J. Defrance; mais l'extrême bizar- rerie du revers, jointe au silence que Mionnet avait gardé à son égard. me fit juger plus prudent de n’en point faire mention. Depuis la publication de mon ouvrage sur les médailles impériales, j'ai vu l’exemplaire dont je donne ici le dessin dans un tiroir d'un des médailliers du Musée britannique qu'on avait oublié de me montrer précédem- ment; il est à fleur de coin et d’une authenticité incon- testable, VI. IMP. T. AEL. CAES. ANTONINVS AVG. PIVS. Tête nue d’Antonin à droite. 364 MEMOIRES LOUIS IT ET ANGILBERGE. ‘Ii suffit d'avoir parcouru les textes relatifs à l'histoire du rx° siècle pour se rappeler le rôle si considérable que jouèrent les femmes dans la politique des descendants de Charlemagne. Jusqu'à présent, toutefois, cette importance semblait n'avoir pas laissé de traces dans la numismatique, ce qui pourrait étonner à bon droit, car la numismatique est toujours le miroir fidèle de l’état des nations. Mais voici un denier dont notre collaborateur M. Feuardent a bien voulu me donner une empreinte, et sur lequel je trouve le nom d'une princesse célèbre; denier frappé de façon qu'on ne saurait dire quel en est le droit et le revers, de sorte que la plus complète égalité règne entre les deux personnages pour lesquels il a été gravé. Cependant cette égalité, vraisemblablement calculée, ne nous conduira pas jusqu'à croire que Louis II, blâmé par l'histoire d’avoir laissé sa femme prendre trop d’empire sur son esprit, ait été assez faible pour lui donner la place prépondérante sur la monnaie, ou que l'impératrice ait osé s’attribuer cet honneur. Je décrirai donc ainsi ce denier : ET DISSERTATIONS. 365 + DM-LYDUWICVS; dans le champ, IMP, entre quatre points (Nomnus Luduwicus imperator). Revers. D-M-A: ANGILBERCA; dans le champ, IMP, entre quatre points ( Domna Angilberga imperatrix). — Argent. Louis IT, fils aîné de l'empereur Lothaire, né vers 822, associé à l'empire et au royaume d'Italie en 849, et sacré le 2 décembre 850, à Rome, par le pape Léon IV, succéda, en 855, à son père; il établit sa cour à Pavie. Les Sarrazins ayant, en 866, fait invasion dans la Calabre et les terres voisines, Louis, à la prière de Landolf, évêque de Capoue, marcha contre eux. En 868 il les assiége dans Bari, qui résiste pendant quatre ans, et qui ne fut emporté qu’en 871 '. Le 28 août de la même année, Louis fut fait pri- sonnier par Adalgise, due de Bénévent, qui l'avait attiré chez lui avec des intentions perfides, et le dépouilla de tout le butin qu'il avait fait sur les musulmans vaincus. La captivité de l'empereur dura jusqu'au 17 septembre. Cependant, malgré le conseil d’'Angilberge, l'empereur ne ‘tarda pas à reprendre les armes pour protéger tes Long- bards, dont les Arabes étaient venus de nouveau dévaster le territoire ; après avoir défait ces envahisseurs en diverses rencontres, il abandonna l'Italie méridionale et vint mourir près de Brescia, le 12 aout 875. Angilberge , fille de Louis le Germanique, qu'it avait épousée en 856, eut grande part aux affaires de son règne Tantôt elle intervient dans les démélés. de Lothaire II, se. rend avec lui au mont Cassin, et détermine le pape Adrien-Il. 4 Ann. met , anno 866. Hist. de Fr., t. VII, p. 404, Reliqui ( Saracenorum }' in castro quod dicitur Bari se fortiter munjerunt ubi Dominus Imperator per quinque annos terras cum Francis et Longobardis et ceteris nationibus suis fidelibus possedit, simul etiam cum sua conjuge Angelberga nomine et multis similter. 366 MEMOIRES à lui donner la communion (869); tantôt elle va trouver à Trente Louis le Germanique et parvient à lui faire céder sa portion du royaume de Lorraine (872), ou bien elle essaye d'obtenir de son oncle, Charles le Chauve, une concession analogue. Il paraît certain qu’Angilberge était d'humeur altière. « En grant haine, dit la Chronique de Saint-Denis, avoient l'empereriz Engeberge li plus haut home d'Ithalie pour son orguel. » Ils voulurent, suivant la Chronique de Saint- Bertin, la renverser et mettre à sa place la fille de Winigise. « Et quia primores Italiæ Ingelbergam propter suam inso- « lentiam habentes exosam, in loco illius filiam Winigisi « substituentes, obtinuerunt apud eumdem Imperatorem «ut missum suum ad Ingelbergam mitteret. quatenus in « Italia degeret, et post illum non pergeret, sed eum in « Italia reversurum expectaret (anno 862) ‘.» « Mais ele ne tint gaires ce commandement; ainz s'en ala après lui assez tost après *. » Angilberge n'avait qu'un enfant, Ermengarde, qui épousa Boson; et ce fut, dit-on, par l'influence de la veuve de Louis II que ce seigneur réussit à s'emparer du royaume de Provence, en 879. Au reste Érmengarde, petite-fille de Charlemagne par son père et par sa mère, se montra digne d’une pareille origine. Enfermée dans Vienne, sa capitale, elle défendit pendant deux années cette place assiégée par les rois Louis et Carloman (880-882). Quant à Angilberge , retirée dans le monastère de Sainte- Julie à Brescia, puis dans celui de Saint-Sixte qu’elle avait fondé à Plaisance, elle paraissait encore redoutable aux ennemis de sa fille. Charles le Gros l’arracha à son cloître, 1 Annal. Bertin., ann, 869 ot 872; Hist. de Fr.,t. VII, p. 103 et 115, 2 Chron, de Saint-Denis ; Hist. de Fr., t. VII, p. 137. 368 MEMOIRES NOUVEAUX ECLAIRCISSEMENTS SUR LA MONNAIE D'AUXERRE. qn, Les Eclaircissemen(s sur la monnaie féodale d'Auxerre, pu- bliés dans ce recueil‘, par M. Bretagne, et réimprimés peu après à Nancy, m'ont décidé à mettre en ordre les notes recueillies par moi depuis la rédaction d'un mémoire sur le même sujet, édité dans les Mémoires de la commission d'archéologie de la Céte-d Or *. De cet examen, j'ai acquis la conviction que je m'étais singulièrement trompé il y a dix-huit ans : je crois pouvoir présenter aujourd'hui la question sous son véritable aspect. M. Bretagne a cherché à distinguer les monnaies des évêques et les monnaies des comtes d'Auxerre parmi ces pièces bien connues, portant deux croix, et dont l’un des côtés seul présente un nom qui est celui de la ville. Il donne aux comtes les pièces à la légende ALTISIODOR, et aux prélats celles sur lesquelles on lit AVTISIODERO. CI ; il ajoute que ces monnaies continuèrent à être frappées jusqu'en 1262, époque à laquelle « Eudes de Bourgogne, « époux de Mahaut Il, qui eut la tutelle de ses enfants « après la mort de sa femme, changea la légende de ses « monnaies » à Nevers, et fit courir les deniers nivernois dans cette ville comme à Auxerre. 1 Revue num., 1859, p. 245 et suiv. , 2 Mém. de la Comm. darcheol, de la Côte-d'Or, t. IT. ET DISSERTATIONS. 369 Dans mon mémoire précité, je cherchais a établir que la monnaie du comte d'Auxerre n’était autre que celle de Nevers, parce que, depuis le commencement du x1° siècle, les deux provinces étaient réunies sous le même seigneur féodal. J'en tirais cette conséquence que les deniers por- tant le nom de la ville d'Auxerre étaient purement épisco- paux. M. Bretagne et moi nous sommes tombés, je crois, dans la même erreur, et M. Cartier, du reste, l'avait signalée en partie en 4843 : tout en reconnaissant implicitement l'existence de la monnaie épiscopale à Auxerre, le savant directeur de la Revue numismatique faisait observer que, par suite d’une assertion fausse de Duby, j'avais mentionné l'évêque d'Auxerre dans la liste de l'ordonnance de 1345. J'avais eu le tort d'adopter sans vérification un rensei- gnement que donnaient Duby et l'abbé Lebœuf, à savoir que l'évèque d'Auxerre avait eu le droit de frapper monnaie : o1 le renseignement était erroné ; rien ne prouve le fait allégué par l’archéologue et par l'historien : tous les docu- ments, au contraire, donnent le droit de le nier catégori- quement. | La charte de Philippe-Auguste de 1188 ne constate qu’une seule chose : c’est que le comte de Nevers s'engage à fabriquer une nouvelle monnaie, et que, si elle vient à être altérée par lui-même ou par ses successeurs, les évêques de Nevers et d'Auxerre devront faire justice du comte et de sa terre: or sa terre comprenait alors le Nivernois, l’Auxerrois et le Tonnerrois. L’évéque d'Auxerre n'a pas ici plus de droit reconnu que n'en a l'évêque de Nevers, au- quel on n’a jamais songé à attribuer le privilége de battre monnaie au x11° siècle. Le préambule de la charte de 1188 établit, d'ailleurs, que ces prélats, ainsi que les abbés et 370 MEMOIRES les barons de la terre du comte de Nevers, avaient été ap- pelés à donner leurs avis sur la mesure à prendre, et à surveiller ensuite l'exécution de l'engagement souscrit par le seigneur. | Les actes postérieurs, cités par M. Bretagne, ne sont que la conséquence de la charte de 1188 : à différentes épaques on met les comtes de Nevers en demeure d'accomplir les promesses solennelles de Pierre de Courtenay. — Donc, à da- ter de 1488, tout concorde à établir que les éréques d Auxerre ne frappérent pas monnate. Examinons maintenant les temps antérieurs à cette date. Nous voyons des actes importants intervenus entre les comtes de Nevers et les évéques d'Auxerre, relativement à leurs droits respectifs dans cette dernière ville : c'est par exemple l'accord conciu en 1145, à l'instigation de saint Bernard, entre l'évêque Hugues et le comte Guillaume II ; celui de 1157 entre l'évêque Alain et Guillaume HI; celui de 1164 entre le même prélat et Guillaume IV ‘. Nalle part, dans ces chartes, les évèques ne font de réserves au sujet de la monnaie qu'ils auraient pu faire forger. Il semble ce- pendant qu'ils n'y auraient pas manqué s'ils eussent cru en avoir le droit, puisque, dans la ville même d'Auxerre, le comte était leur vassal, leur premier baron, et qu'il n'y pouvait presque rien entreprendre sans leur permission. N'oublions pas, en effet, qu’à Auxerre, dans l'enceinte de la ville, le comte était vassal du prélat : hors de l’enceinte c'était le roi de France, et au delà du pont c était le duc de Bourgogne qui se trouvaient seigneurs supérieurs. Remarquons encore que la monnaie d’Auxerre est men- tionnée dans des actes contemporains de ces accords, et ! Gall, Chr., t. XII, pr., col. 115, 124, 137. ET DISSERTATIONS. 372 _ MÉMOIRES l'atelier monétaire de Sens: c'est en effet l'un des hôtels des monnaies mentionnés par l'édit de Pistes, c'est à-dire un véritable atelier royal. Comme il se trouvait dans une cité archiépiscopale, il ne pouvait pas manquer d'exercer une grande influence sur les types des monnaies fabriquées ultérieurement dans la circonscription de la province ec- clésiastique de Sens, et surtout aux environs de cette ville. On connaît de Sens, des pièces de Louis le Débonnaire, de Charles le Chauve ‘ ; — des deniers et des oboles forgés au nom de ce dernier, au type de l’édit de Pistes, ont été d'après le style de quelques exemplaires, émis après son règne. — Puis viennent les monnaies de Charles le Gros, au temple, d'Eudes, au monogramme employé par ce prince à Chartres *. ' On a attribué à Sens un denier cassé de Pépin dont plusieurs dessins incxacts ont été publiés, L'étendue de la cassure n’a pas été bien exprimée. Ce denier complet s’est retrouvé dans le trésor d’Imphy; il appartient par sa fabrique aux environs du Rhin, et, en effet, il porte le nom de la ville de Neuss, Nuessto. Voy. Revue num., 1858, pl. XI, n° 6. 2 L'atelier de Sens exercait une telle influence dans cette partie de la Franoe, que le nom méme de cette ville est gravée sur des monnaies qui appartien- nent, suivant moi, à des seigneurs du voisinage, Ainsi les plus anciennes monnaies de Provins portent les légendes PRY VIYNS CATO-SENOINS CIVI, avec un type qui n’est autre chose que le monogramme du roi Eudes, disposé de manière à devenir ensuite ce que l’on appela le psigne champenois ; le peigne paraît déjà sur des deniers qui, au lieu de Provins, portent les légendes GRACIADITI-SENONS CIVI, GRACIADITIS-SENONS CIV. Faut-il voir dans ces pièces du x1‘ siècle une innovation d’Endes I le Champenois, qui aurait choisi un monogramme rappelant son nom, monogramme qui aurait bientôt dégénére en peigne ? Est-ce une innovation d'Eudes II, qui, de 1048 à 1063, régna si modestement en Champagne, que, jusqu'à MM. d’Arbois de Jubainville et Ed. de Barthélemy, aucun généalogiste n’avait pensé à lui ? J'avoue que je le préférerais, parce qu’il est plus rapproché du comte Thibaut, son oncle et successeur, qui, à Troyes, glissait son nom dans la légende, comme les ducs de France à Orléans. Voici encore deux pièces que je ne crois pas non plus sénonaises, bien qu'elles ET DISSERTATIONS. 373 L'histoire vient expliquer cette monnaie d'Eudes : les comtes amovibles de Sens avaient embrassé le parti du roi Eudes contre Charles le Simple, et l'archevêque Gautier l'avait sacré. En 895 Richard le Justicier, duc de Bour- gogne, vengea Charles en chassant de Sens le comie et le prélat. Il n’y aurait rien d'étonnant qu'après cet événement, l'atelier de Sens eût émis quelques-unes de ces pièces au type de Charles le Chauve, qui sont postérieures à ce roi. En 931 le roi Raoul fit rentrer dans le devoir le comte de en aient toute l’apparence : l’une a été publiée par M. Ph. Salmon dans ce re- cueil (1854, pl. X, n° 5); c’est une obole du cabinet de M. de Vesvrote, portant entre deux grènetis une main ouverte, la légende est remplacée par quatre petites croix ; au revers, on lit SENONSE CVI. M. Salmon voit dans cette main le souvenir des reliques qui étaient particulièrement vénérées à Sens, les doigts de saint Ebbon ou le bras du pape saint Léon. Dans la Revue belge de 1855, ce numismatiste revient sur la même interprétation, et considère cette obole comme frappée par les archevéques Sewin ou Léotheric. Il le répète à propos d'une autre obole d’un travail semblable, sur laquelle, en lisant RVIN VRIOIIITS, il croit apercevoir les rudiments de Rainar comes. Leothéric, après avoir livré Sens au roi, aurait frappé monnaie au type de la main; Rai- nard II, chassé, aurait imité la monnaie archiépiscopale, en cherchant à rendre son nom méconnaissable, pendant qu'il était retiré à Montereau. J'avoue que je ne puis partager l'opinion de mon honorable coufrère. En principe, il me semble que les monnaies dont les.légendes ne sont pas cor- rectes sont des copies de prototypes dont on veut imiter autant que possible Paspect. L’obole à la main me semble être une pièce sur laquelle on a voulu contrefaire à Ia fois la monnaie de Sens et les estevenants de Besançon. Quant à l’obole attribué à Rainard II, on pourrait y lire aussi facilement des rudi- ments du nom de Provins. Remarquons qu’un moment le comte de Champagne frappa des deniers au type anonyme de Sens, avec la légende TRECSIA CIV]; c'est M. Salmon qui a encore fait connaître cette très-rare pièce , d’après un exemplaire de la collection de M. Quentin. Les comtes de Champagne se trouvent d'ailleurs mêlés à l’histoire de Sens, et cette participation ne pouvait que leur donner l’idée d’en imiter la mon- naie. En 1015, Rainard II avait cédé Montereau au comte Eudes pour s'en faire un allié De 1031 à 1034, à la mort du roi Robert, la reine Constance, voulant se servir des barons pour priver son fils Henri de la couronne, excita le comte de Champagne à s'emparer de Sens. 37h MEMOIRES Sens, qui s'était joint à Giselbert de Bourgogne pour le de- trôner : une obole au monogramme de Raoul est un témoi- gnage de la soumissicn de la cité de Sens à ce prince. Dix ans plus tard, le comté de Sens devenait un fief héréditaire : Hugues le Grand, duc de Bourgogne, qui en était seigneur supérieur, le donnait à Ffomont I* : Rai- nard II, petit-fils de ce dernier, battait monnaie à son nom, reprenant le type du temple de Charles le Gros : ces mon- naies, très-rares, me semblent dater de l’époque où, s'étant déclaré contre le roi Robert, à qui l'archevêque Léotheric avait donné Sens, il se considérait comme souverain, et pouvait alors s'approprier l'atelier des monnaies royales. Plus tard, Rainard II se réconcilia avec le roi, qui rendit au comte la moitié de la ville confisquée par lui : l’arche- vêque lui fit la remise de l’autre moitié, de sorte que le comte se trouva à peu près comme avant sa rébellion. C'est au temps qui s écoula entre cet accord et la mort de Re- nard II que j'attribue l'apparition des deniers anonymes de Sens : je ne vois que cette manière d'expliquer l’origine de ces pièces, sur lesquelles le nom du roi est absent, ainsi que celui du seigneur féodal. D’après mes conjec- tures, les deniers anonymes de Sens auraient donc été exclusivement frappés dans cette ville de 1046 environ à 4055, date de la mort de Rainard II‘. A cette dernière époque le roi Henri I°" réunissait la ville et le comté de Sens à la couronne, et y préposait un vicomte : 1 Il est évident que je ne puis admettre l'opinion de M. Poey d'Avant qui; à la page 317 de la Description des monnaies seigneuriales françaises de la collec- tion qu’il a possédée, semble indiquer que les monnaies de Sens étaient fabri- quées à Auxerre: j'avoue, du reste, qu'il ne m'est pas donné de pouvoir concilier tout ce que ce numismatiste dit sur les monnaies d'Auxerre et de Sens aux pages 317, 319 et 320 de l'ouvrage susmentiouné; il me paraît en guerre ouverte avec l'histoire. ET DISSERTATIONS. $75 la monnaie qu'il y fit fabriquer portait le mot Rex dans le champ ; ses successeurs, Philippe 1°", Louis VI et Louis VII reprirent le type du temple. A l’avénement de Philippe- Auguste, l'atelier monétaire de Sens était supprimé. Les chartes nous font connaître les noms des monétaires royaux sous Louis VI et Louis VII : c’est d’abord Gautier, en 1430, dont la signature figure à la suite de celle du vicomte Salon; c'est ensuite, entre 4149 et 1168, Thibaut, qui paraît tantôt après les principaux officiers royaux, — le vicomte, le prévôt royal et le prévôt vicomtal , — tantôt avec les dignitaires du chapitre et les officiers de |'évéque '. Une chose assez singulière, c’est que, malgré toutes mes, investigations et les recherches obligeantes de M. Quentin, il ne m'a pas été possible de trouver un seul texte qui men- tionnat l'usage de la monnaie de Sens : le savant archiviste de l'Yonne, qui a publié dans son Cartulaire tout ce qu'il a pu réunir des titres de l’abbaye des Escharlis, n’a pas retrouvé l'acte de 1446 , dans lequel l'abbé Leriche prétendait avoir vu une mention de monnaie de Sens. . Revenons maintenant aux monnaies d’ Auxerre. Si les textes sont silencieux en ce qui touche aux deniers sénonais , en revanche ils parlent, dans des actes que l'on peut placer entre 1120 et 1139, de la monnaie d'Auxerre”, et, en 4136, de celle de Tonnerre *. Dès 1136 il y avait douc des monnaies de Tonnerre , et nous savons que les monnaies ont toujours été frappées dans cette ville au type des anonymes de Sens : or comme Auxerre et Tonnerre furent réunis sous le même seigneur à dater du milieu du x1° siècle, il est permis de conclure 1 Cartulaire de l'Yonne, t. I, p. 274, 378, 389 et 517. 3 Id., p. 242 et 243. 3 Id,, p. 329; autre mention en 1147, p. 425, 376 MEMOTRES que lorsque le type sénonais était employé à Tonnerre , il était simultanément gravé à Auxerre : — donc les deniers auxerrois imités des anonymes de Sens ont commencé à être frappés antérieurement à 1136. Guillaume 1, comte de Nevers, recouvra, en 1040, sur le duc de Bourgogne, Robert, le comté d'Auxerre, dont celui-ci s était emparé, et qu’il avait occupé pendant dix- sept années : en 1072 il eut le comté de Tonnerre. — J'ai établi clairement, je crois, que les deniers anonymes de Sens avaient dû être frappés pendant les quarante ans qui s'écoulèrent de 1015 à 1055 : je suis convaincu, par le rapprochement de ces faits, que le monnayage anonyme d'Auxerre fut établi par le duc de Bourgogne pendant son occupation (1027, 1040); un fait qui semble en être une preuve assez sérieuse , c'est l'empressement que les ducs de Bourgogne Hugues I** (1075, 40°8) et Eudes I** (1078- 4102) montrèrent, ainsi que l'évêque de Langres Hugues (1032, 1049), a’graver sur leurs monnaies, à l’avers et au revers, des croix qui rappellent le type contemporain de Sens et d'Auxerre. Un texte du Cartulaire de l’Yonne semble indiquer qu'en 4456 il n'y avait qu'une monnaie pour Auxerre et Nevers : dans la donation de Reigny aux moines de Fontenay, nous lisons : « Et pro his omnibus videlicet terris , molendinis et « conventionibus habuit idem Jobertus LXX libras awissio- « dorensis et nivernensis monetz'.» Faut-il en induire que jusqu'à cette date les comtes de Nevers et d'Auxerre ne firent courir que des deniers au type nivernais de Louis IV d’Outremer, et qu’alors seulement ils rétablirent à Auxerre l’ancien type sénonais? Cette hypothèse est très-acceptable 1 Cartulaire de l'Yonne, p. 312. ET DISSERTATIONS. 377 en présence des variétés de style que l'on peut constater parmi les anonymes d'Auxerre. Dans les années postérieures, jusqu'en 1245 ', nous voyons la monnaie d'Auxerre proprement dite employée dans les actes, bien qu'à dater de 1240 elle semble avoir été remplacée de préférence par la monnaie de Nevers et la monnaie tournois. Je vais noter ici quelques renseignements qui viennent compléter les recherches intéressantes publiées par M. Bre- tagne. Dès 4165, la monnaie d'Auxerre était sujette à des varia- tions que l’on avait soin de prévoir dans les actes. Je lis dans une charte passée devant le comte de Nevers, par Jean, . vicomte de Lagny, lorsqu'il engageait à l'abbaye de Saint- Germain moyennant 30 livres, pendant cinq années, tout ce qu'il avait à Rouvray : « Si vero moneta autissiodorensis « tunc debilitata fuerit, in electione abbatis aut monacho- « rum erit aut accipere XXX libras, aut XIV marchas *. » Ce furent sans doute ccs variations qui motivérent la ré- forme de 1188 par Pierre de Courtenay. Il est à remarquer que dans cet acte il n'est pas fait mention des ateliers de Nevers et d'Auxerre, mais en termes généraux de la mon- naie fabriquée par le comte dans sa terre : il semble que les mots moneta nivernensis, employés en 1188, signifient 1 Voy., pour les années 1142, Lebœuf, dernière édition, t. IV, p. 86; pour 1172, 1174, 1176, id., p. 52 et 53; pour 1190, id,, p. 59, et Gallia Christ. t. XII, instr., col. 149; pour 1213, Lebœuf, p. 78; pour 1220, 1223, 1226, id., p. 85, 90, 92; pour 1242, Gall. Christ.,t. XII, col. 165.—En 1245. nous voyons apparaître la formule V. solidos monete currentis apud Autissioderum, qui in- dique que la fabrication n’y avait plus lieu; dans Je testament de Mahaud , en 1257, il n’est fait mention que de nirernois et de tournois, Lebœuf, p. 101, 110, 123. 2 Lebœuf, p. 47. 1860. — 5. 26 378 MÉMOIRES plutôt la monnaie du comte de Nevers que la monnaie faite à Nevers. Entre 1188 et 1251, M. Bretagne ne mentionne aucun fait relatif aux difficultés que souleva l'exécution de l'ac- . cord de la première de ces dates : je remarque cependant que dès 1209, le comte Hervé remettait, à son retour de la croisade contre les Albigeois , le soin de terminer la dis- cussion qui s'était élevée entre lui et l'évêque d'Auxerre, de mutacione monete’. En 1215, le comte Pierre donnait à titre de cens aux bourgeois d'Auxerre , la ville et les faubourgs , pendant six ans, moyennant 2,000 livres de provenisiens. Dans cet acte on remarque cette clause : « Infra hunc terminum non fa- «bricabitur moneta autissiodorensis *. » Je suis très-porté à penser que l'atelier monétaire chôma jusque vers 1230, et que la nouvelle fabrication, reprise par le comte à cette dernière époque, motiva la sentence de l’archevèque de Sens, qui le rappelait alors à l'exécution des engagements pris par Pierre de Courtenay. Cette émission de nouvelle monnaie se reconnait, suivant moi, aux lis qui terminent deux des branches de la croix, au revers, et je base cette observation sur ce fait que cette croix ainsi fleurdelisée fut ensuite adoptée 4 Tonnerre, lorsque le comté de Tonnerre, par succession, eut été séparé du Nivernois et de l’Auxer- rois”. 1] me semble que d'après ces données, et en étudiant attentivement le poids et l’aloi des deniers anonymes de 1 Gall. Chr., t. XII, instr., col. 149. * Lebœuf, p 80. 3 Je compte très-prochainement offrir aux lecteurs de la Reoue une étude sur les monnaies de Tonnerre, à propos de quelques pièces inédites, ET DISSERTATIONS. 379 Nevers , on peut les classer chronologiquement d’une ma- niére certaine ‘. Je conclus : La monnaie anonyme d Auxerre appartenait exclusive- ment aux comtes, l'évêque n y ayant aucun autre droit que celui de contrôle, et seulement depuis 1188. Cette monnaie a commencé d’être fabriquée vers 1027, et a continué jusqu'en 1040, sous la domination des ducs de Bourgogne. Pendant un siècle ensuite, la monnaie de Nevers fut commune à Nevers et à Auxerre. — Vers 1136, l'atelier d'Auxerre reprit l’ancien type, et les pièces qui y furent forgées changèrent d’aloi au gré des officiers du comte. En 1188, Pierre de Courtenay réforma sa monnaie : les deniers d'Auxerre suivirent les mêmes lois que ceux de Nevers, non sans réclamation de la part des évêques d'Auxerre, qui fréquemment intervenaient pour réprimer la fraude des monnayers : cette période dura jusqu’en 1245. — A cette date l'atelier entra en chômage jusqu'en 1230, puis une nouvelle monnaie fut forgée et fut continuée jusqué vers 4240 ou 1245, époque à dater de laquelle nous ne trouvons plus que des nivernois ou des tournois dans les anciennes chartes de l'histoire d’ Auxerre. À. DE BARTHELEMY. 1 M. Bretagne a signalé le parti que l'on pourrait tirer de l'étude des be- sants gravés sur lo côté anonyme des monnaies u’Auxerre. J'espère, lorsque je m'occuperai des monnaies de Tonnerre, être à même de proposer une solu- tion, en rattachant ces combinaisons de paints ou besants aux divers règle- ments intervenus dans la fabrication. On sait que sur les bulles de plomb des papes, le nombre des points du grènetis était fixé.—Je rappellerai ici, pour mé- moire, le précieux denier des collections Laureau et de Vesvrotte , dont voici Ja description: + AVTISIODERCI, croix à pied traversant la légende. #, Croix, à pointes ; devant chaque branche, et au lieu de légende, douze points ou be- sants disposés trois par trois. (Bullet. de la Soc. des sc. hist, et nat. de l'Yonne, t. XIII, pl. 13, n° 6et7.) 380 MÉMOIRES DENIER INÉDIT DE PONS HUGUES, COMTE D'AMPURIAS. Les ruines d'Emporium, la Aëxzoç de Strabon, sont situées au revers méridional des Pyrénées, non loin du petit port de la Escala, sur la Méditerranée, à l'entrée du golfe de Rosas et en face de l’ancienne Rhoda. La ville grecque était assise sur un plateau au pied duquel est le vieux port aujourd'hui complétement ensablé et séparé de la mer par un môle jadis solidement construit, à en juger par les matériaux énormes qui subsistent encore. L’enceinte de la ville est assez conservée pour que l’on puisse vérifier l'exactitude de la description qu'en donne Tite Live ( lib. XXXIV, cap. IX). La portion des murs du côté du levant, est encore presque entière; j'ai constaté que ce mur, élevé de 6 mètres environ, a trois cent soixante pas de longueur, suivant une ligne droite, du nord au sud, perpendiculaire au port, et j’y ai remarqué la trace d’une seule porte. Il est recouvert de blocs de pierre de trois mètres de largeur, et il existe dans l'intérieur une galerie que deux hommes de front peuvent parcourir à l'aise. ET DISSERTATIONS. $84 Les ruines de la ville sont enfouies sous une couche de sable qui atteint presque la hauteur du mur. I doit y avoir sous ce sable de grandes richesses archéologiques qu'il serait possible de découvrir avec quelque travail ; le prin- cipal obstacle résulte des mauvais chemins qui rendent l'accès de ce lieu difficile pour les étrangers. On y trouve, en creusant le sol à deux ou trois mètres de profondeur, des médailles grecques et romaines, des pote- ries fines, et surtout des pierres gravées. Un cultivateur a mis à découvert, il y a peu d'années, une mosaïque appar- tenant à une belle époque d'art, et représentant le sacrifice d'Iphigénie. A l'ouest du plateau occupé par la ville grecque, et sur une éminence escarpée, on aperçoit un amas de pauvres habitations construites avec les débris d’un vieux château, et dominées par une très-ancienne église. C'est le village qui porte aujourd'hui le nom d’ Ampurias , et ce devait être l Impurias du temps des Carlovingiens, à l'époque de l'étæ- blissement du marquisat de Gothie. Beaucoup plus loin, au fond du golfe de Rosas, et en se dirigeant par la plage vers la ville de ce nom, on rencontre le bourg de Castellon de Ampurias. Son vieux château, de forme carrée avec fenêtres en ogive, et une église assez bien conservée, aocusent le style du xun° siècle. Le portaï de cette église est décoré de statues qui ont la tête ceinte de couronnes de comte: Castellon de Ampurias était vraisemblablement devenu le séjour des comtes vers le x° siècle lors des partages de la marche de Gothie entre les enfants des comtes de Bar- celone :. 3 Les auteurs de l'Art de verifier les dates disent que la ville de Castellon fut 382 : MEMOIRES J'ai été assez beureux pour me procurer, dans le pays même, outré de belles monnaies grecques d'argent au type du Pégase et une rare pièce du tyran Maximus, usurpateur en Espagne (409-444), un denier de l’un des comtes dont je publie ici le dessin. V: GO POOCI9 (Hugo Poncius), légende divisée par les bras d’une croix. Revers. COMES EMPVR. (Comes Empuriarum), grande épée. — Billon. Poids, 0,60. On remarque tout de suite le mot VGO coupé par un groupe de trois points, ce qui ne s explique pas par le be- soin de symétrie, puisque le nom Poncius fournissait des caractères que l’on aurait pu employer pour remplir les quatre divisions. Aurait-on voulu conserver exactement à la lettre G la place qu'elle occupe sur les deniers de Roger I*", vicomte de Carcassonne (1130-1150), qui sont des imitations du denier de Bertrand, comte de Toulouse (4105-1142) ? Ou bien les monnayers du comte d’Ampu- rias auront-ils cherché, comme ceux du vicomte Roger, à imiter directement le denier toulousain ? (Voy. Rev. Num., 1859, pl. XVI, n° 7). C'est là une question difficile à résoudre ; la monnaie de Carcassonne ayant pu servir d’in- termédiaire, tant à cause des circonstances géographiques qu'en raison de l’époque à laquelle a vécu le vicomte Roger I. Dans tous les cas, je crois devoir attribuer mon denier à Pons Hugues I*, qui a succédé dans le comté d’Ampurias à son père Hugues I*", à une époque qui n'est pas déterminée, et qui est mort vers 1160. Pons Hugues II, qui succéda à son père Hugues III au redevable de ses fortifications au comte Hugues II, qui y fit travailler pendant plusieurs années. ET DISSERTATIONS. 383 mois d'avril 1230, et qui vivait encore le 27 décembre 4267, appartient à une époque trop récente. Quant à l'usage qui consistait à couper les mots et les noms par des points dont on ne doit pas tenir compte, je renvoie aux exemples recueillis par M. de Longpérier!. L'épée figurée sur le denier de Pons Hugues est une de ces grandes armes à large lame avec pommeau en médail- lon, comme on en voit dans les mains des saints.sculptés au portail gauche de Notre-Dame de Chartres. Cette arme con-. vient très bien à un seigneur qui résidait dans une marche ou proyince servant de limite. C’est aussi en qualité de marquis ou seigneurs de la frontière, que les ducs de Lor- raine et d’autres princes ont adopté le symbole de l'épée: Ce symbole se retrouve tenu par un bras sur une mon- paie de Gaston de Béarn et sur un denier de Hugues Il], comte d'Ampurias, appartenant à M. J. Renouvier, et publié tout récemment par M. Poey d'Avant, qui n’a pas connu d'autre monnaie de la même seigneurie *. Sur cette dernière pièce, l'épée est courte et large à la base, comme cette belle arme conservée au musée d’Artil- lerie de Paris, sous le titre d'épée de connétable. R. Géry. 1 Mem. de la Soc. des antiq. de France, 1850, t. XX, p. 27 et suiv.. et Bullet, de la Soc. des antiq. de France, 1859, p. 147, ? Monnaies féodales de France, t. 11, p. 208, pl. LXXVI, n° 13, 384 . MEMOIRES PERKIN WERBECQUE :. (PI. XVII.) Les amateurs de jetons connaissent ces pièces de cuivre dans le champ desquelles on remarque trois cercles conte- * Il est assez difficile de savoir la véritable orthographe de ce nom de famille. On le trouve écrit Warbek dans les lettres originales de Henri VII et de ses correspondants ; Werbec dans les instructions données par le même prince à son envoyé Richmond (10 août 1494) ; Werbeck dans la chronique de Hall, dans celle de Grafton et dans lord Bacon; Werbeck en tête de la copie de la procla- mation conservée dans le manuscrit 283 de la bibliothèque Harléienne; Wer- beque dans le texte français de la confession de Perkin, et Werbecque dans la lettre écrite par lui à sa mère ( Kervyn de Lettenhove , Histoire de Flandre ). D'autres encore ont écrit Waerbeck et Waarbeck. M. Chotin ( Hist. de Tournai) adopte cette dernière forme. Au xv* siècle la signature personnelle même ne prouve rien, Ne voit-on pas le célèbre lord Bothwell signer ses lettres John L. Bothuatlie? M. Kervyn de Lettenhove cite dans son Histoire de Flandre (t. V, p. 496 ) un registre de condamnations pour l’année 1475 où , suivant M. Hennebert, il est fait mention d’une rixe de bateliers parmi lesquels figu- rent Jean Werbecque et Piérart Flan, le père et l’aïeul maternel de Perkin. Puisque ee personnage était français, « de Tournay en Picardie, » suivant l'expression de Henri VII, il faudrait peut-être préférer l'orthographe Wer- becque. Dans le texte anglais de la confession de Perkin, rapporté par Hall et Grafton, le jeune prétendant nomme son père John Osbeck et son grand- père Diryck Osbeck. Le registre de la chambre des communes d'Irlande (28 mars 1497-8 ) contient la demande d'accusation de haute trahison contre lord William Barry et John Water de Cork, qui ont reçu des lettres et instruc- tions de Parkyn Wosebeck ; mais les historiens anglais contemporains ou plus modernes n'ont pas tenu compte de ces dernières variantes. ET DISSERTATIONS. 385 nant chacun une rose & quatre pétales, et qui portent des légendes dans lesquelles la lettre M est représentée par trois jambages III. Ils savent sans doute que ces pièces ont été fabriquées à Tournai. Cette origine, au reste, n'est pas équivoque, puisqu’un des jetons dont je veux parler, offrant une croix cantonnée de deux fleurs de lis et de deux tours, a pour légendes + IETOIS DE TOURNAI VIVE LE ROI, et + O IIIATER DEI ITIENIENTO WHE (pl. XVII, n° 1 )'. Il est probable "que cette pièce fut frappée lors de la fête célébrée en 1478 pour l'entrée de Louis XI. Ce prince s’exprimait ainsi en s'adressant à sa garde royale tournaisienne : « Loyaulx franchois de notre bonne ville et cité de Tournai, pour gage de votre fidélité, vous porterez désor- mais sur vos robes ma livrée, scavoir : 4° une couronne d'or qui est celle de ma grand garde, 2° deux branches de rosier qui est la parure de ma petite garde, et avec ces parures mises en une, je vous donne d'abondant porter une fleur de lys d'or au-dessus des armes de la cité en argent, sachant que mieux le pourriez porter que aucuns de mon royaume *, » Ceci nous paraît expliquer pourquoi, sur le jeton dont il vient d’être question, on trouve des roses, et pourquoi on a gravé deux branches de rosier au revers d'un autre dont les légendes sont MIhIEL POLET LA FET — A TOVRNAI 1 Mémoires de la Societé éduenne, Autun, 1845, pl, IX , n° 3. Cette pièce est attribuée à la Touraine, p. 155; mais l’auteur du texte, M. de Fontenay, a rectifié cette erreur dans sa Nourelle étude de jetons, 1850, p. 7, sur l’avis qui lui avait été donné par M. Rouyer. 2 Manuscrit Givaire, t. II, p. 135, cité par M. A. C. Chotin, Hist. de Tournas, t. Il, p. 72. 386 MEMOLRES EST FET’. Je reviendrai plus loin sur les jetons appar- tenant a cette série. Comme Tournai fut pris en 1513 par Henri VIII, et en 4521 par Charles-Quint , on pourrait demander si l’excla- mation Vive le roi! ne s'applique pas à un de ces princes étrangers. Mais le style du jeton sur lequel elle est inscrite indique bien certainement le xv° siècle, la légende O Mater Dei memento mei est la devise de Louis XI, et d’ailleurs une variété de ce jeton, au type des roses dans trois cercles, porté sur chacune de ses faces : VIVE LE ROI DE FRAN- CHE *. 11 me parait donc constant qu'à partir de 1478, les branches de rosier et les roses devinrent les ornements habituels des jetons de Tournai. Nous les retrouvons sur une pièce de cuivre qui ressemble encore beaucoup à la premitre, et sur laquelle on lit: + VIVE PERKIN IETOIS DE TOVRNAI autour d’une croix fleurdelisée cantonnée de quatre branches de rosier, et + O JTIIATER DEI IIIE- HIENITO WEI. Une petite tour termine la légende du revers (pl. XVII, n° 2). Les armes de Tournai sont de gueules à la tour d'argent, surmontée d’une fleur de lis d’or. Perkin , ce nom acclamé comme l’avait été celui du roi de France, rappelle un des plus curieux épisodes de l'his- toire du xv° siècle, une aventure qui, pendant huit années, mit en émoi le gouvernement d Angleterre. Henri Tudor, après avoir défait Richard III Plantagenet 1 Fontenay, Nouvelle étude de jetons , 1850, p. 15, et Manuel de l'amateur de jetons, 1854, p. 46. Cette pièce est tellement rognée, qu'on n’y voit plus que la moitié infé- rieure des caractères, sur lesquels cependant on ne peut concevoir de doutes. Je ne l’ai pas dessinée à cause de cet état de dégradation. Le type est tout à fait semblable à celui des deux pièces gravées dans la pl. XVII, sous les n°3 et 4. ET DISSERTATIONS. 887 à la bataille de Bosworth (1485), s'était emparé de la cou- ronne d Angleterre, et régnait depuis huit ans environ, lorsque le bruit se répandit que Richard duc d'York, un des fils d'Édouard IV, échappé de la Tour de Londres , où l’on croyait qu'il avait péri, se présentait pour faire valoir ses droits au trône. En effet, un vaisseau marchand venant de Lisbonne, avait amené dans un port irlandais, à Cork, un jeune homme de dix-neuf ans qui trouva rapidement des partisans ', et se rendit bientôt à Paris, où Charles VIII le traita comme un fils d’Edouard IV. Il est vrai qu’alors Henri VII assiégeait la ville de Boulogne ; l'accueil fait au prétendant par le roi de France détermina Tudor à lâcher prise ; la paix fut signée. Le faux duc d’York, obligé de quitter la cour française , alla trouver, en Flandre, la sœur d’Edouard IV, Marguerite, veuve de Charles le Téméraire, qui le reconnut pour son neveu *. C’est ainsi qu'un siècle plus tard, la tzarine Marfa, veuve d'Ivan le Terrible , con- sacra, par son témoignage , l'imposture du premier faux Démétrius. La duchesse douairière de Bourgogne déclara hautement qu'elle avait retrouvé un fils d'Édouard IV, lui donna le surnom de Rose blanche prince d Angleterre’, et lui fournit une garde de trente hallebardiers. 1 Le débarquement ent lieu le 5 mai 1492, à ce qu'il paraît par une lettre que le roi Henri VII écrivait au comte d’Ormond : « Have tidings that our Rebelles landed the Vth daye of this moneth in our land of Irland. » Voy. Ori- ginal letters illustratice of English history, publiées par Sir Henry Ellis. London, 1825, in-8°, t. I*", p. 18, 2 Le poëte Bernard Andreas, historiographe d’Henri VII, dit à ce propos : « Junone illum revocante, in Flandriam profectus est.» Manusc. de la biblio- théque Cottonienne, cité par S. Henry Ellis. Marguerite avait déjà suscité comme prétendant Lambert Simnel (1487). $ Halls chronicle, p. 463, 388 MEMOIRES Cependant Henri VII, inquiet du crédit accordé en Irlande et en Angleterre méme aux récits du prétendant, employa tous les moyens en son pouvoir pour découvrir l'origine réelle de ce personnage , et frait par apprendre qu'il appar- tenait à une famille de Tournai, et se nommait Perkin Warbeck *. Le prince anglais envoya des ambassadeurs à l’archiduc Philippe, pour le prier d’expulser le jeune Warbeck de ses Etats *. Mais l’archiduc répondit que la duchesse douairière était libre et indépendante dans ses domaines particuliers, et refusa son intervention. C'est alors que fut frappé un gros d'argent dont voici la descriptron : Léopard. DOMINE : SALVVM : FAC : REGEM. Écu d’An- gleterre, timbré d’une couronne fermée et accosté d’une ¢ Hall, dans sa Chronique, dit: « ... Peter Warbecke ; and for his dastard cowardnes of the Englishmen, in derisivn, ealled Perkyn Warbeck, according to the duche phrase, whiche chaunge the name Peter to Perkyn to yonge- linges of no strength nor courage, for their timerous hartes and pusillani- mitie. » ( P. 463.) Hall se trompe assurément, Perkin est un diminutif fami- lier qui n’a rien d’injurieux, une appellation populaire très-usitée chez les Flamands, et tout à fait analogue à ces autres diminutifs si. célèbres, Cola Rienzi et Mas Aniello. 3 Le D' Warham, un de ces ambassadeurs, s’exprimait ainsi en s'adressant au conseil de l’archiduc : « To counterfeit the dead image of a king in his coin is an high offence by all laws. But to counterfeit the living image of a king in his person exceedeth all falsifications except it should be that of a Mahomet or an Antichrist that counterfeit divine honour. » Hist. d'Henri VII ,.par lord Bacon, Œuvres, édit. de Londres, 1858, t. VI, p. 145, C'était alors la mode de comparer Perkin à Mahomet considéré comme type de l’imposteur. C'est pourquoi Grafton, dans sa Chronique, dit en parlent de la duchesse Marguerite : « She sent Perkyn Warbeck, her new invented Mawmet first into Portingall, and so craftelic into the realme of Ireland. » Vol. I], p. 192, | . ET DISSERTATIONS. 389 fleur de lis et d’une rose couronnées ; dans un entourage composé de cinq arcs de cercle. Revers. Léopard. MANI : TECKEL: PHARES 1898 (1494) ; une fleur de lis, un léopard et une rose, surmontés d'une couronne fermée ; le tout dans un entourage composé de quatre cintres et de quatre angles. — Argent. Cette pièce est rare ; elle a été souvent décrite ou gravée en Angleterre ‘. La légende qu'elle porte au revers, em- pruntée à Daniel (V, 25), menaçait le roi Henri du sort de Baltazzar, et le roi très-inquiet se plaignait de la grande méchanceté de la duchesse Marguerite, qui lui créait de continuels embarras : « And forseing nowe , écrivait-il à sir Gilbert Talbot, son conseiller, the perseverance of the same her malice, by th’ untrue coniriving eftsones of an othr fayned lad called Perkin Warbek, born at Tournay in Picardy, which at his furst into Irland called himself-the bastard son of king Richard, » etc. *. Perkin fit d'abord près de Deal . dans le comté de Kent, une tentative qui échoua *. puis passa en Ecosse, où, forte- ment recommandé par Charles VIII, par le roi des Romains et par Marguerite d’York, il fut accueilli par le roi Jac- ques IV, qui lui donna en mariage une de ses parentes, lady Catherine Gordon, fille du comte de Huntley *. Ensuite, 1 Folkes, Table of English silver coins, 1745, p. 19. — Leake, Historical ac- count of English money, p. 186. — Wise, Num. ont. Bodl. Cat., 1750, p. 241, tab. XXI. — Num. ant, Thom. Com. Pembr., 1746, t. II, part. IV, tab. 9. — Rading, Annals of the coinage of Gr. Brif., t. Ier, p. 300; t. II, p. 372, pl. Suppl. III, n° 33. — Hawkins, Descr. of the anglo-yall. coins in the Brit. Mus., p. 37, — Akerman, À numismatic manual, p. 391. — Ch. Cocheteux, Bullet. de la Soc. hist. de Tournai, 1854, t. IV, p. 37, 63 à 68. 2 Originals letters, t. Ier, p. 20. 3 Lord Bacon, Hist. of Henry VII, t. VI, p. 156. à Jhid., p. 162 et suiv. 390 MEMOIRES à la tête d’un parti composé d’Ecossais, d’Irlandais et d’Anglais exilés, il fit une incursion sur les terres de Henri. Bientot après, la paix fut signée entre les rois d'Angleterre et d'Écosse, et Perkin s’embarqua pour l'Irlande ; de là il se rendit dans le comté de Cornwall, qu'il souleva. Henri VII s'empressait d'annoncer ces nouvelles à sir Gilbert : « Perkin Warbek and his wif were lately sette ful porcly to the see by the king of Scottes and aftre that landed within our land of Irland in the wylde Irissherie ’..... » Sous le nom de Richard IV, roi d’Angleterre , Perkin . à la tête de huit mille hommes, tenta de s'emparer d’Exeter, mais sans succès, et ne tarda pas à se trouver, près de Taunton, en face de l’armée de Henri, supérieure en nombre. Perkin rangea ses troupes, et parut disposé à soutenir le combat avec la plus grande résolution. Mais lorsque la nuit fut venue, il s'enfuit à cheval et alla chercher un asile dans le sanctuaire de Beaulieu (Bewley, Hampshire). Lady Catherine Gordon, tombée aux mains de Henri VII, fut placée prés de la reine, et recut une pension considé- rable. Henri s’était empressé de faire écrire à ses amis pour leur apprendre la fuite du prétendant. I] nous reste deux lettres dans lesquelles on trouve la même phrase railleuse : « On thursday about midnight, Perkin fled from his company at Tanton and tooke noe leave nor lycence of them *. » On sait comment Perkin se rendit à Henri VII qui le fit promener sur un cheval dans toute la ville de Londres et lui assigna un logement dans le palais d’où il s'enfuit pour 1 Originals letters, t. Ie", p. 32. — Cf. lord Bacon, Hist. of. Henry VII, œu- eres, 1858, t. VI, p. 188. 2 Originals letters, p. 37 et 38, Ces lettres sont écrites les 23 et 25 septembre. — Cf. lord Bacon, loc. laud., p. 192. ET DISSERTATIONS. 391 se réfugier dans Je prieuré de Shyne ‘ ; comment il se re- mit encore aux mains du roi qui le fit exposer sur un écha- faud devant Westminster Hall, et à la croix de Cheapside (juin 1498), l'obligeant à débiter une confession écrite qui commençait par ces mots: « Mon père demourait subz l’Escault, appelé Jean Werbeque, et estoit conterolleur de la ville de Tournay et le ung de mes grands péres estoit appelé Piérart Flan et estoit recepveur de la dite ville et doyendes navieurs, etc ®. » Après cette humiliante formalité, Perkin fut enfermé dans la tour de Londres; accusé un peu plus tard d’avoir tramé un projet d'évasion avec le comte de Warwick, son compagnon de captivité, il fut con- damné à mort, et exécuté à Tyburn (novembre 1499 * ) M. Kervyn de Lettenhove a publié dans son Histoire de Flandre et d'après un manuscrit de M. Goethals, une lettre de Perkin à sa mère, document dont l’authenticité n’est pas bien démontrée, et qu’au reste le savant académi- cien n’a insérée dans son grand travail qu'à titre de curio- sité inédite *. I] semble que cette pièce ait été fabriquée à 1 Lord Bacon, loc. laud., p. 201. - ° * Nous citons d'après la traduction française conservée dans le manuscrit de M. Goethals et publiée par M. Kervyn de Lettenhove ( Hist. de Flandre, t. V, p. 500). La confession fut, bien entendu, prononcée en anglais, langue que Perkin parlait fort bien; le texte anglaïisdiffère du francais en quelques points: on le trouve rapporté tout au long dans la Chronique de Hall ( Londres, éd. de 1809, p. 488 ) et dans la Chronique de Grafton ( Londres, édit. de 1809. vol. IT, p. 218). Lord Bacon n'en donne que la substance. | 3 Lord Bacon, loc. laud., p. 203. + Hist, de Flandre, Bruxelles, 1850, t. V, p. 501. La lettre est datée d’Exeter le 13° jour d'octobre, et Perkin demande à sa mère « un peu d’argent pour l’aider, afin que ses gardes lui soient plas aimables en leur donnant quelque chose. » Cette lettre aurait donc été écrite au moment où le jenne prétendant venait de quitter son asile de Bewley pour se rendre près d'Henri, et il aurait, gardé à vue comme il l'était, préparé un document qui pouvait être facile- ment saisi et démontrait son imposture. Si cette lettre, inexplicablement impru- 392 MÉMOIRES l’aide de la confession de Westminster qui était cependant l'œuvre des plus cruels ennemis de Perkin’. Le gros de 1494 est conçu suivant le mode flamand ; sur des monnaies de Charles le Téméraire et de sa fille Marie, onlit saluum fac populum tuum Domine, avec les dates 1474, 1476, et 1478 *. La piéce frappée en France avant le dé- part de Perkin pour l'Écosse ne porte pas de nom royal, et cela a singulièrement étonné les antiquaires anglais. Mais cette absence de nom tient peut-être à ce que Perkin était trop bien connu dans sa province pour oser y usurper le nom de Richard. Il n'y rencontrait sans doute pas moins de faveur, car une expédition contre l'ennemi des Planta- genets et de la duchesse Marguerite devait être popalaire. Ne soyons donc pas surpris de trouver la légende VIVE PERKIN sur un jeton de Tournai, puisque les compa- triotes du jeune prétendant pouvaient se réjouir de ses en- treprises sans pour cela prendre le change au sujet de son identité *. Ainsi envisagé, notre jeton présente un très-haut degré d'intérêt historique puisqu'il fournit une preuve de l'origine tournaisienne d’un personnage au sujet duquel le @ dente, est authentique, elle trancherait toutes les difficultés que l'identité de Perkin a soulevées, et que tous les documents étudiés en Angleterre n'ont pas permis de résoudre. 1 Au sujet des divers systèmes historiques qu'a fait naître la longue aven- ture de Perkin, consultez l’intéressant mémoire de Sir FrédéricMa dden, Do- cuments relating to Perkin Warbeck with remarks on his history, imprimé dans le t. XX VII, p. 153, de l’Archeologia. London, 1838. 2 Duby, Traité, pl. LIX, n° 1 et2; pl. LXXXII, n° 1. 3 Dès l'origine de l’aventureuse carrière de Perkin, ses compatriotes disaient son vrai nom. Henri VII ayant, au commencement de l'année 1493, envoyé prendre des renseignements sur le continent, voici ce qui se passa : « Il]i (ex- ploratores) in Galliam profecti dum alii alia loca peragrant, quidam Tornacum perveniunt, ibique intelligunt Ricardum humili loco natum nomenque a primo habere Petrun cognomento Varbechum idque muliorum testimonio constare. Po- lydore Verg., Hist. Henr. VII, p. 591. ET DISSERTATIONS. 393 savant sir Henry Ellis dit : « Who was Perkin Warbeck is & question which the English annals cannot resolve. » Les jetons dont j’ai placé la figure dans la pl. XVII ne présentent pas de difficultés sérieuses. Sur le n° 3 on voit la légende SIT.IOITIEIT divisée en trois parties par une guirlande de feuilles de rosiers, laquelle régne sans inter- ruption sur le jeton n° 4. Les n°* 5 et 6 offrent tous deux, et sur chacune de leurs faces, l'inscription AVE MARISTELLA DEI MATER. Le ca- ractère S sert pour les mots maris et stella dans cette phrase empruntée à l'hymne de saint Bernard qui se chante à l'office de la conception de la Vierge, le 8 dé- cembre : Ave maris stella Dei mater alma Atque semper virgo Felix ceeli porta. Les roses se voient sur ces deux pièces. Le n° 5 présente en outre le monogramme de Jésus-Christ IhS avec une barre d’abréviation qui forme en même temps croix. Un littérateur, la plupart du temps malheureux dans ses con- jectures, a prétendu que ce monogramme devait se lire ITIS et qu'il représente le mot grec ty$v¢. Cette opinion ne mériterait pas sans doute d'être rappelée si elle n'avait été accueillie dans un travail que les amateurs de jetons con- sultent *. Les antiquaires que les diverses questions rela- 1 Fragments d'histoire métallique, par J. de Fontenay, dans les Mem. de La Soc. éduenne, 1844, p. 265, n° 4. 1860. — 6. 27 394 MEMOIRES tives au monogramme de Jésus intéressent les pourront trouver traitées avec toute l’érudition désirable dans deux opuscules de notre savant confrère M. C. Cavedoni‘. On sait que saint Bernardin de Sienne, au xv° siècle, était un fer- vent propagateur de la dévotion au nom de Jésus. Il avait donné en 1423 à l’église sainte Marie delle asse à Modène, un tableau représentant en or sur fond d'azur le mono- gramme sacré entouré de rayons et de fleurons. C'était comme un résumé de la doctrine exposée dans un sermon prononcé par le saint, qui énumère les douze rayons mys- tiques ou attributs du nom de Jésus. Ce même sermon ex- plique la présence des fleurs autour du monogramme sym- bolique : « Hinc et ipsa Maria, tempore passionis Christi per multiplices salsugines amaritudinum progredit ad Domini sepulchrum quærens, ut ait Angelus (Marc. XVI), Jesum Nazarenum crucifixum. IhS autem salus, Nazarenus floridus interpretatur, crucifixum additur ut sic habeas salutem, florem et crucem, et in omnibus consolationem *. » On voit donc que le type de notre jeton qui présente à la fois le monogramme IhS, une croix, et des fleurs, est conçu suivant le système de saint Bernardin. Les pièce gravées sous les n°* 7, 8, 9, 10 de la pl. XVII nous montrent diverses combinaisons de fleurs de lis, de tours, de roses qui relient entre eux tous ces jetons, de telle sorte que leur attribution à Tournai ne laisse pas de doutes dans l'esprit. Cette ‘attribution s'étend à d’autres pièces du 1 Dell’ origine ¢ valore della scrittura compendiosa IHS del sacrosanto nome di Gesu, Modena, 1846, et Dell’ orig. e val. della scritt. comp. IHS del sacr. nome del Salvatore e del suo culto, Modena, 1855. 2 Sermones sancti Bernardini de Senis ordinis fratrum minorum de Evangelio ælerno, sermo XLIX.— De Glorioso nomine Domini Nosiri Jesu Christi, art, se- cund., cap. IV. ET DISSERTATIONS. 395 méme genre dont je ne donne pas le dessin, mais que les antiquaires reconnaîtront aisément. On devra, en étudiant cette série, ne pas oublier la nice publiée par Miéris, Klotz, et Duby *, piéce que je n’ai pas encore vue en nature et qui me parait présenter des roses entre les mots de la légende DIV.NOVS DOIN PAIS ET EN LA FIN SA GRASE. ADRIEN DE LONGPERIER. 1 Hist. der Nederl., t. II, p. 136. — Hist, nummor. obsid., p. 72. — Rec. gén. des monn. obsid., pl. XX, n° 5. CHRONIQUE. NOTICE NÉCROLOGIQUE SUR M. LE MARQUIS DE LAGOY. M. A. de Longpérier, qui s’est chargé d’annoncer la mort de M. de Lagoy et d'offrir à sa mémoire un premier tribut de re- connaissance !, veut bien me céder l'honneur d’entretenir, pen- dant quelques instants, les lecteurs de la Revue de l’homme dont la vie s’est écoulée au milieu de nos respects, et du savant dont nous cherchons à pratiquer les enseignements. Louis-Roger-Xavier de Meyran, marquis de Lagoy, est né au château de Lagoy, près Saint-Remy, le 44 juillet 4789. Sa famille, originaire d’Arles, se distingue, entre les plus nobles et les plus considérables de la Provence, par les services qu'ont rendus, à diverses époques, ses membres, dans les rangs les plus élevés de l'Église, de l’armée et de la diplomatie. La baronie de Lagoy fut érigée en marquisat par Louis XIV, en récompense de la belle conduite d’Etienne de Meyran, qui avait représenté la France, en 4617, auprès de la Sublime Porte. Je ne répéterai pas tout ce qu’ont dit de M. de Lagoy, le jour de ses funérailles, des écrivains distingués de la Pro- vence*. Je rappellerai seulement que M. de Lagoy a religieu- sement pratiqué, à l’exemple de son père et de son aïeul, les vertus privées les plus pures; qu’il a constamment placé 1 Revue num., 1860, p. 248. 2 Eloge funèbre, par M. Norbert Bonafous.—Notice nécrologique, par M. J. B. Gaut, et discours de M. Rouart. CNRONIQUE. 397 au-dessus de tout, les jouissances de l’intérieur et le bonheur qu'il a trouvé, bien jeune, dans une union assortie; que son amour de l’indépendance lui a fait décliner toute fonction pu- blique ‘; que son caractère, ferme et bienveillant à la fois, l’a tenu éloigné des cotertes scientifiques et littéraires, et que, s’il a obtenu les succès de la publicité, ce n’est point qu’il les ait brigués, mais parce qu’ils sont venus à lui. Le goût de l'art et le culte de l'antique étaient tradition- nels dans la famille de M. de Lagoy. La riche collection de mé- dailles, dont il nous a fait si souvent les honneurs avec une grâce extrême, avait été commencée par son père , député sous la Restauration, qui avait su, au milieu des travaux législatifs, pousser assez loin l’art du dessin et de la gravure, pour être attaché à l’Institut (Académie des beaux-arts) en qualité de cor- respondant. C'est à son grand-oncle maternel, le marquis de Méjanes, que la ville d’Aix doit une bibliothèque qui se dis- tingue , entre toutes celles de province , par le choix de ses livres et la rareté de ses manuscrits ?. | M. de Lagoy avait donc été initié, dès sa première jeunesse, aux secrets de la numismatique ; il n’a publié cependant un premier mémoire qu'en 1826, lorsqu'il avait déjà trente-sept ans *, L’extrême modestie, la sage réserve qui le distinguaiént et rendaient son commerce si agréable, lui avaient fait’ com- 1 Cédant au désir de ses concitoyens, M. de Lagoy est cependant entré au conseil municipal d'Aix en juin 1848, et n’en est sorti qu'en 1852, par dé- mission. . 3 Le marquis de Méjanes, l’un des plus célèbres bibliophiles du derniér siècle, mort à Paris le 5 octobre 1786, avait légué, en outre, à la Provence diverses valeurs, dont le- revenu, s’élevant à environ 5,000 livres, devait être employé à l'accroissement annuel de la bibliothèqne que sa générosité on- vrait au public; une grande partie de ces valeurs fat confisquée en 179], mais une rente de 2,000 fr. a continué d’être versée à l’administration de la bi- bliothèque par MM. de Lagoy. à Essai sur les médailles de Cumobelinue. Aix, 1826, in-4°, une planche. 398 CHRONIQUE. prendre que la science du passé exige de fortes études, et qu'il est toujours dangereux de se laisser entraîner dans le monde des hypothèses, par une intelligence trop ardente ou une plume trop facile. | Le début de M. de Lagoy fut ce qu’il devait être, une œuvre sérieuse qui le posa d'emblée au premier rang des numismatistes. Il venait de rendre à la Grande-Bretagne les monnaies marquées du nom d’un personnage historique, Cunobelinus, et de redresser ainsi la doctrine d’Eckhel*, de Mionnet et de Sestini?, qui, appli- quant à la dernière époque ce que César avait dit des temps an- térieurs et forçant la pensée de l’auteur des Commentaires, s’é- taient persuadés que les Gaulois d’outre-Manche n’avaient pas eu de monnaies autonomes, et que leurs signes d’échange avaient uniquement consisté en cylindres et en anneaux de bronze ou de fer, jusqu’au complet établissement de l’administration romaine. Cette importante rectification ouvrit un champ tout nouveau aux investigations numisinatiques, et bientôt on vit apparaître les monnaies de Ségonax, aïeul de Cunobelinus, et de son père Tasciovanus; puis toutes les richesses de la suite gallo-bretonne. On s’oecupa de M. de Lagoy, de l’autre côté du détroit, et la Société des antiquaires de Londres lui envoya le titre de membre correspondant. — En 1834 parut un second mémoire *, beaucoup plus impor- tant encore que le premier, qui valut à M. de Lagoy le titre de 2 Dectrina nummorwm, t. I, p. 80. . 2 Classes generales , première édition, 1787. — Dans la seeonde édition du même ouvrage, 1821, que ne connaissait pas M. de Lagoy, Sestini donne un chapitre à la Bretagne, et dit, en parlant des monnaies de cette contrée : « Mionettus descripsit omnes inter Regulos Gallicos sed inconsulio, dum Bri- tannia repetit nummos suos. » Puis il indique les pièces appartenant à Camu- lodunum , à Verulamium et au roi Cunobelinus. Page 10, deuxième colonne. 3 Description des médailles inédites de Massilia, de Glanum, des Canicences et des Auscit. Aix, 1834, in-4° de 40 pages, avec 2 planches renfermant 27 pièces très-habilement dessinées par l’auteur, CHRONIQUE. 399 correspondant de l’Institut (Académie des inscriptions et belles- lettres). Avant d’analyser ce nouveau travail, il est bon de rap- peler que le hasard, juste parfois, avait placé une des propriétés des Lagoy, cette famille d’antiquaires et d'artistes, à Saint- Remy. sur le territoire même de l’antique Glanum, ville dont pérlent Pline et Ptolémée, et qui marque encore aujourd'hui sa place par des monuments de la belle époque romaine *, et par une curieuse inscription du 1v° siècle *. Un pareil sol ne devait pas être livré en vain à un mineur infatigable et habile, comme M. de Lagoy : de merveilleuses monnaïes furent découvertes, recueillies et interprétées. Le mémoire publié en 1834 fit connaître un monument tout nouveau et encore unique aujourd’hui , la belle pièce d’argent de style grec, portant d’un côté une tête de femme couronnée d’épis ; de l’autre le taureau, symbole habituel du bronze mar- seillais, avee la légende TAANIKON. Ce bijou numismatique est une tétrobole du beau temps de la colonie phocéenne, frappée, soit par une sous-colonie de Marseille, soit par les Salyens, qui auraient imité la monnaie de leurs voisins. Suivant M. de Lagoy, la tête de femme représente Cérès, divinité tutélaire du fertile territoire de Glanum. Ajoutons que l’auteur, complétant le système du président de Fauris Saint-Vincens *, avait habilement démêlé , dans le monogramme qui se lit au-dessus du taureau, la marque d’un monétaire ou d’un graveur de coins, qui tra- vaillait en même temps pour Patelier de Marseille. Le second mémoire de M. de Lagoy donnait aussi la descrip- tion de la monnaie d’argent des Cænicenses, KAINIKHTQN *, dont. 4 [arc de triomphe et le tombeau monumental, qu'on admire aux portes dé Saint-Remy, se distinguent par leur style et leur conservation. * Cette inscription a été reproduite plusieurs fois. Cf. Papon, Caylus, Millin, Orelli, ete., ete. 8 Notice sur Jules-François-Paul de Fauris Saint-Vincens, p. 12. * Les Cænicences faisaient partie des cités latines de Ju Gaule narbonnaise. Plin., Hist. nat., lib. II, cap. 4. 400 CHRONIQUE. on ne soupçonnait pas l’existence avant lui, et dont il n’a jamais été retrouvé un second exemplaire. Venait ensuite , sous la rubrique des Auscit, peuple d’Aqui- taine, une jolie petite monnaie d’argent, également inédite, trouvée aux environs d’Alais, portant d'un côté une tête à gauche, de l’autre AVSC, entre les branches d’une croix. Enfin & ces nouvelles merveilles numismatiques, M. de Lagoy a joint la description de plusieurs pièces de Marseille, de la plus haute antiquité, aux types du phoque, du griffon, du lion dévorant une proie et de la téte de Diane, avec creux au revers, exhumées, la plupart, à Glanum, et qui avaient échappé aux recherches de Fauris Saint-Vincens ! et des autres numismatistes. Ces monnaies sont encore des plus rares aujourd’hui; elles appartiennent au vie siècle avant Jésus-Christ, et forment la tête des collections monétaires de la célèbre colonie phocéenne. Le plus bel éloge qu’on puisse faire de cette partie du mémoire est de rappeler que, huit ans plus tard, l’académicien auquel nous devons un travail d’en- semble sur la numismatique narbonnaise ?, n’avait trouvé aucun type nouveau pour les trois premières époques du monnayage marseillais (600 avant J. C.). — En 4837 M. de Lagoy consacra de nouvelles pages à ka nu- mismatique gauloise *. Ce travail, qui n’embrasse pas moins de trente-six peuples ou chefs divers, serait trop long & analyser. Les articles qui ont été le plus remarqués lorsqu’il parut, sont les suivants : 4° Rétablissement de l’ethnique du roi des Sotiates, qui fut vaincu par Crassus; 1 Voir les planches qui font enite à la Notice sur Paul de Fauris Saint-Vincens. ? L. de La Saussaye, Numism. de la Gaule narbonnaise, Blois , 1842, graud in-4°, 3 In-4°, Aix, 1837, 48 pages, 1 planche, CHRONIQUE. hO1 2 Description du bronze inédit des Samnages ou Samna- genses, portant d’un côté le taureau de Marseille avec ZAMNATHT, de l’autre la tête d’Apollon avec ACTIKO, pour Actrxéc, désigna- tion qui convient à une divinité topique; 3° Rectification au sujet d’une rare monnaie du cabinet Tochon d'Annecy, appartenant aujourd’hui à M. de Saulcy. On avait toujours lu sur cette pièce, OKIPT, mot dont on avait vai- nement cherché le sens. M. de Lagoy, par une heureuse inspi- ration, prit la légende à rebours et y retrouva le nom des Tricorit, peuple qui paraît avoir habité la vallée du Drac, aux environs de Gap. L’auteur suppose que cette belle pièce a été frappée par les Massaliotes, quand la cité des Tricorii tomba entre leurs mains, au temps de César ; 4 Attribution aux Voconces d’une petite monnaie d’argent du musée Calvet, classée jusqu’alors aux incertaines de la Gaule, ct portant d’un côté une tête à gauche, de l’autre un cheval, sous lequel se lisent les deux syllabes VOOC. Cette restitution , basée sur Vhabitude qu’avaient les Gaulois de redoubler certaines voyelles, a été adoptée par M. de La Saussaye ; 5° Confirmation de l’opinion de Bouteroue et classification définitive à l'Éduen Litavicus, d’une monnaie d'argent qu’Ee- khel, Sestini et Mionnet avait rejetée parmi les incertaines ; 6° Description d’une belle monnaie éduenne , au revers de Pours, sur laquelle on lit EDVIS. Les importantes conquêtes numismatiques que nous venons de rappeler sont désormais acquises à la science, et si un très- petit nombre des attributions proposées par M. de Lagoy, telles que celles du BRIGIOS, du VANDIILOS et du CARSICIOS, ont été contestées depuis, il faut se rappeler que la numismatique gauloise naissait à peine en 1837, et que les ouvrages d’en- 1 Num, de la Gaule narbonnaise, p. 133, 402 CHBONIQUE. semble de Lelewel et de La Saussaye n’avaient pas encore paru. — Les monnaies mérovingiennes devaient avoir leur tour. Le quatrième mémoire traite de cette branche importante de notre numismatique nationale’, et fait connaître, outre plu- sieurs liers de sou d’or, vingt-six deniers d’argent du plus haut intérêt, exhumés à Glanum. L'apparition d’un aussi grand nombre de deniers de la première race, lorsqu'on n’en avait découvert jusque-là que des exemplaires isolés, fut un véri- table événement et me fit revenir, pour ma part, sur ce que j'avais dit de trop absolu au sujet de lemploi de l'or, comme monnaie légale, sous les Mérovingiens ?. — J'ai hâte de passer à Pune des études les plus remar- quables que nous ait laissées M. de Lagoy. Je veux parler de sa monographie des monnaies ostrogothes en bronze et en argent ?. On s’est oceupé depuis longtemps, de ce côté-ci des Alpes, des. monnaies frappées en Italie sous la domination des Goths (493- 532). Le baron Marchant avait expliqué quelques-uns des mo- nogrammes que présentent les pièces d’argent de cette série ; _Lelewel en avait déchiffré d’autres: mais il était réservé à Vantiquaire d’Aix de faire sur l’argent et le bronze ostrogoths un. excellent travail, qui a grandement servi à l'ouvrage publié plus tard par M. Friedlander *. Après le monnayage des Ostrogoths, Pauteus fait connattre une mince pièce mérovingienne, en argent, de Childebert IE (693), où il reconnaît le sixième du denier. 1 Description de quelques monnaies mérovingiennes , in-4e de 30 pages, 1 plan- . che. Aix, 1839. 2 Considération sur la monnaie à l'époque romane, passim. — Etudes num. sur une partie du Nord-Est, p. 28. 3 Explication de quelques médailles à un monogramme des rois goths d'Italie. Aix, 1843, in-4°, 23 pages, 2 planches. + Die Manzen der Ostgothen. Berlin, 1844. CHRONIQUE. h03 — Viennent ensuite des mélanges numismatiques ‘ qui pa- rurent en 1845, et où Pon remarque : 4° Un médaillon de Tibère, avec la légende TI. CAESARI AVGVSTO D. D. COL. K, laissé par Goltzius, Erizzo, Tristan, Occo, Morell, etc., etc., parmi les monuments des colonies in- connues. M. de Lagoy démontre l'existence d’un K à la fin de la légende, et considère la pièce comme frappée par décret des décurions de Carthagéne (Carthago- nova), dans la Tarragonaise, sans faire connaître toutefois les motifs qui l’ont déterminé a ne pas la donner à Carthage ; 2° Un bronze gaulois trés-curieux, mais fruste, sur lequel il lit...... RCANTORIX. Un autre exemplaire de la même mon- naie, trouvé avec des pièces analogues portant ROVECA *, acquis aujourd’hui par M. de Saulcy, confirme en grande partie cette lecture, qui avait été contestée. La légende se compose du mot CANTODAN , précédé de l’article AR ; 3° Un statére , imité de ceux de Philippe de Macédoine, mais remarquable par une sorte de tige qui traverse le visage, et par une contremarque représentant un sanglier. La description de cette pièce est accompagnée de considérations très-justes sur la possibilité de répartir les statères du type grec entre les di- verses contrées de la Gaule, au moyen des symboles acces- soires qu'ils présentent; 4° Des consulaires inédites ; 5° Des petits bronzes de Gelimer, roi des Vandales; d’A- malaric, roi des Wisigoths, de Childebert 1°", de Théode- bert, etc., etc. ; 6° Un triens mérovingien d’Agaune. 1 Médailles inédites grecques, gauloises , romaines el du moyen dye. Aix, 1845, in-4°, 38 pages, 2 planches, 3 Cf. Recue num., 1859, p. 102, art. de M. de Longpérier ; 1859, p. 316, et 1860, p. 348, articles de M. de Saulcy. hOA CHRONIQUE. — En 1847 et en 1856,M de Lagoy revient à son sujet favori, la numismatique gauloise ', et décrit un nombre considérable de pièces d’argent , imitées des deniers ou plutôt des quinaires consulaires, au type de la tête casquée d’un côté, et des Dios- cures à cheval de l’autre; remarquant que ces pièces, toujours du même type, se distinguent les unes des autres par les légendes, il admet qu’elles ne constituent pas un monnayage unique, mais qu'elles ont été, au contraire, frappées dans un but commun, par divers peuples. Partant de cette donnée, un heureux numismatiste, M. de Saulcy, y a reconnu, depuis, le monnayage de la ligue contre Arioviste. M. de Lagoy rétablit parfaitement la légende du n° 1 : CN. VOLVNT, qu’une mauvaise conservation avait fait considérer par M. de La Saussaye * comme le nom des Voconces, et où Mionnet, Lelewel et Du- chalais n'avaient pas aperçu le point qui la sépare en deux. Ces mots CN. VOLVNT. désignent un client de la famille Pom- peia. C’est dans cet essai que parut la monnaie où M. de Lagoy voit non EBVROV, mais EBVRON, et qu'il classe par conséquent aux Eburons. Tous les lecteurs de la Revue connaissent le long débat qui s’est élevé à ce sujet, et auquel je n’apporterai pas mon opinion avant qu’il m’ait été donné d’examiner de nouveau cette pièce avec plus de soin que je ne lai fait à Aix, à une époque où je ne m’occupais pas particulièrement de la numisma- tique des Gaules. —En 1849, l'auteur a publié un savant travail sur l’armement et les instruments de guerre gaulois, tels que les font connaître les figures des monnaies de nos pères et les trophées des de- 1 Essai de monographie d'une série de médailles gauloises d'argent au type des Dioscures. Aix, 1847, in-4°, 28 pages, L planche, — Supplément, Aix, 1856, in-4°, 16 pages, 1 planche. 2 Num, de la Gaule narbonn., pl. XVI, fig. 2. 3 Article de M. de Witte, Rev, num., 1856, p. 68. CHRONIQUE. A05 niers consulaires ‘; Il relève une erreur de Duchalais, qui avait pris pour un lituus militaire le carnyx qui se voit sur la monnaie de Dubnoreix, et auquel s’applique si bien la description d’Eustathe; il donne ensuite des explications sur la manière dont les guerriers portaient et rattachaient le sagum, et étudie la forme du torques, du sanglier-enseigne. du javelot ou matara, de l’épée qui se portait au côté droit, du long bouclier dont parle Virgile, etc., etc. — La série des travaux numismatiques de M. de Lagoy, publiés à Aix, se termine par une brochure * où, après avoir donné de précieux renseignements sur l'écriture monogram- matique en Grèce, à Rome, dans l’empire d’Occident et chez les Mérovingiens, il fait connaître des monogrammes nouveaux de Marcien, de Jules Nepos, de Léontius, de Gondomare, roi des Burgundes, d’Amalaric, roi des Wisigoths L'auteur «xamine dans cette brochure l'attribution faite à l’Armorique par Ch. Lenormant, des frientes aux noms de Justin et de Justinien, dont le revers porte un monogramme composé des lettres ARM. Suivant lui, les tiers de sou en question appartiennent au midi de la France, et ce n’est pas un nom de peuple qu'il fant y chercher, mais bien un nom d’homme; placé à ce nouveau point de vue, il admet que le monogramme renferme un L, formé de la barre de VA et d’un des jambages de l’M, et appar- tient à Ainalaric. M. de Lagoy a publié dans la Revue numismatique plusieurs articles que distinguent, comme on Pa dit avec justesse, « une « discussion sobre, mais complète, et un style si précis, qu’il 1 In-4°, 38 pages, 1 planche. Aix, 1849. 2 Recherches sur l'explication des monogrammes de quelques médailles inédiles des derniers temps de l'empire d'Occident et de l'époque mérovingienne, in-4° de 16 pages. Aix, 1856. 406 CHRONIQUE. a serait difficile d’y ajouter ou d’en retrancher un seul mot.» Ces travaux sont plus connus du monde savant que ceux qu’il a fait imprimer à Aix pour un petit nombre d’amis. Je me bornerai à les énumérer; leurs titres suffiront pour faire juger de leur importance. 1837. Sur la médaille gaulotse attribuée a Tasget ; Attribution d'une médaille de bronze à la ville de VISVNTIVM. 1839. Médaille de BRIGANTICVS, roi de Galatie ; — Attri- bution d’une médaille d'argent à Cono ou Cosium ( Bazas); — Sur la médaille IVDEA NAVALIS. 1840. Magusa ou Magusum, ville des Bataves. 1841. Médaille bilingue gréco-celtibérienne ;— Attribution d'une médaille gauloise de bronze à Virinn, Vissec, dans le Gard; — Tiers de sou de Clotatre, frappé à Arles. 1842. At{ribution de deux médailles d’argent aux Belindi. 1844. Évaluations pondérales sur les monnaies. 1846. Monnaies primitives de Massilia; — Rectification nu- . mismatique sur le type d'une monnaie de Sagunte. 1847. Attribution d’une nouvelle médaille aux Anatilit , peuple situé aux bouches du Rhône. — 4849 Découverte de monnaies de bronze de Marseille. 4853. Tétradrachme de Vonones I. 1855. Mélange de quelques médailles arsacides et gauloises ; — Médaillon d’argent de Valérien et de Gallien. 1857. Médailles gauloises. 4858. Description de plusieurs fiertons ou poids monétaires. 1859. Attribution de quelques médailles inédites au monnayage primitif des Arabes, à Alexandrie. La Revue numismatique belge s'est cmpressée également d'ouvrir ses colonnes au savant qui vient de nous être enlevé, ! M. Norbert Bonafous, Eloge funèbre. CHRONIQUE. h07 et a reçu de lui, en 1858, la description d’une pièce de plaisir, en bronze, aux noms de Rodolphe et de Hugues. M. de Lagoy a beaucoup imprimé; mais, je le répète, il te- nait peu à la publicité et aux succès qu’elle n’a jamais manqué de lui procurer. C’est dans la correspondance intime que son esprit élevé se plaisait à prendre essor. Plusieurs numisma- tistes gardent précieusement ses lettres, où des points intéres- sants sont toujours traités avec la supériorité qui lui apparte- nait. M. de La Saussaye et M. de Barthélemy en possèdent un grand nombre. Entré plus tard en relations avec ce savant regretté, j’ai encore trouvé dans ses lettres, dont la dernière est de la fin de 1859, les plus utiles enseignements; mais c’est à son vieil ami M. F. Soret, l’orientaliste de Genève, qu'ont été adressées , pendant vingt ans, ses communications les plus intimes . . Le 16 avril dernier, l’éminent archéologue que nous pleurons, a terminé, entouré des siens, une noble et savante vie. Quel- ques instants avant sa mort, avec le calme de lhonime de bien et du chrétien , il a voulu s’occuper encore des sujets qui 1 Voici ce que m’écrivait il y a quelques jours M. F. Soret, que je ne puis mieux faire que de citer textuellement : « Nous nous faisions part réciproque- « ment de nos découvertes, de nos observations, de nos duutes; nous nous te- « nions au courant des travaux de nos confrères. Les lettres du marquis sont « très-instructives, parce qu'un assez grand nombre de numismatistes et d’ar- « chéologues s’adressaient à lui pour le consulter; plusieurs d’entre eux ont « largement utilisé dans leurs publications les renseignements que leur cor- « respondant ne leur refusait jamais, lors même qu'il se privait par là du « plaisir de publier lui-même ses découvertes. A cet égard, il était d’une libé- « ralité rare et d’une grande modestie. Ses observations sur les allurés des « hommes de science sont quelquefois très-piquantes , mais jamais malignes. « Ses lettres intimes conservent la tournure spirituelle de sa conversation, « mais on retrouve à chaque page les preuves de la sensibilité de son âme, « de son amour pour la vie des champs, de son attachement pour les siens » et pour quelques amis. » 408 CHRONIQUE. lui étaient chers, et, par une dernière disposition , il a légué 4 la ville d’Aix plusieurs ceuvres estimées de peintres proven- çaux, et la précieuse collection des eaux-fortes de son père. Sa magnifique suite numismatique, dont font partie presque sans exception les raretés qu’il a publiées, appartient aujour- d’hui à M™* la marquise douairiére de Lagoy, née de Castellane; plus précieux dépôt ne pouvait être en meilleures mains. Cuances Rosert. Paris, le 30 mai 1860. Au moment où nous mettons cette feuille sous presse, la famille de M. Jules Renouvier nous apprend que cet archéologue distingué vient de mourir à Montpellier, où il était à peine de retour d’un de ces voyages annuels consacrés à l’étude des an- ciens maîtres graveurs, sur lesquels il a publié tant de remar- quables écrits. M. Renouvier savait conduire à bonne fin ses œuvres relatives à l’histoire de l’art sans négliger ses recherches numismatiques ; il laisse de profonds regrets parmi les amis nombreux et sincères que lui avaient attachés son caractère aussi honorable que bienveillant, son instruction solide et variée, et la constante obligeance avec laquelle il s’intéressait aux travaux de tous ceux qui faisaient appel à son érudition. A. L. 27 septembre 1860, MEMOIRES ET DISSERTATIONS. LETTRES A M. A. DE LONGPERIER sur LA NUMISMATIQUE GAULOISE. Septième article. — Voir le ne 6 de 1858, p. 437; le n° 5 de 1859, p. 313; le n°6 de la même année, p. 401; le n° 3 de 1860, p. 164; le n° 4 de la méme année, p. 249, et le n° 5, p. 345. name XI. Ligue gauloise contre l'invasion germaine et helvétique. Mon cher ami, tu connais fort bien la nombreuse série de quinaires gaulois d'argent au type de la tête de Pallas et du cavalier armé. Sans aucun doute tu as lu plus d’une fois tout ce qui a été écrit au sujet de ces intéressants petits monuments, sur l’origine desquels plane encore un doute profond. Ce n’est point ici le lieu d'analyser en détail toutes les idées émises à propos de ces monnaies ; l'exposé serait ” beaucoup trop long, et d’ailleurs cette analyse trouvera sa place plus tard. Je veux tout simplement te faire part aujour- 1860.— 6. 28 A10 MÉMOIRES d’hui de l'attribution que je crois vraie et que j'ai adoptée comme telle, pour cette série de nos monnaies nationales. Si je me trompe, ce qui n'est guère que le fait de ceux qui cherchent et qui produisent leurs idées, je serai, comme toutes les fois que cela m'est arrivé, heureux d’avoir fourni une occasion de rectifier une erreur émise par moi. Ceci dit, j'entre en matière. Commençons d’abord par établir un fait qui domine tous les autres, c'est que ces monnaies, calquées sur le système monétaire des Romains, puisqu'elles offrent le même poids et pour ainsi dire les mêmes types que les quinaires de la République, sont antérieures, d'aussi peu que l’on voudra, mais enfin antérieures aux expéditions de César conquérant dans les Gaules, c’est-à-dire à celles qui ont suivi la cam- pagne d’allié de l'année 58 avant Jésus-Christ, contre les Helvétiens d’abord, et ensuite contre Arioviste et ses Ger- mains. En effet, il paraît inadmissible que ces types aient été choisis par un groupe de peuplades gauloises quelcon- ques, postérieurement au premier événement qui devait faire détester. le nom romain de tous ceux que l’asservis- sement menacait. | Les pièces en question sont donc certainement antérieures à la première tentative de conquête de César, c'est-à-dire à l’année 57 avant Jésus-Christ. Cette limite inférieure d'âge une fois posée, est-il pos- sible d'en déterminer une seconde? C'est ce que nous allons essayer de faire. Dans le groupe intéressant de monnaies dont je m'occupe, il en est qui ont été émises par un per- sonnage nommé Voluntillus, et qui offrent ce nom isolé d'abord, puis précédé du prénom de Cneius emprunté à la gens Pompéia, Ce Cneius Voluntillus était donc un client de Pompée , comme Durat et Togirix furent clients de la gens ET DISSERTATIONS. h11 Julia. Ce fut en l'an 77 que Cn. Pompée marcha à la téte d’une armée considérable contre Sertorius , qui s'était em- paré de la Province ; il le battit et séjourna quelque temps à Narbonne; de là il se rendit en Espagne , d’où il revint passer dans la Gaule l'hiver de l’année 76. Voilà certaine- ment l’époque supérieure à laquelle on peut admettre l’ap- parition parmi les Gaulois de clients de la gens Pompéia, clients qui se multiplièrent, puisque nous savons, par exemple, qu'une famille nombreuse de ces Pompéiens gau- lois habitait Vésone, la capitale des Petrucorii. Ainsi, il faut trouver dans les vingt années comprises entre 77 et 57 avant Jésus-Christ la cause et l'époque d’é- mission de la série des quinaires gaulois au cavalier armé. Il n’est guère possible, on en conviendra, que la révolte ardente des Allobroges, sous les ordres de Catugnat (62 av. J. C.), ait donné lieu à la fabr'cation d'espèces em- _ preintes des types adoptés par un ennemi abhorré. Il nous faut donc chercher un autre événement qui nous explique une émission de monnaies gauloises si clairement roma- nisées. Depuis un demi-siècle déjà, les Germains renouvelaient à chaque instant des invasions sur les terres formant la rive gauche du Rhin. Ils n’attendaient qu'un prétexte pour se ruer sur les provinces gauloises qui leur offraient un climat plus doux, une vie plus facile. L’ambition et la rivalité de quelques grandes peuplades ne tardèrent pas à leur fournir ce prétexte si impatiemment cherché. La nation des Édues, par calcul bien plus que par servilité, avait su se concilier l'affection de la République. Elle avait reçu le titre de sœur et d’amie du peuple romain, au moment même où la race Arverne se voyait décheoir et perdait la suprématie qu’elle avait longtemps exercée sur toute la Gaule libre encore. Les hi2 MÉMOIRES Édues, à leur tour, étaient devenus les arbitres souverains de la confédération gauloise, ou du moins de toute cette partie du pays qui avait droit, suivant César, à la qualification de celtique. Cette suprématie des Édues était loin de s'exercer sans tiraillements, et le sénat de Bibracte soulevait contre lui, comme à plaisir, des haines dont il devait bientôt sentir cruellement le poids. Ainsi les Séquanes, poussés à bout, s'allièrent étroitement avec les Arvernes, et parviurent à organiser une ligue contre la domination éduenne, en nour- rissant l'espérance de reconquérir la suprématie qui leur avait échappé. Comme les Édues, suivant toute apparence, pouvaient compter sur l'assistance romaine, les Séquanes, afin de contre-balancer une intervention aussi redoutable, eurent la malencontreuse idée de s'adresser aux Germains d'outre-Rhin. Ceux-ci n’eurent garde de laisser échapper une si belle occasion de se mêler aux affaires gauloises. Arioviste , chef de ces sauvages guerriers, s empressa de franchir le Rhin, avec quinze mille hommes d'élite , et vint se mettre à la solde des Séquanes. La guerre éclata aussitôt, mais elle fut courte; les Edues furent complétement battus dans deux batailles terribles, où ils perdirent toute leur noblesse, tout leur sénat, toute leur cavalerie (Cesar, 1. I, cap. 31). Ils se virent contraints d'accepter les conditions les plus humiliantes pour obtenir la paix, et ce fut alors que leur vergobret, le druide Divitiac, partit seul pour Rome, afin d’implorer, pour sa malheureuse nation , la protection de la République. Les Séquanes , vainqueurs, ne tardèrent pas à regretter amèrement leur victoire ; ils avaient cru acheter des mer- cenaires, ils s'étaient donné des maîtres insatiables et sans pitié. Arioviste leur déclara qu'il se trouvait bien en Sé- quanie, et qu'il y resterait, plus de cent mille guerriers ET DISSERTATIONS. 413 germains étaient venus se ranger autour de ses étendards, et il commença par se faire attribuer en toute propriété le tiers des terres de la Séquanie , en ayant soin d'exiger la cession des plus fertiles. Bientôt réduits au désespoir, les Séquanes implorérent les Edues et les supplièrent d'oublier les funestes querelles qui avaient ruiné leurs deux cités. La guerre s’alluma aussitôt, et les Edues, réunis aux Séquanes , finirent par être écrasés auprès d' Amagetobria. Les résultats de cette nouvelle victoire furent un asservis- sement plus cruel encore, la cession de moitié de ce qui restait de terres aux Séquanes, et la remise, comme otages, entre les mains d’Arioviste, de tous les enfants des pre- mières familles séquanes et édues. Ce fut vers cette époque que le bruit se répandit rapidement jusqu'à Rome, de l'invasion de la Gaule projetée par les Helvétiens. Rome comprit tout ce que ce mouvement avait de menaçant, et elle se hata d'organiser une ligue de cités gauloises capable de résister à ces nouveaux ennemis. et au besoin de déli- vrer la terre celtique des Germains, ses premiers envahis- seurs. On eut l'adresse de dissimuler aux yeux d'Arioviste cette seconde partie secrète du traité d'alhance-offensive et défensive conclu entre le sénat romain et les cités gau- loises. Arioviste laissa faire, pensant que pendant que les intéressés seraient absorbés par la guerre qui allait éclater, il lui serait plus facile de s'impatroniser plus solidement encore sur les terres qu'il regardait comme sa conquête , et d'en faire à son profit une province comme: celle que les Romains s'étaient appropriée. H est inutile de te rappeler, mon cher ami, la relation si éminemment dramatique de la première campagne de César, campagne dans laquelle il refoula tour à tour les Nelvétiens ct les Germains au delà du Rhin et du Jura. h14 MÉMOIRES Tu as compris que c'est à la ligue gauloise, nouée par les soins du sénat romain, que je propose, avec toute confiance, d'attribuer l'émission des quinaires d'argent au type du cavalier. C'est là, je crois, une attribution qui se démontre d'elle-même. Probablement on peut faire remon- ter l'origine de cette fabrication de monnaies uniformes à la première ligue qui fut écrasée près d'Amagetobria (en l'an 63 av. J. C.). Les quinaires gaulois au type du cavalier auraient ainsi servi de monnaies de confédération jusqu'à l'invasion helvétienne (58 av. J. C.), c'est-à-dire pendant cinq années consécutives : et ceci expliquerait à merveille, à ce qu'il me semble, les différences de style et de fabrique que l’on remarque dans les pièces appartenant à la même cité, aussi bien que la succession des chefs différents inscri- vant leur nom sur les monnaies d'une seule et même peu- plade. Je livre cette hypothèse à ton appréciation. Quoi qu'il en soit, je désire te donner l'énumération de toutes les variétés de types et de légendes que j'ai pu re- cueillir dans les ouvrages de numismatique et dans ma propre collection. Mais avant tout , permets-moi de te rap- peler que plusieurs trésors considérables, composés de ces curieuses monnaies au cavalier, ont été déterrés à Lyon et à Valence. Les pièces composant ces dépôts avaient très-peu circulé ; elles étaient d’une excellente conservation, mais le plus souvent d'une fabrication très-négligée. Des spécimens de presque toutes les variétés se retrouvent isolément dans une grande partie de la France, c’est-à-dire dans tout ]’ Est et vers le Midi. Ceux-là, quand ils sont d'argent pur, sont généralement usés , et ont évidemment circulé longtemps; le plus souvent ils sont fourrés, et sont par conséquent des produits de l’industrie des faux monnayeurs. - .Enfin de la présence à Lyon de plusieurs trésors composés ET DISSERTATIONS. hid de ces monnaies , nous pouvons conclure que ce n’est pas loin de cette ville qu'eut à agir la confédération qui émet- tait ces quinaires à l'apparence romaine. Or la Séquanie était proche. D'un autre côté, la négligence de fabrication des pièces en question en fait, en quelque sorte, des monnaies de guerre. Passons à l'énumération des variétés. Ligue gauloise contre Ariovtste et les Helcétiens. Pièces de ma collection : 4. MBILL devant une tête de chef, avec casque à crinière. Fr. Cavalier; àl'exergue, EBVRO. 2. ANBIL. Tête de Pallas. r. EBWRO. 3. AABILO. RN. EBVWRO. h. A\BILLI. (Derrière la tête.) nr. EBVRO. 5. Id. #. EBVRO. 6. Légende hors du flan. In- cus : Vda. Rn. EBVRO. 7. RICA’. Devant la téte casquée. #. EBVRO. 8. RICA’. Derrière la tête. Rp. EBVRO. 9. DVRNAC. Tête. s. EBVRO. (Fourrée.} 40. DVRNAGVS. Tête. a. DONNVS. (Argent pur et fourrée.) 11. DVRNACOS. Tête. rR. AVSCRO. ( Argent pur et fourrée.) 12. Légende hors du flan. (A-t- elle existé?) x. ASCROCOS. 43. BR—I. Devant la tête. y. BRI. 1h. Autre style. Pièce incusc et confuse devant la téte. gk. BRI. M6 MEMOIRES | 45. Rien devant la tête. 3. B(RI). (Le haut del’R est très-visible. ) 46. BRIC. Pas de collier de perles. y. COAAN. On voit les deux pieds du cavalier. 47. BRICO. 3. COMA. On ne voit pas les deux pieds. 48. BR. x. Légende non portée. 49. BR—I. (Probablement Æ,) #. CO—MA. 20. BR—I. Acheval sur legrénetis. #. C—OMA. 24. BR—I. Collier de perles. 3. COMA. 22. BR—I.A cheval surlegrènetis. 9. COMA. 23. BR—I. a. (C)—OMA. 24. BR—I.%. y. COMA. - 25. Légende non portée. Re (C)—OMA. 26. B(R—I). ¥ 3. CO—MA. 27. On ne voit que BR. # ¥. CO—MA. 28. Cavalier. COMA. Le tout incus. 9. COMA. Cavalier. 29. COSII. 5. COMN. On voit les deux pieds. (Argent et fourrée.) 30. Sans légende. ñ. COM. 31. Sans légende. NH. COMA. 32. Téte. OMA incus. 8. COMA. 33. -(C)OMA. Devant la tête. 3. C-OM. 34. Sans légende. 5. MA. (?) 35. Sans légende. x. (COM—A entre les -pieds de devant). 36. Sans légende. . COM. ñ 37. VIID. Le V sous le nez. x. COMA. 38. V(IID). Le V sous le menton. yy. CO... 39. VIID. | aj. COM. 40, GOOV. 3. (C)—OMA. ET DISSERTATIONS. bi7 hi. COOV. y. COV. 42. Rien; O devant le nez. x. COVI. 43. COOV. Double surfrappe. Ah. ? BI. x. .N Y.... (Gn. Vol.) A5. ROVV. (Lisez MOR.) n. V—OLVN. 46. ROW. (Lisez MOR.) 3. VOLVN. h7. ROVV. (Lisez MOR.) 3. CN. VOL. h8. Manque. x’. CN—VOLsanspoint. A9. Rien. R. CAL. 50. ROVY. R. CAL. 54. Devant la tête CAL incus. rn. CAL. 52. Non marqué faute de flan. n. CVL. 53. MOR. x. CAL. 54. VIRODV. 3. TVROCA. Collection de La Saussaye : 55. PETRVCORI. x. ACINCOVEPVS. Collection de feu M. le marquis de Lagoy : 56. COSII. R. CALITIX. 57. AMBILI. Derriére la téte. A. EBVRO. . 58. DVRNAC. R. EBVRON. Voici maintenant quelques considérations que m'inspire l'étude de cette suite monétaire. 4° Pour moi, les monnaies à la double légende MBIL, ‘MBILO, AABILL , MBILLI et EBVRO, sont vraisembla- blement frappées par le fameux Ambiorix de César; le nom de ce héros aura été altéré comme d'habitude par les Ro- mains; il s'appelait en réalité Ambilorix ou Ambilliorix. Il va sans dire que les quinaires n° 1 sont les plus anciens de tous; le peu d'exemplaires que j'en connais est assez usé, h18 MÉMOIRES et ceux qui proviennent de la grande trouvaille de Lyon sont beaucoup moins bien conservés que tous les autres. 2° Les quinaires à la légende RICA appartenaient à un autre chef éburon, qui s'appelait probablement Rigan- ticus. 3° La rare pièce à Ja double légende DVRNAC et EBVRO me paraît appartenir à un troisième chef éburon du nom de Durnacus. Les Eburons avaient plusieurs chefs à la fois, puisque César nous mentionne en même temps Ambiorix et Cattivol- cus comme marchant à la tète de cette peuplade guerrière. Il n'y a donc rien que de trés-naturel à trouver sur des monnaies éburonnes avec le nom d’Ambiorix les noms de Riganticus et de Durnacus, chefs dont il n est plus question au moment où Cattivolcus paraît au pouvoir; probable- ment ils avaient péri dans les guerres meurtrières auxquelles ils prirent part. k Les quinaires à la double légende de DVRNACVS DONNVS , et DVRNACOS AVSCRO ou AVSCROCOS sont, pour moi, des monnaies émises en commun par deux chefs alliés. L’un est l'Éburon Durnacus que nous avons men- tionné tout à l'heure ; les deux autres sont un Donnus, qui n’est très-probablement que le petit roi, père de Cottius, que nous trouvons mentionné dans l'inscription de l'arc de Suze, et un Auscrocos dont la nationalité nous est in- connue. Remarquons en passant la terminaison en us des noms Durnacus et Donnus, placés sur des pièces que nous sup- posons émises dans le voisinage immédiat des Romains, tandis que nous lisons Durnacos sur les quinaires frappés, je ne saurais dire pour quelle peuplade, par un chef nommé Auscrocos. ET DISSERTATIONS. h19 5° La série des quinaires variés présentant le nom de COMAN est très-considérable. De quel pays ce personnage était-il roi? nous ne le savons pas. Nous trouvons ce nom accompagné des légendes certainement géographiques BR, BRI, BRIC, BRICO, COSII, VIID et COOV. Parfois on voit des deux côtés de la pièce le nom Coman, ou le nom Bri, ou parfois encore on ne lit qu’au revers le nom de Coman, le côté de la tête ne comportant pas de légende. Je ne me hasarderai pas à proposer des applications plus ou moins vraisemblables de ces différentes légerides , et je me bornerai à faire remarquer que de même que la légende EPAD s'applique au nom Epasnactus, la syllabe VIID pourrait peut-être se lire Ves (ontio), aussi bien que repré- senter l'abbréviation du nom des Védiantiens. La légende BR, BRI, BRIC ou BRICO (cette dernière existe bien réellement et j'en possède un bon exemplaire’), ne me paraît pas représenter Brigantium (Briançon) pré- cisément à cause de la forme BRICO. Serait-ce Bricomagus pour Brocomagus ou Breucomagus, la Brumaite d’Alsace, ainsi que le pensait Bouteroue? C’est fort douteux. D’ail- leurs, à priori, je suis disposé à chercher autre chose que des noms de ville dans les légendes gauloises, bien qu’il y ait quelques exceptions certaines, mais en bien petit nombre, par exemple pour Sens et Rouen, Agedincum et Ratumagus. Je rappellerai la légende des pièces de cuivre d’ Epasnactus, le chef arverne, sur lesquelles on lit CICIIDV. 1 Duchalais ( Descript. des méd. gaul., p. 271) décrit une monnaie portant les légendes BRICCA-COMA, et fait remarquer que Bouteroue lisait BRICCO sur une pièce semblable ; mais c'est une erreur. Bouteroue (p. 52) donne la légende BRICO. C'est la légende BRICCA qui n'existe pas réellement. Pel- lerin avait lu BRICCIT. La monnaie n'offre que BRI; le reste se compose de boucles de cheveux et de pendants du collier de la tête casquée. h20 MÉMOIRES BRI. Peut-être y a-t-il quelque liaison entre cette légende et celles de nos quinaires d'argent. La légende COSII, qu'il faut assurément lire COSE, n'a certainement rien de commun avec le Cossium des Vasates. C'est tout ce que j'aurai à en dire. Enfin, la légende COOV, qui accompagne au revers la _ forme COV ou COVI, est, jusqu’à présent, lettre close pour moi. Quant au nom Coman, il ne paraît pas pour la première fois sur nos médailles. Lorsqu'une colonie phocéenne, con- duite par Euxène, vint fonder Marseille, elle aborda sur le territoire des Ségobriges, peuplade gauloise, dont le chef s'appelait Nannos. Euxène épousa la fille de ce Nannos et reçut en dot le territoire sur lequel il était venu prendre terre. Le fils et successeur de Nannos s'appelait Coman, ainsi que tu l'as déjà rappelé à propos de nos monnaies '. Ce nom n'est donc pas d'une forme étrange et qui doive nous étonner. 6° La pièce sur laquelle on lit très-distinctement BI au droit, et N V..... au revers, est dans un état peu satisfai- sant, par suite de la négligence avec laquelle elle a été fabriquée. Tout ce que j'en puis dire, c'est que la syllabe BI, qu'on serait tenté d'appliquer aux Bituriges , pourrait bien n'être qu'une fin de légende, et que l’N et le V du revers rappellent Ja légende CN. VOL du Cneius Voluntillus dont j'ai déjà parlé et dont je vais parler de nouveau. 7° Le nom VOLN pour Voluntillus se trouve écrit ainsi sans prénom ou abrégé en VOL lorsqu'il est précédé du prénom Pompéien CN. Cneius. Du côté de la tête de Pallas paraît constamment la légende ROW, ou mieux ROVV, - 1 Rerue num.. 1856, p. 86. ET DISSERTATIONS. 421 dans laquelle on a proposé de voir le nom de Rome, altéré par le graveur. Cette supposition ne peut être soutenue, et je ne m'y arréterai pas. Si maintenant nous remarquons que cette même légende ROVV se retrouve sur les quinaires offrant au-dessous du cavalier l’abbréviation de CAL, et que de plus sur de très- beaux exemplaires de cette dernière variété, ROVV est rem- placé bien nettement par MOR, nous serons fort tenté de voir le nom des Morins, ou des Armoricains sur toutes ces pièces. M. de Lagoy proposait, en désespoir de cause, de cher- cher dans la légende CAL la syllabe initiale du nom gau- lois de Grenoble : Cularo ou Calaro. Il eût été bien plus rassuré en proposant cette attribution s'il eût eu entre les mains l'exemplaire que je possède et sur lequel on voit très- nettement l’A remplacé, sans doute par une faute de gra- vure, par un V. Et cependant, je ne crois pas à cette expli- cation , parce que je veux bien croire à la présence de deux noms de chefs sur la même pièce gauloise , tandis que je ne crois pas du tout à la présence de deux légendes géo- graphiques. Pour moi donc CAL est un nom d'homme. Est- ce le CALITIX du quinaire à la légende COSII, publié par M. de Lagoy? J'en doute, quoique cette identification soit bien tentante. Quant au Cneius Voluntillus de nos médailles, Duchalais a pris la peine de rechercher dans le Recueil épigraphique de Muratori les inscriptions qui le présentent. Or, il ren- contre sous les numéros M.D.LXVIII, n° 4, et M.CD.XXV, n° 2, les inscriptions suivantes : 422 MEMOIRES DIS MANIB CN. VOLYNTILLO SOPHRO. VOLVNTILLA RODINE PATRONO BENEMEREN ET SIBI FEC. D. M. GN. VOLVNTILLI SESTI FEC CLAVDIA FELICITAS CONIVGI. B. M. Duchalais (Rev. num., année 1847, page 259) cite, à propos de ces deux inscriptions, Voluntilla Rodine, à An- vers, Cneius Voluntillus Sophrus, à Rome, et enfin, Cneius Voluntillus Sestus, à Anvers. Comment se fait-il que les deux noms Voluntilla Rodine et Cneius Voluntillus Sophrus, inscrits sur le même marbre, soient attribués l’un à Rome et l’autre à Anvers ? Il y a évidemment là une erreur qu'il importe de faire disparaître. Remarquons que si l'attribution à Anvers doit être con- servée, la présence de la légende MOR n’a plus rien d’éton- nant, et elle s'applique d'elle-même aux Morins. Gette nation aurait donc suivi l'exemple des Eburons, peuplade de même origine qu'elle, c’est-à-dire essentiellement belge. 8° L'application des quinaires aux légendes VIRODV et TVROCA est bien loin d'être certaine. En effet, il y a eu plus d’une ville gauloise portant le nom de Virodunum ou Viridunum. A laquelle, dès lors, donner la préférence, et, ET DISSERTATIONS. 423 d'un autre côté, que pourrait-on conclure des provenances de monnaies qui sont très-probablement des monetz cas- trenses? Je me hâte d'ajouter que je n'ai jamais entendu dire que la pièce en question ait été trouvée du côté de Verdun. Sans parler du Viriodu..... aulerque qui figure dans une des inscriptions tant discutées , recueillies à la Chapelle- Saint-Eloi', tu as déjà signalé plusieurs fois le nom du gladiateur gaulois VIRIOD tracé sur une muraille de Pom- péi en compagnie du nom VIRIOTAL qui contient aussi un I de plus que le Verotal des monnaies gauloises *. Quant à la légende TVROCA, il paraît fort problable qu'elle repré- sente un nom de chef. 9 La pièce des Pétrucoriens, malgré les dénégations si . mal fondées de Duchalais, est bien lisible et bien classée °. Quant à la légende du revers, la forme CINCONEPVS me déplait d’instinct. Une étude très-attentive de l'unique exemplaire connu m’a conduit à voir ACINCOVEPUS pour Acincoverus, qui me paraît plus acceptable ; mais je m’em- presse de le dire, mon hypothèse n’a absolument rien de probant, et elle est toute de sentiment. 40° J'ai parlé déjà de la monnaie à la légende Calitix. Si cette pièce est bien lue, Calitix serait un chef qui aurait succédé à Coman ou qui, plutôt, aurait été remplacé par celui-ci dans l'autorité suprème exercée sur la peuplade dont le nom est encore caché sous la légende COSII. 41° M. de Lagoy a fait graver une variété des quinaires 4 Ch. Lenormant, Découcerte d’un cimelière meroringien à la Chapelle Saint. Éloi ( Eure), 1854, p. 67, ne V. 2 Revue num., 1856, p. 84, et 1859, p. 101. 3 Voy. Rerue num., 1851, p. 388, pl. XV. A2h MEMOIRES d'Ambiorix offrant devant la tête de Pallas la légende AMBIL, et au revers la légende EBVRO'. Je n'ai jamais vu cette variété, et je dois me borner à la mentionner. 12° Reste enfin le quinaire à la double légende DURNAC et EBVRON, sur lequel on a tant discuté. J'ai eu jadis entre les mains nne pièce semblable, qui s’est perdue. Espérons que quelque jour on en retrouvera un bon exem- plaire plus distinct encore que celui de M. de Lagoy*, et capable de trancher définitivement la question. Tout à toi, etc. F. DE SAULCY. 1 Suppl. à l'Essai de monogr. d'une série de méd. gaul. im. des den. consul., 1856, p. Set pl. n° 1. 4 Essai d'une monogr, d'une série de mod. gaul., etc., 1847, pl. n° 18. ET DISSERTATIONS. h25 NOTE SUR LES NOMS VOLUNTILLIUS ET AMBILLIUS. Il est bien évident que Duchalais n'avait pas, en consul- tant le Thesaurus de Muratori, pris ses notes avec le soin nécessaire en pareil cas. Il cite Voluntilla Prisca au lieu de Voluntilla Prima; il attribue à Anvers une inscrip- tion de Rome, enfin il transcrit inexactement deux noms importants, écrivant Voluntillus Sophrus et Voluntilla Ro- dine au lieu de Voluntillius et Voluntillia. L'inscription qui contient ces deux noms a été copiée sur une urne sépulcrale dont Montfaucon nous a conservé un bon dessin (An/. explig. suppl. V. pl. 50, p. 122). Cette urne, en forme d'édicule, avait été trouvée en 1610 à An- vers lorsqu'on jetait les fondements du fort Saint-Michel sur l’Escaut, et sa face antérieure présente, entourées d’un : cadre en relief, les lignes que voici : = — DIS MANIB | CN. VOLVNTIL‘IO | SOPHRO i VOLYNTIL'IA. RODINE | | PATRONO.BENE.MEREN ' | | msmne ET.SIBI.FEC | nm | | La gravure de Montfaucon, dans laquelle l'artiste s’est efforcé d'exprimer la dimension relative et la forme de chaque 1860. — 6. 29 A26 . MEMOIRES caractère, ne présente pas les chances d'erreurs de la typo- graphie. On peut donc en accepter la teneur avec confiance. Dans l'inscription provenant de Rome (Murat. 1425-2), que Duchalais cité à tort comme trouvée à Anvers : D. M. GN. VOLVNTILLI SESTI FEC CLAVDIA FELICITAS CONIVGI B M Je nom Voluntilli au génitif a pu faire illusion; mais c'est un nom de famille accompagné, comme dans l'épigraphe qui précède et dans celle qui suit, d’un prénom et d'un surnom. il est donc évident qu'il faut lire le nominatif Voluntillius. Nous citerons encore, d'après Fabretti (p. 9), l'inscription tirée d'un columbarium : CN. VOLVNTILIVS PETRONIAE SPERATUS ZOSIMENI SIBI ET CONIVGI.OLL. II. et d'après Reinesius (p. 853, cl. XVII, n° 138), celle-ci trouvée à Capoue : VOLVNTILIO L.L NIZEPHORO 0. H. S. S. Enfin nous trouvons dans le beau recueil de Doni (cl. V, 481) ce fragment copié à Civita-Nuova en Istrie : -P.VALERIO.L.F. PVP lim! VIR CONIVGI P. VALERIO.P.F.PVP TIRONI FILIO VOLVNTILIA PAVLA ET DISSERTATIONS. h27 Je crois devoir rappeler encore ici ce que j'ai déjà dit au sujet des consonnes que l’on écrivait simples et qui se prononçaient doubles. Voluntilius est donc la même chose que Voluntillius ‘. I nous reste trois inscriptions, l’une provenant de Florence (Nov. thes., 1512-8), une autre d’Antium (Grut , 4069-3) : “VOLVNTILLA VENERI ANTIOPA VESTINAE SEX. VALERIVS L.IVLIVS KARICVS T.F.CLV GVM. VOLVNTILLA ~ SEVERA VXORE la troisième copiée à Rome (Nov. thes., 4425-4) : D.M. VOLVNTILLAE PRI MAE -CONIVGI PHSSI MAE.C.IVLIVS EPAPHRODITVS _ FEC. LIB. LIBER TAB.Q. POSTERIQVE EORVM.IN.F.PED VI.IN AGR.P. VI Fabretti (cap. 1, p. 48) fait observer avec beaucoup de raison, à propos de l'inscription d’Antium publiée par Gruter, que la correction de Voluntilla en Voluntilia paraît d'autant plus naturelle que Voluntilia Severa se trouverait avoir deux surnoms contre l'usage. Cette remarque s’ap- plique, on le voit clairement, aux noms de Voluntilla An- tiopa et de Voluntilla Prima. On sait avec quel peu de soin Muratori, qui nous donne deux de ces inscriptions, a enregistré certains textes. L’in- scription de Florence devrait contenir un datif ; quant à celle de Rome, elle appartient à la femme de Caius Julius Epa- 1 Rerue num., 1857, p. 182; 1858, p. 333; 1859, p. 122; 1860, p. 180. — Mém. de la Soc. des antiq. de France, t. XXI, p. 373. 428 MEMOIRES phroditus, dont elle mentionne les affranchis. Cette femme, étant de condition libre, devait avoir un nom de famille. Ou dans le nom de Velunti/la un I a été oublié par le co- piste, ou bien cet I a été pris pour un L, ou enfin la hau- teur de ce caractère L n'a pas été bien rendue par la ty- pographie, car la hampe prolongée sert à exprimer un I qui complète la syllabe, ainsi que cela se voit dans cette inscription de Pola en Istrie : AVRELAE LEVCIPPE CONIVGI L.ANNIVS.P.T VITALI.SVAE Comme sur les monnaies gauloises, VOLVNT paraît re- présenter le même nom que CN.VOL, nous devons inférer de la présence du prénom que VOL et VOLVNT nous offrent un new de famille et doivent être lus Voluntillius. C'est par suite de cette observation que je n’ai pas fait figurer ce nom dans la liste de noms terminés en illus que j'ai publiée récemment’. C'est encore par une raison analogue que eeite liste ne contient pas le nom d'Ambillus que j'aurais pu tirer des légendes AMBILL, AMBILLI et AMBILI. J'avais été averti par l'existence de deux inscriptions, l’une trou- yée à Narbonne (Gruter, 960-4) : | VIV M.AMBILLIVS M. LIB. GAL SILVANVS SIBI ET SVIS IN... XXV 1 Recue num., 1860. p. 184 et suiv. ET DISSERTATIONS. h29 l'autre recueillie à Modène (Gruter, 520-2, et 1178-2) : Q-AMBILIVS T.F POL.TIRO MVTIN MILES COHORT VII PR > GRAECINI. VIXIT ANN XXX MILITAVIT ANN XIF ARBITRATV MYRMELIAE VERECVNDAE SORORIS T. F. F Marcus Ambillius Silvanus et Quintus Ambillius Tiro ont un prénom et un surnom; Ambillius est donc un nom de famille. La monnaie publiée par Duchalais (Descript. des méd. gaul., p. 206, pl. III, n° 1, et Rev. num., 1847, pl. XI, n° 4) porte AMBILO ‘. Elle paraît d'une fabrication un peu pos- térieure à celle des deniers sur lesquels ou lit AMBILLI, et ces deux noms peuvent fort bien être différents. Pour peu que l’on ait étudié l’onomastique , on sait que dans une famille on trouve des séries de noms formés du même ra- dical, avec des variantes dans les:suffixes ; ainsi, pour n'en mentionner qu'un court exemple entre mille, nous lisons- dans une inscription de Metz : POLLINIS BELLINI ET IVCVNDI LIBERTI S BELLIANVS BELLIO IVCYNDVS.F.C + Malgré cette double publication d'une monnaie appartenant’é la Biblio- thèque impériale de Paris, M. le marquis de Lagoy imprimait encore on 1856 & « Les légendes TAMBIL et AMBILO, il est bon d’en faire ici l'observation, n’existent pas au Cabinet impérial; ce sont, à ce qu'il paraît, de fausses leçons de Pellerin, » Suppl. à Essai de monogr. d'une série de med, gaul. im, des den: consul., p. 6.. 430 MEMOIRES Les noms gaulois terminés en Q-ONIS sont fort nombreux ; j'en citerais plus de cent pris dans les inscriptions, tels que Billo, Gennalo, Grigalo, Cucalo, Ateulo, Anatello, etc. Dans tous les cas, Ambillius et Ambilo ne représentent pas plus Ambiorix que Ambigatus, Ambatusius, Ambactus, Ambibius, Amber, Ambimogidus, ou méme Cisiambus. Le nom d’Ambiorix nous a été conservé par César, dont l'exactitude est bien connue; Dion Cassius et Paul Orose l'ont trouvé dans les manuscrits des commentaires dont ils ont fait usage, et la forme intérieure de ce nom se trouve encore attestée par une inscription recueillie près de Vou- tenay, sur la voie romaine d'Avallon à Auxerre : [A]VG SAC DEO MER [CJVRIO AM ....VS CELSVS [A]MBIORI..S EX VOTO SOL....8 M ll n'y a donc aucune raison pour supposer que César ait altéré le nom du chef des Eburons qui aurait été Ambillio- riz, ainsi qu'on l’a plusieurs fois déjà donné à entendre. Si nous connaissions bien exactement la valeur, le sens. le mode de formation des noms gaulois, nous pourrions décider si Ambilliorixz et Ambilorix (car il faudrait ad- mettre ces deux variantes) peuvent être des équivalents d'Ambiorix. Nous saurions si ces deux noms sont possibles ou s'ils répugnent à la langue de nos ancêtres. Quand il s’a- git de noms grecs, par exemple, la grammaire indique ce ET DISSERTATIONS. h3i qu'on peut lire et comparer. Mais en fait de noms gaulois, notre science est fort restreinte; il nous faut avancer avec les plus grandes précautions sur le terrain des faits, et n’admettre que ce qui est évident pour les yeux. On peut cependant remarquer que le mot armoricain ambil (sign. qui est le premier, qui est à la tête) paraît entrer dans les noms Ambillius et Ambilo, tandis qu Ambiorix, qui a bien certainement existé, ainst que le prouve l'inscription de Voutenay, peut être formé à l’aide de la particule privative am. Ce n’est là qu'une hypothèse; mais elle sert à prému- pir contre des rapprochements que la philologie peut un jour désavouer. Au reste, ces considérations n’affaiblissent en rien les ingé- nieux arguments sur lesquels mon savant ami, M. de Saulcy, fonde la classification des monnaies de la ligue éduenne. Quant au nom inscrit au revers de la monnaie d'argent des Petrucorii, j'avoue qu'après un examen attentif de Ja pièce qui le porte, je demeure dans une grande incertitude au sujet de ce qui précède le premier C. Je serais assez disposé à croire que ce nom appartient à la famille que j établis ict : Excincomarus (inseription de Nimes) ; Excingius (inscription de Briançon); Excingillius (inscription de Nîmes); Excingilla (inscriptions de Narbonne et de: Nimes); Excinsus (inscription de Chalon sur-Saône). Mais qu'on lise Exinconepus ou Acincovepus, on doit toujours rapprocher la dernière partie de ce nom de la ter- Minaison qui distingue le Trouceteivepus que nous montre une inscription de Ladecy près Genève. Ap. DE LONGPERIER.. h32 MÉMOIRES ÉTUDES DE NUMISMATIQUE ASIATIQUE. (Pl. XVIII.) me ll n'y a guere de branche de la numismatique ancienne plus intéressante que celle qui embrasse les médailles frappées par les peuples qui parlaient la langue phéni- cienne et les dialectes qui en dérivent; car chaque nou- velle légende déchiffrée avec certitude, établit un fait nouveau dans le domaine de l’histoire ou de la philologie, et précise, par des documents contemporains, des asser- tions plus ou moins coutroversées des auteurs classiques. Étudiée depuis longtemps déjà, bien qu'avec d'assez faibles résultats, la numismatique phénicienne n'est véri- tablement entrée en voie de progrès scientifique que dans ces dernières années; longtemps arrêtée par le petit nombre des monuments connus, l’inexactitude des dessins qui en avaient été publiés, par les difficultés inhérentes à l'alphabet phénicien, et enfin, il faut le dire, par le manque de critique des auteurs qui avaient abordé le su- jet, cette étude importante commence enfin à reposer sur des bases plus solides. C'est à M. le duc de Luynes que revient l’honneur de lui avoir donné une impulsion nouvelle; et l'ouvrage où il a réuni presque tous les monuments connus de l’Asie Mineure et de la Phénicie restera pendant longtemps la ET DISSERTATIONS. h33 mine où chacun ira puiser des renseignements sûrs et des reproductions exactes des médailles. Le premier il a établi l'existence de monnaies à légendes araméennes frappées aux noms de satrapes persans, et bien que plusieurs de ces attributions aient été contestées avec raison, néanmoins le principe établi par lui n’a pas été ébranlé, et les noms de Pharnabaze, de Téribaze et de quelques antres personnages sont définitivement acquis à la science. Depuis la publica- ” tion de son ouvrage, l'attention a été attirée sur cette branche de la numismatique, et les travaux de MM. Blau et Lévy en Allemagne, les articles de MM. le comte de Vogüé et François Lenormant, publiés dans cette Revue, contien- nent tous, soit des documents nouveaux, soit des critiques et des observations, dont nous aurons à tenir compte dans le cours de cet article. Amené, dans le cours de mes re- cherches sur l’histoire de l'Asie Mineure, à examiner les documents de toute nature qui peuvent jeter quelque jour sur l'histoire si obscure de la péninsule, j'ai dû soumettre à un examen approfondi les résultats obtenus par mes de- vanciers, et rechercher quelle était leur véritable valeur historique ; le but de cet article est de constater les faits bien établis, de faire connaître quelques pièces inédites, et enfin de proposer quelques interprétations nouvelles. l. Téribaze. 4. stan. Jupiter debout appuyé sur son sceptre, et portant de la main droite un aigle qui bat des ailes. Dans le champ, la lettre T. x» Ormuzd vu de face à mi-corps, tenant une couronne et la fleur de hom. — M. Poids, 9,98. (Mus. Brit., pl. XVIII, n° 4.) h34 MÉMOIRES 2. Mème légende et mèmes types sans Ja lettre T. — MR. Poids, 105,36. (Mus. Hunter, pl. XVIII, n° 2.) L'attribution au satrape Téribaze ou Tiribaze, due en pre- mier lien à M. le due de Luynes (Num. Satr., p. 1), a été universellement acceptée, et nous servira de point de départ. Mais des trois exemplaires de cette rare médaille, publiés dans l’ouvrage que nous venons de citer, le premier seul offre une légende complète ; encore la troisième lettre, |’ tod, est-elle d’une forme indéeise, le coin n'ayant pas bien mordu dans cet endroit. Nous sommes heureux de pouvoir en publier un quatrième exemplaire, appartenant au Musée Hunter, où toutes les lettres sont d’une parfaite netteté, et grâce auquel on peut se rendre compte de la forme de l’iod sur l'exemplaire du Musée Britannique. La ferme de cette lettre, clairement établie par ce nouveau monument nu- mismatique, est d’une grande importance pour la paléo- graphie des médailles à légende araméenne frappées en Asie Mineure, et nous permettra d'expliquer plusieurs lé- gendes, restées jusqu'à présent sans interprétation satis- faisante. Téribaze était satrape de l'Arménie occidentale et de _ quelques peuplades voisines au temps de la retraite des. Dix Mille. (Xen., Anab., 1V, 4, 4; 4, 18; À, 24; VII, 8, 25.) Quelques années plus tard il commandait les forces persanes dans l’ouest de l'Asie Mineure, et conclut en 387 avec le spartiate Antalcidas, la fameuse paix qui porte le nom de ce dernier ; enfin il commanda eonjointe- ment avec Oronte l’expédition contre Evagoras de Cypre; . vers la fin de cette guerre il tomba en disgrace, rentra en- suite en faveur et finit par périr dans une conspiration contre Artaxerce. Les monnaies qui portent son nom ne ET DISSERTATIONS. | 485 peuvent pas avoir été frappées en Arménie, où l'on ne par- lait pas une langue sémitique ; par la même raison, elles ne furent pas fabriquées pour circuler dans les provinces occidentales de la péninsule, qui d’ailleurs se servaient d'un système monétaire très-différent. Par conséquent, elles appattiennent à l’époque où Téribaze commandait en Cypre (386-380); il tirait alors ses approvisionnements de la Ci- licie, et fit sans doute frapper à son nom une partie des deux mille talents qu’il obtint du Grand Roi pour les frais de la guerre. M. le duc de Luynes a déjà signalé la ressemblance de ces monnaies avec celles de Nagidus; or cette ville est située en face de la côte de Cypre et ser- vait peut-être de quartier général aux troupes persanes de terre ferme; j'incline donc fortement à croire que ces pièces ont été frappées à l'atelier de Nagidus à l’époque de l'expédition contre Evagoras. Tout s'accorde pour indiquer cette localité ; la fabrique, le poids et l'emploi d'une lé- gende araméenne appropriée aux populations sémitiques de la Cilicie. (Diodor., XV, 2-5.) HM. Pharnabaze. Toutes les médailles de ce satrape ont été publiées par M. le duc de Luynes, et je n’en ai point de nouvelles à faire connaître; mais j'ai quelques observations à présenter sur les circonstances dans lesquelles elles ont été émises. La première et la plus ancienne a été frappée dans Ja propre satrapie de Pharnabaze; elle porte la marque dis- tinctive de l’atelier de Cyzique, le thon ou pélamys, et c'est à tort qu'on l’a crue frappée à Lampsaque; car la pé- lamys placée à l’exergue est l’attribut exclusif des mon- naies de Cyzique, en or, en argent et en cuivre, depuis les 436 MÉMOIRES plus anciennes jusque sous les premiers empereurs ro- mains. La marque de l'atelier de Lampsaque est presque toujours, bien que moins exclusivement que la pélamys à Cyzique, la partie antérieure d'un Pégase, et nous en ver- rons plus loin un exemple remarquable. La médaille de Pharnabaze frappée à Cyzique, étant des- tinée à circuler chez des populations helléniques ou helléni- sées, porte une légende grecque; toutes les autres sortent de l'atelier de Tarse, et étant destinées aux peuples sémi- tiques de la Cilicie, portent les légendes araméennes sui- vantes : A. 17259. 2. on yas. 3. on 472399. 9 Tindys. Dans la dernière légende, M. de Luynes, trompé par un point qui se trouve après la première lettre sur l’exem- plaire de la Bibliothèque impériale, avait lu 55 au lieu de 52, et il en avait conclu que Pharnabaze avait porté le titre de roi; mais la véritable leçon est 753, le mot Cilicie s'écrivant indifféremment sur les médailles +5n ou 52; la première forme se trouve sur celles d’Abdsohar, la se- conde sur celles de Datame et sur une monnaie bilingue que nous donnerons plus loin, et toutes les deux sur celles de Pharnabaze. | Toutes les monnaies de Pharnabaze proviennent du même atelier, celui de Tarse, bien que quelques-unes seulement portent le nom de Baal-Tars; elles sont toutes de la même fabrique et frappées apparemment dans un intervalle de temps assez court. Mais ce n'est pas comme satrape de la province que Pharnabaze a émis ces monnaies, car rien n'indique qu'il ait jamais eu d'autre satrapie que celle de ET DISSERTATIONS. 437 Dascylium, qu'il tenait de son père, et qui passa à ses des- cendants; c'est en qualité de commandant en chef des forces persanes en Cilicie et dans les provinces voisines. En 394, Pharnabaze désigné par Artaxerce pour coopérer avec Conon, poursuivait de concert avec lui la guerre ma- ritime contre les Lacédémoniens; la flotte qui sous leurs ordres remporta la bataille décisive de Cnide (394), avait été équipée dans les ports de la Cilicie et de Cypre. De 392 à 390, Pharnabaze, avec deux collègues, Abrocomas et Ti- thrauste, dirigeait les opérations contre |’ Egypte révoltée. (Isocrat., Panegyr., p. 69. — Rehdantz, Vita Iphicrat., p. 241.) Il revint alors dans sa satrapie de Dascylium, et eu repartit en 388, pour aller à la cour de Suse épouser une des filles d’Artaxerce. Les forces de l'empire persan, employées de 386 à 380 contre Evagoras, roi de Cypre, et ensuite contre les Cadusiens révoltés (379), furent bientôt tournées de nouveau contre l'Égypte, et le comman- — dement de cette expédition fut confié une secondé fois à Pharnabaze; plusieurs années se passèrent en préparatifs, et ce ne fut qu'en 374 que la guerre commença; l'expédi- tion réussit d'abord, mais par suite des dissensions qui éclatèrent entre les généraux persans et l'athénien Iphi- crate, ce dernier quitta le service de Perse, et l'Égypte dut être évacuée. Dans cette campagne, Datame et ‘Fithrauste étaient associés à Pharnabaze, et après le rappel de ee der- nier, Datame obtint le commandement en chef. (Diod., XV, 8-11, 29, 41-4h4.—Nepos, Datam., 3-5.) Depuis cette époque, il n’est plus question de Pharnabaze. C’est à l’occasion de sa seconde expédition contre l'Égypte, que Pharnabaze fit frapper les monnaies qui portent son nom. Bien qu’Acé. en Palestine, fat le rendez-vous ou le quartier général des troupes, la flotte était fournie princi- 438 MÉMOIRES. palement par les villes de la Phénicie, de la Cilicie et de Cypre ; et pendant les années qui s écoulérent en prépara- tifs, on peut supposer qu'il y avait à Tarse un centre im- portant de constructions maritimes et d’ approvisionnements militaires. Je place donc l'émission de ces monnaies entre les années 378 et 373, plutôt que dans les deux autres occasions où Pharnabaze commanda dans les parages de la Cilicie ; la fabrication et le style de ces médailles, l'absence de toute trace de carré creux, se rapportent parfaitement à cette époque , et la ressemblance parfaite avec celles de Datame, qui fut son collègue et son successeur, ajoute beaucoup de poids à cette supposition. Voici maintenant deux médailles frappées à la même époque, et pour la province de Cilicie, mais sans le nom de Pharnabaze. 4, KIAIKION. Tête virile casquée. A Tête de femme de face, les cheveux épars. — Æ. Poids, 105,49. (Collection de M. le général Fox, pl. XVIII, n° 3.) 2. (K)IAIKION 45>. Même tête casquée. ‘7. Méme tête de femme. — Æ. Poids, 105,59. (Musée Hunter, pl. XVIII, n° 4.) Les légendes de ces deux pièces intéressantes paraissent complètes; mais bien qu'elles ne portent pas de nom de satrape, elles se rattachent évidemment, par leur style et par leurs types, aux monnaies de Pharnabaze et de Datame, et peuvent avoir été frappées par l'un ou l'autre de ces per- sonnages. IT. Datame. Il y a déjà quelques années que j'ai proposé d'attribuer à Datame ( Bull. archéol. de l'Athén. franç., 1856, p. 13) ET DISSERTATIONS. 439 les nombreuses monnaies sorties de l’atelier de Tarse, et portant une légende où on avait lu le nom de Dernès. Cette attribution nouvelle a été admise par M. le duc de Luynes ( Bull. archfol., ib., p. 18) et par M. le docteur A. Lévy. (Zeitschrift der Morgenl. Geselisch.¢ XIV, p. 23); mais d'autres savants ne l'ayant pas acceptée, et ayant proposé à leur tour de nouvelles lectures .de la même légende, je me crois obligé de revenir sur ce sujet, pour combattre leurs conclusions et fortifier la mienne par de nouveaux arguments. Dans tous les cas, il ne sera pas inutile, dans un travail d'ensemble comme celui-ci, de reprendre cette difficile question de numismatique. M. Fr. Lenormant a proposé de lire son, Tiridamo ; (Catalogue Bchr., p. 159), et M. Blau osn, Tirinamo; (Num. Achæm. , p. 12); la lecture que j'avais suggérée est 1537n, Tadnaino. Bien que ces trois leçons produisent des mots assez différents, il faut avouer qu’elles sont toutes les trois presque également soutenables au point de vue épigraphique, tant est grande la difficulté de distinguer certaines lettres de l'alphabet araméen. Sous ce rapport je n'ai rien à objecter à la lecture de M. Blau, la seconde lettre pouvant être tout aussi bien un qu'un 7; mais celle de M. Fr. Lenormant ne me parait pas tout à fait aussi ir- réprochable. 1] est vrai que sur certains exemplaires des monnaies de Datame, la deuxième et Ja troisième lettre de la légende sont figurées d’une manière identique, soit à cause de l'incurie de l'artiste, soit à cause de l’exiguité de la place dont il disposait : mais sur les plus belles pièces qui portent son nom, celles au type de l’archer assis, ces deux lettres sont nettement distinguées, et si la seconde peut être un * ou un 7, la troisième, qui a la forme 7 doit être un 3 plutôt que toute autre lettre; car le jambage hho MÉMOIRES transversal part du haut de la haste, et ceci n'a jamais lieu sur les monnaies ciliciennes pour le * ou le +. Mais il y a une objection insurmontable à mes yeux, tant à la lecture de M. Fr. Lenormant qu'à celle de M. Blau ; ces deux savants comparent les noms Tiridame et Tiriname , que l'on ne rencontre pas dans les textes, aux noms bien connus de Tiribaze et de Tiridate. Or, le mot Tiribaze ou Té- ribaze s'écrit en araméen \r2"n , et les autres noms propres formés de la même manière doivent évidemment commencer par les lettres sn; par ce motif, les lectures proposées par ces deux savants ne me semblent pas admissibles. Depuis que j'ai attribué à Datame les médailles qui nous occupent, j'en ai trouvé une confirmation inattendue ; c'est une pièce au type de Sinope, que je donnerai plus loin, por- tant son nom en caractères grecs ; Datame a été certaine- ment satrape de Paphlagonie ; et si, comme Pharnabaze à Cyzique, il a frappé des monnaies dans sa propre satrapie, il a pu comme lui, également, en frapper en Cilicie, dans d'autres circonstances. Ici se présente la question qui nous a déjà occupé à propos de Pharnabaze ; en quelle qualité Datame faisait-il fabriquer des monnaies à l'atelier de Tarse? Était-ce comme satrape ou comme investi de pouvoirs temporaires et ex- traordinaires ? J'ai cru autrefois que c était comme satrape héréditaire de Cilicie que Datame battait monnaie à Tarse ; mais un examen plus approfondi de la question, et une connaissance plus exacte de l’histoire de cette époque, ont fait naître dans mon esprit quelques doutes à cet égard. Cornélius Népos, à qui l’on doit presque tous les détails que l’on possède sur la vie de Datame, affirme que s'étant distingué dans une guerre contre les Cadusiens, où son père Camissarès trouva la mort, il recut la satrapie de ce der- ET DISSERTATIONS. AhA nier, c'est-à-dire la portion de la Cilicie voisine de la Cap- padoce et habitée par les Leuco-Syri. Comme toute la Cilicie orientale est limitrophe de la Cappadoce, j'avais cru qu'il s'agissait ici de la Cilicie campestris, c'est-à-dire de celle dont Tarse était la capitale. Mais alors que signifie cette restriction, « habitée par les Leuco-Syri? » En voici, il me semble, l'explication. La portion de la Cappadoce, située sur le versant sep- tentrional du Taurus, et séparée de la Cilicie proprement dite par cette chaîne de montagnes , s'appelait aussi Cilicie (Strab., XII, 4; Herodot., I, 72); elle forma plus tard une des dix préfectures du royaume de Cappadoce; elle était arrosée par le haut Halys et c'est là qu'était située Mazaca , la capitale, bâtie au pied du mont Argée, et elle dut sans doute de bonne heure à cette circonstance une importance particulière. Je crois que c'est cette Cilicie que gouvernaient Camissarès et Datame , et ceci explique plu- sieurs circonstances obscures dans la vie de ce personuage, pourquoi il est appelé satrape de Cappadoce par Diodore (Diod., XV, 94) et pourquoi plusieurs actions de sa vie agitée ont pour théâtre cette province; c'est pour cela, sans doute, qu'il fut chargé par Artaxerce, au milieu des préparatifs d'une campagne contre l'Égypte, d'aller châtier la révolte du Cataonien Aspis , qui était son voisin et peut- être son rival héréditaire. Il y a un autre point relatif à Datame, qui mérite un examen particulier. Quelle était sa nationalité ? Selon Cor- nélius Népos, son père Camissarès était Carien, et obtint sa satrapie en récompense de sa valeur; mais le nom de - Datame paraît être purement persan, tandis que celui de Camissarès a une physionomie plutôt sémitique que per- sane. I] est certain que les rois de Perse accordaient quel- 1860,— 6. 30 hh? MEMOIRES quefois à des étrangers des principautés en récompense de services éminents; cependant il semble plus probable que Camissarès appartenait à une de ces petites dynasties de satrapes héréditaires, si nombreuses en Asie Mineure ; il avait épousé la sœur du roi Thys de Paphlagonie, et le nom de son fils Datame était celui d'un des. ancêtres de la famille royale de Cappadoce, contemporain ou un pev antérieur 4 Camissarés. Ces deux circonstances indiquent des relations anciennes avec les familles princiéres du pays, plutôt que la position d’un aventurier carien nou- vellement élevé au pouvoir. Quoi qu'il en soit de ces conjectures, tous les numisma- tistes ont remarqué la ressemblance qui existe entre les monnaies de Pharnabaze et celles de Datame, toutes appa- remment frappées à Tarse. Celles de Datame sont de trois types différents. | 1° wostn. Tête virile casquée. x. Tête de femme de face. Ces pièces sont entièrement pareilles à celles de Pharna- baze , et n’en diffèrent absolument que par la légende. 2 spin. Archer assis. x. 71n0ÿ. Baal-Tars assis , le tout dans un cercle cré- nelé. | Ces pièces sont d’un trés-beau travail. 3° 35> s051n. Deux figures debout. r. Comme Je précédent. Ces pièces paraissent un peu plus anciennes que les au- tres; quelques-unes présentent des traces de carré creux. Le mot 75> est écrit en petits caractères dans le coin infé- rieur du champ à gauche ; et on ne le voit que sur les exemplaires dont le flan est assez large pour reproduire le type en entier. ET DISSERTATIONS. hh3 Ainsi la disposition des légendes est identique avec celle des monnaies de Pharnabaze, et l'un des types est absolu- ment le méme. Une telle coincidence ne peut étre fortuite, et il faut en cunclure que les pièces de Datame ont été frap- pées dans des circonstances semblables à celles qui ont motivé l'émission des monnaies de Pharnabaze. Or Datame. succéda directement à Pharnabaze dans le commandement de l'expédition contre l'Égypte, expédition qui fut constam- ment à l'ordre du jour pendant les vingt dernières années du règne d’Artaxerce Mnémon, et qui occasionnait chaque: fois des préparatifs immenses. C’est en leur qualité de com- mandants en chef, et comme disposant souverainement des ressources de certaines provinces, que Téribaze pour la guerre de Cypre, Pharnabaze et Datame pour celle d'Égypte, battaient monnaie l’un à Nagidus, les deux autres à Tarse. Dans ces cas si graves, le roi de Perse confiait à ses lieute- pants des pouvoirs extraordinaires , et exprimés par le ti- tre de Kpzvos qui fut conféré à Cyrus le jeune. Ces monnaies forment donc une classe à part, qu’il faut soigneusement distinguer de celles qui portent le nom de différents souverains indigènes, vassaux et tributaires de la couronne de Perse ; et on remarquera, à l'époque dont nous parlons, qu'à Tarse les monnaies locales proprement dites, tant municipales que royales, portent toujours le mot 7 qu'on ne rencontre jamais sur celles des trois satrapes persans que nous venons de nommer. IV. Aldsohar. . Quoique les monnaies d’Abdsohar aient déjà été, dans la Revue cette année, l'objet d’un travail approfondi, dd à la plume de M. Fr. Lenormant, nous sommes forcé de les. Ahh MÉMOIRES discuter de nouveau, tant nous sommes loin de pouvoir embrasser les opinions de notre savant collaborateur. Je dirai tout d'abord que j’adopte pour la difficile légende de ces monnaies (Voyez Luynes, Num. Satr., pl. IF et IV), la lecture proposée par M. Blau (Num. Arhæmenid., p. 5) on ininrtay Sy 15 vin, et j'espère pouvoir prouver que c'est la seule qui réponde aux exigences de la critique pa- léographique. Ce n'est que petit à petit que la lumière s’est faite dans l'esprit de M. Blau ; il avait proposé successivement deux lectures fort différentes (Zeitschrift der Mergent. Gesellsch., 4852, p. 481, et 1855, p. 81), et ce n’est que dans son dernier travail qu’i? est arrivé à celle qui nous paraît devoir être la lecon définitive ; mais il se borne à constater son opinion , et il ne l’a pas appuyée de toutes les preuves dont elle a besoin pour se faire accepter. C'est cette lacune que nous nous proposons de remplir. Commençons par le mot 14 | #, premier mot de la lé- gende, et qui se trouve sur presque toutes les monnaies autonomes de. Tarse du 1v° siècle. M. Blau et M. A. Lévy {Phænizische Studien, 1857, p. A1) ont reconnu l'identité de cette légende araméenne, avec celle qui se trouve en ca- ‘ ractères phéniciens sur une grande darique du Cabinet de France, publiée par Gesémius ( Monum. Phen., pl. XXXVI, G.) et par M. Ch. Lenormant dans cette Revue (1855, pl. Hl, n° 2), et qui est figurée ainsi : A YY #2 Or, tout le monde la lit 752, et effectivement, sauf la troisième lettre qui est toujours douteuse, elle ne peut être lue autrement. I] s'agit de prouver que cette légende est la même que celle des monnaies de Tarse, ou, en d'autres termes, que le caractère 4 représente la lettre iod,. dans l'alphabet araméen, comme le caractère Z dans l'alphabet phénicien. ET DISSERTATIONS. 445 La seule monnaie araméenne sur laquelle on trouve un iod incontesté est celle de Téribaze , et, jusqu'à présent, la forme de cette lettre précisément était restée incertaine a cause de l'état défectueux des trois exemplaires connus ; je viens maintenant d’en publier un quatrième (pl. XVIH, n° 2) où la légende est d’une netteté parfaite, et où l'iod a la forme 4. Nous verrons plus loin que ce caractère a la même valeur sur des monnaies de Sinope et de la Cappa- doce. Je ne connais point d'autres monnaies où on le ren- contre; mais il se trouve fréquemment sur d’autres mo- puments araméens, le papyrus de Turin, l'inscription de Carpentras, et enfin sur celle du Sérapéum de Memphis, rapportée il y a peu d'années en France par M. Mariette. Les premiers commentateurs de ce document curieux, ayant pris pour un caph le caractère en question, né pouvaient tirer aucun sens raisonnable de l'inscription ; M. E. Renan, le premier, en reconput la véritable valeur et grace à cette découverte il put lire avec certitude les mots Osiris et Apis (Journal Asiat., 5° série, t. VII, p. 414). Sur tous ces monuments , l'iod à exactement la forme qu'il a sur les moanaies de Tarse. li est singulier que, mème après la découverte de M. Blau, on ait persisté à prendre cette lettre pour un caph dans la légende d’ Abdsobar ; car la dernière lettre de la légende, un caph ineontestable, présente une forme toute différente 4, et il est sans exemple que les lettres varient à ce point dans une seule et méme légende. Je ne nie pas, du reste, que le caph ait quelquefois une forme qui se rapproche beaucoup de celle de Fiod; mais on peut toujours l'en distinguer avec certitude en tenant compte des remarques suivantes. Parmi Jes légendes des monnaies ciliciennes il n'y a que le nom de la province, écrit tantôt Jon, h&6. MÉMOIRES tantôt 75>, qui fournisse des exemples certains de la lettre caph. Sa forme présente, suivant les médailles, les variétés que voici: #7, jamais 4; l'iod est presque tou- jours plus petit que les autres lettres, jamais plus grand ; ea barre transversale coupe par moitié la barre verticale, et souvent elle est inclinée en bas ; le caph, au contraire, a une haste qui dépasse presque toujours les autres lettres et qui n'est jamais moindre ; son jambage transversal est presque toujours dirigé en haut, jamais incliné vers le bas. Dans l'étude de ces questions, on n’a pas distingué assez nettement l'alphabet usité en Phénicie, de celui qui était employé à Tarse, et par les populations araméennes de la Cilicie et du reste de l'Asie Mineure ; il y a cependant entre les deux de notables différences. L'inscription d’Eschmu- nasar fournit l'alphabet complet, tel qu'il était usité à Sidon, et en le comparant aux légendes des monnaies de Tyr et de Gébal, on se convaincra aisément que c'était là l'alphabet usité dans toute la Phénicie. Quoique les mon- paies ciliciennes ne donnent pas un alphabet araméen com- plet, on en connaît un assez grand nombre de lettres pour pouvoir constater les différences qui existent entre les deux séries ; et notamment pour les lettres beth, zain, tod, ain. Toutefois, je dois rappeler ici une particularité épi- graphique assez singulière ; c'est que souvent sur les mon- naies araméennes on trouve dans le champ des lettres iso- lées appartenant à l'alphabet phénicien; telles sont les lettres ain, resch, et aleph, sur les pièces frappées à Tarse (Num. Satr., pl. IV et pl. VIII.). De même sur les monnaies de Sidé, attribuées à Dernés et Syennésis, il se trouve des lettres isolées appartenant à un alphabet com- plétement différent de celui de la légende principale. ET DISSERTATIONS. hA7 Revenant à l’iod, je ferai remarquer que la forme de cette lettre, tant dans les légendes ciliciennes, que dans celles de la Phénicie, suit généralement celle du zain ; Viod est un zain avec un trait horizontal de plus. A Gébal, et sur la grande darique, on trouve Z et Z. Sur le lion d’Abydos — 2 et 2. De même à Tarse | — J et 4. . De toutes ces considérations il me semble résulter que la forme araméenne de l’ivd 4 est celle usitée en Cilicie , et que le premier mot de la légende d’Abdsohar doit être lu tip ou 172. Je passe au second mot qui a été lu avec raison v par MM. Blau et Lévy; sa lecture dépend de Ja forme du se- cond caractère, et d’après ce que nous venons d'exposer, il ne peut être qu'un tod. ‘+ est une particule araméenne connue des grammairiens , mais qui paraît ici pour la pre- mière fois sur les monnaies; elle se trouve également dans l'inscription du lion de bronze récemment découvert à Abydos'. Le troisième mot est une antre particule bien connue 5y, sur laquelle tout le monde est d'accord; il en est de même du quatrième mot, le nom propre 11772y, Abdsohar. Viennent ensuite deux caractères qui ont été compris fort diversement. Le premier ne se trouve pas sur tous les exemplaires, et comme le dit fort bien M. de Luynes, res- semble plutôt à un x mal tracé, qu à tout autre caractère ; Je papyrus de Turin offre des exemples d’alephs formés de la même manière ; et c'est ainsi que MM. Blau et Fr. Le- oormant l’ont lu. Nous nous rangeons du mème avis, sans ‘1 Ce monument intéressant sera publié incessamment par M. le eomte Mel chior de Vogüé. hh8 MEMOIRES cependant regarder la question comme définitivement réso- lue; car plusieurs des médailles d’Abdsohar portent au re- vers un aleph isolé de la forme ordinaire, et sur les mon- naies araméennes de Sinope et de la Cappadoce, dont nous parlerons plus loin, cette lettre a également sa forme habi- tuelle. La présence sur la monnaie d'Abdsohar de deux alephs différents, ne peut s'expliquer qu'au moyen de la remarque que j'ai faite plus haut, au sujet des lettres phé- niciennes isolées, que l’on rencontre quelquefois à côté de légendes araméennes. J'arrive à la lettre suivante, que MM. de Luynes et Fr. Lenormant prennent pour un ghimel, et M. Blau pour un vav. C’est cette dernière valeur qui nous paraît la véritable. En effet, la lettre en question a exactement la même forme que la lettre finale du nom de Téribaze, et se retrouve avec la même valeur sur les monnaies de la Cappadoce, que pous examinerons bientôl; et cet examen nous apprendra en même temps que la forme araméenne du ghimel est la même que celle de l’alphabet phénicien. On obtient donc en résumé une légende ainsi concue : yon ainrtay Sy 07 ot Mais si nous avons pu établir la valeur des lettres par un enchaînement rigoureux de comparaisons et de rapproche- ments paléographiques, nous serons beaucoup moins affir- matif quant au sens de la légende, et nous nous bornerons à quelques observations générales, sentant combien nous sommes loin de posséder les connaissances philologiques nécessaires pour former une opinion là où tant d'hommes éminents sont en désaccord. La légende 119 se trouve sur trois classes de monnaies d'un poids complétement différent, celles de Tarse frap- ET DISSERTATIONS. . AAQ pées avant Alexandre, celles frappées sous les Séleucides , et sur une grande darique ; elle ne peut donc indiquer une valeur, et elle ne peut avoir qu’un sens religieux, ou bien une signification banale comme «monnaie, argent, etc. » M. le docteur A. Lévy (Phæœniz. Studien., 1857, p. 40), M. Fr. Lenormant et M. de Longpérier (Rev. num., 1860, p. 20), sont d'accord pour lui donner, du moins sur la grande darique, une signification empruntée à la religion persane, et traduisent par «le Mazdéen, l’adorateur d’Or- muzd. » Mais du moment que l’on admet l'identité de lé- gende de la darique et des pièces de Tarse, il devient difficile de soutenir cette interprétation ; car on ne voit pas ce qui pourrait motiver la présence d’une pareille expres- sion sur toutes ces pièces araméennes et phéniciennes, qui n'ont aucun rapport avec le culte d’Ormuzd, et dont quel- ques-unes ont été frappées par un prince dont le nom est purement sémitique. Et d’ailleurs, comment se fait-il que ce mot manque sur les monnaies sorties des mêmes ate- liers, et portant le nom des satrapes persans, Téribaze, Pharnabaze et Datame, qui étaient certainement des ado- rateurs d'Ormuzd ? M. Blau , de son côté, compare 119 au zend mizda, qui signifie «solde, » et traduit « monnaie pour la solde frappée par Abdsohar.» Ne connaissant pas la langue zende. je ne puis discuter le sens proposé par M. Blau, qui fonde sur la présence supposée d’un ou deux mots persans sur les mon- paies araméennes, tout un petit système de philologie. Je: ne vois aucun motif pour admettre des mots persans dans les légendes de monnaies frappées pour des populations sémitiques , et pour faire accepter une pareille hypothèse, il faudrait des arguments bien autrement solides que ceux que M. Blau a mis en avant. L’explication de ce mot mys- A450 MÉMOIRES térieux reste donc, selon moi, toujours à chercher, bien que le sens doive être « monnaie courante, argent, solde, » ou quelque chose de semblable. D'ailleurs, il ne faut pas perdre de vue qu'on peut lire "159 aussi bien que 150, et peut-être cette leçon donverait-elle un sens raisonnable : c’est un problème que je laisse à résoudre aux savants hé- braïsants de la France et de I’ Allemagne. Je ne m’arréterai pas aux particules et 5y, qui sont bien connues ; je passe aux deux lettres 1x qui suivent le mot say. M. Fr. Lenormant prend l'aleph pour l’initiale du mot 17x, «seigneur; mais je craindrais de le suivre dans cette voie périlleuse ; l'hypothèse des abréviations est une ressource désespérée, qui n'a encore réussi à aucun des savants qui se sont occupés d’épigraphie phénicienne ; cest un nouvel élément d'incertitude ajouté à ceux - qui existent déjà en trop grand nombre, et la saine critique doit le rejeter sans pitié. L’aleph manque sur quelques exemplaires des médailles d’ Abdsohar ; si donc cette lettre pouvait être admise ou négligée dans la légende, elle n'a- vait qu'une valeur secondaire et n'était pas nécessaire à la prononciation ; c'est ce que M. Blau a fort bien aperçu et il regarde les lettres 1x ou purement et simplement comme la désinence du mot Abdsohar, qu'il écrit Abdsohara. Sans vouloir tirer de cette terminaison en x ou \ les mêmes conclusions que M. Blau, je crois qu'elle ne soulève aucune difficulté sérieuse ; elle n’est pas réservée aux noms propres d’origine persane, comme on l'a prétendu ; on trouve, il est vrai, an, 172399, 1037N; mais on trouve aussi le nom sémitique de la déesse syrienne nny1ny écrit avec un 4 fi- nal sur les médailles, et le nom persan nvsx écrit sans terminaison aucune, et M. Fr. Lenormant a cité lui-même la légende d'une pierre gravée, d'origine juive (Rev. num., ET DISSERTATIONS. Ab4 1860, p. 44), sur laquelle deux noms purement sémitiques, se terminent par un tap, wyT2y 12 wnans5. Il serait facile de multiplier les exemples. Au surplus, en présence du trés- petit nombre d'anciennes formes araméennes que l’on con- naît, il est au moins téméraire d'affirmer que telle ou telle inflexion grammaticale est impossible; et lorsqu'on trouve sur un monument une désinence nouvelle et singulière, du moment que la valeur des lettres est bien établie, il faut Yadmettre comme un élément nouveau de la grammaire araméenne, jusqu'à preuve du contraire. | En résumé, il nous semble que l'explication proposée par M. Blau doit être acceptée, sauf en ce qui regarde le pre- mier mot; et, dans tous les cas, le sens de la légende doit être purement et simplement «Monnaie d’Abdsohara de Cilicie. » | Maintenant, qui est cet Abdsohar, plutôt prince indigène que satrape de Cilicie? M. Blau a rapproché ce nom du nom propre phénicien Badétwpos , cité par Josèphe ; mais M. de Luynes y a reconnu avec raison le nom propre Ab- dissarès, appartenant à un prince connu seulement par les médailles, et qui régna probablement sur la Sophène, au uc siècle avant l'ère chrétienne (Cf. Mionnet, 1V, p. 455. — Bullet. archéol. de l'Athén. Franç., 4855, p. 101). Le nom d'Abd-issarès paraît être formé de la même manière que celui du père de Datame , Cam-issarès ; et je ne serais pas éloigné de croire que tous ces princes appartenaient à des familles royales indigènes qui régnaient sur différents dis- tricts de la Cappadoce et de la Cilicie, et qui se maintinrent après la conquête d'Alexandre de même que les Mithridate du Pout et les Ariarathe de la Cappadoce. J’ajouterai enfin un rapprochement assez singulier ; outre le roi Abdissarés , il y eut aussi un prince nommé Samès , appartenant à la 452 MEMOIRES même dynastie, et connu par les médailles seulement (Cf. Mionnet, IV, p. 454). Or sur de nombreuses pièces de Tarse à peu près contemporaines de celles d'Abdsohar, on lit la légende op ; ce mot, qui a été interprété de différentes manières, ne serait-il pas le nom d'un prince appelé Samés? et de même que sur les monnaies grecques on trouve un Samès et un Abdissarès, n'y aurait-il pas eu à Tarse un Sam et un Abdsohar? V. Autonomes de Tarse. 4. Cavalier marchant à gauche, la main droite levée; sous le cheval, la croix ansée. ¥. Deux guerriers debout en face l'un de l'autre ; ils ont l'arc et le carquois sur le dos, et tiennent des deux mains chacun un javelot planté en terre devant eux ; ils sont vétus de tuniques dont l’étoffe semble couverte d’écailles ; dans le champ {a légende tin, et une lettre isolée qui ressemble à un I grec. Le tout dans un carré creux. Æ. Poids, 105,64. (Musée Hunter. Voy. pl. XVIII, n° 5. ) 2. Cavalier marchant à gauche, et tenant de Ja main droite la fleur de hom; à l’exergue une légende de deux ou trois lettres, peut-être tn. | x. Archer agenouillé et tirant de l’are ; 31 est coiffé d’une tiare dentelée , et il porte un vêtement rayé descendant jusqu'aux genoux; derrière, la croix ansée. Le tout dans un carré creux. Æ. Poids, 105,88. (Musée Hunter. Voy. pl. XVIII, n° 6.) 3. Personnage barbu debout et vêtu d’un long manteau, s'apprètant à frapper de son poignard un lion dressé de- vant lui. x. Guerrier debout, coiffé d’une tiare dentelée, tenant ET DISSERTATIONS. 153 une lance de la main droite, et la croix ansée de la gauche, Devant lui, la légende TEP25I; derrière, la légende sn et la fleur de hom. Æ Poids, 105,89. (Musée Hunter : deux exemplaires. Voy. pl. XVIII, n° 7.) Jusqu'à présent on ne connaissait, en fait de monnaies autonomes de Tarse, antérieures à celles qui portent le nom de Baal-Tars, que la médaille archaïque publiée par M. le duc de Luynes. Les pièces que je viens de décrire rem- plissent la lacune entre cette médaille et celles du sv‘ siècle ; elles sont toutes les trois d’un beau style, mais avec un reste d’archaisme. Les guerriers représentés sont des soldats persans; ils portent le costume décrit avec tant d'exactitude par Héro- dote (VII, 64). Iepi per riot region elyoy tiapxc xxhsouévous, Tilou, dntryÉac, mepi de To cpa xIdvas yemsswToUs TowiÂous, Aemidos ardrpéerc du CAuqedéo;. alls avaient sur la tête des chapeaux d'étofle molle, appelés tiares, et, sur le corps, des tuniques à longues manches d’étoffe rayée, et ayant l'apparence d’écailles de fer disposées comme celles d’un poisson. » Ces détails se reconnaissent parfaitement sur la première médaille. La seconde est une variété de celle décrite par M. de Luynes (Num. satr., pl. XII), et attribuée par lui à Soli; il paraît y avoir une légende à l'exergue, dont on voit deux lettres, et qui représente peut-être le mot 3; mais la première lettre a une forme insolite , et je n'oserais affirmer que ces lettres ne sont pas le résul- tat accidentel de cassures dans le coin. Quai qu’il en soit, la ressemblance de cette médaille avec le n° 1 la rattache évidemment à l'atelier de Tarse. La troisième pièce est fort intéressante à cause de sa légende bilingue ; la forme TEPSI était déjà connue par la belle médaille du Cabinet de France à la légende TEPZIKON, hbk _ MÉMOIRES et représentant Hercule combattant le lion (Pellerin, Peupt. et villes, pl. XLI, n° 4.—Mionnet, Suppl., VII, pl. VII, n° 8). Ces deux pièces ont été frappées à des intervalles assez rap- prochés , et montrent d'une facon remarquable comment s'opérait la transition du type assyrien du personnage s'apprétant à percer le lion de son poignard, au type hel- lénique d'Hercule combattant le même animal. On aura sans doute remarqué que le même type assyrien est figuré sur Ja médaille publiée par M. de Luynes, d'après Dutens (Num. satr., pl. V), et attribuée par lui à. un satrape, Bogès ou Bagæus. Nous avons retrouvé l'ori- ginal de cette pièce dans la collection Hunter, où se trou- vent réunies toutes les médailles de Dutens et de Duane, et nous la publions de nouveau ici, d’après l'empreinte que nous en avons prise; en voici la description, ainsi que celle de quelques autres pièces analogues. 4. Personnage barbu, s’apprétant à frapper de son poi- gnard un lion dressé devant lui. 3. nays. Vache allaitant son veau. Le tout dans un carré creux. Æ. Poids, 105,78. ( Musée Hunter. Voy. pl. XVIII, n° 8.) 2. Vache allaitant son veau, tournée à droite, et la tête retournée en arrière. Le tout dans un grènetis circulaire ; il y a peut-être une lettre au-dessus de la tête de la vache. 4. Hercule assyrien frappant de sa massue un lion qu’il tient suspendu par la queue. Le tout dans un carré creux. A. Poids, 106,64. ( Musée Hunter. ) 3. Méme type d’Hercule et du lion. a. Vache allaitant son veau; au-dessus un monogramme. Le tout dans un carré creux. MR. Poids, 405,71. (Musée Hunter.) . ET DISSERTATIONS. AbS La seconde et la troisiéme piéces ne sont que des variétés de celle déjà publiée par M. de Luynes ; quant à la pre- mitre, on remarquera que Ja troisième lettre de la légende a été mal dessinée par Dutens; c'est un nun parfaitement régulier et non un ghimel, dont la forme est toute diffé- rente. La médaille est trés-bien conservée, de sorte que la lecture nayn est certaine; mais que signifie cette lé- gende, reproduite apparemment en monogramme sur d'autres pièces? L’identité du type du droit avec celui de la médaille bilingue de Tarse, la rattache sinon à l'atelier de cette ville, du moins à quelque atelier peu éloigné; mais la forme des lettres, Vain circulaire et le beth fermé en haut , accuse une origine plutôt phénicienne qu’araméenne. Le poids de la pièce est celui de toutes les monnaies con- temporaines de la Cilicie, de Cypre et de Phénicie, et elle appartient certainement à une de ces provinces; mais je n'ai aucune attribution raisonnable à proposer, et je laisse à de plus habiles le problème à résoudre. W. H. WaDDINGTON. (La suite dans le prochain numéro.) A56 MEMOIRES MONNAIES DE MACON. (Pl. XIX, XX et XXL.) § As, César cite Mâcon, au pays des Eduens, lorsqu'il raconte comment il organisa ses quartiers d'hiver, après la prise d’Alesia et la défaite de Vercingetorix '. Cette ville eut des comtes amovibles dont le premier, Warin , vivait sous Louis le Debonnaire. Le comté devint héréditaire en 920, à la mort de Raculfe, qui le transmit à Albéric Ie, mari de sa fille Etolane. Vers 995, Otte Guillaume, comte de Bourgogne, s'em- para du Maconnais; il avait épousé Ermentrude, veuve d'Albéric II. Macon resta dans sa maison, jusqu'au mois de février 1239, où le comte Jean de Braine le céda au roi de France , saint Louis *. 1 Q. Tullium Ciceronem et P. Sulpicium Cabilloni et Matiscone in Æduis ad Ararim, rei frumentariæ causa, collocat. Comm. lib. VII, cap. 90. 2 Ce contrat s'exprime ainsi :« Ego Johannes, Comes Matisconensis et ego AolesComitissa ejus uxor, notum facimus tam presentibus quam futuris quod nos escambivimus, vendidimus et quitavimus in perpetaum carissimo domino nostro Ludovico regi Francorum illustri et heredibus suis comitatum matisco- uensem Cum ejusdem comitatus pertinentiis in regno Francie et quiquid ha- bebamus in partibus illis et in Burgundia in regno Francie, sit de feodo, sit de domanio per quemcumque modum haberamus, sive per hereditagiam, sive per conquestum, sive per alium modum, nihil in predictis penitus nec jus, nec ET DISSERTATIONS. h57 En 1359, le dauphin Charles, régent du royaume, érigea le comté de Mâcon en pairie et Je domha à Jean son frère, comte de Poitiers. Jean mourut sans enfants en 1416, et Macon fit retour à la couronne. Par le traité d’ Arras, 1435, le Mâconnais fut abandonné à Philippe le Bon, duc de Bourgogne. A la mort de Charles le Téméraire, 1477, aliud retinentes et dominus Rex propter istud escambium propter istam vendi- tionem et propter istam quitacionem nobis donat decem milia libr. turonens., in denariis et mille libr. turonens. de redditu in Normannia assisitas, vide- licet quingentas libras ad scaquarium Pasehe et quingentas libras assisitas in terra extra fortericiam et extra castrum ; et si in terra quam dominus Rex nobis assideret, esset aliquod berbergagium sine fortericia, illud herbergagium nostrum esset; et omnia predicta nos tenemur deliberare et garantire eidem domino Regi ubique contra omnes gentes ; et si forte in predictis aliquid con- tingeret quod non possemus garantire, illud teneor escambire domino Regi ad valorem, in terra mea Francie in feodo ejusdem domini Regis; et de predictis decem milibus libr., dominus Rex tradet nobis ad presens quinque mille libras turonens.; et sciendum est quod si istud escambium ista venditio et ista qui- tacio non placeret eidem domino Regi potest se penitere, sine se meffacere erga nos a nativitate santi Johannis Baptiste infra tres annos, et si penitent nos tenemur reddere domino Regi predicta quinque milia librar., tali mode quod illud quod receperit de dicta terra ultra custus computatum erit in paga nostra; et si dictas quinque mille libras non habuisset de exitibus illius terre nos eidem defectum reddere teneremur; et si de exitibus dicte terre plus rece- pisset, illud nobis redderet. Si autem idem dominus Rex valt tenere escambium venditionem et quitacionem ad terminum predictum vel ante, tenetur nobis reddere alias quinque mille libras ad eumdem terminum supradictum, et hoc quod exierit de illa terra, suum erit, et faciet nobis assidere ad eumdem termi- num dictas mille libras redditus, sicut superius continetur, et reddet nobis pro quolibet anno de dictis tribus annis transactis mille libras turonens., si illi anni sint transacti. Hee omnia prout superius continentur ego Johannes comes et ego Aales comitissa uxor ejus super sacrosancta jaravimus nos firmiter et in- violabiliter tenere et servare, quod ut perpetue stabilitatis robur obtineat, pre- sentes litteras sigillorum nostrorum munimine fecimus confirmari, Actam anno domini millesimo ducentesimo tricesimo octavo mense februarii. » Scellé en cire verte, avec lacs de soie verte. Le sceau de la comtesse a disparu. Au dos est écrit : Littera Johanis Comitis Matisconensis et Aales ejus uxoris deescambio et vendicione Comitatus Matisconensis. Arch. del’emp., J. 252, n°2. 1860.— 6. 31 h58 MÉMOIRES Louis XI le réunit de nouveau à la couronne. Enfin en 1526, François I* le céda à Charles-Quint, mais le contrat de vente ne reçut pas d'exécution. Depuis cette époque, Macon n'a plus eessé d’appartenir à la France. Vorci ce qu'on sait de la chronologie des possesseurs du comté de Macon, jusqu'à Jean de Braine : . On trouve avant 886, dans l'Art de vérifier les dates, des comtes bénéficiers nommés Warin, Wilbert et Bernard: vient ensuite Letalde et enfin Raculfe. Puis le comté de- vient héréditaire et appartient successivement à Albé- ric I, 920-942; Letalde I, 942-971?: Albéric II, associé, 962-971 ? ; seul, 971 ?-975; Letalde II , 975-979 : . Albéric HI, 979-995; Otte Guillaume, 995-1027?; Gui, associé, 995-1007 ; Otton, jusqu'en 1049; Geoffroi , 1049- 4065; Gui Il, 1065-1078; Guillaume Is, 1078-1085; Renaud I* et Etienne; Guillaume II, l'Allemand, avec ses cousins Renaud II et Guillaume; plus tard, Guillaume IV; Guillaume III, l'enfant, fils de Guillaume II, avec Renaud II; Guillaume IV, 1427-4456; Girard, 14156-1184; Guil- laume V, 4484-1224 ; Alix et Jean de Braine, 4224-42309. § 2. Oa rencontre fréquemment à Mâcon des bronzes apparte- nant aux Eduens; mais il ne paraît pas qu'il ait existé une monnaie propre à cette ville. On sait combien sont rares les noms de lieu dans l’épigraphie monétaire de l’époque gau- loise. Les premières monnaies dont nous aurons à nous occu- per, sont des trientes mérovingiens. Viennent ensuite des de- niers, dont quelques-uns semblent appartenir à la fin de la deuxième race, mais dont la plupart ne se classent qu'à la pé- riode comprise entre le commencement du x° siècle, où le ET DISSERTATIONS. h59 comté devint héréditaire, et l’année 1289, où il fut cédé à : saint Louis. Bien qu'on yrencontre les noms des rois Charles. Louis , Lothaire, Robert, Henri et Philippe, ils ont été frappés le’ plus souvent, non sous l'autorité directe du roi, mais par les comtes *, en vertu de concessions qui exigeaient sans doute, comme dans l'atelier voisin de Tournus, que le nom du souverain fût reproduit, même après sa mort, ou qu’on fit mention de son autorisation *. Les monnaies de Mâcon, sous la deuxième et la troi- sième race, présentent des types très-variés, empruntés souvent, dans l'intérêt de leur circulation, hors de France, et, par exemple, au royaume de Bourgogne ou d'Arles, et même à l'empire. Sous Jean de Braine, en 1224, la monnaie de Mâcon était prise à raison de 20 sols pour 24 sols tournois, celui-ci étant à 42 deniers”. Il n'est pas question de la monnaie de Macon dans l’acte de cession de 4239. Ç 3. A partir de 1239 jusqu au cominencement du xvi' siècle, où il fut transféré à Lyon, l'atelier monétaire de Mâcon a dû fonctionner directement pour la couronne, sauf sous le comte de Poitiers (1359-1416), et sous les ducs de Bour- 1 On a prétendu que les évêques de Macon avaient eu le droit de frapper monnaie; M. de Barthélemy ( Statistique de Saône-et-Loire, p. 428) a fait, dès 1838, justice de cette hypothèse. * Voir la concession faite à l’abbaye de Tournus, en 915, par Charles le Simple; voir aussi les monnaies de cette abbaye portant le nom de Lothaire ou Permissione regis. 3 La monnaie de Mâcon, Matisconensis moneta, est citée dans des Jettres du même Jean de Braine, adressées à Joceran, sire de Brancion.— Cf. Trés. des chart., 183, B. Mascon, n° 1. 460 . MEMOIRES gogne de 4436 à 1477. Il est difficile de reconnaître les monnaies royales qui y ont été frappées depuis saint Louis jusqu’à la fin du règne de Charles VI; mais, à partir de cette époque, l'usage des différents s'est régularisé, .et Mâcon a eu son point secret *. Delombardy décrit, dans le catalogue de la collection Rignault, une obole anglo-fran- çaise, avec point sous le I de Henricus*, et la classe à l'atelier de Mâcon, sans dire sur quoi il se fonde. M. A. de Barthélemy * ne cite pas Mâcon parmi les villes où on frappa monnaie au nom de Henri V ou de Henri VI, et M. Poey d'Avant pense que Dijon a été le seul atelier de la Bourgogne d’où soient sorties des monnaies anglo-fran- çaises *. | SA. Le cartulaire de saint Vincent renferme, sous les n* 448 et 450, deux actes, de 1034 et de 1060, dans lesquels in- tervient un monétaire du nom de Gislebert. Le premier commence ainsi : « Notum sit omnibus quod Gislebertus monetarius in commuandum misit canonicis S. Vincenti vineam que est sita in pago Matisconensi, m villa Foutanilias (Fontenailles sur Saint-Clément-lés-Macon ) usque ad annos trigenta pro trigenta solidis denariorum, que termina- tur...» On lit dans le second : «Sacrosancta Dei ecclesia sancti Vincentii martyris que fundata est infra meenia Matisconis. Ego Gislebertus monetarius et uxor mea Emel- trudis, donamus pro remedio animarum nostrarum et geni- ' Cf. A. de Barthélemy, Manuel, p. 64. 2 Lecointre-Dupont, Hist. monétaire de la Normandie et du Perohe, p. 81 et pl. V, fig. 9. 3 Manuel, p. 65. & Monnaies féodales de France, t, II, p. 132. ET DISSERTATIONS. GA toris mei Martini et genetricis mez Engeltrudis, quoddam mansum cum vinea, in pago Matisconensi, in agro Salor- niarcense (Salornay) in villa Fontanilias...... Data per manum “eens mense Marcii (sic) die Jovis, Henrico rege regnante . Il existe ‘de nombreux documents, postérieurs à 1239, où il est question de monnaies. En 1267, dans une trans- action entre saint Louis et l’évêque, ce dernier renonce à un hommage qu'il prétendait lui être dû par le roi, ainsi qu'aux droits qu’il percevait sur le vin et Je péage, mais conserve deux deniers par trousseau entrant en ville *. En 4310, un sieur du Courtenay cède à Philippe le Bel 40 livres mâconnaises sur le péage *. Deux ans après, le chapitre de Macon vend au roi son droit d'un denier pour chaque livre de monnaie fabriquée dans le comté de Mâcon‘. On trouve la liste de ces documents dans l’excel- lent recueil dirigé par M. Louis Paris *. M. Lacroix, à qui je dois la communication de la plu- part des rares monnaies que je publie aujourd'hui, a bien voulu me faire parvenir les extraits qu’il a recueillis de quarante-huit chartes relatives au monnayage royal et aux agents qui y ont été employés, depuis le règne de Philippe de - Valois jusqu’au commencement du xvi‘ siècle, où Louis XII transféra l’atelier à Lyon‘. Le plus ancien de ces titres est 1 Communiqué par M. de Barthélemy, sur copies fournies par M. l’abbé Çu- cherat. 3 Trés. des ch., 183, B. Mâcon, n° 7. 3 Clair., Trés. des ch., vol. 367, 107. * F. Harlay, n°48, fol. 101.—Dupuis,518.—Trés. des chartes, 183, Mâcon, n°8. % Cabinet historique, 1860, p. 65 et suiv. 6 M. Lacroix compte publier plus tard un travail étendu sur la monnaie de Mâcon, de Cluny, de Tournus, etc., dans lequel il donnera tn extenso les docu ments que je me borne à signaler aujourd'hui, 462 MÉMOIRES la confirmation par Philippe VI, en 4337, «des exemp- « tions, » accordées par Charles le Bel, «au maître de la « monnaie de Macon, à ses ouvriers, à lenrs femmes et fa- « milles, de toutes autres juridictions que celle du général «de la monnaie, si ce n’est en cas de larcein, meurtre « ou rapt, etc. » D’autres sont relatifs aux luttes entre le personnel de la Monnaie et les échevins, qui voulaient le faire contribuer à certaines charges. Les derniers consacrent les circonstances dans lesquelles eut lieu la translation de la Monnaie à Lyon. Cette mesure, décidée en principe par un arrêt de 1414, n’était pas encore exécutée en 1499; elle avait excité les réclamations les plus vives de la part du magistrat de Mâcon et de celle de l'archevêque de Lyon. Les échevins faisaient valoir que « leur ville était du propre domaine du roi, à qui seul appartenait la juridiction à la réserve de la rue Franche, qui relevait de l'évèque, et que le plus grand des priviléges accordés par saint Louis à Mâcon, lorsqu'il en eut fait l'acquisition, était la fabrication des monnaies. » Ils ajoutaient que si les mines sont plus près de Lyon que de Mâcon, les chemins qui conduisent dans cette dernière ville sont pius sûrs; que, d’ailleurs, l'argent des mines n’occupe pas la Monnaie pendant plus de deux mois, et qu'on n’y travaille, le reste du temps, que du billon....... Quant à l’archevèque, il insistait surtout, dans sa protestation , sur ce que l’ouverture d’un atelier royal à Lyon détruirait les priviléges monétaires concédés à son siége par les empereurs, et confirmés par les rois de France. L'atelier monétaire n'a pas toujours été maintenu à Macon même, avant d’être transféré définitivement à Lyon. On lit en effet dans un article de M. A. de Barthélemy’ que le + Statistique de Saône-et-Loire, p. 428, ET DISSERTATIONS. A63 denier par livre fabriquée, accordé à l’évêque Guichard de Germolles, par un arrêt du parlement, devait se percevoir sur la monnaie fabriquée, soit à Macon, soit au bois Sainte-Marie. On ignore dans quelles circonstances a fonc- tionné ce deuxième atelier. 6 5. Monnaies mérovingiennes. N° 4. MATASCONE. Buste à droite, la tête ceinte d’un diadème de perles. #. RAMNISILVS MONITA. Les deux premières lettres sont liées et le premier jambage est rogné, ce qui ne per- met pas de reconnaître si le nom commence bien par un R, un D ou un M. Dans le champ, une croix haussée sur trois degrés et accostée des sigles M et A. — Bon or. Pesant 4,28 (pl. XXI, n° 4). Ce triens a été trouvé dans le département de l'Ain il y a une dizaine d’années et acquis par M. Sirand, qui m’en a communiqué l'empreinte. Il appartient aujourd'hui à M. Charvet. N° 2, MATASCONE FET. Buste diadémé à droite. y. IVSE MONETARIVS. Croix sur un globe, accostée des lettres M et A. — Triens. Pesant 4#°,25. (Collection Charvet , pl. XXI, n° 2.) La bibliothèque de la ville de Mâcon possède un triens semblable , mais moins bien conservé (pl. XIX , n°4). Le nom insolite Juse ou Jose, qui se lit sur ce triens, est sans doute l’abrégé de Josephus '. Ne 3. J'ai vu à Turin, dans le Musée numismatique de J’Académie des sciences, un beau triens au même type et 4 Barthélemy, Statistique de Saéne-et-Loire, p. 428, AG MÉMOIRES également en or fin, sur lequel la légende du revers com- mence au-dessus de la croix. Lelewel et M. Cartier avaient donné ce triens comme por- tant MATALONE’. N° 4. MATASCONE FET. Buste à droite, la tête ceinte d'un diadème de perles. #. .... ISILVS ET IVSE MOS. Croix sur uu globe, accostée des lettres M et A. — Tiers de sou. Or. Pesant 15,28. ( Collection Charvet, pl. XXI, n°. 3.) Cette précieuse monnaie présente l'association des noms des deux monétaires RAMNISILVS et IVSE. Les trientes qui précèdent, portent le nom de la ville au droit et ses initiales au revers. Cette répétition se rencontre quelquefois dans les monnaies mérovingiennes, par exemple à Lyon, à Châlon, etc. ; lorsque le nom commençait par la syllabe MA, comme à Mâcon, Marsal? et Saint-Jean-de-Mau- rienne *, elle avait l'avantage de donner à la pièce quelque ressemblance avec le numéraire de Marseille, qui jouissait d'un grand crédit. $ 6. Monnaies carlovingiennes et types immobilisés. Les monnaies que nous allons décrire dans ce paragraphe et dans le suivant, sont en général trés-rares; plusieurs sont uniques. Duby n'a donné, sous le titre de Mâcon, que deux pièces, dont l’une n’est pas de cette ville; M. de Barthélemy, qui a consacré, en 1838, trois pages à la nu- mismatique de Mâcon dans la statistique de Saône-et-Loire, ne décrit que le denier au nom de Charles et ceux au nom de 1 Num. du moyen dge, pl. 1V, fig. 6, et Revue num., t. V, p. 230. | 2 Voir mes Recherches num. sur le nord-ouest de la France, pl. VI, fig. 1. 9 Recueil de 920 monclaires, pl. XXX, fig. 9. ET DISSERTATIONS. 465 Philippe, timbrés d’un N ou d’un S; enfin M. Poey d’Avant, énumérant , en 4853, dans le catalogue de sa collection, ce qu’il connaît de cet atelier, n’ajoute au contingent de M. de Barthélemy qu'un denier de Henri I°". CHARLEMAGNE. CAROLYS, en deux lignes horizontales. | x. M AI C N dans les cantons d’une croix, dont le cœur est évidé de manière à formerun O. Deux points se voient aux extrémités de chaque branche; un autre au centre. —Argent. (Collection de M. Drouet. ). M. Hucher, à qui on doit la connaissance de ce denier *, attribue dubitativement à Macon; il voit dans les lettres MAIÏCN, combinées avec l'O central, MAICON , abréviation de MATISCON. Nous ne pensons pas que la consonne T ait pu être omise au profit de la voyelle 1 ; si donc la pièce est bien de Mâcon, il faut qu'elle porte MATCN, ce qui fait MATACON, comme sur les mérovingiennes. Le dessin de M. Hucher ne donne en effet qu'une figure incomplète de cette lettre, dont la tête semble sortir du champ, et qui pourrait par conséquent être un T*. Les types des monnaies suivantes, pl. XIX, n°° 2 et A, et pl. XX, n° 4, aux noms de Charles, de Louis et de Lothaire, ont dû prendre naissance sous les derniers carlovingiens de ce nom; mais les exemplaires, qui en sont venus jusqu'à nous, appartiennent en partie, par leur style et leurs ca- ractéres , à des fabrications posthumes. 1 Revue num., l'e série, t. XI, p. 183 et pl. X, fig. 15. + M. de Longpérier (Cat. Rousseau, p. 111) n’admet pas l'attribution de ce denier à Mâcon; il prend la légende par la ligne inférieure et y lit CNOMAN (Cenomanis). La leçon que je propose et à laquelle se range M. Hucher, serait peut-être de nature à lever les doutes, sielle ne reposait pas sur l'existence un peu problématique de la consonne T. A66 MEMOIRES Voici la description de ces piéces : CHARLES LE SIMPLE; TYPE IMMOBILISÉ. + CARLVS EX, de droite à gauche; au centre, une croix à branches épaisses et pattées. 9. MATISCON CI. Dans le champ un monogramme con- fus ‘, ou plutôt une croix tréflée lors du poinçonnage du coin. Caractères larges, mais dénotant une monnaie frappée assez longtemps après la mort de Charles le Simple, à un type adopté sans doute de son vivant”. — Argent. Pesant 1e",253, (Collection Lacroix, pl. XIX, n° 4.) Cette monnaie rappelle par son style les plus anciens des petits deniers portant Carlus rex et Bledonis*. Monnaie de restitution au nom de Louis. LYDOVICVSII. Croix à branches égales. y. MATISCO CIVITAS, de droite à gauche; dans le champ, un monogramme inexpliqué, formé des lettres V, 0, S et d’un X ou d’une croisette. — Bon argent. Pesant 05,696 ; flan assez épais. (Collection Lacroix, pl. XIX, n° 2. ) ' M. Poey d’Avant voit dans cette figure une dégénérescence du chrisme, Descrip. des mon. de sa col!., p. 301. * Si, comme l’a admis M, de Barthélemy (Statistiq. de Saône-et-Loire, p. 429), ce qui se voit sur une de ses faces était un monogramme , ce dernier aurait peut-être été frappé à Mâcon par les comtes Albéric I** (920-942) ou Albério II (952-975), en vertu d'une concession de Charles-le-Simple qui a été forcé, en raison de sa situation politique, d'en accorder un grand nombre ; mais, je le répète, cette marque ne doit être qu’une croix. 3 Fougère et Combrouse, n° 184. ET DISSEBTATIONS. 467 L’obole que nous venons de décrire a été évidemment frappée à une époque de beaucoup antérieure au règne du premier Capétien du nom de Louis. D'un autre côté, la forme de son monogramme ne permet pas d’en faire une dé- génération du type de Louis I* ou de LouisIl, et oblige à la placer après le règne du roi Eudes; il faut donc y voir un coin adopté sous Louis d'Outremer (936-954) ou un peu après. Cette monnaie a un air de famille avec cer- taines pièces languedociennes du x1° siècle‘, mais paraît plus ancienne. LOTHAIRE (954-986). +LOTHRIVS EX. Au centre une figure cruciforme , com- posée d’un losange , avec un annelet à chaque sommet ; un point au centre et dans chaque angle. NH. MATISENSIV. Croix formée de quatre O, avec une croisette au centre. — Argent de très-bon titre. Pesant 18,32. ( Collection Lacroix, pl. XX, n° 4.) . M. de Longpérier a publié un autre exempiaire de cette monnaie , en argent presque pur et du poids de 1*,45%, Il considére le type du revers comme une dégénérescence du monogramme de Eudes, que les monétaires du roi Lothaire avaient adopté & Macon. Le type du revers a la plus grande analogie avec celui des grands deniers angoumois, dont les plus lourds et les plus anciens remontent jusqu’à Louis d’Outremer (936- 954) *. 1 Cf, Monn, seignewriales de M. Poey d'Avant, pl. XXVI, fig. 2. * Cat, Rousseau, p. 212, n° 540. 9 Cf. B. Fillon, Considerations sur les monnaies de France, p. 112. 868 MÉMOIRES Les caractères extérieurs et le poids de cette monnaie permettent, malgré lirrégularité du mot REX, écrit EX, de la considérer, avec M. de Longpérier, comme frappée du temps même de Lothaire. M. Fillon en a cité un spécimen parmi les exemples de types royaux immobilisés ‘. M. Charvet en possède une variété, d'un coin à peu près semblable, mais de moins bon titre. Enfin il en existe une autre au Cabinet des mé- dailles, de trés-mauvais aloi, dont le poids n’est plus que de 15,15, et qui a été évidemment frappée longtemps après Lothaire , sans doute au commencement de la troi- sième race. Grand denier à l'H. Avant de passer aux monnaies de la troisième race , j'ai à décrire un magnifique denier que ses caractères et son faire, encore tous romans, obligent à classer à une époque antérieure à l’avénement de Hugues Capet et peut- être même à celui de Lothaire. MA-‘TVSCONV, entre deux grènetis ; au centre, la lettre H. N. + CVTATVS:, peut-être civitas? Dans le champ, une croix pattée. — Caractères larges ; reliefs prononcés ; bon argent. Pesant 15,32. | ( Collection Lacroix, pl. XIX, n° 5.) Cette monnaie , unique jusqu'à ce jour, a été trouvée , il y a quelques années, dans le cimetière d'un village de Saône-et-Loire qui a fait partie jadis des domaines de l'abbaye de Tournus. Je serais disposé à la donner à Hugues le Noir, duc bénéficier de Bourgogne, qui eut le Maconnais 1 B. Fillon, Lettres sur quelques monnaies françaises, p. 153. ET DISSERTATIONS. 469 dans le partage qu'il fit, en 936, avec Hugues lé Grand '. Cette attribution ne surprendra pas le lecteur, lorsqu'il se rappellera que M. de Longpérier reconnaît le monogramme de Hugues le Grand lui-méme sur un denier frappé un peu plus tard à Tournus, quand Lothaire eut reconnu le père de Hugues Capet comme duc de Bourgogne. Je ne puis résister au plaisir de faire connaitre ici, bien qu elles n’appartiennent pas à Mâcon, des monnaies tout à fait nouvelles, qui ont été exhumées en méme temps que le. denier qui précéde et qui sont également passées dans la collection de M. Lacroix. N° 4. CAPVT REGIS. Tête diadémée, à droite, assez bar- bare et semblable à celle du denier de Chinon, classé par Conbrouse et Fougère à Louis le Bègue *, mais qu'on a reculé depuis et avec raison, à Louis WV d'Outremer (936-954 ) °. 3. + T:N:C:VG:T” entre deux grénetis; an centre un petit globe. — Bon argent; style large. Pesant, comme la pièce à l'H, 45,32 (pl. XIX, n° 6). Ces lettres isolées , séparées par des points, et le cer- cle vide, où le signe habituel de la croix est remplacé par un point, se rencontrent sur quelques monnaies d’outre- Rhin *. N° 2. Même denier, mais d'un autre coin; tête mieux caractérisée ; lettres plus petites au revers; grénetis inté- rieur d'un plus grand diamètre, sans point au centre, et par conséquent complétement vide. — Bon argent. Pesant 4s" 38 (pl. XIX, n° 7). 1 Frodoard, Chron. 936. ® Description des monnaies de la 2° race, n° 438. 2 B. Fillon, Lettres sur quelques monnaies françaises, p. 158. & Jacob Gotz, 543,t. XVII, n° 177. — Mader, th. IV, n° 32. ._ 470 MÉMOIRES Ne 3. Autre, semblable au n° 2, avec quelques légères variétés de coin. — Moins bon argent. Pesant 45,20. N° 4. CAPVT REGIS. Tête diadémée à droite, comme aux numéros précédents, mais plus barbare. #. T:N:C.V.T': Point au centre de la couronne.—Obole, flan épais; un peu moins ancienne par son faire que les de- niers. — Argent. Pesant 05,652 (pl. XIX, n° 6). Les curieuses pièces qui viennent d'être décrites , me paraissent appartenir à Tournus, sur le territoire duquel elles ont été trouvées. On reconnaît en effet sur le denier les principales lettres de la légende TorNuGiV.CasT., qai se termine en V, comme le nom de Mâcon sur le denier de Hugues le Noir, et qui a bien pu précéder la légende iden- tique, sauf l'emploi de l’ablatif, que présentent les deniers connus de Tournus. Ces monnaies doivent, comme le de- nier à l’H, appartenir au x* siècle. Leur faire, leur poids élevé et leur style, les rapprochent des deniers frappés, un peu plus tard, par divers comtes de l'ancien royaume de Lorraine’. | Blitger, abbé de Tournus, avait obtenu, en 889, du roi Eudes le droit de frapper monnaie; ce privilége a été con- firmé par Charles le Simple *, qui exigea que le coin portât son nom; par Raoul et Louis IV; par Lothaire, qui voulut qu'on fit mention de son autorisation ; par Henri Ie", Phi- lippe le Bel, etc.; mais il y aura eu sans doute un moment où on se sera borné à mettre, au droit, une tête ceinte du bandeau royal, avec les mots : caput regis. Quoi qu'il en soit, ces grands deniers et leur obole sont 1 Cf, Mes éiudes num. sur une partie du nord-est, p. 231 et suiv. 2 M. Poey d'Avant ( Description des monnaies de sa collection, p. 804) a mis Charles-le-Chauve par suite d’nne faute d'impression. ET DISSERTATIONS. h74 plus anciens que le petit denier de Tournus portant égale- ment une tête, mais avec TORNVCIOCAST et SCSVALERIAN’. Ils doivent, à mon avis, être classés aux premières années de Charles le Simple et avant 945, date de la concession où ce prince exigeait l'inscription de son nom. Il est à remarquer que les curieuses pièces que nous venons de publier, ne portent pas le nom du patron qui se voit toujours sur les monnaies abbatiales de Tournus. On a voulu en inférer qu’elles ont été frappées non-seulement avant 915, comme je viens de le dire, mais avant l'avé- nement du roi Eudes, auteur du privilége, et par une auto- rité autre que celle. de l'abbé; elles ne sont pas assez anciennes pour qu'on puisse admettre cette hypothèse *. 7. Période de la troisième race. OTTE GUILLAUME, COMTE DE BOURGOGNE (995-1027).° OTTO avec trois points entre chaque lettre ; croix dans le champ. x. + MTSCONVS ; au centre un E et un R accolés. —Trés- bon argent; style large (pl. XIX, n° 8 ). J'ai copié ce denier à Mâcon, il y a douze ans. Je ne re- trouve pas sur mon dessin le nom de son possesseur ; mais, si ma mémoire ne me trompe, il appartenait 4 M. Bouchage. Son titre, son type, son faire et son diamétre rappellent certaines monnaies frappées sous les Otton de Germanie 1 Duby, pl. 17, fig. 6 et 7.—Lelewel, Atlas, pl. IX, fig. 14.—Poey d'Avant, Descrip. des monnaies de sa coll., p. 505, n° 1437. 3 Le château de Tournns a appartenu à Brenduieus, évêqne de Mâcon sous A72 - MÉMOIRES (986-1002), dans l’ancien royaume de Lorraine’, et ont da lui donner un débouché vers le nord-est. Quel est maintenant le personnage du nom d'Ottou, qui a signé cette pièce et qui a écrit au revers la syllabe ER? Otton ou Otte Guillaume, comte de Bourgogne, s'empara du Maconnais l'an 995, en faisant valoir les droits qu'il avait comme époux d’Ermentrude, veuve d’ Albéric II, et conserva longtemps la jouissance de ce riche comté *. | Serait-il trop téméraire d'admettre qu'Otte Guillaume utilisa l'atelier monétaire de Mâcon à son profit et qu'il y associa le nom de sa femme au sien? Ajoutons que ce personnage a joué le plus grand rôle dans les événements de son époque. Après avoir été en lutte pendant douze ans , avec le roi Robert, pour la possession du duché de Bourgogne, il exerça, à la fin de sa vie, une influence presque souveraine, sous Rodolphe III, dans le royaume d'Arles. Rosert II (996-1081 ). + ROT.BER:TS dans le champ un R entouré de trois points. yn). + MATISCONVM. Au centre une croix pattée. — Grand denier d'argent à lettres larges et bien accusées. Pesant 4.10. Appartient à M. Thibaut à Lyon (pl. XXI, n° 4). Trouvée avec un denier de Conrad le Pacifique, roi de Charles-le-Chauve (Recueil des historiens de Francs. t. VII], année 853); mais, à cette époque, le monnayage des barons était encore un fait exceptionnel. 1 Voir un denier reproduit dans mes Etudes num. sur le nord-est de la France, pl. XVII, fig. 12. ? Art de vérifier les dates. ET DISSERTATIONS. 473 Bourgogne ou d’Arles (937-998), et plusieurs deniers et oboles de Rodolphe III, son successeur (993-1032), cette précieuse et unique monnaie du roi Robert a pu être frappée durant la guerre qu'il fit avec des chances di- verses, 4 Otte Guillaume, et qui put mettre temporai- rement Mâcon en son pouvoir. Cette guerre, commencée en 1002, pour la succession de Henri, duc de Bourgogne, frère du roi, ne se termina qu'en 1044. L’arrangement qui intervint, confirma Otte Guillaume, dans la pos- session du comté de Bourgogne et du Maconnais. On peut supposer aussi que ce comte reprit, aprés la paix, le monnayage traditionnel de Macon, c’est-à-dire la fabrication d’espéces au nom du roi, sans doute avec part dans les bé- - néfices. La monnaie de M. Thibaut aurait alors été frappée après 1014 , sous Otte-Guillaume ou sous son successeur _ Otton. HENRI I** (1031-1060). N° 4. +HEINRICVS RX. Croix pattée dans le champ. R. + MATISCENSIS. Losange bouclé à ses sommets, can- tonné de points, avec un cinquième point au centre. — Argent. Pesant 4,32. (Collection Lacroix; autre de coin différent, collection Charvet, pl. XX, n° 2). _ Cette monnaie a été évidemment frappée sous Henri 1°" par le monétaire Gislebert; elle reproduit, au droit, une des faces du denier lyonnais de Henri le Noir, fils de Conrad le Salique ‘ (4033-1056); au revers, le type du 1 Henry le Noir et ses prédécesseurs ne prenaient pas néanmoins le titre de roi. Voy. A. de Longpérier, Cat. Rousseau, p. 242. 1860. — 6. 32 h7h MEMOIRES droit du denier du roi Lothaire , qui s'était immobilisé à Mâcon. Elle était donc dans les meilleures conditions pour circuler et dans le comté de Macon et dans le royaume d'Arles. N° 2. + HNRICI REGIS entre deux grénetis, la légende commençant au bas de la pièce; au centre un édifice formé d'un rectangle dont les petits côtés verticaux sont prolongés et terminés chacun par une boule; un fuseau, également terminé par une boule et un peu plus élevé, se voit au milieu. Deux petits globes dans le vide du rec- tangle. | y. + MATISCONVM entre deux grénetis; au centre une croix pattée. Ce denier, de moins bon titre que le précédent, est un peu moins large et plus léger ; il n’a que 49 millimètres de dia- mètre, et pèse 45,10 ; il doit être moins ancien. Il a été exhumé à Mâcon, et fait partie de la collection de M. Sau- vadet, de Montpellier, qui, tout en se réservant d’en publier le dessin, a bien voulu me le communiquer et me permettre de le décrire. La forme du génitif, employée au droit, s'explique, en sous-entendant le mot permissione. La pièce aura été frappée par un comte, après la mort du roi; on aura mis d'abord permissions regis, comme dans l'atelier voisin de Tournus; puis la légende aura été abrégée. L'édifice du revers rappelle quelque peu la forme de celui qui se voit à Parme à la fin du xn° siècle ', seulement il est plus large que haut. 1 Zanetti, Della secca e moneta parmigiana, t. 1. ET DISSERTATIONS. h75 PHILIPPE I** (4060-1108). Denier à UN. -+PILIPVS RX. Figure cruciforme , composée d'un petit losange, avec appendices triangulaires 4 ses sommets ; glo- bules dans les cantons. Ce dispositif est une dégénérescence du type mâconnais de Lothaire. 5. MATISCON entre deux grènetis; au centre un N. — Billon rouge. Pesant 4 gram. (Collection Lacroix, pl. XX, n° 6.) Il existait chez M. Bouchage un denier semblable, mais de meilleur aloi. Cette monnaie est plus pesante que toutes les autres au nom de Philippe. Son type a pu s’immobiliser ; mais il a dû prendre naissance sous Philippe I. On a vu, dans la lettre du centre, l'initiale de Mâcon; j'ai pensé moi-même un instant à y chercher un souvenir de l’'H du grand denier que j'ai décrit plus haut. Mais c’est bien un N, dont un autre, plus heureux que moi, trouvera peut-être la signification. Deniers et oboles à US. Les monnaies suivantes sont les moins rares de toute la suite mâconnaise. Elles se distinguent par la présence de la lettre S, dans le champ du revers. Ce type a beaucoup occupé les numismatistes. Je ne par- lerai pas de Leblanc, qui y voyait l'initiale des Segusiaves ’, 1 Traité hist. des monnaies de France, p. 146. A76 MÉMOIRES ni de M. Rodolphe Blanchet , qui n'est pas éloigné d'y re- connaître un serpent’. Duby n’hésitait pas à attribuer la pièce timbrée d’un S au comte Etienne, qui a possédé Mâcon sous Philippe I<'. D’au- tres y ont vu l'initiale d’un évêque du même nom qui a oc- cupé le siége de cette ville vers 1166 , sous Louis le Jeune. M. A. de Barthélemy a, comme nous l'avons dit plus haut, prouvé que les évêques n'ont pas frappé monnaie à Macon; reste à examiner l’opinion de Duby. Les deniers à I'S, retrouvés jusqu'à ce jour, ne peuvent remonter au temps de Philippe I*™; tout le monde le recon- paît ; mais ils ont dû avoir un prototype contemporain de ce prince. L'opinion de Duby ne doit donc pas être repous- sée d’une manière absolue; il est néanmoins plus probable que la lettre S a été adoptée à Mâcon, sans signification locale et comme imitation du type introduit, avant le temps de Philippe I:", dans le royaume voisin de Bour- gogne et conservé à Lyon, après Rodolphe III et Conrad le : Salique, sous Henri le Noir, de 1038 à 1056°. Cette contre- façon, qui trompait le public, ouvrait à la monnaie de Mâcon, dont le cours légal était fort limité, la Bresse, le Lyonnais, et dela, les vastes contrées du royaume d’ Arles. On m’objectera peut être que j'ai reconnu tout à l’heure dans la lettre H, l'initiale d'un comte, et que je renonce bien facilement à voir le nom d'Étienne dans la lettre S. Mais chaque atelier monétaire féodal a eu des types locaux 1 Mittheilungen der antiquarischen Gesellschaft in Zurich, Band XI, Heft 3. Zurich, 1856, * Suivant M. Fillon, le denier 41'S, frappé à Lyon au nom de Rodolphe III, serait le produit du monnayage archiépiscopal, et cette lettre serait le com- mencement de Sedes, mot qui parut plus tard, tout entier, dans les légendes lyonnaises. ET DISSERTATIONS. 477 et des types d'imitation; tantôt on satisfaisait au besoin de eonsacrer, par un type nouveau, le nom et les titres du souverain ou du seigneur ; tantôt on se bornait à faci- liter, par la contrefaçon des espèces voisines, le cours de la monnaie, qui était alors plutôt une marchandise qu'un signe représentatif, et souvent une mauvaise marchandise, dont il fallait assurer le débit par tous les moyens. Ajoutons que cet S isolé, peut-être Signum (Signum cruris), a été fréquemment employé; on le retrouve plus tard sur la monnaie d'un prince croisé dont le nom com- mence par un G, Gauthier de Brienne, duc d'Athènes (13081310 ) *, et déjà, sous les Mérovingiens , il occupe le champ d’un denier d'argent. N° 4. PILIPVS RX. Figure cruciforme, comme aux pièces précédentes ; un point dans chaque canton. s. MATISCON. Dans le champ un S. — Denier; argent bas; deux exemplaires, pesant 0s",94 et 0#,98. (Collection Lacroix, pl. XX, n° 5.) N° 2. Même denier; faire irrégulier ; moins ancien que le premier. — Argent bas, pesant 4,10. (Collection Lacroix, pl. XXI, n°5. ) Il en existe un exemplaire au Cabinet des médailles , qui paraît encore moins ancien. N° 3. -+ PIIIPVS RX. Figure cruciforme, cantonnée de points. R. + MATISCON. Dans le champ un S, accosté de deux points. — Denier d'argent, pesant 0s",90. (Collection Charvet, pl. XXI, n° 6.) Ce denier, d’assez bon style, n’a pas été frappé très-long- temps après Philippe I*. 1 Saulcy, Numismatique des croisades, p. 164 et pl. XVI, fig. 15. A78 MEMOIRES M. Lacroix en possède deux variétés, pesant 0,85 et 05,96. Gonbrouse en publie un exemplaire, qu'il considère comme étant bien de Philippe 1°' :, M. Poey d'Avant cite cette pièce, mais indique à tort quatre points au revers °. N° 4. <+-PIHIPVS RX. Même type. H. MATISCON, en légende rétrograde. Cette pièce est décrite par M. Poey d'Avant, qui y lit PHIPVS *; je préfère PILIPVS. N° 5. +PIIIPVS RX. Figure cruciforme, cantonnée de quatre points. W. MATISCON. S accosté de deux points. — Obole. (Ancienne collection Bouchage , pl. XX, n° 4.) Oboles à la croix el au losange. +PILIPVS RX. Losange patté à ses angles, de manière à former une croix; points dans les cantons, comme aux numéros précédents. 3. MATISCON. Croix pattée, à branches égales, canton- née de quatre points. — Obole. Argent bas. Pesant 05,42. (Ma collection; autre un peu plus lourde, collection Charvet.) Le droit est comme celui du n° 6, pl. XX, une dégé- nérescence du type de Lothaire. Une obole semblable, mais moins bien conservée , a été publiée par M. Fillon, comme postérieure au règne de Philippe I*", et émise par un comte *. 1 T. I, p. 52, et atlas, pl. 47, n° 3. ® Poey d'Avant, Descrip. des monn, seig. de sa coll., p. 302. 3 Id., p. 302, et pl. XX, n° 1. + Etudes num., p. 63. ET DISSERTATIONS. h79 PILIPVS RX. Mème type qu'au droit du n° 12, sauf les points des cantons de la figure cruciforme, qui ne sont pas — visibles et semblent n’avoir jamais existé. #. MATISCON. Croix cantonnée de quatre points. — Obole. (Ancienne collection Bouchage, pl. XX, n° 8.) Louis VI (4108-41387). | N°4. +L+D+V+CG Dans le champ, un S. 8. MATISCON. Figure cruciforme, avec points dans les cantons. — Denier, argent bas. 7 (Collection Charvet, pl. XX, n° 7.) Cette pièce, postérieure sans doute à Louis le Gros, est d'assez mauvais style. | N° 2. Variété, où un point se voit distinctement entre la première croisette et la lettre L. — Billon noir. Pesant 05,76. ( Collection Lacroix. ) N° 3. +L+D+V-+C. Au centre, une croix pattée. x. MATISCON. Figure cruciforme , cantonnée de quatre points. — Obole, billon noir. Pesant 08.39. (Collection Charvet, pl. XX, n° 8. ) Sur cette obole, la croix a remplacé la lettre S, qui se voit sur le denier. C’est la transformation qui s’est déjà produite dans les pièces au nom de Philippe. § 8. Outre le Philippe à 1S, Duby avait donné a Macon un denier de Louis VI, sur lequel on lit CASTRVM MAT. Cette A80 | MÉMOIRES pièce est de Mantes‘ suivant Cartier, et de Nanteuil sui- vant M. de Barthélemy *. L'auteur des monnaies des prélats et barons, se rappelant que Macon n'avait été d’abord qu’un casirum, s'est laissé tromper par la légende. Nous avons vu plus haut que, sur les monnaies les plus anciennes, le nom de Mâcon paraissait seul ou suivi du mot civitas. Enfin M. Piot *, reprenant l'étude d'un denier publié comme incertain par le savant Thomsen, dans la Revue du docteur Grote *, le décrit ainsi : +MADICONISE; au centre, un S entre deux croisettes. 8. +GVILELMVS. Croix dans un grènetis. Il attribue ensuite cette pièce à Macon qui a eu plusieurs comtes du nom de Guillaume au xu° siècle. M. Poey d'Avant‘ en a fait depuis une monnaie d'Aquitaine. Cette dernière opinion nous semble préférable. Nous ne pensons pas, en effet, que les comtes de Mâcon aient eu des espèces à leur ” nom; leur atelier, surtout à cette époque, ne devait fonc- tionner qu'au type royal. Si nous avons cru pouvoir donner des monnaies à Hugues le Noir et à Otte Guillaume, c’est que le premier était duc de Bourgogne et que le second a aussi possédé la Bourgogne, acquis une position presque souveraine dans le royaume d'Arles, et longtemps lutté avec succès contre le roi Robert. De tels princes n'étaient pas soumis, comme les comtes de Macon, à revêtir la livrée monétaire du roi. Au reste il faudrait, pour se prononcer en toute sécurité sur le denier de M. Thomsen, avoir l'original sous les yeux. 1 Reoue num., 1836, p. 255. 2 A. de Barthélemy, Reoue num., 1860, p. 136. > Revue num. belge, 2° série, t. VI, p. 265. + Blatter far Munz-Kunde, 1835, 1. 16, 23 et 24. 5 Monnaies feodales de France, t. I], p. 73. ET DISSERTATIONS. h81 $9. Méreaux. J'ai à faire connaître des méreaux de plomb, sur deux des- quels on retrouve le type des dernières monnaies de Macon. M. J. Rouyer, dans un intéressant article sur l'étude des méreaux ecclésiastiques ‘, constate qu'on n’en a pas encore retrouvés d'antérieurs à 1401. Ce n'est, en effet, qu'au xv° siècle que se généralisa l'usage de ces valeurs repré- sentatives, qui tenaient lieu de monnaie, dans l’intérieur du cloître et quelquefois au dehors. Cet auteur pense cepen- dant qu'il a existé, longtemps avant cette époque, des mé- reaux à l'usage des chapitres et des collégiales; il s'appuie, tout en admettant qu’elles peuvent être exagérées, sur les prétentions des chanoines de Saint-Vincent de Macon, qui déclaraient en 1557, qu'ils avaient depuis trois ou quatre siècles, le droit de fabriquer et distribuer des marques de plomb, valant 1, 2 et 6 deniers tournois. Voici le texte où M. Rouyer a puisé ce curieux renseignement : « Les commissaires de la Cour des monnayes estant de- putez dans les provinces du royaume ont esté de tout temps en droit de décrier toute sorte de monnoyes estrangeres et autres pieces quelconques, s’il ne leur estoit donné cours par ordonnance du roy; les sieurs Aymery et de Riberolles, conseillers généraux de la dite Cour des monnoyes et par elle deputez, passans par la ville de Mascon au mois d’aoust de l’année 1557, y corrigèrent l'abus qui s’y estoit glissé depuis longtemps, et défendirent à toutes personnes, sur peine d'estre punis comme expositeurs et faux monnoyeurs, 1 Revue num., 1849, p. 356 et suiv. 482 MÉMOIRES le cours et exposition de certaine quantité de marques de plomb, vulgairement appelées pièces ou iettons de plomb, que le doyen, chanoines et chapitre de l’église cathédrale de la ville faisoient distribuer par leur Benestier, pour le payement des choristes et autres prestres servans en la dite église : lesquelles pièces avoient abusivement cours non seulement parmy lesdits prestres et choristes de ladite église, mais encore par toute la dite ville de Mascon, les vnes pour six deniers, les autres pour doubles et deniers tournois. Duquel droit de faire et de distribuer les dites marques, les dits doyen, chanoines et chapitre sous- tenoient estre en droit et possession depuis plus de trois à quatre cens ans. Lequel abus fut corrigé par l'ordonnance desdits commissaires, nonobstant les lettres en opposition envers icelle impetrées par lesdits doyen, chanoines et cha- pitre, de laquelle ils furent deboutez, ainsi que i’ay veu par la copie desdites lettres signifiées à maistre Louis Hen- nequin, procureur général de la dite cour '. N° 1. Sentouré de points. B. Croix pattée, accostée de trois points dans chacun de ses cantons. — Plomb. (Collection Gharvet, pl. XXI, n° 7. ) Ge méreau qui rappelle le type des deniers et des oboles aux noms de Philippe et de Louis, me paraît fort ancien. N° 2. S rétrograde, accosté de deux points. x. Figure cruciforme, avec un point au milieu. Ce petit méreau reproduit le type de l'obole que nous avons décrite pl. XX, n° 4. Il a été trouvé dans la Saône. (Collection Charvet, pl. XXI, n° 8. ) 1 Traité de la cour des monnoyes, par Germains Constans, juge-garde de la monnoye de Thoulouze. Paris 1658, p. 270. ET DISSERTATIONS. 483 N° 3. M. Forgeais a décrit un petit plomb qu'il rapporte au xuI° siècle, et dont le droit est identique à celui de la pièce qui précède, tandis que le revers porte une croix au lieu d'un S'. N° 4. Voici une pièce de plomb frappée par le chapitre : MONETA.ECCLIE.MATISCON. Au centre, Saint-Vincent, patron de la cathédrale : le champ de la pièce est semé de fleurs de lis. #, SVSCIPIAT.MOT.....45.. Cartouche accosté de deux lis, sur lequel on ne distingue plus qu’une étoile. Ce méreau appartenait à M. Bouchage, si mes souvenirs sont exacts. Voy. pl. XXI, n° 9. La marque de plomb qui précède, est sans doute de celles que le roi Henri II avait fait décrier. Elle ne porte pas l’in- dication numérale, qui se voit sur la plupart des méreaux- monnaies du xvi° siècle. § 10. Jelons. Des recherches attentives, dans les médailliers des par- ticuliers et dans les collections publiques , feront assuré- ment découvrir quelques jetons de Macon. On sait, en effet, que ces petits monuments mélalliques, qui ont aussi leur intérét, ont été trés-répandus dans toute la Bourgogne au XVI° et au xv’ siècle, et que [usage n'en était pas en- core perdu aux derniers temps de la monarchie. En voici un qui appartient à une importante famille du Mâconnais. MESSIRE:FRANCOIS. DE. CHEVRIERS ; écu aux armes des § Plombs historiés trouvés dans la Seine et reoueillis par Arthur Forgenis. Paris 1868, A8A MEMOIRES ET DISSERTATIONS. Chevriers , qui sont : d'argent à trois chevrons de gueules, à la bordure engrelée d’azur'. RK. DAME.LOVISE.PARISE; dans le champ, les armes des Parise, qui sont : d'argent à trois corbeaux, les têtes penchées de sable, tenant sous leurs griffes trois saute- relles de sinople*. — Cuivre. ( Collection de la ville de Macon, pl. XXI , n° 10.) Les Chevriers descendaient, dit-on, d’un comte de Macon. Un de leurs ancêtres avait joué un rôle important dès le xn° siècle; Gui de Chevriers, seigneur de Saint- Mauris, près Mâcon, commandait, en-1231, les troupes de Jean de Braine *. M. Lacroix, qui a bien voulu faire quelques recherches, à Mâcon, au sujet de ce jeton, m'écrit qu'il le croit du xvii° siècle ou du commencement du xvin*, mais qu'il n'a pu découvrir quel est celui des François de Chevriers dont il porte le nom. J’ajouterai que les Parise ne figurent pas parmi les alliances de cette famille , données par plusieurs généalogistes jusqu à l'année 1711 *. CHARLES ROBERT. Paris , le 20 novembre 1860. Nota. J'avais fait graver, il y a plusieurs années, les deux premières planches qui accompagnent cet article; de nou- velles communications, recueillies depuis, m'ont obligé à en ajouter une troisième. Cette circonstance explique le désordre dans lequel mes dessins sont présentés. 1 Palliot, ls Vraie et parfaite science des armoiries. Paris, 1661, p. 158. 2 Id., p. 60. 3 Moréri, Dictionn. hist, mot CHEVRIERS. + Cf. Dictionn, de la noblesse, t. IV. 1772. CHRONIQUE. PRIX DE NUMISMATIQUE. Dans sa séance publique du 7 décembre, PAcadémie des inscriptions et belles-lettres de l’Institut de France a décerné le prix de numismatique, fondé par Allier de Hauteroche, à Don Vicente Vazquez Queipo, membre de l’Académie royale des sciences de Madrid, pour son ouvrage intitulé : Æssai sur les systèmes métriques et monétaires des anciens peuples, depuis les premiers temps historiques jusqu’à la fin du khalifat d'Orient, © 3 volumes grand in-8 , imprimés à Paris en 1859. RECTIFICATION NUMISMATIQUE. Une trouvaille de tétroboles de Marseille a été faite récem- ment à Cadenet, département de Vaucluse. Ces pièces, au numbre de 1,800 environ, étaient contenues dans un petit vase de terre à deux anses, orné de sujets, et que le paysan, inventeur de ce trésor, a malheureusement brisé. De ces pièces, 854 exem- plaires ont été d’abord vendus à M. Lazard, marchand d’antiquités à Marseille, et celui-ci les a confiés à mon excellent ami et con- frère, M. de Saulcy, qui m’a permis de les étudier sous ses yeux '. 1 Le reste de la trouvaille a été vendn, quelques semaines plus tard, à A86 CHRONIQUE. Sur les 854 pièces, 28 avaient été préalablement réservées par M. Carpentin, pour le musée de Marseille, et après un examen attentif de chacune des pièces de la trouvaille, 437 ont été choi- sies par M. de Saulcy et sont restées dans ses cartons. L'étude d’un aussi grand nombre de monnaies, réunies dans un seul ripostiglio, comme disent les Italiens, est singulièrement précieuse pour la classification chronologique des variétés que le degré de frai ou d’user met en possession de leur véritable place dans la série. Je classerai par ordre d'ancienneté les diverses variétés de types contenues dans le trésor de Cadenet; après avoir énu- méré ce qui se trouvait dans ce trésor, j’examinerai ce qui ne s’y trouvait pas, et il en résultera d’indispensables modifications dans l’ordre des époques adopté pour les monnaies massaliotes, dans ma Numismatique de la Gaule narbornaise. Dépourvu d’un élément de travail aussi précieux, quand, il y a vingt ans, je publiais ma classification d'après des pièces étudiées isolément dans les collections, je ne pouvais éviter des erreurs que la ‘trouvaille de Cadenet me met heureuse- ment en mesure dé rectifier aujourd’hui. Voici, d'abord, l’énumération des types différents, par rang d'ancienneté, constaté par le degré plus ou moins avancé du frat. 1. Tête de Diane, à droite, n° 70 de ma Numismatique nar- bonnaise. y. MAZZA. Lion passant à droite; à l’exergue, HH. Très-beau style. 2. Méme téte. WN. MAZZA. Lion passant à droite, le dos en hosse. Entre les pattes, des lettres ou des symboles. M. Blancard, archiviste de Marseille, lequel compte publier une notice sur la portion du trésor venue entre ses mains. CHRONIQUE. 187 3. Méme tête, n° 236. R. MAZZAAIHTON. Lion passant à droite. Devant sa poi- trine , A. 4. Buste de Diane à droite, avec ou sans lettres. N° 238 à 248. RH. MAZZAAIBTON. Lion passant à droite , la queue contour- née autour d’une de ses pattes. Lettres doubles. 8. Buste à droite. 5. MAZSAAIHTON. Lion à gauche, patte et queue en l'air. Triple lettre entre les pattes. 6. La méme; le lion a droite. 7. Buste à gauche. yw. MAZZA. Lion à gauche, la queue en Fair. Letires à _l'exergue. | 8. Buste à droite. R. MAZZA. Lion a gauche, patte et queue en l'air. Lettres à l'exergue,. 9. Buste à droite. x. MAZZA, Lion à droite, patte en l'air, queue entre les jambes. À l’exergue, EE. 40. Buste à droite. R. MAZSAAIHTON. Lion à droite, patte en lair et queue entre les jambes. Pas de lettres. 11. Buste à droite. R. MAZZAAIHTON. Lion à droite, patte en l'air et queue entre les jambes. Lettres entre les jambes. 12. La même, sauf que le lion a la queue en lair. Je reprends maintenant chaque série pour donner le nombre de pièces qui la composent. A88 Naméros des séries. 1. ND PPrAAA Sw 10. 11 et 12 réunis. Pièces en assez mauvais état pour être négligées, incuses,surfrappées,etc. 45 Nombre égal. . . 854 CHRONIQUE. Nombre de pièces. Observations. 6 Très-usées, flan épais. 46 Id., surtout quelques-unes, flan épais. 2 Un peu usées, flan un peu plus large. 50 Peu usées, flan large. 38 Très-belles. 2 Id. 34 Un peu usées parfois. 157 Très-belles. 8 Id. 5 Id., fabrique médiocre. 461 A fleur de coin. 809 Voici maintenant l’énumération des variétés contenues dans chaque série, d’après les numéros de la Numismatique de la Gaule narbonnaise : Série n° 1.,.... Série n° 2. .... oe Série n° 3 ...... Série n° 4...... Variétés inédites : Ne 70. N°* 73, 75, 77, 79, 82, 83, 86, 90, 94, 95, 96, 106, 107, 110, 112, 113. 1° avec un rameau, feuillu d’un seul côté. 2° avec la lettre W. Ne 71. Ne* 231, 235, 236, 239, 241, 242, 245, 246, 247, 249, 252, 253, 254, 258. 1° le ne 235, avec un fer de javelot placé hori- zontalement à la poitrine. 2 Pas de lettres devant le buste de Diane. — #. À. 8° Id. —n. À. 4 À — WA, 5 À — W. Palme. 6° À — #. + 7*rien.— 8. A. "++ CHRONIQUE. A89 Série n° 5 ,...... Ne 192, Variété inédite : ,7Z, H. ’ Série n° 6........ Ne 191. (Il faut lire: M, A, ®. ) Série n° 7........ Nes 160, 161, 162, 163. Série n° 8........ Nes 164, 165, 166, 168, 169, 170, 171, 174, 175. Variétés inédites : 1° V — W. AH. C'est un lapsus sculptoris. 2 À — g. A6. Id., variété du n° 168. 3° À — my. AN. 4° À — ». HA. 5° A— #. Na. Série ne 9. ..,..., Inédite. Séries net 11et 12 réunies, N° 190, 193, 197, 198, 202, 204, 205, 206, 207 208, 210, 211, 212, 214, 217, 221, 228, 225, 226, 227. Variétés inédites : le A, N. Variété du n° 198. 2° E, A. Probablement n° 109, 3° N M. Peut-être le n° 217? 4° TIT ? 5° H, 4. Le trésor de Cadenet ne contenait pas une seule des drachmes pesantes de ma première époque, n°* 54 & 59. Leur excès de poids a pu les faire démonétiser quand la taille aura été changée, et ce serait la vraie raison de Jeur grande ra- reté. Quant aux pièces barbares de cette série, n° 60 à 69, il faut les regarder, je crois, comme des imitations frappées dans la Cisalpine. Le trésor de Cadenet ne contenait pas une seule des pièces de ma sixième époque, comprenant les n° 116 à 482. Donc ces pièces sont postérieures à tous les types qui composaient le trésor en question. Il en est de même, forcément, des pièces portant les n° 176 à 489 inclusivement. Elles sont donc aussi postérieures à toutes celles de la trouvaille, et se rapprochent fort naturellement des pièces de la huitième époque. 1860. — 6. 33 490 CHRONIQUE. En conséquence, je propose la classification suivante des drachmes massaliotes, comprises entre les n°* 54 à 282. Première époque. N° 54 à 59, — Les n°° 60 à 69 peuvent être attri- bnés à Ia Gaule cisalpine. Deuzième époque. Ne 70a 115. Troisième époque. N° 231 à 258. Quatrième époque. N°° 153 à 175. Cinquième époque. Ne* 190 à 230. Sixième époque. N°° 116 à 152. Septième époque. N* 176 à 189. Huitiéme époque. N°° 261 à 282. L. pe LA SAUSSArE. NECROLOGIE. Le colonel William Martin Leake, correspondant de l’Institut (Académie des inscriptions et belles-lettres), commenca sa carriére comme officier d’artillerie en 1794, et servit d’abord dans les Antilles. En 1799, il fut cnvoyé à Constantinople par le gouvernement anglais pour former des officiers turcs au ma- niement de l’artillerie moderne, et l’année suivante il fut attaché à l'état-major du grand vizir alors à la tête de l’armée qui opé- rait contre les troupes françaises en Égypte. En se rendant à son poste, il traversa une grande partie de l'Asie Mineure et profita de sa position officielle pour visiter en délail la Syrie et la Pa- lestine. En 1801, après l’évacuation de l'Égypte par l’armée française, il explora toute la vallée du Nil jusqu’aux cataractes. L'année suivante, il était de nouveau en Syrie, et enfin en 1804 il fut chargé par son gouvernement d’une mission politique en Grèce ; il devait examiner le pays au point de vue de la défense des côtes, faire un rapport sur l’état des forteresses, sur l'esprit des populations et sur les ressources naturelles de la contrée, et émettre un avis sur les meilleurs moyens de mettre la Grèce à CHRONIQUE. Avi l'abri d’une invasion étrangère, Sauf une interruption, causée par la guerre de 1806 entre l’Angleterre et la Porte, le colonel Leake continua jusqu’en 1809 son exploration de la Grèce, et c'est aux nombreuses découvertes faites à cette époque qu’il dut principalement la haute position qu'il s’acquit plus tard dans le monde scientifique. Après avoir été employé en 1844 en qualité de commissaire auprès des alliés en Suisse, il rentra en Angleterre, et se consacra désormais exclusivement à ses travaux archéologiques. Outre une foule d'articles, insérés dans les recueils savants de l'Angleterre, il publia successivement les ouvrages suivants, dont plusieurs sont encore d'une importance capitale : 4844. Recherches en Grèce. 4894. Topographie d'Athènes. 1822. Une édition des Voyages de Burckhardt en Nubie, en . Syrie et en Aralne. 1824. Voyage en Asie Mineure, ouvrage qui a été traduit en français, et publié dans les Nouvelles Annales des Voyages, t. XVIII, XIX et XX, d’après une version qu’on trouve dans les Walpole's Travels in the East, t. 11, p. 185. 1826. Histoire de la Révolution grecque. 1829. Les Demes de I Attique. 1830. Voyages dans la Morée. 1835. Voyages dans le nord de la Grèce. 4841. Topographie d'Athènes, 2° édition. 4834. Numismata hellenica. Un volume in-4, accompagné d'une carte géographique et de trois planches de monogrammes. 41859. Supplément aux Numismata hellenica. In-4. Ce dernier ouvrage parut quelques semaines avant la mort de l’auteur, qui eut lieu le 6 janvier 4860 ; il était âgé de quatre- vingt-trois ans. Leake avait épousé M™* Marsden, veuve du savant orientaliste auquel la numismatique doit le célèbre recueil des monnaies arabes, persanes et indiennes qui sert de manuel à tous ceux 492 CHRONIQUE. qui s’occupent de cette branche de l’archéologie. M=* Leake, femme d’un esprit charmant et remarquablement instruite, a efficacement concouru à la publication des Numismata hellenica, ouvrage dans lequel se trouvent décrites un nombre considé- rable de pièces (plus de douze mille) de rois, de peuples et de villes , tant d’Asie que d'Europe. C'est surtout comme géographe que le colonel Leake s’est _ fait un nom parmi ceux à qui l'étude de lantiquité est chère. Ses travaux sur la Grèce sont des modèles d’érudition et de saine critique; les découvertes postérieures y ont sans doute ajouté, mais n’ont presque jamais modifié les résultats qu’il avait obtenus, tant sa méthode était sûre et son coup d’œil exercé. Joignant à une étude approfondie des auteurs classiques les connaissances pratiques d’un officier d'état-major, il savait suivre sur le terrain les marches des armées dans les cam- pagnes racontées par les historiens grecs ; épigraphiste habile, une inscription mutilée lui livrait souvent la solution de quel- que difficulté topographique; doué d’une sorte d intuition, il indiquait dans les districts qu'il n'avait pu visiter lui-même la position où devaient se trouver les ruines de telle ou telle ville, et les recherches postérieures sont venues lui donner raison. Jusqu’à sa dernière heure, il continua à porter le plus vif in- térêt aux progrès de l’archéologie classique; une de ses der- nières joies fut d’examiner les magnifiques résultats des fouilles de Ch. Newton à Halicarnasse, à Cnide et à Milet; et il semblait regretter de toucher au terme de la vie à une époque où les dé- couvertes se multiplient, où l’antiquité devient chaque jour mieux connue, et où d’autres ouvriers élèvent l’édifice dont lui- même avail posé les fondements d’une main si sûre, Aussi mo- deste que savant, d’un commerce facile et agréable, le colonel Leake était un de ces hommes qu'on est heureux d’avoir con- nus; et c’est pour moi un pieux devoir de consacrer ces quel- ques lignes à la mémoire d’un homme dont l'amitié m'était précieuse, W. A. W. TABLE METHODIQUE DES MATIERES CONTENUES DANS LA REVUE NUMISMATIQUE. ANNÉE 1860. a | 5 NOUVELLE SERIE. TOME CINQUIÈME. beam — MUMISMATIQUE ANCIENNE. Médaiiles des Peuples, Villes et Rols. Lettres à M. de Longpérier sur la numismatique gau- loise, par M. px Sautcy. V. Mandubiens.— VI. Grande-Bretagne (pl. var). . . . . . . . . . . . — VII. Rectification. —VIII. Nerviens et Andes.— IX. Senons (pl. x1). . . . . . . . . . . . . . .. — X. Meldes. .. ..............,.. — XI. Ligue éduenne. .. ............ Monnaies des Eduens, par L. pe La Saussaye (pl. iv et v, vignettes). . . . .. .. . . . .. . . .. Lettre à M. de Longpérier sur la médaille gau- loise portant la légende Verotal et sur le cos- tume des Gaulois, par E. Hucaer (pl. vi). . . . . Note sur la forme de la lettre F dans les légendes 165—174 249—265 345—358 409—424 97—112 113—198 h9A TABLE METHODIQUE DES MATIERES. de quelques médailles gauloises, par Avr. vk Note sur les noms Voluntillius et Ambillius , par ADR. DE LONGPÉRIER. . .. . . . . . . . . . . . . Première lettre à M. Adrien de Longpérier sur quel- . ques collections du Piémont et de la Lombardie, par Cu. Ropert | vignettes ). . . . . . . . . .. . Description de quelques médailles grecques (Abdera, Sala Thraciæ, Lemnus insula, Acanthus, Amphi- polis, Lete, Thermæ Macedoniæ , Reges Mace- doniæ antiquiores , Lysimachia Ætoliæ, Delphi Phocidis, Erythræ , Haliartus, Platææ, Thebæ Bœotiæ, Athenee, Fœdus Achaicus, Sicyon Achaie, Cyparissia , Pylus Messeniæ, Elis, Asine, Cleonæ Hermione Argolidis, Gortys, Heræa, Psophis, Tegea Arcadiæ, Aptera Crete, Andros insula , Sinda Bospori, Colchis, Anciens rois de Lydie, Dionysius Heracles rex , Cyzicus, Pitane Mysiæ, Proconnesus insula, lasus, Taba Cariz , Myra, Tlos Lyciæ , Termessus Pisidiæ . Zephyrium Ci- liciæ, Cilbiani Lydiæ , Dionysopolis Phrygiæ, Gabala Syriæ’, Molon Babyloniæ rex, Timarchus Babyloniæ rex, Tigranes incertus) , par le baron de Proxescu-Osten, (pl. xt). . . . . . . . . . . Attribution de quelques médailles à Lappa de Crète , par A. pp Raucu (pl. 1x). . . . . . . . .. Note sur les médailles de Lappa de Crète, par J. pr Witte (pl. ix). ................. Médailles de Marium en Cypre, par W. H. Wav- DINGTON (pl.1t).. ............,.,. Observations sur quelques points de numismatique phénicienne, par François LENORMANT. . . : . . . Études de numismatique asiatique, par W. H.Wan- DINGTOX pl, XVM. 2. we ee ee 175—189 425—431 197—207 266—279 190—194 195— 196 i— 10 11— 30 A32—458 TABLE METHODIQUE DES MATIERES. Monnaies juives; par Mexcuior pe Vocüé (pl. xm). . CuroniQug. Trésur de Cadenet, p. 485 490.— Vente des mé- dailles de lord Northwick, 82-94.— Médailles de Pæstum, 251 et 344 ‘pl. VIII et XI).— Médailles des Aravisci | vignette), 203. Médailles romaines. Notice sur sept médailles romaines. Familles Allia, Antonia, César, Antonia, Vespasien, Antonin, Probus , par Henry Conen (pl. xv1) . . . .. .. Dissertation sur les médailles de consécration frap- pées par Maxence à la mémoire de son fils Ro- mulus, par R. GÉRr. . . . . . . . .. . Note sur lesmonnaies de Romulus, fils de Maxence, par Apr. pg LONGPÉRIER. . . . . . . . . . . Lettre à M. Adr. de Longpérier sur un médaillon d’or de Constantin le jeune, par le baron Cuaupauc DE CRAZANNES (vignette ).. . . . . . . .. oe CHRONIQUE. Pièces d’argent de la république romaine dé- couvertes à Arbanats, 230-231. — Découverte de deniers ro- mains à Sarwar ( Hongrie ), 157-159 ; — de médailles romaines dans le département d'Eure-et-Loir, 163-164 ; — de médailles romaines u’or à Paris, 341-344. — Type de l’autol de Lyon, 336-338. — Médailles de Dioclétien et de ses successeurs , dé- couvertes dans la villa romaine du Lodo, 78-79.—Lettre de M. le marquis de Lagoy sur les marques d'ateliers, 80-81. — Aureus inédit de Victorin au musée Trivulce, 201. — Vente d’une collection de médailles romaines, 339.340. Monnaies consulaires du Bas-Empire, par À. De BantTagieur (pl. vii). .............. Lettre à M. Maury, membre de l’Institut, sur un sceau byzantin, par E. Miner... . . . . . .. SS ES eT h95 280— 292 309—363 3i— 35 J6— 42 293— 294 129—131 208—213 hO6 TABLE METHODIQUE DES MATIERES. MUMISMATIQUE DU MOYEN AGE. Monnaies françaises. PREMIÈRE RACE. escription des monnaies mérovingiennes du Li- mousin, par Max. Decocus. VI. . . . , . . .. Restitution à Tours d’un triens mérovingien, par L. Bourgau (vignette)... .. ......... Monnaie de cuivre de Théodebert, 44. — Denier attribué à saint Victor de Marseille, 44. SECONDE RACE. Louis If et Angilberge, par Avr. pg LoncrÉRigR (vi- Obole de Boson, roi de Provence, 46. TROISIÈME RACE. Monnaies de Mantes au xr° et au xu‘° siècle, par A. ve Baarattemy (pl. vn). . . . . . . . . . . Monnaies obsidionales de Novare, rappers par ordre de Louis, duc d'Orléans , par C. Morsio ( vi- gnettes). . ................... Monnaies provinciales. Nouveaux éclaircissements sur lamonnaie d'Auxerre, par A. DR BARTHELEMY. . . . . . . . . . . . .. De la monnaie de Dol en Bretagne , par ADRIEN bE Loxcrérier (pl. xiv). . . 2 eee ee .. .. Monnaies françaises inédites (Reims, Lyon), par À. pe Barruéremy (pl. vu). ............ uelques monnaies rares ou inédites de la biblio- thèque de Marseille (comtes de Provence , abbé 295—310 311—314 364—367 135—138 224— 229 368—379 315—323 138—149 TABLE METHODIQUE DES MATIÈRES. de Lerins, archevéque d’Arles, prince d'Orange ), par A. Carpentin (pl. neti). . eRemarques sur quelques monnaies décrites dans l’article précédent, par Aprien De LONGPÉRIER (vi- gnette).. .. .................. Quelques monnaies des princes de la maison d’An- jou, par An. CaRPenTIN (pl. x)... . . .. . .. Addition à l’article précédent , par Aprign ne Lonc- PERIER. eee Monnaies de Mâcon, par C. Rogerr (pl. xix, xx, xx1). Monnaies inédites de Bar, par Léon Maxx(vignettes). BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE ET CHRONIQUE. Denier d'F- berhard de Strasbourg , 94-95. — Denier d'or de Raimond V, comte de Toulouse ( vignette), 199. — Monnaie de Guillaume de Villehardouin (vignette), 153-156. Monnaies étrangères. Denier inédit de Pons Hugues, comte d’Ampurias, par R. Géry (vignette)... . . . . . . . . . .. Gros inédit de Louis If, baron de Vaud , par FruarDenr | vignette). . . . . . : . . . . . . .. Deux monnaies inédites de Reckheim, frappées à des types français, par J. Rovysr (vignettes). . Monnaie de Jean d'Arkel, par N.Pontarevx (vignette). Lettre à M. Adrien de Longpérier sur les bractéates : juives de la Pologne, par Joacnim Letewex (pl. xv). Monnaies inédites de l’ Adherbaidjan (suite et fin), Caroniquz. Héribert, évêque d’Utrecht , 232. — Monnaies d'Amérique, 158-163. | Méreaux, jetons. Perkin Werbecque, jetons de Tournai, par Apr. pe LONGPÉRIER { pl. xvir). . . . . . . . . . . . . . Méreaux et jetons de Mâcon (pl. XXI), 481-484. AO7 43— 56 57— 61 914-920 220—223 456—484 132—134 380—383 450—152 324 — 327 62— 67 328 — 334 68— 77 A938 TABLE METHODIQUE DES MATIERES. BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE. Lemovii de la Germanie, ( A. L.) . . . . . . . .. 156 Médailles de la villa romaine du Lodo ( Morbihan ), par Acrrep Lattemanp. (A. L.). ........ 78— 81 AvéxBotov véquaux loulou tod Bukapiouivou, ws tpräpyou Ed6olxc, par P. Lampros (vignette). (A. L.). 453—156 CHRONIQUE. Prix de numigmatique. .. .. . .. . .. . . .. 485 Rectification numismatique. Trésor de Cadenet, par L. pe La Saussare. . . . . ess. 485—490 Vente des médailles grecques de la cottection de lord Northwick. (3. W.|. .............. 82— 94 Découverte de pièces d'argent de la répablique ro- maine , à Arbanats (Gironde } (J. W.) . . . .. 230 —231 Découverte de deniers romains à. Sarwar en Hon- grie. (J. W.}.................. 157 —159 Médailles romaines d’or trouvées à Paris (Por D'AVANT. he see ee. 341 — 344 Découverte de médailles romaines dans le départe- d’Eure-et-Loir. (J. Caanvet.). . . . . . . . .. 163—164 Médailles au type de l'autel de Lyon. (G. Vazuen.). 333—338 Vente d’une collection de médailles romaines d'or, d’argent et de bronze (J. W.). . ........ 339 — 340 Denier d’Eberhard de Strasbourg (A. L.). . . . .. 94— 95 Monnaies épiscopales trouvées près de Wagenin- gen. (J.W.). .................. 232 Collections de médailles en Amérique. (M. M.). . 159—163 ATBLE METHODIQUE DES MATIERES. AYO NECROLOGIE. Notice biographique sur M. E. Cartier, par L. vr La SAUSSAYE. © 6 . ee tt ws 233—247 Notice nécrologique sur M. le marquis de Lagoy, par M. Caanugs Ropent. .. 2... . . . . . . .. 396 —408 Le colonel Leake , par W. H. Wappineton. . . . . 490— 492 M. J. de Fontenay. . . . . .. ... . ...... 96 MM. Borghesi et le marquis de 280: A. L.).. 248 M. Jules Renouvier. . . . .. .. rn 408 ERRATA DE LA REVUE NUMISMATIQUE. Page 112, ligne 13, lettre, lisez tête. — 112, — 14, avec les pièces, lisez avec celle des pieces. — 393, — 6, feuilles de rosiers, lisez fenilles de rosier. Paris. — Imprimé par FE. Tnuxot et C*, rue Racine, 26. 1860 . REVUE NUMISMATIQUE ETS PT arden ane WEOAILLES DE MARIUM REVUE NUMISMATIQUE Farc inp Faron oo PROVENCE PLIL 1860. REVUE NUMISMATIOUE Fara Ian F Chandon wine PROVENCE PL II. 1860. REVUE NUMISMATIQUE PL. I. Z Dardel so. Lars. Inp. F Charden aime.. MONNAIES B22 EDURNE. REVUE NUMISMATIQUE PL. V. } / à A Ge » de “a A \ ay a bos NG Paru. Jmp.F. Chariton and, MONNATES DES EMUENS. 359. REVUE NUMISMATIQUE | PL YL VIITGTAL Vit RLCO £ Hucher del. LDardet re Paru Imp. f Pardon ane. VEROTAL 1860. REVUE NUMISMATIQUE PLIL Lo Zager cet Fone inp PROVENCE 1860 REVUE NUMISMATIQUE PL. aay ior aa PF Chardon wand Dir PROVENCE 1860. REVUE NUMISMATIQUE PL. IV. Z Dardel se. fare. Inp. F Chardan au. WONNALES DET TOURNÉE PL. V. REVUE NUMISMATIQUE 1860. Pare. Pnp.F Charden. and, i) a MONNAIESZ DES EOUEN PL. VI. REVUE NUMISMATIQUE fare. lap F tharden ain. L Dardal re. VEROTAL 4 Lucker del. 1860 KEVUE NUMISMATIQUE PLV L__ Lan ve Faw top F Charon ore MONNAIE BYZANTINE __ BARONALES 1860. | REVUE NUMISMATIQUE PL. VIL NONNAIES GAULOISES PL. IX Pari. inp. F Chardon asni. CRETE REVUE NUMISMATIQUE LAPPA DE £ Dardel se. 1860. LS 1860 REVUE NUMISMATIQUE PLE Loeb vo Part bap F Darin aa MAISON bw ANJOU 6 0 REVUE NUMISMATIQUE PL.XL. 1BGO. REVUE NUMISMATIQUE PL. XIL f Lh ted del 4 se d'srse np Fi Chaedon sine IN TL fee Ga A tp i) Te rE: COLLECTIONS PRIOR ES OM PL. XII. MATIQUE [al ~ U REVUE NUMI 1880. Paris. bp} Chardon sine. L. Darded se. L E LEA 1460 REVUE NUMISMATIQUE PL XW. R : ; i / ï , La & 7 A — a Fae OO 1860. REVUE NUMISMATIQUE PL XVI Z Dardel dad st re Far dap F Chardon ain. ROMAIN ES 1860. REVUE NUMISMATIQUE PL.XVIL JETONS DE TOURNAI PL. XVII. TDardal dol cere REVUE NUMISMATIQUE WUNNAULY Ye WAGUN PL. XIX. Re 1860. REVUE NUMISMATIQUE PLAX ae, a Len) mm Hire el. Fara Tap Fo harden wins Bel re MONNAIES DE MACON 1860 REVUE NUMISMATIQUE PL XXL CITE Pow Ep 7 Cnantin ame. À Ballon Se MONNAIES DE MACON TW NUV & J 1944